Question de M. LE JEUNE Edouard (Finistère - UC) publiée le 14/07/1994

M. Edouard Le Jeune attire l'attention de M. le ministre de l'industrie, des postes et télécommunications et du commerce extérieur sur les propositions émises par un grand groupe industriel et commercial implanté en Asie depuis des dizaines d'années. Sensible à la compatibilité entre éthique et développement économique, ce groupe a institué avec ses partenaires une charte visant à exclure, sous toutes ses formes, le travail obligatoire, celui des prisonniers notamment politiques, comme celui des enfants. Il considère qu'il s'agit non seulement d'une priorité morale mais aussi d'une condition de la dynamique des échanges avec l'Asie. C'est pourquoi, il propose de mettre en place une commission mixte, parlementaires-chefs d'entreprise sur l'éthique du développement commercial en Asie, d'étudier la création d'un " label liberté " attribué aux entreprises s'engageant à refuser le travail obligatoire et de discuter avec les autorités internationales de la création d'un corps d'observateurs de l'éthique et du développement économique. Il lui demande de bien vouloir lui préciser sa position concernant ces différents points et s'il envisage d'y réserver une suite favorable afin d'aider les entreprises présentes dans cette partie du monde.

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Réponse du ministère : Industrie publiée le 15/09/1994

Réponse. - Les propositions émises par un groupe industriel et commercial implanté en Asie visant à la mise en place d'une commission mixte parlementaires-chefs d'entreprise sur l'éthique du développement commercial en Asie sont intéressantes et méritent une analyse attentive. Cette commission aurait en particulier pour mission d'étudier la création d'un " label Liberté " attribué aux entreprises. Les autorités françaises attachent une attention toute particulière à l'examen de la question des normes sociales. En effet, la France a particulièrement insisté pour que cette question soit inscrite dans le programme de travail de la future Organisation mondiale du commerce (OMC). Le président du comité de négociations commerciales a, dans sa déclaration finale, indiqué que le sujet des normes de travail pouvait être traité dans ce cadre. Au cours de la dernière réunion ministérielle de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), les autorités françaises ont obtenu que cette question fasse l'objet d'une étude spécifique de la part de cette organisation et qu'un rapport soit élaboré dans la perspective de la prochaine réunion ministérielle en 1995 afin d'analyser les moyens d'action dans ce domaine. L'Organisation internationale du travail, par ailleurs, a décidé de réunir un groupe de travail sur " la dimension sociale de la libéralisation du commerce international " lors de sa prochaine réunion. Enfin, à Naples, les pays membres du G7 ont confirmé leur souhait de voir, " dans le cadre des activités de la nouvelle OMC, améliorer la compréhension des nouveaux sujets, à commencer pour l'emploi et la clause sociale et leurs effets sur les politiques commerciales ". L'idée de la création d'un " label Liberté " attribué aux entreprises s'engageant à refuser le travail obligatoire est constructive, mais elle sera difficile à mettre en oeuvre à brève échéance. Ce " label Liberté " devrait être reconnu dans un cadre communautaire pour qu'il revête un caractère officiel. Il ne semble pas, à ce stade, que les autorités de certains Etats membres de l'Union européenne soient disposées à l'accepter, compte tenu de sensibilités différentes à ce sujet. En outre, l'Asie n'est pas la seule zone concernée par le problème du respect des normes sociales pour la main-d'oeuvre enfantine et la population carcérale. Certains pays d'Afrique et d'Amérique centrale et du Sud, voire certains pays d'Europe, ne respectent pas les normes agréées internationalement ni leur propre législation sociale. Lamise en place d'un dispositif ne peut être envisagée que dans le cadre d'une approche générale du problème sans spécification géographique. Une limitation à une zone géographique du monde conduirait à affaiblir la portée politique de ces principes fondamentaux. La création d'un corps d'observateurs de l'éthique et du développement économique est une proposition intéressante mais semble particulièrement difficile à mettre en place, notamment pour des raisons politiques, peu de pays étant en mesure d'accepter ce qu'ils considéreraient comme une ingérence directe dans des questions de souveraineté nationale. L'objectif prioritaire des autorités françaises sur ces questions délicates doit donc être de développer la concertation pour aboutir à une meilleure compréhension des problèmes et à une approche internationale commune.

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