Question de M. LE JEUNE Edouard (Finistère - UC) publiée le 29/03/1990

M. Edouard Le Jeune attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le fait que les procédures d'expropriation dictées par la législation actuelle sont souvent lourdes et contraignantes pour l'exproprié qui ne perçoit l'indemnisation du bien concerné qu'après de longues démarches et un long délai d'instruction. Suite à un drame humain qui s'est déroulé dans la commune du Relecq-Kerhuon, le conseil municipal a décidé de réagir pour que de tels gestes ne se reproduisent plus jamais en adoptant un voeu concernant les difficultés d'indemnisation des expropriés. Il lui demande, en conséquence, s'il envisage de modifier la législation actuelle afin que les propriétaires expropriés ne soient pas confrontés à des procédures trop longues et, qu'en particulier, lorsque les indemnisations sont connues, le règlement par l'Etat soit effectué dans un délai bref.

- page 652

Transmise au ministère : Budget


Réponse du ministère : Budget publiée le 23/08/1990

Réponse. - L'article L. 123-9 du code de l'urbanisme permet au propriétaire d'un bien réservé par un plan d'occupation des sols, pour un ouvrage public, une voie publique, une installation d'intérêt général ou un espace vert, de mettre en demeure la collectivité bénéficiaire de la réserve d'acquérir l'immeuble, au prix du marché majoré d'une indemnité pour frais de remploi, comme en matière d'expropriation. C'est en application de cette procédure, dite du droit de délaissement, qu'une mise en demeure d'acquérir a été, au cas particulier cité par l'honorable parlementaire, adressée à l'Etat par le propriétaire du bien réservé. Le Conseil constitutionnel a considéré que cette procédure d'appropriation par la collectivité publique n'est pas contraire à la Constitution, lorsqu'il est prévu que l'indemnité due au propriétaire est fixée, en cas de désaccord, comme en matière d'expropriation (décision n° 89-267 D.C., du 22 janvier 1990, J.O. du 24 janvier 1990, p. 971). Le droit de délaissement institué par l'article L. 123-9 du code de l'urbanisme respecte cette exigence. Le Conseil constitutionnel a également considéré, le 25 juillet 1989 (décision n° 89-256 D.C., J.O. du 28 juillet 1989, p. 9501) qu'une législation autorisant l'expropriation d'immeubles était conforme aux exigences constitutionnelles, si quatre conditions étaient réunies. En particulier, " l'exproprié doit disposer d'une voie de recours appropriée ". Tel est le cas du code de l'expropriation qui prévoit, en son article L. 13-21, une voie de recours, devant la chambre d'appel, des décisions rendues en première instance, en fixation d'indemnités d'expropriations. C'est en application de cette disposition que le propriétaire du bien réservé, sur la commune de Relecq-Kerhuon, a usé de son droit d'interjeter appel pour obtenir une majoration de l'indemnité allouée par le premier juge. Entre-temps, et afin de ne pas pénaliser l'intéressé pendant le développement de la procédure judiciaire, toutes les possibilités réglementaires permettant de payer sans délai les sommes dues par l'Etat ont été mises en oeuvre. C'est ainsi qu'un premier règlement, représentant les deux tiers de l'indemnité allouée le 25 novembre 1988 par le juge de première instance, a été effectué dès le 6 février 1989. Le surplus a été consigné, dans le même temps, en raison d'obstacles au paiement (art. R. 13-65 (4e, R. 13-69 et L. 15-2 C. Expro). A la suite de la levée de l'un des obstacles à paiement, l'indemnité a été déconsignée à due concurrence, le 31 mai 1989. Dès cette date, 92 p. 100 des sommes allouées par le premier juge étaient donc payées, alors même que la décision de la Cour d'appel n'est intervenue que le 8 septembre 1989. La législation actuelle, conforme aux règles constitutionnelles, tend à sauvegarder, à la fois, les intérêts des expropriés, de leurs créanciers et le juste emploi des finances publiques.

- page 1808

Page mise à jour le