Question de M. MÉLENCHON Jean-Luc (Essonne - SOC) publiée le 19/11/1987

M.Jean-Luc Mélenchon expose à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, que dans la nuit du 4 au 5 décembre 1984, près de Hienghène en Nouvelle-Calédonie, dix militants indépendantistes trouvaient la mort au cours d'une embuscade. Les sept inculpés qui ont comparu lors du procès qui s'est terminé le 29 octobre dernier ont été acquittés. Le jury de la cour d'assises ne comportait aucun Kanak. Il est indispensable de rappeler ici l'émotion qu'a suscitée ce verdict. Dans ces conditions, il paraît surprenant que le jugement ait acquitté les sept inculpés : ils avaient eux-mêmes reconnu les faits. Le ministère public avait conclu lui-même à la culpabilité de ces inculpés. Les réquisitions de l'avocat général étaient lourdes et sans ambiguïté. La violence des actes, le piège tendu aux militants indépendantistes alors que M. Djibaou aurait dû être du convoi, l'incendie de la maison de ce dernier, juste après la fusillade ne sauraient sérieusement être portés
au crédit d'une légitime défense dont se réclament les meurtriers. Après le jugement de la cour d'assises de Nouméa, une justice dépassionnée est nécessaire dans cette affaire. C'est pourquoi il serait important que la représentation nationale sache si le ministre de la justice va demander au procureur général près de la Cour de cassation de former un pourvoi contre cette décision. Il souhaite connaître la position du Gouvernement sur les conditions dans lesquelles ce jugement est intervenu. En effet, cette décision rappelle, par bien des aspects, celle de la justice coloniale.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 28/01/1988

Réponse. -Le garde des sceaux ne saurait émettre une appréciation sur le verdict rendu par la cour d'assises de Nouméa sans porter atteinte à l'autorité qui s'attache aux décisions de justice. Par ailleurs, la faculté dont dispose le ministre de la justice, en application de l'article 620 du code de procédure pénale, de donner l'ordre au procureur général près la Cour de cassation de dénoncer à la chambre criminelle des décisions, arrêts ou jugements en vue d'une éventuelle annulation, ne peut trouver à s'exercer que dans l'hypothèse d'un arrêt ou jugement " contraires à la loi " : en l'état, aucune irrégularité susceptible de justifier une telle procédure n'a été décelée. En tout état de cause, une décision, fût-elle de cassation, rendue dans ce cadre juridique par la Cour suprême, n'aurait aucune incidence sur le verdict en question : il est en effet de jurisprudence constante qu'une telle cassation ne peut préjudicier au condamné et ne pourrait donc remettre en cause la décision d'acquittement rendue.

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