Question de M. BELCOUR Henri (Corrèze - RPR) publiée le 08/10/1987

M.Henri Belcour attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur au sujet de l'inscription sur les listes électorales. Celle-ci est obligatoire mais, comme il n'existe pas de texte sanctionnant cette obligation, elle reste purement théorique et souvent ignorée. Ainsi, selon une étude du Centre d'information civique effectuée en 1985, les citoyens non inscrits représentent plus de 9 p. 100 de l'électorat potentiel. Ce taux est en stagnation, puisqu'il était de 10 p. 100 en 1955 et 11,3 p. 100 en 1982. Il lui demande donc quelle action peut être envisagée afin de résorber le nombre des " citoyens passifs " lors des prochaines échéances électorales.

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Réponse du ministère : Intérieur publiée le 05/11/1987

Réponse. -Les services du ministère de l'intérieur ont eux-mêmes cherché à évaluer la proportion de Français non inscrits sur les listes électorales. En comparant la somme des électeurs inscrits (telle qu'elle résulte de l'addition des électeurs portés sur les listes électorales déposées en préfecture en début d'année en application de l'article R. 11 du code électoral) et la population d'âge électoral (déduction faite des étrangers et des Français privés de la capacité électorale), ils ont estimé que la proportion des " non-inscrits " variait, selon les années, de 3 à 8,5 p. 100 du corps électoral théorique. Ces chiffres recoupent des données plus anciennes fournies par les recherches de divers universitaires : 8,5 p. 100 pour 1954, 6,7 p. 100 pour 1957, cités par M. Duverger dans son ouvrage " Institutions politiques et droit constitutionnel ". Ils sont en revanche assez différents de ceux mentionnés dans l'étude à laquelle fait allusion l'auteur de la question, qui ont été obtenus selon d'autres méthodes. Il paraît toutefois impossible, en cette matière, d'obtenir une exactitude parfaite. Toute méthode introduit sa marge d'incertitude : il est vraisemblable, par exemple, que celle suivie par les services du ministère de l'intérieur conduit à minorer légèrement la proportion des non-inscrits puisqu'elle ne peut prendre en compte les radiations tardives adressées aux mairies par le canal de l'I.N.S.E.E. postérieurement à la date d'établissement des " tableaux rectificatifs " qui doivent être publiés le 10 janvier de chaque année conformément à l'article R. 10 du code électoral. Quoi qu'il en soit, il demeure que la proportion des non-inscrits varie sensiblement d'une année sur l'autre : en particulier, on constate un afflux de nouvelles inscriptions au cours des révisions qui précèdent une année où doivent avoir lieu des élections législatives ou présidentielle. D'autre part, l'inscription des jeunes qui atteignent l'âge de la majorité s'échelonne sur plusieurs années ; d'où une proportion anormalement élevée de non-inscrits au sein des tranches d'âge les plus basses. Il a été envisagé à diverses reprises de sanctionner l'obligation, édictée par l'article L. 9 du code électoral, de s'inscrire sur les listes électorales. Mais une telle réforme se heurte à des obstacles manifestes. Il faudrait, en effet, que l'autorité habilitée à infliger la sanction (qui pourrait être le juge judiciaire puisque celui-ci est déjà compétent pour apprécier, en application de l'article L. 25 du code électoral, le bien-fondé des inscriptions sur les listes électorales) puisse être saisie du cas des citoyens non inscrits. A cet égard, trois formules apparaissent possibles : 1° On peut imaginer tout d'abord que la commission administrative instituée pour chaque bureau de vote par l'article L. 17 du code électoral détermine quelles personnes ont négligé de se faire inscrire sur la liste. La c irconscription d'un bureau de vote est en effet assez petite pour qu'il soit possible en théorie de comparer la liste des inscrits avec celle des habitants. Mais la commission administrative ne pourrait entreprendre d'investigations qu'après le 31 décembre, puisque les électeurs ont jusqu'à cette date pour déposer leur demande d'inscription. D'autre part, quand aurait été arrêtée la liste des personnes résidant dans la circonscription du bureau de vote et non inscrites sur la liste électorale dudit bureau, on n'aurait pas pour autant déterminé le nombre et l'identité des citoyens en contravention avec l'obligation posée par l'article L. 9 du code électoral, puisque les intéressés sont susceptibles d'être inscrits sur la liste électorale d'un autre bureau de vote (de la même commune ou d'une autre commune) à l'un des titres énumérés à l'article L. 11 du même code. Une enquête détaillée sur leur situation serait donc nécessaire, et elle ne pourrait être menée à bien qu'avec le concours des services de police, ce qui lui donnerait inévitablement un caractère inquisitorial et vexatoire. De ce fait, il est peu vraisemblable que les maires prennent l'initiative de demander de telles enquêtes ; 2° Cette initiative pourrait également revenir à une tierce personne, par le biais du contentieux des listes électorales prévu par l'article L. 25 du code électoral, lequel autorise tout électeur à réclamer l'inscription d'un électeur omis. Mais on encouragerait ainsi la délation, ce qui apparaît comme extrêmement choquant, sans que pour autant un contrôle méthodique soit réalisé ; 3° Une troisième solution consisterait à comparer systématiquement, pour l'ensemble des électeurs, le " répertoire national d'identification des personnes " et le " fichier électoral ", tous deux tenus par l'Institut national de la statistique et des études économiques. Ce rapprochement permettrait, tout au moins en principe, de détecter les citoyens qui ne se seraient pas fait inscrire sur les listes électorales. Il ne dispenserait cependant pas de prévoir des enquêtes de police, car des erreurs sont toujours possibles. Mais une telle formule appellerait de graves objections sous l'angle du respect des libertés fondamentales des citoyens et des dispositions législatives concernant l'utilisation des fichiers informatisés. Au surplus, elle ferait jouer à l'I.N.S.E.E. le rôle d'" accusateur public " pour lequel cet organisme n'a certainement pas été institué. Au demeurant, on doit reconnaître que la non-inscription d'un citoyen est dans la pratique sanctionnée par l'impossibilité pour l'intéressé de prendre part à un scrutin, même s'il le désire, et jusqu'à la prochaine révision des listes électorales. Ce résultat paraît convenablement adapté au manquement dont le citoyen s'est rendu coupable et il est en tout cas conforme à la tradition libérale de notre droit électoral. C'est pour les raisons qui précèdent que le Gouvernement s'était opposé, lors de la discussion du projet de loi abaissant à dix-huit ans l'âge de la majorité, à un amendement déposé par M. Michel Cointat, qui tendait à sanctionner la non-inscription sur les listes électorales. Le ministre de la justice de l'époque avait notamment déclaré, le 25 juin 1974 : " ... une telle disposition n'est pas dans la ligne traditionnelle de libéralisme qui inspire notre droit. Sur le plan pratique, rendre l'inscription sur les listes électorales... obligatoire impliquerait un contrôle et des investigations qui pourraient prendre un caractère inquisitorial. L 'application des sanctions... poserait aux juges des problèmes délicats... ". A la suite de cette mise au point, l'amendement avait été retiré par son auteur. En définitive, il semble bien que seul un effort renouvelé pour rappeler aux citoyens l'obligation morale qui leur est faite de participer aux scrutins soit de nature à les sensibiliser à cet égard et à contribuer à la diminution de la proportion des Français non inscrits sur les listes électorales. Le Centre d'information civique est d'ailleurs l'un des organismes qui s'attache avec le plus de persévérance et d'efficacité à cette action. Pour leur part, les services administratifs, par des ; posée par l'article L. 9 du code électoral, puisque les intéressés sont susceptibles d'être inscrits sur la liste électorale d'un autre bureau de vote (de la même commune ou d'une autre commune) à l'un des titres énumérés à l'article L. 11 du même code. Une enquête détaillée sur leur situation serait donc nécessaire, et elle ne pourrait être menée à bien qu'avec le concours des services de police, ce qui lui donnerait inévitablement un caractère inquisitorial et vexatoire. De ce fait, il est peu vraisemblable que les maires prennent l'initiative de demander de telles enquêtes ; 2° Cette initiative pourrait également revenir à une tierce personne, par le biais du contentieux des listes électorales prévu par l'article L. 25 du code électoral, lequel autorise tout électeur à réclamer l'inscription d'un électeur omis. Mais on encouragerait ainsi la délation, ce qui apparaît comme extrêmement choquant, sans que pour autant un contrôle méthodique soit réalisé ; 3° Une troisième solution consisterait à comparer systématiquement, pour l'ensemble des électeurs, le " répertoire national d'identification des personnes " et le " fichier électoral ", tous deux tenus par l'Institut national de la statistique et des études économiques. Ce rapprochement permettrait, tout au moins en principe, de détecter les citoyens qui ne se seraient pas fait inscrire sur les listes électorales. Il ne dispenserait cependant pas de prévoir des enquêtes de police, car des erreurs sont toujours possibles. Mais une telle formule appellerait de graves objections sous l'angle du respect des libertés fondamentales des citoyens et des dispositions législatives concernant l'utilisation des fichiers informatisés. Au surplus, elle ferait jouer à l'I.N.S.E.E. le rôle d'" accusateur public " pour lequel cet organisme n'a certainement pas été institué. Au demeurant, on doit reconnaître que la non-inscription d'un citoyen est dans la pratique sanctionnée par l'impossibilité pour l'intéressé de prendre part à un scrutin, même s'il le désire, et jusqu'à la prochaine révision des listes électorales. Ce résultat paraît convenablement adapté au manquement dont le citoyen s'est rendu coupable et il est en tout cas conforme à la tradition libérale de notre droit électoral. C'est pour les raisons qui précèdent que le Gouvernement s'était opposé, lors de la discussion du projet de loi abaissant à dix-huit ans l'âge de la majorité, à un amendement déposé par M. Michel Cointat, qui tendait à sanctionner la non-inscription sur les listes électorales. Le ministre de la justice de l'époque avait notamment déclaré, le 25 juin 1974 : " ... une telle disposition n'est pas dans la ligne traditionnelle de libéralisme qui inspire notre droit. Sur le plan pratique, rendre l'inscription sur les listes électorales... obligatoire impliquerait un contrôle et des investigations qui pourraient prendre un caractère inquisitorial. L 'application des sanctions... poserait aux juges des problèmes délicats... ". A la suite de cette mise au point, l'amendement avait été retiré par son auteur. En définitive, il semble bien que seul un effort renouvelé pour rappeler aux citoyens l'obligation morale qui leur est faite de participer aux scrutins soit de nature à les sensibiliser à cet égard et à contribuer à la diminution de la proportion des Français non inscrits sur les listes électorales. Le Centre d'information civique est d'ailleurs l'un des organismes qui s'attache avec le plus de persévérance et d'efficacité à cette action. Pour leur part, les services administratifs, par des communiqués de presse et des affiches, rappellent chaque année, tout au long de la période de révision des listes, les obligations des citoyens en cette matière tout en leur indiquant les modalités pratiques des démarches qu'ils ont à accomplir. ; communiqués de presse et des affiches, rappellent chaque année, tout au long de la période de révision des listes, les obligations des citoyens en cette matière tout en leur indiquant les modalités pratiques des démarches qu'ils ont à accomplir.

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