Question de M. MALÉCOT Kléber (Loiret - UC) publiée le 21/05/1987

M.Kléber Malécot attire l'attention de M. le ministre de l'industrie, des P. et T. et du tourisme sur les préoccupations exprimées par de nombreux petits porteurs d'actions d'Usinor et de Sacilor à l'égard des décisions prises par l'assemblée générale de ces entreprises dont l'Etat est actionnaire majoritaire, visant à annuler purement et simplement la totalité de leurs actions pour procéder ensuite à une augmentation de capital qui a eu pour conséquence la réduction à zéro de la valeur de ces portefeuilles. Il lui demande de bien vouloir lui préciser quelles mesures le Gouvernement envisage de prendre visant à indemniser ces actionnaires privés qui ont cru à la possibilité de redressement de la sidérurgie française et ont supposé, en tout état de cause, que l'Etat, principal actionnaire, préserverait leurs intérêts.

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Réponse du ministère : Industrie publiée le 03/09/1987

Réponse. -L'annonce de l'opération de reconstitution de la situation de l'entreprise Usinor a préoccupé certains actionnaires. Cette opération qui s'est terminée le 31 décembre dernier était une obligation légale imposée par la loi de 1966 sur les sociétés. Il faut rappeler que la situation nette cumulée d'Usinor et de Sacilor était négative de 38 milliards de francs à la fin de 1985 et que la loi sur les sociétés faisait obligation de reconstituer les fonds propres de ces entreprises avant la fin de 1986. Les actionnaires de ces sociétés ne pouvaient ignorer la situation de leurs fonds propres, ainsi que l'obligation légale de reconstitution. Les procédures d'information et de décision ont été par ailleurs intégralement respectées. Ainsi, les résultats de ces entreprises, régulièrement publiés conformément à la réglementation, faisaient nettement apparaître que les capitaux propres à la sidérurgie dans son ensemble étaient négatifs de plusieurs dizaines de milliards de francs. Leurs dirigeants ont, à plusieurs reprises, commenté ces résultats et souligné le caractère anormal de la valeur des actions, compte tenu du montant cumulé des pertes et du risque que pouvait faire peser la nécessité légale de reconstitution des capitaux propres. Pour la mise en place de l'opération de reconstitution, l'Etat devait tenir compte de contraintes très fortes. Le droit des sociétés repose sur l'égalité des actionnaires et un actionnaire doit, par définition, être associé aux résultats de son entreprise. En outre, la cour des comptes avait critiqué sévèreemnt l'Etat lors d'une précédente reconstitution, et les pouvoirs publics se devaient de respecter cette fois le droit et l'orthodoxie financière. La reconstitution pouvait se concevoir, en effet, de deux façons : soit par une réduction du capital destinée à apurer les pertes, suivie d'une augmentation de capital par incorporation des créances de l'Etat ; soit par une augmentation préalable du capital suivie d'une réduction pour apurer les pertes. La cour des comptes, qui a examiné attentivement ce problème, a fortement recommandé à l'Etat de recourir à la première solution et non à la seconde. Dans son référé en date du 25 avril 1985 et son rapport public de juillet 1986, la cour faisait les recommandations suivantes : " en 1978, la réduction du capital pour éponger les pertes antérieures a été préalable à l'augmentation du capital réalisée grâce à l'apport des sociétés financières constituées entre les créanciers. En 1981, au contraire, la réduction du capital n'a été faite qu'après l'augmentation du capital par incorporation des créances de l'Etat, ce qui est beaucoup plus discutable et a eu pour effet d'accroître, à l'avantage des actionaires autres que l'Etat, la part relative du déficit supporté par ce dernier. Il n'est, du reste, pas exclu que l'espoir du renouvellement de la procédure utilisée en 1981 soit à l'origine des mouvements erratiques constatés à la bourse de Paris sur le cours des actions des deux sociétés, alors même que ces sociétés s'enfoncent dans des déficits croissants. Toute spéculation sur les titres de sociétés dont le financement ne dépend que de l'Etat depuis plusieurs années est évidemment anormale. La logique financière aurait commandé que l'apurement des pertes antérieures par réduction du capital eût lieu avant l'augmentation résultant de l'incorporation des créances de l'Etat. Il reste à résoudre, avant le 31 décembre 1986, le problème de la reconstitution du capital des sociétés, imposé par la loi du 24 juillet 1966. A cette fin, il sera inévitable de convertir en actions une grande partie des créances détenues ou garanties par l'Etat. Il importe d'éviter le renouvellement des erreurs commises lors de la précédente reconstitution du capital des deux sociétés. " En procédant comme il l'a fait, le Gouvernement a suivi ces recommandations, qui sont conformes à la logique financière, et respecté le principe d'égalité entre tous les actionnaires. L'opération soumise aux assemblées générales extraordinaires d'Usinor et Sacilor, qui avait pour seul objet d'apurer les pertes cumulées des sociétés, ne peut donc fonder aucune mesure d'indemnisation. Pourtant, il est indéniable que les décisions prises, au demeurant obligatoires au regard de la loi, ont présenté un caractère douloureux voire traumatisant pour un certain nombre de petits porteurs. Pour cette raison, et bien que la cotation des actions d'Usinor et de Sacilor n'ait pas été rétablie, le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de la privatisation a décidé que leurs détenteurs pourront, exceptionnellement, en l'absence de transaction permettant de constater la moins-value, prendre en compte celle-ci et la réduire des plus-values mobilières qu'ils auraient pu dégager par ailleurs. ; en actions une grande partie des créances détenues ou garanties par l'Etat. Il importe d'éviter le renouvellement des erreurs commises lors de la précédente reconstitution du capital des deux sociétés. " En procédant comme il l'a fait, le Gouvernement a suivi ces recommandations, qui sont conformes à la logique financière, et respecté le principe d'égalité entre tous les actionnaires. L'opération soumise aux assemblées générales extraordinaires d'Usinor et Sacilor, qui avait pour seul objet d'apurer les pertes cumulées des sociétés, ne peut donc fonder aucune mesure d'indemnisation. Pourtant, il est indéniable que les décisions prises, au demeurant obligatoires au regard de la loi, ont présenté un caractère douloureux voire traumatisant pour un certain nombre de petits porteurs. Pour cette raison, et bien que la cotation des actions d'Usinor et de Sacilor n'ait pas été rétablie, le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de la privatisation a décidé que leurs détenteurs pourront, exceptionnellement, en l'absence de transaction permettant de constater la moins-value, prendre en compte celle-ci et la réduire des plus-values mobilières qu'ils auraient pu dégager par ailleurs.

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