Question de M. PERCHERON Daniel (Pas-de-Calais - SOC) publiée le 05/02/1987

M.Daniel Percheron attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conséquences engendrées par le plan de lutte contre la toxicomanie : en effet, ce plan de lutte contre la toxicomanie est basé sur la répression et prévoit notamment une aggravation des peines de prison pour les toxicomanes, ainsi qu'un allongement des délais de prescription. Or les statistiques montrent qu'en France 50 à 60 p. 100 des personnes emprisonnées deviennent récidivistes. Cette proposition atteint 70 p. 100 pour les condamnés à des peines de courte durée. Actuellement 90 000 personnes sont incarcérées chaque année pour une période moyenne de cinq mois. Environ 50 000 d'entre elles y reviendront donc après récidive. En conséquence, il lui demande de bien vouloir revenir sur les mesures annoncées et souhaiterait qu'il indique les intentions du Gouvernement pour permettre une réelle amélioration de la politique préventive en ce domaine.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 17/09/1987

Réponse. -La toxicomanie et le trafic de produits stupéfiants connaissent depuis quelques années une croissance alarmante : on estime à 800 000 le nombre de ceux qui en France s'adonnent à l'usage de stupéfiants ; parmi eux, 200 000 seraient des héroïnomanes ; alors qu'en 1974 1 200 personnes environ avaient été condamnées pour infractions à la législation sur les stupéfiants, en 1984 ce chiffre a été de l'ordre de 10 500. La gravité de cette situation a conduit le comité interministériel du 23 septembre 1986 à décider quatre séries de mesures : la mise en place de moyens permettant l'application stricte de la loi du 31 décembre 1970, l'aggravation des peines encourues par les trafiquants, la mobilisation des forces vives de la nation au service de la prévention et l'encouragement au développement de la recherche médicale. Le plan de lutte contre la toxicomanie élaboré par le Gouvernement à la suite de ce comité ne remet pas en cause les principes inscrits dans la loi du 31 décembre 1970 en ce qui concerne les peines encourues par les usagers de stupéfiants. A leur égard a été recherchée une amélioration, à tous les stades de la procédure, du contrôle exercé par les autorités judiciaires sur le déroulement des cures qui sont prescrites. C'est ainsi qu'une circulaire définissant les principes qui doivent désormais guider l'action des parquets en matière de stupéfiants a été adressée aux procureurs généraux et aux procureurs de la République. Ce document recommande notamment un recours systématique de la part des magistrats du parquet à la procédure de l'injonction thérapeutique. Parallèlement, les magistrats du ministère public, les préfets et les directeurs départementaux des affaires sanitaires et sociales ont été destinataires de directives visant à mieux coordonner les actions menées par les autorités judiciaires et sanitaires dans chaque département. Par ailleurs, les mesures qui sont actuellement soumises au Parlement tendent d'abord à renforcer l'efficacité des dispositions applicables aux trafiquants : ainsi est-il proposé d'augmenter la durée des délais de prescription respectivement applicables à l'action publique et à la peine en cas de trafic de stupéfiants ; une sensible aggravation des peines applicables en la matière est également prévue ; en outre, le projet de loi tend à introduire dans notre législation un mécanisme d'exemption ou de réduction de peine au profit des personnes qui, impliquées à des titres divers dans l'organisation d'un trafic de stupéfiants, auront permis d'éviter que l'infraction se réalise ou faciliter l'arrestation de leurs complices ; il est également proposé d'instituer une peine complémentaire de confiscation générale de l'ensemble du patrimoine acquis par les personnes reconnues coupables de trafic. Enfin, ces dispositions sont complétées par un effort très important tant dans le domaine de la prévention que dans le domaine des soins. C'est ainsi que les 250 MF inscrits au chapitre 37-00 du budget du ministère de la justice sont destinés à être utilisés, notamment à hauteur de 8 p. 100 pour des actions d'information et de formation, et de plus de 70 p. 100 pour des actions de dépistage, d'accueil et de soins pour les toxicomanes. C'est donc un dispositif très complet, fondé autant sur la prévention que sur la répression, qui est envisagé par le Gouvernement à la mesure de la gravité que revêt désormais ce fléau pour notre société.

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