Pour Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques : "Il faudra évaluer ce plan de relance point par point et le piloter par les résultats. Les orientations sont conformes à celles que nous avions dégagées en juillet dans le plan de relance de la commission des affaires économiques du Sénat issu de trois mois de travaux au plus proche du terrain. Mais injecter des milliards ne suffira pas, il faut également des réformes de structure, une rupture avec le centralisme administratif et politique français, un approfondissement de la décentralisation et une véritable simplification administrative.

La question est de savoir si ce plan va relancer durablement l’économie française ou si c’est une politique d’annonces. Nous faisons face à la plus grave crise économique depuis 1945 avec moins 11 % de croissance prévus pour 2020. L’ampleur de la crise est presque deux fois plus importante en France qu’en Allemagne. Un chiffre qui m’a frappée pendant le confinement : 80 % des chantiers allemands ont poursuivi leur activité contre 20 % seulement en France.

Le diable est dans les détails et dans la méthode. Chaque secteur a ses enjeux. Prenons la rénovation énergétique des bâtiments. Nous avons accumulé les dispositifs. Leur complexité effraie les propriétaires. Le Gouvernement propose encore de nouveaux dispositifs. Il faudra  veiller à ce qu’ils soient lisibles, suffisamment souples et simples pour enclencher une véritable dynamique économique avec des emplois à la clé.

Il faut parler rénovation, mais aussi construction. La crise sanitaire va aggraver la crise du logement avec sans doute 100 000 logements neufs en moins en 2020. Il y a une tension très forte sur les logements qui poussent les prix à la hausse avec des conséquences majeures sur le pouvoir d’achat des français. Relancer la construction est une nécessité sociale et économique avec un effet multiplicateur massif sur toute une série d’emplois qui ne sont pas délocalisables. Or dans le plan de relance, on voit peu de choses sur le sujet aussi bien d’un point de vue fiscal que réglementaire.

La transition climatique : les mesures vont évidemment dans le bon sens, mais sont-elles suffisamment ambitieuses ? Prenons l’exemple de l’hydrogène. Nous avions défendu au Sénat un investissement important dans ce secteur d’avenir lors du débat sur la loi "Énergie-climat". Le Gouvernement avait alors un objectif limité, un plan à 100 millions d’euros. Aujourd’hui, c’est 2 milliards. C’est mieux ! En Allemagne, le plan de relance y consacre 9 milliards !

Garantir une alimentation saine, sûre, durable, de qualité et accessible au plus grand nombre fait également partie des objectifs de la transition écologique. Pour cela, le pays a besoin d’une agriculture forte, dynamique, innovante. Les mesures proposées reprennent celles que le Sénat promeut depuis des années comme les aides à l'investissement dans les agroéquipements, mais le grand oublié de la relance est la compétitivité. La France perd des parts de marché à l'export tous les jours et importe de plus en plus des denrées produites avec des normes différentes de celles requises en France car elles sont moins chères. Le manque de compétitivité agricole provient de charges et de normes pesant sur les agriculteurs.

L’enjeu n’est pas de savoir si c’est vraiment 100 milliards ou pas, même si de fait on additionne des choux et des carottes, mais de savoir si on met les bons instruments devant les bons enjeux. Le Premier ministre a évoqué "un cadeau" de 100 milliards à la France, c’est en grande partie une dette que devront payer nos enfants, il faut donc que cet argent soit bien utilisé et leur prépare vraiment un avenir meilleur !

Le Sénat contribuera à améliorer le plan de relance lors de la discussion budgétaire en lien avec l’ensemble des secteurs économiques de façon à ce que l’on mette toute les chances de notre côté. Le Premier ministre dit vouloir viser la création de 260 000 emplois l’année prochaine. L’économie française a déjà perdu 800 000 emplois cette année. C’est dire la gravité de la situation".


La commission des affaires économiques est présidée par Sophie PRIMAS (Les Républicains - Yvelines).

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Philippe PÉJO
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