Lors de sa réunion du 30 avril, la commission des affaires européennes du Sénat a décidé d’adresser un avis politique à la Commission européenne afin d’obtenir le renforcement des mesures d’urgence de gestion des crises qu’elle s’est résolue à activer le 22 avril, après avoir longtemps privilégié des dispositions techniques. Ces mesures sont celles prévues aux articles 219 et 222 du règlement dit "OCM", relatif à l’Organisation commune des marchés agricoles. Face à l’ampleur de la crise économique consécutive à la pandémie de Covid-19, elles étaient réclamées avec force par les organisations professionnelles agricoles, de même que par de nombreux parlementaires européens et nationaux, à commencer par les sénateurs.

Pour Sophie Primas et Jean Bizet, présidant respectivement les commissions des affaires économiques et des affaires européennes du Sénat, "la réponse de la Commission européenne est à ce jour très insuffisante pour faire face à la crise agricole : il s’agit certes d’un geste politique fort méritant d’être salué, mais ce "saupoudrage" sera dépourvu d’effet pratique, aussi longtemps que les moyens ne suivront pas". En effet, le budget prévu ne devrait pas dépasser  90 millions d’euros, sans argent frais. En outre, seules certaines filières agricoles (lait, viande bovine, ovine, caprine, fleurs, pommes de terre) figurent dans le champ des mesures à intervenir, alors que les secteurs qui souffrent sont beaucoup plus nombreux : fruits et légumes, biocarburants, horticulture, viticulture ou volaille. Enfin, si la Commission européenne entend désormais valider les mécanismes d’entente sur les volumes, elle ne va pas jusqu’à autoriser les ententes sur les prix, comme les agriculteurs américains sont, eux, en droit de le faire depuis 1922.

L’avis politique adressé le 30 avril 2020 (PDF - 397 Ko) appelle la Commission à :

- remettre à plat le projet de réforme de la Politique agricole commune (PAC) à l’étude pour la période 2021/2027;

- consacrer la souveraineté alimentaire de l’Union européenne comme une priorité dans la stratégie de "nouvelle donne verte" (ou "Green Deal"), actuellement en cours d’élaboration ;

- prendre en compte, d’une part, la spécificité de l’agriculture au regard du droit de la concurrence, d’autre part, la faiblesse structurelle des producteurs face aux industriels transformateurs, ainsi qu’à la distribution ;

- affirmer que les objectifs de la PAC doivent prévaloir sur ceux de la politique de la concurrence, laquelle défend les seuls intérêts des consommateurs.

Pour Sophie Primas et Jean Bizet, "l'épidémie de Covid-19 constitue un électrochoc révélateur qui peut être salutaire : la PAC demeure plus que jamais un formidable outil pour garantir notre résilience alimentaire au niveau européen. C’était la conviction des pères fondateurs de l’Europe : elle reste d’actualité. Dans ce contexte, l’annonce hier par la Commission d’un nouvel accord commercial avec le Mexique apparaît incompréhensible".

M. Jean Bizet (Les Républicains – Manche) est président de la commission des affaires européennes du Sénat.

Mme  Sophie Primas (Les Républicains – Yvelines) est président de la commission des affaires économiques du Sénat.

L’activité du Sénat se déroule dans le strict respect des conditions sanitaires dictées par la nécessité d’enrayer la pandémie du Covid 19.

Clothilde Labatie
presse@senat.fr