La commission des affaires européennes du Sénat a entendu, le 8 avril 2020, par audioconférence, Fabrice LEGGERI, directeur exécutif de Frontex, agence européenne chargée de la sécurité des frontières extérieures de l’Union européenne (UE).


Les sénateurs ont interrogé le directeur sur la façon dont Frontex avait adapté ses missions à la fermeture des frontières européennes et à la période de confinement actuelle, sur l’évolution récente des flux migratoires, sur la situation à la frontière gréco-turque, et enfin sur les moyens alloués à Frontex pour remplir ses missions, en particulier mettre en place le corps européen de 10 000 gardes-frontières et gardes-côtes annoncé pour 2027.


Fabrice LEGGERI a indiqué que Frontex devait actuellement gérer une double crise : sanitaire, avec les contrôles imposés par l’épidémie de Covid-19, et géopolitique, avec la pression migratoire qu’exerce la Turquie sur l’Union européenne en ne régulant plus le flux migratoire à la frontière, au mépris de l’accord conclu en 2016. Fin février-début mars, 20 000 migrants hébergés en Turquie se sont ainsi présentés aux frontières terrestres et maritimes grecques : moins de 2 000 – et non pas 150 000 comme allégué par les autorités turques – les ont franchies, dans un contexte parfois violent tout à fait inédit. Les autorités grecques ont été très réactives, et, avec l’appui de l’UE, la situation est aujourd’hui maîtrisée. En dépit du confinement, Frontex a déployé 900 de ses garde-frontières équipés de protections sanitaires sur le terrain, dont 600 en Grèce, priorité du moment pour assurer la protection des frontières extérieures européennes.


Le directeur exécutif a insisté sur le risque budgétaire qui pèse lourdement sur Frontex. Alors que cette agence devait se voir allouer 11 milliards d’euros sur les années 2021 à 2027, les Présidences finlandaise puis croate du Conseil de l’UE ont proposé de réduire ce budget de moitié. Fabrice LEGGERI a qualifié cette situation de "catastrophique" : non seulement, la création du corps européen ne serait pas financée, alors que 7 000 candidatures ont été reçues pour 700 postes à pourvoir au 1er janvier prochain, mais l’agence ne pourrait pas renforcer sa contribution au retour effectif des étrangers en situation irrégulière vers leur pays d’origine, question pourtant essentielle pour la crédibilité de la politique migratoire de l’Union européenne.


Fabrice LEGGERI a indiqué que les flux migratoires avaient logiquement diminué dans le contexte actuel de confinement de la majorité de la population mondiale, mais qu’il était trop tôt pour évaluer l’effet de l’épidémie sur leur évolution de moyen terme. Des sorties de crise à des dates différentes selon les régions du monde devront en tout cas conduire à renforcer les contrôles sanitaires aux frontières extérieures de l’Europe pour ne pas relancer l’épidémie quand elle sera en voie de résorption dans l’UE.


Le président Jean BIZET a déclaré : "Vouloir une Europe qui protège tout en assurant la libre circulation, qui plus est dans un contexte d’épidémie, requiert des moyens : il faut absolument sécuriser le budget de Frontex pour les prochaines années".

Jean BIZET (Les Républicains - Manche) est président de la commission des affaires européennes du Sénat.

http://www.senat.fr/europe/broch.html

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Clothilde LABATIE
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