Mardi 8 octobre, la Délégation aux entreprises et le Groupe d’études sur le numérique du Sénat ont débuté la série d’auditions consacrées à la question : "Comment garantir un accès efficient des PME à des réseaux et services numériques ?", dans le contexte nouveau provoqué par la décision du 3 septembre dernier de l’Autorité de la concurrence (ADLC) et celle de la Banque des Territoires relative au renoncement à souscrire à une augmentation de capital de la société KOSC.

Les comptes rendus des premières auditions sont désormais en ligne : http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20191007/2019_10_08.html

Les sénateurs ont entendu les représentants de la société KOSC, l’opérateur dont la naissance avait été favorisée par les autorités publiques pour garantir une "concurrence effective" sur le marché de gros des télécoms, à l’occasion du rachat de SFR par Altice en 2014.

Ils ont pu ensuite mesurer les risques directs pour les PME que représenterait la disparition de KOSC, en recueillant les témoignages de dirigeants d’agrégateurs de réseaux et de solutions de communication permettant aux sociétés de services numériques d’accompagner la transformation numérique des PME. 100 000 PME pourraient être temporairement privées de connexion du jour au lendemain en cas de disparition brutale de l’unique opérateur neutre du marché de gros.

Mme Elisabeth LAMURE (LR–Rhône) a indiqué à la présidente de l’ADLC : "Nous avons été frappés par la répétition des "stratégies nocives" des grands opérateurs historiques (coûts élevés pour être raccordés à la fibre, immeubles d'entreprises régulièrement "oubliés", etc.) dont les premières victimes ont été les PME. Ces constats font d'autant plus réagir que les délais des procédures d'instruction des autorités de régulation laissent largement le temps aux opérateurs de poursuivre leurs pratiques sans être finalement inquiétés compte tenu du caractère peu dissuasif des sanctions."

Les réponses de la présidente de l’ADLC ont vivement inquiété les sénateurs présents, tant elles semblaient traduire une vision limitée à la seule approche juridique, sans prendre en compte l’impact économique des décisions de l’Autorité. "Ce n’est pas notre office" a-t-elle dit, après avoir rappelé le champ des compétences de l’ADLC.

  1. Patrick CHAIZE (LR–Ain) lui a demandé : "estimez-vous que le législateur devrait vous conférer un pouvoir qui ne soit pas strictement juridique, mais qui embrasse la dimension de la concurrence ?" La présidente de l’ADLC a jugé qu’il n’était pas nécessaire, au regard de cette affaire, de modifier la législation pour mieux prendre en compte la concurrence. "J'estime que le contrôle du respect des engagements fonctionne bien" a-t-elle ajouté.

S’agissant de la question d’éventuelles pratiques anti-concurrentielles sur ce marché, elle a indiqué que "rien pour le moment n’était remonté à l’Autorité qui lui paraisse susceptible de rentrer dans cette qualification".

Les signaux d’alerte sont pourtant multiples et peuvent faire craindre un retour à une moindre concurrence sur le marché de gros. L’écosystème des opérateurs de services numériques, qui sont les intermédiaires au service des PME, se dit particulièrement inquiet de l’évolution de la situation.

L’audition ce soir du président de l’ARCEP, puis la semaine prochaine de la Banque des Territoires, d’OVH et de la Direction générale des entreprises, donnera l’occasion de vérifier si l’État entend enfin réellement réguler le marché des télécoms au bénéfice des PME-TPE sur nos territoires.

Clothilde LABATIE
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