La commission des lois du Sénat a examiné ce matin le rapport de son président M. Jean-Pierre Sueur (Soc. – Loiret) sur la proposition de loi de Mme Valérie Boyer visant à réprimer la contestation de l’existence des génocides reconnus par la loi, adoptée par l’Assemblée nationale le 22 décembre dernier.

La commission des lois a souhaité qu’un débat serein puisse avoir lieu sur les questions importantes soulevées par cette proposition de loi, dont le dispositif vise, en l’état du droit, le seul génocide arménien, officiellement reconnu par la France par une loi du 29 janvier 2001.

La commission des lois condamne toute forme de négationnisme, qui constitue une atteinte odieuse à la mémoire des disparus et à la dignité des victimes. Il y a eu un génocide, et la commission des lois tient à exprimer son infini respect pour le peuple arménien et les terribles épreuves qu’il a endurées.

Elle s’est toutefois longuement interrogée sur la légitimité de l’intervention du législateur dans le champ de l’Histoire – considérant que l’adoption de résolutions et l’organisation de commémorations constituaient probablement des moyens plus adaptés pour exprimer la solidarité de la Nation avec les souffrances endurées par les victimes.

Elle a considéré que la création d’un délit pénal de contestation ou de minimisation outrancière des génocides reconnus par la loi encourait un fort risque d’être en contradiction avec plusieurs principes reconnus par notre Constitution – en particulier le principe de légalité des délits et des peines, le principe de liberté d’opinion et d’expression et le principe de liberté de la recherche.

Enfin, elle a jugé qu’il existait un risque sérieux de remise en cause de la loi du 29 janvier 2001, par laquelle la France a officiellement reconnu l’existence du génocide arménien de 1915, dans le cas où le Conseil constitutionnel serait conduit à se prononcer sur la constitutionnalité du délit créé par la proposition de loi.

Sur la proposition de son rapporteur, M. Jean-Pierre Sueur, la commission des lois a décidé d’opposer à la proposition de loi une motion d’exception d’irrecevabilité.

Cette motion sera discutée lors de l’examen de la proposition de loi en séance publique lundi 23 janvier 2012. Son adoption aurait pour conséquence le rejet du texte voté par les députés en décembre dernier.

Ali Si Mohamed
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