A la suite de la dégradation de trois banques françaises par Moody’s le 21 juin 2012, Frédérique Espagnac, présidente de la mission commune d’information du Sénat sur le fonctionnement, la méthodologie et la crédibilité des agences de notation souligne ses doutes sur la qualité de l’analyse de l’agence.

Dans son rapport publié le 19 juin 2012, la mission commune fait état de distorsions de notation avérées subies par les entreprises françaises. Elle publie une contribution écrite de la fédération bancaire française soulignant : « la rentabilité est devenue la seule priorité des agences de notation : le nombre croissant d’instruments et d’entreprises à noter par analyste, l'exploitation mécanique d'immenses tables de données universelles remplies par les émetteurs de façon sans doute hétérogène, et la multiplication d'erreurs de calcul ou d'interprétations erronées qui en résultent, ont entrainé une dégradation importante de la qualité d'analyse. (…) Les agences de notation ne respectent pas leur propre méthodologie. Dans certains cas, des changements méthodologiques majeurs sont annoncés ou mis en oeuvre en contradiction avec la réglementation en vigueur sans consultation et sans explications suffisantes pour le marché et les émetteurs. Les méthodologies en vigueur contiennent un fort biais américain, notamment dans l'analyse financière qui privilégie les normes comptables américaines plutôt que les IFRS. » Des analystes entendus par le Sénat ont ainsi déclaré : « le bilan du Crédit agricole, c'est vingt-trois fois le PIB du Maroc ! Je ne sais pas faire, je l'ai dit, on ne m'a pas écouté, je suis parti. Pour analyser correctement la situation du Crédit agricole, il faudrait une dizaine d'analystes très expérimentés, connaissant tous les métiers de la banque, rémunérés chacun entre 500 000 et 600 000 euros : cela ruinerait une agence ».

La mission commune d’information appelle les agences de notation à améliorer la qualité de leurs notations, et à renforcer tout particulièrement leurs ressources humaines « en surchauffe », en qualité et en quantité. Le rapport du Sénat montre que, chez Moody’s, les analystes dédiés aux institutions financières avaient en moyenne à traiter 15,2 dossiers, mais 36,2 dossiers en moyenne pour le décile supérieur. 66 % de ces analystes ont une expérience de moins de cinq ans dans l’agence. L’autorité européenne des marchés financiers doit accentuer son contrôle sur ces questions cruciales.

La mission commune d’information propose aussi que les notations soient systématiquement accompagnées d’un droit de réponse des émetteurs.

Le rapport du Sénat :
http://www.senat.fr/rap/r11-598-1/r11-598-1.html

Olivier GRAFTIEAUX
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