Transferts forcés massifs d'enfants ukrainiens (PPRE) - Texte déposé - Sénat

N° 345

SÉNAT


SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

                                                                                                                                             

Enregistré à la Présidence du Sénat le 10 février 2023

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE


en application de l’article 73 quinquies du Règlement,


dénonçant les transferts forcés massifs d’enfants ukrainiens par la Fédération de Russie,


présentée

Par MM. André GATTOLIN, François PATRIAT, Hervé MARSEILLE, Claude MALHURET, Jean-Claude REQUIER, Mme Nadia SOLLOGOUB, MM. Claude KERN, Julien BARGETON, Mme Esther BENBASSA, M. Christian BILHAC, Mme Annick BILLON, MM. Étienne BLANC, François BONNEAU, Philippe BONNECARRÈRE, Gilbert BOUCHET, Mme Céline BOULAY-ESPÉRONNIER, MM. Bernard BUIS, Henri CABANEL, Olivier CADIC, Mmes Agnès CANAYER, Samantha CAZEBONNE, MM. Alain CHATILLON, Michel DAGBERT, Mme Sonia de LA PROVÔTÉ, M. Jean-Pierre DECOOL, Mme Nathalie DELATTRE, MM. Michel DENNEMONT, Yves DÉTRAIGNE, Mmes Élisabeth DOINEAU, Nicole DURANTON, MM. Gilbert FAVREAU, Jacques FERNIQUE, Bernard FIALAIRE, Philippe FOLLIOT, Mmes Joëlle GARRIAUD-MAYLAM, Françoise GATEL, MM. Éric GOLD, Jean-Pierre GRAND, Mme Pascale GRUNY, MM. Jean-Noël GUÉRINI, Joël GUERRIAU, André GUIOL, Abdallah HASSANI, Mme Nadège HAVET, MM. Ludovic HAYE, Jean HINGRAY, Xavier IACOVELLI, Jean-Louis LAGOURGUE, Jacques LE NAY, Jean-Yves LECONTE, Jean-Baptiste LEMOYNE, Martin LÉVRIER, Mme Brigitte LHERBIER, MM. Jean-François LONGEOT, Gérard LONGUET, Pierre LOUAULT, Frédéric MARCHAND, Hervé MAUREY, Mme Colette MÉLOT, MM. Alain MILON, Jean-Pierre MOGA, Thani MOHAMED SOILIHI, Mmes Catherine MORIN-DESAILLY, Guylène PANTEL, M. Georges PATIENT, Mmes Marie-Laure PHINERA-HORTH, Angèle PRÉVILLE, MM. Didier RAMBAUD, Alain RICHARD, Teva ROHFRITSCH, Mmes Denise SAINT-PÉ, Patricia SCHILLINGER, Lana TETUANUI, MM. Dominique THÉOPHILE, André VALLINI, Yannick VAUGRENARD et Dany WATTEBLED,

Sénateurs et Sénatrices


(Envoyée à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.)




Proposition de résolution européenne dénonçant les transferts forcés massifs d’enfants ukrainiens par la Fédération de Russie

Le Sénat,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu la Charte des Nations unies, signée à San Francisco le 26 juin 1945,

Vu le Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, notamment ses articles 18 alinéa 4 et 24,

Vu la Convention relative aux droits de l’enfant, signée à New York le 20 novembre 1989,

Vu le Statut de Rome, signé le 17 juillet 1998, notamment ses articles 5, 6-e, 7-d, 8-a-vii, 8-b-i, 8-b-xxi, 15, 25, 53 et 81,

Vu la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, signée le 20 décembre 2006,

Vu la Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre du 12 août 1949, notamment ses articles 4, 49 et 50,

Vu le Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux, notamment ses articles 77 et 78,



Vu la résolution ES-11/1 de l’Assemblée générale des Nations unies du 2 mars 2022 intitulée « Agression contre l’Ukraine »,



Vu l’ordonnance de la Cour internationale de justice du 16 mars 2022 sur les allégations de génocide au titre de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Ukraine c. Fédération de Russie),



Vu l’article 3, paragraphe 3, du traité sur l’Union européenne,



Vu l’article 3 du protocole  4 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales reconnaissant certains droits et libertés autres que ceux figurant déjà dans la Convention et dans le premier Protocole additionnel à la Convention,



Vu la résolution 2433 (2022) de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe,



Vu la résolution 2436 (2022) de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe,



Vu la résolution 2482 (2023) de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, notamment ses alinéas 10, 12, 15-7, 17 et 25-5,



Vu la résolution 2022/2564 du Parlement européen du 1er mars 2022 sur l’agression russe contre l’Ukraine,



Vu la résolution 2022/2655 du Parlement européen du 19 mai 2022 sur la lutte contre l’impunité des crimes de guerre en Ukraine,



Vu la résolution  52 (2022-2023) du Sénat du 7 février 2023 exprimant le soutien du Sénat à l’Ukraine, condamnant la guerre d’agression menée par la Fédération de Russie et appelant au renforcement de l’aide fournie à l’Ukraine,



Vu le décret du Président de la Fédération de Russie du 30 mai 2022, visant à simplifier la procédure d’obtention de la citoyenneté russe,



Vu la loi russe de juillet 2022 sur le non-respect par la Russie des décisions de la CEDH adoptée par la Douma d’État, l’Assemblée fédérale de la Fédération de Russie,



Considérant que la Cour pénale internationale a compétence à l’égard des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et des crimes de génocide ;



Considérant que la Cour pénale internationale entend, par « crimes de guerre », les « atteintes à la dignité de la personne, notamment les traitements humiliants et dégradants » ;



Considérant que la Cour pénale internationale aux fins du Statut de Rome entend, par « crimes de guerre », « la déportation ou le transfert illégal ou la détention illégale » ;



Considérant que la Cour pénale internationale entend, par « crime contre l’humanité », « la déportation ou le transfert forcé de population » ;



Considérant que la Cour pénale internationale entend, par « crime de génocide », « le transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe » ;



Considérant que le Procureur de la Cour pénale internationale a pouvoir pour ouvrir une enquête de sa propre initiative au vu de renseignements concernant des crimes relevant de la compétence de la Cour ;



Considérant que la Cour pénale internationale est compétente à l’égard des personnes physiques et que quiconque commet un crime relevant de sa compétence est individuellement responsable et peut être puni ;



Considérant que les transferts forcés et les déportations de personnes protégées hors du territoire occupé dans le territoire de la Puissance occupante sont interdits quel qu’en soit le motif ;



Considérant que la Puissance occupante doit prendre toutes les mesures nécessaires pour faciliter l’identification des enfants et l’enregistrement de leur filiation et ne peut, en aucun sens, procéder à une modification de leur statut personnel ;



Considérant les nombreuses preuves et témoignages faisant état de déplacements massifs d’enfants ukrainiens vers la Russie ;



Considérant que la Convention de Genève définit comme protégée toute personne qui, à un moment quelconque et de quelque manière que ce soit, se trouve, en cas de conflit ou d’occupation, au pouvoir d’une Puissance occupante ;



Considérant les déclarations de Mme Maria Lvova-Belova, commissaire aux droits de l’enfant de la Fédération de Russie, admettant que des orphelins ukrainiens ont été « déplacés » vers son pays depuis des établissements ukrainiens ;



Considérant que la Fédération de Russie procède également au transfert forcé d’enfants ukrainiens vers la Russie ;



Considérant qu’il est fait état que la Fédération de Russie procède de manière administrative et massive à la naturalisation, au changement de nom et de filiation d’enfants transférés vers son territoire ;



Considérant les déclarations d’officiels russes selon lesquelles des enfants ukrainiens ont été massivement déplacés depuis le début de la guerre ;



Considérant les déclarations d’officiels russes selon lesquelles des enfants ukrainiens ont été placés dans des familles russes depuis le début de la guerre ;



Considérant l’obligation juridique de prévenir et de punir le génocide en vertu de la Convention des Nations unies de 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide ;



Condamne les transferts forcés d’Ukrainiens et notamment d’enfants, perpétrés par la Fédération de Russie ;



Dénonce le caractère massif de ces transferts ;



Dénonce le processus d’assimilation forcée et accélérée mis en œuvre par la Fédération de Russie, notamment à l’égard d’enfants ukrainiens, orphelins ou non ;



Invite le Procureur de la Cour pénale internationale à ouvrir une enquête sur ces agissements ;



Conteste les arguments des autorités russes qualifiant les transferts et assimilations forcés d’enfants ukrainiens d’actes de solidarité humanitaire ;



Invite l’Union européenne et ses États membres à condamner vigoureusement ces transferts forcés et notamment ceux se rapportant à des enfants ;



Invite l’Union européenne à demander une enquête sur ces crimes ;



Demande à l’Union européenne et ses États membres de mettre en œuvre tous les moyens techniques et humains à leur disposition, en coopération avec les autorités ukrainiennes pour identifier, documenter et recenser tous les cas de transferts forcés et de déportation engagés par la Fédération de Russie depuis le début du conflit et d’identifier les responsables de ces actes afin d’engager des sanctions immédiates et d’ouvrir la voie à des poursuites judiciaires ultérieures ;



Invite le Gouvernement à soutenir ces orientations et à les faire valoir dans les négociations en cours et à venir au Conseil.

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