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N° 430

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 16 avril 2018

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

au nom de la commission des affaires européennes, en application de l'article 73 quater du Règlement, en faveur de la préservation d'une Politique agricole commune forte , conjuguée au maintien de ses moyens budgétaires ,

PRÉSENTÉE

Par M. Daniel GREMILLET, Mme Pascale GRUNY, MM. Claude HAUT et Franck MONTAUGÉ,

Sénateurs

(Envoyée à la commission des affaires économiques.)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La commission des affaires européennes et la commission des affaires économiques ont examiné, le 12 avril 2018, le rapport d'information n° 437 (2017-2018) de M. Daniel Gremillet, Mme Pascale Gruny, MM. Claude Haut et Franck Montaugé sur la prochaine réforme de la Politique agricole commune : pour un maintien des moyens budgétaires, au service d'une PAC forte et rénovée.

À la suite de cet examen, la commission des affaires européennes a conclu au dépôt de la proposition de résolution européenne suivante :

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

Le Sénat,

Vu l'article 88-4 de la Constitution ;

Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, en particulier ses articles 38 à 44 ;

Vu les conclusions du Conseil européen des 22 et 23 mars 2018, sur le prochain Cadre financier pluriannuel (CFP) de l'Union européenne, d'une part, sur l'avenir de la Politique agricole commune (PAC), d'autre part ;

Vu les documents préparatoires de la Commission européenne et du Parlement européen sur la PAC et sur le CFP 2021/2027 ;

Vu la résolution européenne du Sénat du 8 septembre 2017, sur la rénovation de la Politique agricole commune ;

Vu les dispositions du Règlement dit « Omnibus » 2017/2393 du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2017 ;

Vu les négociations commerciales en cours ;

Vu les conclusions de la présidence du conseil « agriculture et pêche » du 19 mars 2018, sur la communication de la Commission européenne intitulée « L'avenir de l'alimentation et de l'agriculture » ;

Considérant que l'agriculture française ressort exsangue des crises des dernières années et que la France ne saurait sortir de cette spirale négative sans une stratégie offensive, qui pourrait au demeurant utilement s'inspirer de l'exemple d'autres États membres de l'Union européenne ;

Considérant que les modalités actuelles de fonctionnement de la PAC n'assurent pas une protection suffisante aux exploitants agricoles, en particulier face à la volatilité des prix agricoles ;

Considérant, qu'en dépit des améliorations appréciables introduites par le « Règlement Omnibus » du 13 décembre 2017, les outils de gestion de crise de la PAC ne sont ni assez efficaces, ni suffisamment réactifs ;

Considérant que les éléments préparatoires, disponibles à ce jour sur la prochaine réforme de la PAC, ne répondraient que très partiellement aux préconisations de la résolution du Sénat du 8 septembre 2017, voire en contrediraient certains points essentiels, notamment sur le plan budgétaire, que cette circonstance conduit le Sénat à réaffirmer ses priorités pour la prochaine réforme ;

Rappelle l'importance de l'agriculture et du secteur agro-alimentaire pour le tissu économique et sociétal ;

Demande a minima que la PAC bénéficie, pour la période 2021-2027, d'un budget stable en montant en euros ;

Déplore que la PAC soit présentée comme une « vieille politique » ayant une moindre « valeur ajoutée européenne », et ce alors même que les autres grandes puissances agricoles mondiales, à commencer par la Chine, les États-Unis, l'Inde et la Russie, ont a contrario fortement accru leur effort budgétaire dans ce secteur ;

Juge l'état de l'agriculture européenne et française trop fragile pour faire l'objet de « coupes sombres » budgétaires, demande aux institutions européennes de partager ce constat et soutiendra toutes les démarches des autorités françaises qui s'opposeraient à cette perspective, dans les négociations à venir ;

Refuse, en conséquence, que la PAC soit la variable d'ajustement du budget de l'Union européenne en raison, tout à la fois, du manque de ressources créé par le retrait Royaume-Uni et de l'émergence de nouvelles priorités politiques européennes ;

Juge indispensable que la Commission européenne apporte rapidement des garanties effectives sur le nouveau mode de mise en oeuvre qu'elle envisage pour la PAC, au regard du très fort risque de création de distorsions de concurrence ;

Estime que, faute de disposer de ces informations, le schéma de simplification proposé par la Commission européenne ne serait qu'une pétition de principe, tandis que l'expérience des Plans de développements régionaux du « second pilier » de la PAC fait redouter a contrario une complexité supplémentaire ;

Affirme que l'adoption du « Règlement Omnibus » ne constitue qu'une étape dans la voie d'une meilleure sécurisation des revenus des agriculteurs, grâce à une plus large palette d'instruments, notamment assurantiels ;

Réitère la nécessité d'adapter, en règle générale, le droit de la concurrence aux spécificités agricoles et de renforcer effectivement le poids des producteurs dans la chaîne alimentaire, ce que la réglementation européenne ne permet pas encore suffisamment ;

Demande que la lutte contre les pratiques commerciales déloyales des firmes transnationales et contre les pratiques des « centrales offshore » d'optimisation fiscale du secteur de la distribution, fasse l'objet d'une réglementation européenne ;

Rejette la perspective d'un statu quo de la future PAC en matière de règles de gestion de crise ou d'intervention, au motif que les avancées du « Règlement Omnibus » seraient suffisantes, quitte à envisager le basculement d'une partie du montant des aides découplées vers des mécanismes de gestion des risques, ou la création de nouveaux outils au sein du « premier pilier », ou bien encore l'activation des mécanismes existants du « second pilier » ;

Déplore, dans un contexte général où les outils de régulation des aléas économiques liés aux rendements et au climat font défaut aux agriculteurs, que la réserve de crise du budget européen n'ait jamais été activée depuis 2013, ce qui justifierait que son emploi soit conçu à l'avenir dans un cadre triennal ;

Demande que les mesures de gestion des crises agricoles prises par l'Union européenne reposent sur les mécanismes d'aides volontaires à la réduction de la production, d'autant plus efficaces que tous les États membres respecteront cette discipline collective, sans comportement opportuniste de « passager clandestin » ;

Appelle, d'une façon générale, à aborder les questions relatives à la concurrence et à la gestion des crises sous l'angle du pragmatisme et de l'efficacité, au-delà des seules considérations de principe en faveur des règles du marché ;

Confirme son attachement au soutien des zones défavorisées, ainsi qu'aux enjeux de la préservation de l'emploi et de la diversité des territoires, dans la conception et le fonctionnement de la Politique agricole commune ;

Rappelle l'importance de valoriser les externalités positives de l'agriculture, en particulier pour son potentiel en matière de stockage de carbone, au regard des services rendus, tant à l'égard de la société que de l'environnement, ce qui devrait valoir aux agriculteurs une rémunération mieux conçue et plus simple des biens publics qu'ils produisent ;

Réaffirme l'importance de la recherche et de l'innovation pour l'avenir de l'agriculture européenne, tout en demandant une Politique agricole plus incitative dans ces domaines ;

Réitère son attachement aux principes de réciprocité ainsi qu'à la nécessité d'une concurrence loyale dans les échanges internationaux ;

Confirme son soutien aux démarches de la Commission européenne tendant à assurer, tout à la fois, la promotion internationale de nos produits, la recherche de débouchés à l'exportation et le respect des indications géographiques sur les marchés extérieurs ;

Continue à exiger que la Commission européenne veille au respect de l'égalité des conditions de concurrence sanitaires, environnementales et de production, applicables aux importations des produits agricoles des pays tiers, par rapport aux produits de l'Union européenne ;

Réaffirme que la Commission européenne doit consacrer autant de ressources administratives au suivi des accords commerciaux déjà signés, qu'à l'ouverture de nouvelles négociations commerciales ;

Demande que la Commission européenne soit particulièrement attentive à la préservation des relations commerciales futures entre le Royaume-Uni et l'Union européenne, dans les domaines de l'agriculture et de la pêche ;

S'interroge sur la possibilité de conclure les négociations en cours sur la PAC d'ici au printemps 2019 ;

Invite le Gouvernement à faire valoir cette position dans les négociations au Conseil.

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