N° 312

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000

Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 6 avril 2000.
Enregistré à la Présidence le 7 avril 2000.

PROPOSITION DE LOI

tendant à élargir les modalités d'accès à l'aide juridique,

Présentée

Par MM. Bernard FOURNIER, Pierre ANDRÉ, Jean BERNARD, Jean BIZET, Mme Paulette BRISEPIERRE, MM. Louis de BROISSIA, Robert CALMEJANE, Auguste CAZALET, Charles CECCALDI-RAYNAUD, Xavier DARCOS, Désiré DEBAVELAERE, Jacques DELONG, Charles DESCOURS, Michel DOUBLET, DANIELECKENSPIELLER, Michel ESNEU, Yann GAILLARD, Alain GÉRARD, François GERBAUD, Charles GINÉSY, Francis GIRAUD, Daniel GOULET, Alain GOURNAC, Adrien GOUTEYRON, Georges GRUILLOT, Hubert HAENEL, Roger HUSSON, Roger KAROUTCHI, Christian de la MALÈNE, Lucien LANIER, Gérard LARCHER, Robert LAUFOAULU, Edmond LAURET, Jean-François LE GRAND, Bernard MURAT, Paul NATALI, Mme Nelly OLIN, MM. Paul D'ORNANO, Jacques OUDIN, Jacques PEYRAT, Victor REUX, Yves RISPAT, Jean-Pierre SCHOSTECK, Louis SOUVET, Martial TAUGOURDEAU, Jean-Pierre VIAL, Serge VINÇON et Guy VISSAC,

Sénateurs.

(Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

Justice.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L'article 1 er de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 dispose que " les hommes naissent libres et égaux en droits ". La pleine valeur constitutionnelle de ce texte fondamental de notre République impose que le législateur se montre le garant de cette égalité et s'empare des moyens pour la faire respecter.

L'accès à la justice pour tous est le corollaire de cette égalité. Le Président de la République l'a rappelé à de nombreuses reprises. La faculté de choisir son conseil lorsque le citoyen doit se défendre ou qu'il doit faire valoir ses intérêts est la base même de l'accès au droit, c'en est une des garanties premières.

Les conditions dans lesquelles l'accès aux services d'un défenseur est rempli aujourd'hui, en France, et notamment pour les plus démunis de nos concitoyens, ne sont pas de nature à permettre l'application satisfaisante du principe d'égalité posé par notre Constitution.

L'aide juridictionnelle prévue à l'article 4 de la loi 91-647 du 10 juillet 1991, par ses conditions restrictives, eu égard aux conditions de revenus, ne permet pas un accès au droit qui tende à l'équité.

Il vous a déjà été soumis précédemment une proposition de loi visant à instaurer un taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les prestations juridiques et judiciaires dispensées aux particuliers par les avocats (1). Ce texte visait à réduire la charge financière qui pèse sur les ménages.

Le dispositif qui vous est ici soumis est complémentaire et vous propose d'étendre le bénéfice de l'aide juridictionnelle aux franges les plus fragiles de la population.

Le système actuellement en place prévoit un plafond de ressources mensuelles de 4400 F pour le déclenchement de l'aide juridictionnelle totale et de 6600 F pour celui de l'aide juridictionnelle partielle. Ces montants ne correspondent plus à la réalité des conséquences de l'exclusion sociale. Beaucoup de justiciables n'ont pas les moyens de payer leur conseil : ils renoncent donc à leur action.

En portant à 5500 F le seuil de déclenchement de l'aide juridique totale et à 7500 F celui de l'aide juridictionnelle partielle, le législateur montrera sa préoccupation de coller à la réalité.

Les honoraires d'avocat sont la contrepartie légitime d'une prestation de qualité et spécialisée ; cependant, ils sont parfois encore trop élevés au regard des charges que supportent les ménages les plus fragiles. Ils ne permettent pas à ces familles, le plus souvent, de consacrer même symboliquement une part infime de leur revenu à la défense de leurs intérêts. Or, la défense même de ces intérêts est au rang des droits fondamentaux de la personne humaine.

Il y a donc ici un terrain d'expression de la solidarité nationale, afin de mettre en accord les objectifs que nous imposent notre conception de l'équité et la réalité.

C'est pourquoi il vous est proposé de ramener les plafonds de ressources de déclenchement de l'aide juridictionnelle à des seuils qui permettent de couvrir plus largement les populations défavorisées.

Il vous est par ailleurs également proposé d'insérer l'Allocation adulte handicapé (AAH) au rang des revenus dispensant de la condition de justification de l'insuffisance des ressources pour le calcul de l'aide juridictionnelle. Cette mesure est inspirée par la nécessité, une nouvelle fois, d'exprimer la solidarité de la Nation envers celles et ceux qui, au quotidien, vivent le handicap, du fait d'un accident, ou d'une maladie.

Ces personnes, elles aussi, préfèrent parfois renoncer à faire valoir leurs droits. Elles ont souvent d'autres priorités et consacrent leurs revenus aux besoins fondamentaux. Les dispenser légalement de la quote-part qui pouvait être laissée à leur charge est une mesure de justice sociale.

Tels sont les motifs pour lesquels nous vous demandons d'adopter, Mesdames, Messieurs, la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI

Article 1 er

L'article 4 de la loi n° 91-647 du 13 juillet 1991 relative à l'aide juridique est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, la somme : "4400 F" est remplacée par la somme : "5500 F" et la somme : "6600 F" est remplacée par la somme : "7500 F".

2° Au troisième alinéa, l'année : "1993" est remplacée par l'année : "2001".

3° Au quatrième alinéa, les mots : "ou du revenu minimum d'insertion" sont remplacés par les mots : ", du revenu minimum d'insertion ou de l'allocation adulte handicapé".

Article 2

La perte de recettes pour l'Etat résultant des présentes dispositions est compensée, à due concurrence, par la création de taxes additionnelles aux droits prévus aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page