N°55

SENAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 28 octobre 1997.

PROPOSITION DE LOI

tendant à préciser le mode de calcul de la durée maximale de détention provisoire autorisée par le code de procédure pénale,

PRÉSENTÉE

Par MM. Michel DREYFUS-SCHMIDT, Michel CHARASSE, Guy ALLOUCHE, Robert BADINTER et les membres du groupe socialiste (1) et apparentés (2),

Sénateurs.

(Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

(1) Ce groupe est composé de : MM. Guy AUouche, Bernard Angels, François Autain, Germain Authié, Robert Badinter, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Jean Besson, Pierre Biarnès, Marcel Bony, Jean-Louis Carrère, Robert Castaing, Francis Cavalrèr-Bénezet, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Gilbert Chabroux, Michel Charasse, Marcel Charmant, Michel Charzat, William Chervy, Raymond Courrière, Roland Courtcau, Marcel Debarge, Bertrand Delanoë, Gérard Delfau, Jean-Pierre Demerliat, Mmes Dinah Derycke, Marie-Madeleine Dieulangard, M. Michel Dreyrus-Schmidt, Mme Josette Dunku, MM. Bernard Dussaut, Claude Estier, Léon Fatous, Aubert Garcia, Claude Haut, Roger Hesling, Roland Huguet, Philippe Labeyrie, Serge Lagauche, Guy Lèguevaques, Philippe Madrelle, Jacques Mahéas, Michel Manet, Marc Massion, Pierre Mauroy, Georges Mazars, Jean-Luc Mélenchon, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Jean-Baptiste Motroni, Jean-Marc Pastor, Guy Penne, Daniel Percheron, Jean Peyrafltte, Jean-Claude Peyronnet, Louis Philibert, Bernard Piras, Mmes Danièle Pourtaud, Gisèle Printz, MM. Roger Quilliot, Paul Raoult, René Régnault, Roger Rinchet, Michel Rocard, Gérard Roujas, André Rouvière, Claude Saunier. Michel Sergent, Franck Sérusclat, René-Pierre Signé, Fernand Tardy, André Vézinhet, Marcel Vidai, Henri Weber.

(2) Apparentés : MM. Rodolphe Désiré, Dominique Larifla, Claude Lise.

Procédure pénale.

EXPOSE DES MOTIFS

MESDAMES, MESSIEURS,

Parce qu'elle constitue une atteinte grave à la liberté individuelle et touche une personne présumée innocente, la détention provisoire doit demeurer l'ultime mesure à laquelle peut recourir un juge d'instruction et seulement dans les cas de strictes nécessités.

Afin de conférer à cette décision le caractère véritablement exceptionnel qui doit être le sien dans un Etat de droit, le législateur a fixé les critères du recours à la détention provisoire ainsi que, dans certaines hypothèses, une durée qu'elle ne saurait dépasser.

Cette durée, prévue par l'article 145-1 du code de procédure pénale, varie selon le passé judiciaire de la personne mise en examen et la gravité de la peine encourue. Elle est, prolongations comprises, de:

- six mois lorsque la personne mise en examen n'encourt pas une peine d'emprisonnement supérieure à cinq ans et n'a pas déjà été condamnée pour crime ou délit de droit commun, soit à une peine criminelle, soit à une peine d'emprisonnement sans sursis d'une durée supérieure à un an ;

- un an, lorsque la peine encourue n'excède pas cinq ans d'emprisonnement ;

- deux ans lorsque la peine encourue est inférieure à dix ans d'emprisonnement.

Parmi les critères permettant de placer une personne en détention provisoire figure l'hypothèse dans laquelle celle-ci «se soustrait volontairement aux obligations du contrôle judiciaire » (articles 141-2 et t44 du code de procédure pénale).

*

Or, dans un arrêt en date du 20 décembre 1983, la chambre criminelle de la Cour de cassation a considéré que l'inobservation volontaire des obligations du contrôle judiciaire permettait de décerner mandat de dépôt « quelles que soient la durée de la peine d'emprisonnement encourue et celle de la détention provisoire antérieurement subie », sous réserve que la durée de « réincarcération » n'excède pas la durée maximale prévue par le code de procédure pénale.

Il en résulte qu'une personne qui, en vertu de l'article 145-1, ne saurait être placée en détention provisoire durant plus de six mois, peut néanmoins faire l'objet, au cours de la même instruction, de plusieurs détentions d'une durée allant chacune jusqu'à six mois si elles sont séparées par un contrôle judiciaire auquel l'intéressé se serait volontairement soustrait.

Le cumul des détentions successives peut donc dépasser largement la durée maximale fixée par le législateur, ce qui restreint considérablement la portée de l'article 145-1 et va même à rencontre de l'esprit de cette disposition.

Aussi paraît-il nécessaire de préciser que, lorsque la personne mise en examen fait l'objet de plusieurs ordonnances de placement en détention provisoire, il est tenu compte de la durée des détentions antérieurement subies pour le calcul de la durée maximale fixée par le législateur.

Au surplus, même si cette conséquence peut apparaître quelque peu subsidiaire, une telle précision serait une incitation indirecte à l'accélération des instructions, dont la durée parfois trop longue est souvent dénoncée.

Telles sont les considérations qui ont présidé au dépôt de la proposition de loi dont le texte figure ci-après.

PROPOSITION DE LOI

Article 1 er

Dans le premier alinéa de l'article 141-2 du code de procédure pénale, après les mots : « quelle que soit la durée de la peine d'emprisonnement encourue », sont insérés les mots : « et sous réserve des dispositions de l'article 145-1 ».

Article 2

L'article 145-1 du même code est ainsi modifié :

I. - Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Si, dans une même affaire, la personne fait l'objet de plusieurs ordonnances de placement en détention provisoire, la durée cumulée des détentions ne peut excéder six mois. »

II. - Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Si, dans une même affaire, la personne fait l'objet de plusieurs ordonnances de placement en détention provisoire, la durée cumulée des détentions ne peut excéder un an lorsque la peine encourue est inférieure ou égale à cinq ans d'emprisonnement ou deux ans lorsque la peine encourue est inférieure à dix ans d'emprisonnement. »

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