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N° 365

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 mars 2018

PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

tendant à permettre d' abroger ou de suspendre dans les collectivités de la Guyane et de Mayotte , l' application du droit du sol pour l' obtention de la nationalité ,

PRÉSENTÉE

Par M. Jean Louis MASSON,

Sénateur

(Envoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le régime de la nationalité peut reposer sur le droit du sol ou sur le droit du sang. Dans le premier cas, toute personne née sur le territoire de l'État concerné a vocation à en avoir la nationalité. Dans le second cas, la nationalité se transmet des ascendants aux descendants.

Depuis plus de deux siècles, la France applique le droit du sol. Mais, historiquement, ce choix correspondait à des motivations sans rapport avec les flux actuels d'immigration. À l'origine, les déplacements de personnes s'effectuaient sur de courtes distances, le long des frontières et concernaient des populations homogènes. Le droit du sol avait alors essentiellement pour but d'augmenter le nombre des nationaux relevant de certains impôts et surtout de la conscription militaire.

Aujourd'hui, les flux migratoires sont massifs ; ils concernent des populations hétérogènes sur des distances de plusieurs milliers de kilomètres. On peut donc légitimement se demander si l'application du droit du sol reste pertinente car ces flux sont à l'origine de nombreuses difficultés dans les pays d'accueil.

De plus, le droit du sol joue le rôle d'une pompe aspirante incitant les familles à entrer illégalement sur le territoire national pour y faire naître leurs enfants. Ceux-ci étant alors considérés comme potentiellement français, toute la famille profite ensuite de certaines dispositions relatives au regroupement familial. C'est tout particulièrement le cas en Guyane et à Mayotte car l'État ne parvient pas à y contrôler les frontières.

Selon l'Insee, en 2015, plus d'un adulte sur deux vivant à Mayotte n'y est pas né. Les natifs des Comores y représentent à eux seuls 42 % de la population. Comme l'a reconnu le porte-parole du Gouvernement, Mayotte est la première maternité de France avec « 10 000 naissances par an, dont 70 % issues de parents étrangers, pour être clair venant en quasi-totalité des Comores ».

Manifestement, il est urgent d'enrayer l'explosion des naissances d'enfants de femmes enceintes venues accoucher en toute illégalité à Mayotte ou en Guyane. Il y a là un abus du droit du sol car ces femmes enceintes ne cherchent qu'à créer une situation de fait pour leur enfant, pour elles et pour leur famille.

Il faut avoir le courage de regarder la vérité en face et de prendre les mesures qui s'imposent. C'est d'autant plus vrai que les flux migratoires à Mayotte et en Guyane créent des problèmes considérables. Ces deux départements sont de très loin ceux où l'insécurité et la délinquance sont les plus élevées. Ce sont aussi les deux départements où la population est la plus paupérisée.

La solution consiste donc à supprimer ou au moins à suspendre l'application des dispositions du code civil afférentes au droit du sol pour toutes les personnes nées en Guyane et à Mayotte après 2005. Toutefois, une proposition de loi en ce sens contreviendrait au principe constitutionnel d'égalité devant la loi et d'indivisibilité de la République.

Afin de contourner cet obstacle, il suffit de compléter l'article 73 de la Constitution qui prévoit des dispositions spécifiques aux collectivités d'outre-mer. La présente proposition de loi constitutionnelle tend donc à permettre aux collectivités de la Guyane et de Mayotte d'abroger ou de suspendre l'application du droit du sol pour l'obtention de la nationalité.

PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

Article unique

Après le cinquième alinéa de l'article 73 de la Constitution, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation aux deuxième et quatrième alinéas, les collectivités de Guyane et de Mayotte régies par le présent article peuvent, sans y avoir été habilitées par la loi ou le règlement, abroger ou suspendre ou amender l'application de règles relatives à l'acquisition de la nationalité française par des personnes nées sur leur territoire de parents étrangers. »

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