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N° 508

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2016-2017

Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 avril 2017

PROPOSITION DE LOI

tendant à reconnaître la saliculture comme activité agricole ,

PRÉSENTÉE

Par MM. Bruno RETAILLEAU, André TRILLARD, Pascal ALLIZARD, Gérard BAILLY, Jérôme BIGNON, Jean BIZET, François BONHOMME, François CALVET, Christian CAMBON, Mme Agnès CANAYER, MM. Jean-Pierre CANTEGRIT, Jean-Noël CARDOUX, Mme Caroline CAYEUX, MM. Gérard CÉSAR, Patrick CHAIZE, Daniel CHASSEING, Alain CHATILLON, François COMMEINHES, Pierre CUYPERS, Philippe DALLIER, Serge DASSAULT, Mmes Catherine DEROCHE, Jacky DEROMEDI, Catherine DI FOLCO, M. Éric DOLIGÉ, Mme Marie-Annick DUCHÊNE, M. Alain DUFAUT, Mmes Nicole DURANTON, Dominique ESTROSI SASSONE, MM. Hubert FALCO, Jean-Paul FOURNIER, Mme Joëlle GARRIAUD-MAYLAM, MM. Jacques GENEST, Bruno GILLES, Alain GOURNAC, Daniel GREMILLET, François GROSDIDIER, Jacques GROSPERRIN, Mme Pascale GRUNY, M. Charles GUENÉ, Mme Christiane HUMMEL, M. Benoît HURÉ, Mme Corinne IMBERT, MM. Alain JOYANDET, Roger KAROUTCHI, Mme Élisabeth LAMURE, MM. Robert LAUFOAULU, Daniel LAURENT, Antoine LEFÈVRE, Jacques LEGENDRE, Dominique de LEGGE, Jean-Pierre LELEUX, Jean-Claude LENOIR, Philippe LEROY, Gérard LONGUET, Mme Vivette LOPEZ, MM. Didier MANDELLI, Alain MARC, Patrick MASCLET, Mmes Colette MÉLOT, Marie MERCIER, Brigitte MICOULEAU, Patricia MORHET-RICHAUD, MM. Philippe MOUILLER, Jean-Jacques PANUNZI, Philippe PAUL, Cyril PELLEVAT, François PILLET, Mme Sophie PRIMAS, MM. Henri de RAINCOURT, Michel RAISON, Jean-François RAPIN, Charles REVET, Mme Marie-France de ROSE, MM. René-Paul SAVARY, Alain VASSELLE, Bernard FOURNIER et Christophe PRIOU,

Sénateurs

(Envoyée à la commission des affaires économiques, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L'exploitation du sel marin issu des marais salants est depuis longtemps considérée comme étant une activité agricole au titre de nombreux domaines (foncier, social, fiscal, installation des producteurs, formation, autorité de tutelle du ministère de l'agriculture) et surtout au titre des quatre axes majeurs qui structurent l'activité agricole en France (foncier, exploitation agricole, production, statut professionnel).

Cependant, l'évolution de l'environnement législatif et réglementaire, de plus en plus complexe et restrictif, a abouti au fait que la reconnaissance de la saliculture en tant qu'activité agricole n'est pas explicite. La définition de l'activité agricole à l'article L. 311.1 du code rural et de la pêche maritime, telle que rédigée en 1988, fait obstacle à la reconnaissance de la saliculture comme activité agricole alors que ce même code rural s'applique à cette activité et à ses producteurs. En effet, sont considérés comme activités agricoles au titre de cet article « toutes activités correspondant à la maîtrise et à l'exploitation d'un cycle biologique de caractère végétal ou animal » auxquelles s'ajoutent des dérogations (cultures marines, préparation et entraînement des équidés domestiques...).

Ainsi, il y a dans le code rural et de la pêche maritime une trentaine de thèmes faisant directement référence à l'activité agricole. Les effets de la reconnaissance de la saliculture comme une activité agricole sont donc assez divers et leur application à la saliculture est partielle et incertaine. Parfois, les règles sont appliquées sans demande particulière, parfois elles le sont par dérogation ou de manière détournée, parfois elles ne leur sont pas appliquées. Il reste que, au bout du compte, de très nombreuses dispositions du code rural et de la pêche maritime s'appliquent d'ores et déjà à la saliculture. Mais celles qui ne s'appliquent pas, et qui aideraient les saliculteurs tiennent à ce que la saliculture n'est pas reconnue comme activité agricole par l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime.

C'est donc seulement au fur et à mesure des occasions et des circonstances que les saliculteurs sont ou non concernés par la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (art. L. 112-1), le pouvoir de la société d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) (art. L. 143-1), les actifs agricoles (art. L. 311-2 et L. 374-4), la possibilité de créer un fonds agricole ou un nantissement (art. L. 311-3), les effets juridiques de l'abandon de l'activité agricole (art. L. 321-18), les modes de transmission de l'exploitation (art. L. 321-22), les groupements agricoles d'exploitation en commun (GAEC) (art. L. 323-2), le redressement et la liquidation judiciaire (art. L. 351-8), le règlement amiable (art. L. 351-1), le congé formation (art. L. 353-1), la coopérative agricole européenne (art. L. 524-6-5), tous les articles relatifs au bail rural (art. L. 411-1 et s.), tous ceux qui ont trait aux chambres d'agriculture (art. L. 510-1 et s.), à la Mutualité sociale agricole (MSA) (art. L. 723-1 et s.), au travail salarié (art. L. 711-1), aux revenus professionnels (art. L. 731-19 et s.), le dispositif d'accès des demandeurs d'emplois aux métiers agricoles (ADEMA) permettant à des demandeurs d'emploi d'effectuer des stages en exploitation agricole (art. L. 722-1), etc ., sans oublier les possibilités offertes par les signes de qualité et les mentions valorisantes.

À cet égard, il faut préciser que le dispositif d'accès des demandeurs d'emplois aux métiers agricoles leur a récemment été partiellement refusé par la chambre d'agriculture alors que « Pôle emploi » avait accepté d'assimiler la saliculture à une activité agricole, créant ainsi une incertitude préjudiciable pour les personnes qui souhaitent bénéficier d'une formation professionnelle. Enfin, si la reconnaissance comme « organisation de producteurs » a pu être admise, cette possibilité n'a pas été confirmée en dépit de la demande faite depuis 2013, réitérée en 2016, sans aucune information sur les raisons. Par ailleurs, la dissociation de la saliculture des activités agricoles est clairement apparue comme une « anomalie » lors de la tempête Xynthia et de la demande d'indemnisation au titre des « calamités agricoles ». Le droit d'accéder au régime des calamités agricoles est d'autant plus important pour cette activité fragile en raison de sa situation à la frontière de la terre et de la mer, et d'autant plus dans un contexte de réchauffement climatique.

De telles incertitudes sont très préjudiciables à la prévisibilité de la conduite d'une exploitation et, au-delà, d'une activité. Les saliculteurs ne maîtrisent pas leur statut professionnel faute d'avoir une connaissance complète de leurs droits et obligations, alors que l'activité salicole est liée à la nature, à l'environnement et à la biodiversité spécifique des marais salants.

Pratiquement, dans chaque loi nouvelle qui vise l'agriculture, on trouve quantité de règles pour lesquelles on ne peut pas dire si la saliculture est ou non concernée. Ainsi, par exemple, la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte vise une dizaine de fois les activités agricoles, les terres agricoles, le secteur agricole, l'agriculture, l'enseignement agricole ou la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages qui comporte aussi une dizaine de références à l'agriculture, aux surfaces agricoles, aux activités agricoles, à l'enseignement agricole, aux espaces agricoles, aux pratiques agricoles, à l'aménagement foncier agricole. On pourrait aussi évoquer la centaine d'articles de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt.

En conséquence, puisque les saliculteurs sont assimilés à des agriculteurs, titulaires de baux ruraux, relevant de la mutualité sociale agricole, produisant le sel alimentaire de la plus haute qualité, il est proposé, dans un objectif de simplification, de clarté juridique et de cohérence, de reconnaître leur activité comme agricole, basée sur la conjonction du travail du sol, de la sensibilité au climat et de la saisonnalité des éléments que sont le vent et la mer, de la soumission aux risques naturels. Ils pourront dès lors relever à part entière des dispositifs liés à une telle activité, notamment au titre de l'installation des jeunes, du régime de calamités agricoles, de l'organisation des producteurs ou de la fiscalité foncière.

PROPOSITION DE LOI

Article 1 er

Après la deuxième phrase de l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime, est ajoutée une phrase ainsi rédigée :

« Il en est de même des activités de production de sel issu de l'exploitation des marais salants. »

Article 2

La perte éventuelle de recettes résultant pour l'État de la présente proposition de loi est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

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