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N° 700

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016

Enregistré à la Présidence du Sénat le 20 juin 2016

PROPOSITION DE LOI

relative à l' obligation de reprise par les distributeurs de matériaux , produits et équipements de construction des déchets en résultant,

PRÉSENTÉE

Par M. Didier MANDELLI, Mme Annick BILLON, MM. Claude KERN, Hervé MARSEILLE, Rémy POINTEREAU et Alain VASSELLE,

Sénateurs

(Envoyée à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) confie aux régions le soin d'établir un plan de prévention et de gestion des déchets destiné à organiser leur prise en charge, au vu de l'analyse des infrastructures existantes, des flux de déchets ménagers et professionnels et des besoins en reprise supplémentaires.

La création de ce plan, qui se substitue aux plans existants, répond à la fois à un objectif de simplification administrative et d'efficience dans la planification, en l'établissant à un niveau permettant une approche interdépartementale de la problématique tout en tenant compte des réalités diverses caractérisant nos territoires.

Ce plan est notamment appelé à organiser la reprise des déchets du bâtiment afin de faciliter leur valorisation et de lutter contre les décharges sauvages.

L'analyse des besoins en la matière démontre qu'ils divergent très sensiblement d'un département à un autre et d'un territoire à un autre en fonction de leur caractère urbain, périurbain ou rural. Il est donc essentiel, pour éviter des investissements publics et privés inutiles, que la loi prenne en compte cette diversité de situation, permette d'acclimater l'organisation de la reprise des déchets du bâtiment en conséquence et responsabilise les acteurs de la filière bâtiment.

À cet égard, l'article 93 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, portant le nouvel article L. 541-10-9 du code de l'environnement, confie au distributeur une responsabilité essentielle, celle de s'organiser « en lien avec les pouvoirs publics et les collectivités compétentes, pour reprendre, sur ses sites de distribution ou à proximité de ceux-ci, les déchets issus des mêmes types de matériaux, produits et équipements de construction à destination des professionnels, qu'il vend » .

Si la profession souscrit à cette obligation dans son principe, sa rédaction pose problème dans la mesure où elle ne fait, par son systématisme, aucun lien avec les besoins effectifs en reprise et leur analyse territorialisée dans le cadre des plans régionaux de prévention et de gestions des déchets.

Elle contraint, en outre, les conditions de la reprise en écartant, du fait du critère de proximité fixé uniformément à 10 km par son décret d'application, des solutions innovantes telles que, par exemple, la prise en charge des déchets directement sur le site du chantier ou l'utilisation de déchèteries mobiles.

Enfin, elle fait peser sur le distributeur une responsabilité pénale exorbitante puisque couvrant non seulement la reprise des déchets résultant de son activité mais également de celle de ses concurrents, le distributeur étant tenu de reprendre les déchets résultant des produits qu'il vend, mais également de ceux, du même type, éventuellement vendus par d'autres.

Pour mémoire, la distribution professionnelle au bâtiment compte près de 13 000 points de vente sur le territoire pour un besoin effectif en point de reprise nouveau évalué collectivement par les acteurs de la filière, dans le cadre des travaux du comité stratégique des éco-industries (COSEI), à 500 à 600 à l'échéance de 2020.

La présente proposition de loi propose donc de renforcer la coordination entre l'article L. 541-10-9 du code de l'environnement tel qu'issu de la loi de transition énergétique et la loi NOTRe, et de réécrire en conséquence l'obligation pesant sur le distributeur.

Son article 1 er , tout en maintenant l'obligation pour le distributeur d'organiser la reprise, supprime le critère de proximité figurant à l'article L. 541-10-9 du code de l'environnement pour flexibiliser sa mise en oeuvre et rendre possible des modèles d'organisation de la reprise innovants.

En zone péri-urbaine, où se concentre l'essentiel des unités de la profession, beaucoup de celles-ci ne disposeront pas de la surface nécessaire pour organiser la reprise sur site. Il leur faudra donc trouver une emprise foncière à proximité, en l'absence de solution de reprise préexistante.

Trouver ces emprises est extrêmement difficile. Outre la disponibilité du foncier, l'acceptabilité de son utilisation à des fins de reprise pose également des difficultés récurrentes. Le dialogue avec les collectivités territoriales sera à cet égard essentiel, en termes de localisation de l'infrastructure, requérant de fait une certaine flexibilité dans la distance au point de vente.

Par ailleurs, afin de permettre la mise en place de partenariats avec les entreprises de recyclage, l'article 1 er propose de mettre à la charge du distributeur une obligation « d'organiser la reprise » plutôt qu'une obligation de « s'organiser pour reprendre » les déchets de chantier. Cette rédaction n'est autre que celle retenue par le décret d'application de l'article L. 541-10-9 du code de l'environnement. À la différence de la rédaction initiale, elle permet au distributeur à la fois de mutualiser la reprise et, le cas échéant, d'en confier la prise en charge à une entreprise spécialisée dans la collecte et le recyclage. Elle précise que cette organisation se fait en cohérence avec les plans régionaux de prévention et de gestion des déchets et donc les besoins effectifs localement.

L'article 1 er revoit également le périmètre de cette obligation en le limitant aux seuls déchets résultant des matériaux, produits et équipements de construction vendus par le distributeur, afin de lui permettre de calibrer l'organisation de la reprise en fonction des flux de déchets prévisibles généré par son activité.

Enfin, afin de préserver les PME de la profession, il indique que le décret d'application de cette mesure intègre un critère de surface et de chiffre d'affaires destiné à cibler l'obligation sur les unités générant un flux de déchets suffisant pour justifier la création d'un point de reprise supplémentaire, pour autant que les infrastructures existantes n'y subviennent pas.

L' article 2 organise la mise en cohérence entre l'obligation générale définie à l'article L. 541-10-9 précité et les plans régionaux de prévention et de gestion des déchets.

Il prévoit que les plans régionaux de prévention et de gestion des déchets établissent les conditions de prise en charge des déchets du BTP en lien avec les distributeurs et utilisateurs de matériaux, produits et équipements de construction, ainsi qu'avec les entreprises de collecte et de traitement des déchets en résultant.

L' article 3 engage les régions, afin de faciliter la valorisation des déchets du BTP, à identifier les terrains susceptibles d'être affectés à la création d'installations dédiées à cette activité.

PROPOSITION DE LOI

Article 1 er

L'article L. 541-10-9 du code de l'environnement est ainsi rédigé :

« Art . L. 541-10-9. - En cohérence avec les plan régionaux de prévention et de gestion des déchets définis à l'article L. 541-13 du présent code, tout distributeur de matériaux, produits et équipements de construction organise la reprise des déchets issus des matériaux, produits et équipements de construction qu'il vend.

« Un décret précise les modalités d'application du présent article, notamment la surface et le chiffre d'affaires à partir desquels ces unités de distribution sont concernées par cette disposition. »

Article 2

Le 4° du II de l'article L. 541-13 du code de l'environnement est complété par les mots :

« et les terrains susceptibles d'être affectés à la création de ces installations ; »

Article 3

L'article L. 541-13 du code de l'environnement est complété par un IX ainsi rédigé :

« IX. - Le plan définit, en lien avec les distributeurs et utilisateurs de matériaux, produits et équipements de construction, ainsi que les entreprises de collecte et de traitement, les conditions dans lesquelles est organisée la prise en charge des déchets en résultant. »

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