N° 371

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 1" avril 1998.

PROJET DE LOI

autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Hong Kong,

PRÉSENTÉ

au nom de M. LIONEL JOSPIN,

Premier ministre,

par M. HUBERT VÉDRINE,

Ministre des affaires étrangères.

(Renvoyé à la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

Traités et conventions.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

A l'issue des négociations relatives à une convention d'extradition qui se sont tenues à Paris les 10 et 11 mars 1994, Hong Kong a proposé à la France d'ouvrir également des négociations en vue de la signature d'une convention d'entraide judiciaire en matière pénale.

Afin de préparer une première rencontre, fixée à Paris à compter du 23 octobre 1995, les autorités de Hong Kong ont fait parvenir aux autorités françaises une proposition de texte. De son côté, la France a soumis à leur examen, le texte de la convention signée en la matière avec le Mexique, le 27 janvier 1994.

Le deuxième tour des négociations s'est déroulé à Hong Kong du 8 au 12 avril 1996, à l'issue duquel un document a été paraphé. La convention a été signée le 25 juin 1997, le texte ayant été auparavant soumis au nihil obstat de Pékin.

Hong Kong a souhaité, dans la perspective de la rétrocession du territoire à la Chine le 1 er juillet 1997, conclure un certain nombre de conventions avec des pays à régime démocratique, afin de préserver sa propre expérience de la démocratie.

Cette convention, qui compte vingt-deux articles, a reçu l'aval des autorités de tutelle, le Foreign Office, pour la période antérieure au 1 er juillet 1997, et le ministère chinois des affaires étrangères, pour l'après rétrocession. Inspirée des principes qui sous-tendent la convention européenne en la matière, elle trahit, néanmoins, l'empreinte du droit anglo-saxon, pour certains articles et, pour certaines dispositions, elle reflète le statut spécifique du territoire.

Le champ d'application de la convention fait l'objet de l'article 1er qui vise la volonté des deux Parties de s'accorder l'entraide judiciaire la plus large possible en matière d'enquêtes et de poursuites d'infractions pénales, relevant de la juridiction de la Partie requérante et dans les procédures y afférentes. Le paragraphe 2 qui énumère diverses formes de l'entraide laisse toutefois ouverte la possibilité de recourir à toute autre forme compatible avec la législation de l'Etat requis. Il est souligné, au paragraphe 3, que l'entraide peut être accordée également en matière fiscale. Par contre, l'exécution des décisions d'arrestation et de condamnation ainsi que les infractions militaires qui ne constituent pas des infractions de droit commun sont exclues du domaine de l'entraide.

Aux termes de l'article 2, chaque Partie désigne une autorité centrale, le ministère de la justice, pour la France, l'Attorney Général ou son représentant dûment autorisé, pour Hong Kong. Ces autorités centrales s'adressent les demandes par écrit sauf cas d'urgence pour lesquels la transmission peut être faite par télécopie ou par la voie d'Interpol.

Les deux Parties peuvent aussi s'accorder l'entraide judiciaire en matière pénale sur la base d'autres conventions, arrangements ou pratiques (art. 3).

Les divers cas de refus qui peuvent être opposés à une demande d'entraide font l'objet de l'article 4. Le paragraphe 1 qui vise la protection de la souveraineté, de la sécurité et de l'ordre public de chacune des deux Parties se réfère, en ce qui concerne Hong Kong, à l'Etat responsable des affaires étrangères de Hong Kong, qui est à l'heure actuelle la Chine. Les autres cas de refus sont classiques dans ce type de conventions et se réfèrent aux intérêts essentiels de chaque Partie, au caractère politique de l'infraction, aux considérations de race, religion, nationalité et opinions politiques d'une personne, à la confidentialité et aux restrictions relatives à l'utilisation des pièces communiquées, à l'application de la règle « non bis in idem » et à celle de la double incrimination. Le paragraphe 2 fonde le refus sur le risque, encouru par la personne poursuivie, d'une condamnation à la peine de mort. Le paragraphe 3 permet de différer l'entraide si son exécution est de nature à interférer avec une enquête ou des poursuites en cours dans la Partie requise. Cependant, avant tout refus, la Partie requise doit informer de son intention la Partie requérante et la consulte sur les conditions auxquelles la demande pourrait cependant être exécutée, conditions qui, une fois acceptées, lient la Partie requérante.

L'article 5 détermine les éléments que doit contenir une demande et qui se rapportent aux autorités, aux faits, aux lois applicables, à la confidentialité, aux procédures particulières souhaitées ainsi qu'aux délais. Le caractère confidentiel de la demande doit être préservé, dans toute la mesure du possible, par la Partie requise sauf accord contraire de la Partie requérante. Cet article dispose in fine que les documents qui accompagnent les demandes doivent être traduits dans l'une des langues officielles de la Partie requise, que cette dernière spécifie pour chaque cas.

L'exécution des demandes suit la législation de la Partie requise qui se conforme, dans toute la mesure du possible, aux directives de la Partie requérante. Celle-ci est informée, dans les meilleurs délais, de toute circonstance pouvant entraîner un retard significatif dans l'exécution de la demande ainsi que de toute décision, et de ses motifs, de ne pas exécuter, totalement ou partiellement, la demande d'entraide judiciaire (art. 6).

Les frais d'exécution d'une demande sont supportés par l'Etat requis à l'exception des honoraires d'experts, des frais de traduction et des frais de voyage et de séjour des témoins, experts, personnes détenues transférées et agents assurant l'escorte de ces dernières. Toutefois, les Parties se consultent lorsque l'exécution de la demande doit entraîner des frais de nature extraordinaire (art. 7).

Aux termes de l'article 8, la Partie requise peut, après consultation, requérir, pour les informations ou les éléments de preuve communiqués, la confidentialité ou encore une divulgation et une utilisation sous certaines conditions. La Partie requérante est liée par la règle de la spécialité et ne peut, sauf accord de l'autorité centrale de l'Etat requis, les utiliser à des fins autres que celles stipulées dans la demande.

L'article 9 permet, avec l'autorisation de la Partie requise, aux personnes concernées, à leurs représentants légaux et aux représentants de la Partie requérante d'assister à l'exécution de la demande.

A la demande de la Partie requérante, la Partie requise recueille le témoignage sollicité, qui, pour les besoins de la .convention, comprend également la production de documents, dossiers ou autres pièces. Outre les questions spécifiées par la Partie requérante, la Partie requise peut, de sa propre initiative ou à la demande des personnes qui assistent à l'exécution, poser d'autres questions pertinentes. Le témoin peut refuser de témoigner si la législation de la Partie requise le prévoit. Lorsque le refus est fondé sur la législation de la Partie requérante, le témoignage est cependant recueilli, mais l'invocation du droit de refus est notifiée à la Partie requérante afin que ses autorités compétentes statuent à cet égard (art. 10).

L'article 11, dont les conditions sont inspirées de la convention européenne d'entraide judiciaire du 20 avril 1959, traite de la remise de documents : forme, délais, immunité de la personne à qui un acte de procédure a été remis et qui ne s'y est pas conformée.

Dans les limites prévues par sa législation, la Partie requise transmet des copies de documents accessibles au public et des copies des documents officiels auxquels ses propres autorités compétentes pourraient avoir accès (art. 12).

L'article 13 dispense les documents transmis de la procédure de légalisation ou d'authentification, à moins que la Partie requérante ne le demande expressément ou que sa législation ne l'exige.

L'article 14 traite des conditions de transfèrement d'une personne détenue dans la Partie requise et qui est citée à comparaître en qualité de témoin dans la Partie requérante : consentements, maintien en détention, renvoi dans la Partie requise, remise en liberté.

La Partie requise invite le témoin ou l'expert dont l'importance de la comparution lui a été signalée par la Partie requérante à comparaître et fait connaître la réponse à cette dernière. Dans ce cas, la demande indique le montant approximatif des indemnités à verser (art. 15).

La personne qui consent à comparaître bénéficie d'immunités en application de la règle de la spécialité (art. 16) : elle ne peut être ni poursuivie, ni détenue, ni soumise à aucune restriction de sa liberté individuelle à raison d'une infraction pénale, ni poursuivie dans une affaire civile alors qu'elle ne pourrait pas l'être si elle ne se trouvait pas dans l'Etat requérant, ou à raison de toute autre action ou omission précédant son départ de la Partie requise. Elle ne peut être poursuivie sur le fondement de son témoignage, sauf dans le cas de faux témoignage. Il ne peut lui être demandé de témoigner dans une autre procédure que celle visée par la demande. La personne qui se rend à une citation pour répondre de faits pour lesquels elle fait l'objet de poursuites ne peut être ni poursuivie, ni détenue, ni soumise à aucune restriction de sa liberté individuelle pour des actions ou omissions antérieures à son départ de la Partie requise et non visées par la citation. Toutefois, l'immunité est levée lorsque la personne à laquelle il a été notifié que sa présence n'était plus requise n'a pas quitté le territoire de la Partie requérante dans les trente jours de cette notification ou y est retournée après l'avoir quitté.

L'article 17 dispose que la Partie requise, toujours dans les limites de sa législation, exécute les demandes de perquisition, saisie et remise à la Partie requérante de toute pièce utile. A la demande de la Partie requérante, elle fournit les informations relatives aux résultats de la perquisition ainsi qu'aux lieux, circonstances et conditions de garde des objets saisis.

La Partie requise recherche les produits d'une infraction à la législation de la Partie requérante et informe cette dernière du résultat de ses recherches. La Partie requérante communique, dans la demande, les éléments qui lui donnent à penser que les produits peuvent se trouver dans la juridiction de la Partie requise. Lorsque les produits sont retrouvés, la Partie requise prend toute mesure nécessaire pour empêcher qu'ils ne fassent l'objet de transactions ou qu'ils ne soient transférés ou cédés, en attendant qu'une décision définitive soit prise à leur égard. Les demandes de confiscation de produits d'infractions sont exécutées conformément à la législation de la Partie requise et les produits confisqués sont conservés par cette dernière sauf accord contraire entre les Parties. Pour l'application de la convention, les instruments utilisés en corrélation avec la commission d'une infraction sont considérés comme produits d'infractions (art. 18).

L'article 19 précise que, lorsqu'une infraction peut être poursuivie par les deux Parties, la Partie sur le territoire de laquelle elle a été commise informe l'autre Partie de sa décision éventuelle de ne pas exercer des poursuites. Sur demande, elle fournit alors les informations et les éléments de preuve relatifs à l'infraction.

Chaque Partie communique à l'autre un avis des condamnations à des peines d'emprisonnement concernant, dans le cas de la France, ses ressortissants et, dans le cas de Hong Kong, ses résidents permanents. Les autorités centrales se communiquent ces avis au moins une fois par an (art 20).

L'article 21 prévoit que les différends relatifs à l'interprétation, la mise en oeuvre ou l'application de la convention sont réglés entre autorités centrales et, en dernier recours, par la voie diplomatique.

L'article 22 vise l'entrée en vigueur et la dénonciation.

L'entrée en vigueur interviendra le trentième jour suivant la date de la dernière des notifications relatives à l'accomplissement des procédures requises à cet effet.

La dénonciation, qui peut intervenir à tout moment, prendra effet à la date de réception de sa notification. Les demandes reçues antérieurement à cette date seront traitées conformément à la convention.

Telles sont les principales observations qu'appelle cette convention, qui est soumise au Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution.

PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre des affaires étrangères,

Vu l'article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Hong Kong, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat, sera présenté au Sénat par le ministre des affaires étrangères, qui sera chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.

Article unique

Est autorisée l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Hong Kong, signée à Hong Kong le 25 juin 1997 et dont le texte est annexé à la présente loi.

Fait à Paris, le 1 er avril 1998.

Signé: LIONEL JOSPIN

Par le Premier ministre :

Le ministre des affaires étrangères,

Signé: HUBERT VÉDRINE

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page