Projet de loi d'orientation et de programmation pour la justice

N° 362

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 17 juillet 2002

PROJET DE LOI

d' orientation et de programmation pour la justice ,

(Urgence déclarée)

PRÉSENTÉ

au nom de M. JEAN-PIERRE RAFFARIN,

Premier ministre,

par M. DOMINIQUE PERBEN,

Garde des Sceaux, ministre de la justice.

( Renvoyé à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).

Justice.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L'attente des Français n'a jamais été aussi forte en matière de justice. L'institution judiciaire se doit d'assurer pleinement l'état de droit, c'est-à-dire garantir la sécurité des rapports juridiques entre les citoyens, l'effectivité des décisions rendues et protéger la société et ses membres contre le crime.

La lutte contre la délinquance dépend aussi pour une large part de l'action qui doit être conduite en amont de l'institution judiciaire et particulièrement par les services chargés de la sécurité intérieure, mais aussi par les autres administrations et organismes concourant à la prévention générale ainsi qu'aux diverses politiques publiques, économiques, sociales et culturelles.

Pour autant, la justice ne dispose pas de moyens suffisamment adaptés pour assurer avec une pleine efficacité le traitement des affaires qui lui parviennent : les délais de jugement sont trop longs et provoquent l'incompréhension des citoyens, les procédures restent souvent lourdes et formalistes et parfois inadaptées à la nature des litiges, particulièrement s'agissant des conflits de la vie quotidienne.

En outre, la justice pénale souffre d'un cadre procédural trop complexe et qui, sans apporter des garanties supplémentaires aux citoyens, nuit fortement à l'efficacité et à la célérité de la lutte contre la délinquance. Dans ce contexte, l'absence de réponse pénale appropriée compromet la confiance de nos concitoyens dans l'autorité judiciaire.

Enfin, les victimes restent trop souvent en retrait des procédures judiciaires et leur prise en charge ne répond pas toujours aux exigences de solidarité qu'implique leur situation.

Un plan d'ensemble et d'envergure, ciblé sur les difficultés concrètes, porté par une loi d'orientation et de programmation pluriannuelle est donc indispensable pour répondre aux retards et carences dont souffre l'institution judiciaire.

C'est pourquoi le Président de la République s'est engagé à ce que soit défini et mis en oeuvre un programme sans précédent en faveur de la justice et de la sécurité.

Parallèlement à ces moyens indispensables, il sera mis en oeuvre, en vue de leur meilleure utilisation, une profonde modernisation des modes de gestion administrative et des méthodes de traitement des dossiers.

Ainsi, la loi d'orientation et de programmation pluriannuelle pour la justice constituera la première étape de la réconciliation des Français avec leur justice.

En cohérence avec la loi organique du 1 er août 2001 relative aux finances, la mise en oeuvre de la loi d'orientation et de programmation fera l'objet d'un suivi rigoureux, de manière à pouvoir rendre compte chaque année des résultats obtenus au regard des objectifs annoncés et des moyens alloués.

Mais d'ores et déjà, il est apparu indispensable d'arrêter un certain nombre de mesures fondamentales en matière civile, administrative, pénale - notamment à l'égard des mineurs - et pénitentiaire.

C'est pourquoi la présente loi comporte un second volet consacré à ces réformes. Il concerne l'instauration d'une justice de proximité, l'adaptation du droit pénal des mineurs, la simplification et la plus grande efficacité de la procédure pénale, l'amélioration du fonctionnement et de la sécurité des établissements pénitentiaires, les moyens d'un traitement plus rapide du contentieux administratif et une meilleure prise en charge de victimes.

DISPOSITIONS DE PROGRAMMATION

Le montant global des ressources affectées au ministère de la justice au titre de la loi d'orientation et de programmation s'élève à 3,65 milliards d'euros.

Les orientations retenues et la programmation des moyens correspondants figurent dans un rapport qui est annexé au projet de loi.

Ces orientations sont regroupées autour de quatre axes :

- améliorer l'efficacité de la justice au service des citoyens, et permettre ainsi à la justice de faire face à l'accroissement de ses charges et au développement de ses missions ; rapprocher la justice des justiciables en créant une véritable justice de proximité, réduire les délais de traitement des affaires, en particulier celles relevant de la justice administrative, et enfin développer l'efficacité de l'administration judiciaire, notamment en faisant porter un effort significatif sur son équipement et fonctionnement matériel, et notamment informatique ;

- développer l'effectivité de la réponse pénale. La mise en oeuvre de cet objectif passe par un traitement judiciaire rénové de la réponse pénale, le développement de la capacité de mise à exécution de peines en milieu pénitentiaire et par l'amélioration du fonctionnement des services pénitentiaires ;

- traiter plus efficacement la délinquance des mineurs à la fois en renforçant le dispositif de traitement des mineurs récidivistes ou violents, en développant la prévention de la récidive et en remettant à niveau les services de formation et d'administration de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse ;

- améliorer l'accès des citoyens au droit et à la justice, notamment en renforçant les dispositifs d'aide aux victimes.

L'approbation de ces orientations est prévue à l'article 1 er du projet de loi.

L'article 2 fixe le montant des crédits correspondant à la loi. Il fixe à 3,65 milliards d'euros l'enveloppe totale en dépenses ordinaires et en crédits de paiement et à 1,75 milliard d'euros le montant des autorisations de programme.

L'article précise également que ces crédits s'ajoutent à la reconduction annuelle des moyens d'engagement et de paiement ouverts en 2002, ainsi qu'à l'évolution résultant des variations de l'indice de la fonction publique et du glissement vieillesse-technicité (GVT).

Il fixe à 10 100 le nombre des emplois consacrés à la loi qui ouvre également la possibilité de recruter, sur crédits de vacations, des juges de proximité et des assistants de justice pour un montant en équivalent-temps plein de 580 emplois.

Ces dispositions budgétaires sont complétées par des dispositions, figurant à l'article 3, qui visent à accélérer la réalisation des programmes immobiliers du ministère de la justice.

Cet article prévoit d'abord la possibilité pour l'État de conclure avec des opérateurs privés des marchés à caractère global, portant sur la conception, la construction et l'aménagement des établissements pénitentiaires. En outre, et le cas échéant dans le cadre du même marché, des responsabilités en matière de fonctionnement des établissements pourront être confiées à des opérateurs publics ou privés, à l'exception des fonctions de direction, de greffe et de surveillance.

Enfin, il est prévu d'accélérer la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique au profit des constructions ou extensions d'établissements pénitentiaires.

D'autres dispositions immobilières ont été regroupées dans la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure.

Le dernier article de la partie du projet de loi consacrée à la programmation porte sur les dispositions d'évaluation qui apparaissent indispensables compte tenu de l'importance des moyens mobilisés et de la nécessité de s'assurer de leur bonne utilisation au regard des objectifs de programmation.

L'INSTAURATION D'UNE JUSTICE DE PROXIMITÉ

Bon nombre de petits litiges de la vie quotidienne (en matière de consommation, de conflits de voisinage etc...) ne sont pas soumis à l'institution judiciaire pour des raisons de coût, de démarches jugées trop complexes ou de délais estimés trop importants.

Cette situation engendre une incompréhension et un sentiment d'inadéquation de la réponse sociale et institutionnelle au besoin de justice.

Il s'agit de trouver à ce type de litiges pour lesquels il n'existe pas actuellement de solution adaptée, une réponse simple, rapide et efficace.

C'est pourquoi le projet de loi prévoit d'instituer un juge disposant du temps nécessaire pour privilégier l'écoute des justiciables ainsi que la voie de la conciliation et pour s'impliquer sur le terrain. Dépassant, lorsqu'il le faut, la recherche d'un rapprochement des parties, le juge de proximité sera là également pour trancher sans formalisme les contestations en rendant une décision ayant force exécutoire.

Pour les mêmes raisons d'adéquation de la réponse judiciaire, des petites infractions aux règles de conduite élémentaires de la vie en société, le projet prévoit que ce juge pourra intervenir en matière pénale, afin de juger les contraventions des quatre premières classes commises tant par les majeurs que par les mineurs.

Il ne s'agira pas d'un magistrat de carrière mais d'un juge recruté à titre temporaire qui assurera un certain nombre de vacations. Afin qu'il rende une justice de qualité, il devra disposer d'une compétence juridique solide.

Un projet de loi organique fixera le statut du juge de proximité. Il sera inspiré des règles régissant les magistrats à titre temporaire, mais élargira d'une part le champ du recrutement et assouplira d'autre part la procédure de nomination.

Il est prévu de recruter 3 300 juges de proximité au cours des cinq prochaines années.

I. - Institution, compétence et fonctionnement

La juridiction de proximité est instituée dans le ressort de chaque cour d'appel.

En matière civile, les choix retenus en ce qui concerne la compétence matérielle du juge de proximité comme les modalités procédurales d'examen des affaires portées devant lui répondent au triple objectif de centrer les missions de cette institution sur les petits litiges de la vie quotidienne, de lui confier le traitement de conflits qui aujourd'hui, en raison de leur faible montant ou de leur nature, ne sont pas portés devant un tribunal et d'apporter rapidement une réponse judiciaire au citoyen.

En premier lieu, les compétences du juge de proximité se trouvent limitées, jusqu'à 1 500 €, aux actions personnelles mobilières qui se rapportent à des besoins du requérant, dans sa vie non professionnelle : action en paiement d'une créance, action en exécution d'une obligation de faire, telle qu'une livraison d'un meuble, action en réparation d'un petit préjudice, comme un trouble de voisinage. Le juge de proximité aura à connaître des actions indéterminées mais qui portent sur des obligations dont le montant est inférieur ou égal au seuil de sa compétence. Aujourd'hui, ces actions indéterminées relèvent de la compétence du tribunal de grande instance et les particuliers, qui doivent constituer avocat, sont peu enclins à les exercer lorsque le montant du litige est faible. C'est par exemple le cas des actions en résolution ou en nullité d'une vente dont le montant est inférieur à 1 500 € (voiture affectée de vices cachés dont le prix de vente est inférieur à 1 500 €).

En second lieu, la saisine de cette juridiction est réservée aux seules personnes physiques qui sont au premier chef concernées par ces petits litiges, à l'exclusion des personnes morales, dont les créanciers institutionnels, afin de ne pas détourner le juge de proximité de sa mission première. Les modalités de représentation et d'assistance sont calquées sur celles applicables devant le tribunal d'instance.

En troisième lieu, pour rendre la saisine de cette juridiction simple et garantir une réponse judiciaire rapide, les procédures d'injonction de faire et de payer seront applicables dans les limites de la compétence de cette juridiction. Ces procédures permettent au demandeur d'obtenir dans de très brefs délais une décision de justice, en l'absence de la présence du défendeur, qu'il peut faire exécuter immédiatement si le défendeur ne conteste pas la décision.

En quatrième lieu, ni l'économie de la réforme qui s'attache avant tout à permettre une réponse judiciaire simple et rapide, ni les conditions de recrutement du juge de proximité ne prédestinent celui-ci à trancher des litiges qui poseraient en droit des difficultés sérieuses. Aussi, le juge de proximité pourra renvoyer au juge d'instance, sur demande des parties ou d'office, les affaires qui impliqueront une analyse juridique sur l'application d'une règle de droit ou sur l'interprétation de l'obligation liant les parties.

En matière pénale, le juge de proximité sera compétent pour le jugement de certaines contraventions des cinq premières classes commises par les majeurs et pour le jugement de certaines contraventions des quatre premières classes commises par les mineurs. La liste de ces contraventions sera fixée par décret en Conseil d'Etat.

Le projet lui attribue également compétence pour valider les mesures de composition pénale décidées par le parquet.

Ainsi, une voie nouvelle est créée qui permet au parquet, dans la mesure où il l'estime nécessaire et adapté, de privilégier la rapidité de la réponse pénale.

La juridiction de proximité a vocation à couvrir l'ensemble du territoire. Pour pallier cependant toute difficulté éventuelle de recrutement ou pour répondre aux cas d'absence ou d'empêchement du juge de proximité désigné, il est prévu que le juge d'instance du ressort, dans ces hypothèses, pourra exercer les fonctions du juge de proximité. Des ressorts identiques pour la juridiction de proximité et la juridiction d'instance ainsi qu'une même procédure applicable, assurent au justiciable la garantie d'une continuité du service public de la justice et d'une égalité de traitement.

II. - Organisation

Comme pour toute juridiction, le siège et le ressort seront fixés par décret en Conseil d'État.

Ils s'inspireront des règles en vigueur devant le tribunal d'instance afin de rendre le juge de proximité très accessible.

La juridiction sera composée d'un ou de plusieurs juges de proximité, localisés en fonction des besoins. Elle statuera dans tous les cas à juge unique, d'accès plus aisé et gage d'une plus grande célérité dans le traitement des affaires. Pour assurer une meilleure proximité, le principe d'audiences foraines en tout lieu public approprié est réaffirmé.

La juridiction est pourvue d'un secrétariat-greffe comme toute juridiction et les attributions de celui-ci seront précisées par voie réglementaire. L'article L. 811-1 du code de l'organisation judiciaire qui pose le principe du secrétariat-greffe des juridictions de droit commun est donc complété par la mention des juridictions de proximité.

LA RÉFORME DU DROIT PÉNAL DES MINEURS

L'évolution récente de la délinquance des mineurs, caractérisée par un accroissement du nombre des infractions commises et de leur gravité, est également marquée par trois phénomènes principaux : un rajeunissement des auteurs de ces faits, une particulière désocialisation de certains mineurs qui apparaissent très souvent sans repères éducatifs et une augmentation des mineurs multirécidivistes pour lesquels la réponse pénale apportée apparaît souvent trop tardive. Le présent projet a ainsi pour objet de modifier l'ordonnance n 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante afin de permettre à l'autorité judiciaire d'apporter des réponses adaptées à ces phénomènes nouveaux.

1° Les centres éducatifs fermés

Le projet a pour objectif notamment de répondre à une des insuffisances majeures du système de l'ordonnance du 2 février 1945, qui concerne la prise en charge éducative des mineurs dans un centre éducatif renforcé, avant ou après jugement par la juridiction des mineurs.

En effet, s'agissant notamment des mineurs de 13 à 16 ans placés dans un centre éducatif renforcé avant jugement en matière délictuelle, l'institution judiciaire ne dispose d'aucun moyen de contrainte, lorsque les mineurs ne respectent pas les conditions du placement et qu'ils font échec aux mesures éducatives entreprises, en premier lieu en refusant de résider dans le lieu de placement.

A cette problématique qui peut favoriser le sentiment d'impunité de ces mineurs, le présent projet créé les centres éducatifs fermés prévus à l'article 33 de l'ordonnance du 2 février 1945 qui seront des établissements publics ou des établissements privés habilités dans des conditions prévues par décret en Conseil d'État, dans lesquels les mineurs ne pourront être placés qu'en application d'un contrôle judiciaire avant jugement ou d'un sursis avec mise à l'épreuve après jugement.

Ces centres éducatifs fermés permettront d'assurer notamment à l'égard des mineurs de 13 à 16 ans, mais également de 16 à 18 ans, un suivi éducatif et pédagogique renforcé et adapté à leur personnalité. Placés dans ces centres dans le cadre d'un contrôle judiciaire ou d'un sursis avec mise à l'épreuve, les mineurs seront soumis à des mesures de surveillance et de contrôle. A ce titre, les sorties à l'extérieur du centre, notamment pour l'exercice d'activités de réinsertion devront être autorisées par le chef d'établissement.

Le non-respect par les mineurs des obligations qui leur seront imposées dans ces centres éducatifs fermés pourra entraîner leur placement en détention provisoire ou la mise à exécution de la peine d'emprisonnement.

Une possibilité de réponse graduée et progressive est en conséquence offerte aux juridictions à l'égard de ces mineurs, dont la détention provisoire est désormais possible, mais uniquement en cas d'échec d'un placement intervenant dans le cadre d'un contrôle judiciaire, qui a pu lui même être décidé en raison de l'échec d'un placement simple.

L'article 10-1 rappelle par ailleurs expressément la possibilité déjà existante de prononcer à l'encontre d'un mineur de 16 à 18 ans une mesure de placement sous contrôle judiciaire, notamment dans un centre éducatif fermé.

Enfin, poursuivant l'objectif de clarification déjà recherché par les dispositions précédentes, sont résumées, à droit constant, dans l'article 11 de l'ordonnance du 2 février 1945, les hypothèses dans lesquelles un mineur peut être placé en détention provisoire, en y ajoutant l'hypothèse nouvelle résultant de l'article 10-1, de révocation du contrôle judiciaire prononcée à l'encontre des mineurs de 13 à 16 ans.

2° Le renforcement de la responsabilité pénale des mineurs de 10 à 13 ans

Le projet prévoit de renforcer l'efficacité des réponses apportées aux actes commis par les mineurs les plus jeunes.

Le deuxième alinéa de l'article 2 est modifié afin de prévoir que les mineurs de 10 à 13 ans pourront, outre les mesures éducatives, faire l'objet de sanctions éducatives, dont la liste est fixée dans l'ordonnance du 2 février 1945 par un nouvel article 15-1.

Cet article 15-1 prévoit ainsi que le tribunal pour enfants pourra prononcer à l'encontre des mineurs de 10 à 13 ans, outre la sanction éducative que constitue déjà la mesure d'aide ou de réparation, les sanctions éducatives suivantes : la confiscation de l'objet ayant servi à la commission de l'infraction, l'interdiction de paraître dans certains lieux, l'interdiction de rentrer en relation avec les victimes, et enfin l'obligation d'accomplir un stage de formation civique. Afin d'assurer l'effectivité de ces sanctions éducatives, il est prévu que leur inexécution, dûment portée à la connaissance du juge des enfants par le service chargé de l'exécution, pourra être sanctionnée par une mesure de placement prononcée par le tribunal pour enfants.

Le présent projet procède également à des modifications de coordination dans le code pénal et le code de procédure pénale.

3° La retenue des mineurs de 10 à 13 ans

Le projet tend à renforcer l'efficacité des enquêtes concernant les mineurs de 10 à 13 ans.

Sont ainsi modifiées les dispositions de l'article 4 de l'ordonnance du 2 février 1945 relatives à la retenue judiciaire applicable aux mineurs de 10-13 ans. Il est ainsi prévu que le mineur pourra être retenu lorsque la peine encourue est de cinq ans d'emprisonnement et non plus de sept ans comme c'est le cas actuellement. Par ailleurs, la durée de la retenue est allongée, pouvant être de 12 heures, renouvelables pour une durée de 12 heures, la durée actuelle de la retenue étant de 10 heures, renouvelable pour une durée de 10 heures.

4° La procédure de jugement à délai rapproché

Afin d'apporter une réponse plus rapide aux actes commis par les mineurs multirécidivistes, le présent projet instaure une procédure de jugement à délai rapproché.

Cette procédure nouvelle insérée dans l'ordonnance du 2 février 1945 dans un nouvel article 14-2 a pour objet de permettre au procureur de la République de traduire devant le tribunal pour enfants dans un délai compris entre 10 jours et un mois le mineur de 16 à 18 ans déféré devant lui, pour lequel des investigations suffisantes sur sa personnalité et sur les moyens appropriés à sa rééducation ont déjà été accomplies à l'occasion d'une procédure antérieure. Cette procédure n'est possible que si la peine d'emprisonnement encourue est supérieure ou égale à trois ans en cas de flagrance et à cinq ans dans les autres cas et si des investigations sur les faits ne sont pas nécessaires.

Le juge des enfants doit, par ordonnance motivée à l'issue d'un débat contradictoire, statuer sur les réquisitions du procureur de la République tendant soit au placement sous contrôle judiciaire soit au placement en détention provisoire du mineur jusqu'à l'audience du jugement.

Le tribunal pour enfants, saisi par le procureur de la République peut, s'il estime que l'affaire n'est pas en état d'être jugée, renvoyer à une prochaine audience dans un délai qui ne peut être supérieur à un mois en décidant d'un supplément d'information, le jugement au fond devant être rendu dans un délai d'un mois qui suit le jour de la première comparution du mineur devant le tribunal, lorsqu'il est en détention provisoire. Le tribunal pour enfants peut également, s'il estime que des investigations supplémentaires sont nécessaires, compte tenu de la gravité ou de la complexité de l'affaire, renvoyer le dossier au procureur de la République.

Cette procédure de jugement à délai rapproché est également applicable aux mineurs de 13 à 16 ans à condition que la peine encourue soit d'au moins cinq ans d'emprisonnement, sans qu'elle ne puisse excéder sept ans, le procureur de la République ne pouvant requérir que le placement sous contrôle judiciaire du mineur jusqu'à sa comparution devant le tribunal pour enfants, à une audience qui doit alors se tenir dans un délai de dix jours à deux mois.

5° Le sursis avec mise à l'épreuve

Dans une perspective de renforcement des mesures de suivi postérieurement à une condamnation, il est inséré un article 20-9 dans l'ordonnance du 2 février 1945 afin de prévoir la possibilité, pour la juridiction de jugement qui prononce à l'encontre du mineur de 13 à 18 ans un sursis avec mise à l'épreuve, de combiner cette mesure avec une mesure de placement, notamment dans un centre éducatif fermé ou une mesure de liberté surveillée. La juridiction de jugement peut alors astreindre le condamné à l'obligation de respecter les conditions d'exécution de ces mesures, le non-respect de ces obligations pouvant entraîner la révocation du sursis avec mise à l'épreuve et la mise à exécution de la peine d'emprisonnement. Cette possibilité qui existe déjà en application des dispositions relatives à la mise à l'épreuve est ainsi clairement affirmée dans la loi.

6° L'amélioration des conditions d'incarcération des mineurs

Afin de permettre la création de nouveaux établissements pénitentiaires spécialisés pour l'accueil des mineurs, les articles 11 et 20-2 de l'ordonnance sont modifiés afin de prévoir que l'emprisonnement est subi par les mineurs soit dans un quartier spécial d'une maison d'arrêt ou d'un établissement pénitentiaire, soit dans un établissement pénitentiaire spécialisé pour mineurs.

UNE SIMPLIFICATION ET UNE PLUS GRANDE EFFICACITÉ
DE LA PROCÉDURE PÉNALE

Les réformes successives de la procédure pénale intervenues ces dernières années ont abouti à une complexité croissante des règles applicables qui, dans de nombreux cas, affaiblissent considérablement l'efficacité de la répression.

Il était donc indispensable, sans remettre en cause les principes fondamentaux de notre droit au premier rang desquels figurent la présomption d'innocence et le respect des droits de la défense, de procéder à certaines simplifications.

Les propositions du présent projet concernent ainsi la composition pénale, l'instruction et la détention provisoire, le jugement des délits et la procédure criminelle et la cour d'assises.

1° Dispositions relatives à la composition pénale

Plusieurs modifications sont apportées à l'article 41-2 du code de procédure pénale afin d'étendre le champ d'application et l'efficacité de la composition pénale. Sont ainsi prévus :

- l'extension de cette procédure au délit de recel ;

- l'allongement de quatre à six mois de la mesure de remise du permis de conduire ou de chasser (ce qui renforce la lutte contre l'insécurité routière notamment liée à l'alcool au volant) ;

- la création d'une nouvelle mesure consistant dans l'obligation de suivre un stage ou une formation dans une structure sanitaire, sociale ou professionnelle (mesure qui peut notamment être proposée aux conducteurs alcooliques) ;

- l'inscription des compositions pénales exécutées au bulletin numéro 1 du casier judiciaire de l'intéressé, bulletin qui n'est accessible qu'aux seules autorités judiciaires ; cette inscription, qui est toutefois sans incidence sur l'application des règles sur la récidive, est en effet indispensable pour permettre aux magistrats de connaître les antécédents judiciaires des personnes ayant fait l'objet de cette procédure.

2° Dispositions relatives à l'instruction et à la détention provisoire

a) Dispositions concernant la détention provisoire et le contrôle judiciaire

En matière de détention provisoire, il est apparu nécessaire de renforcer le rôle du procureur de la République. Ce magistrat, qui représente l'intérêt général et la société, doit en effet disposer des instruments juridiques permettant de faire efficacement valoir ses observations devant les magistrats du siège, en vue de la meilleure application de la loi et au regard des considérations liées à la préservation de l'ordre public, même si c'est bien évidemment aux juges qu'il appartient de se prononcer souverainement sur les procédures dont ils sont saisis.

En premier lieu, les conditions de placement en détention provisoire sont unifiées et la cohérence des règles de prolongation est renforcée.

Le Gouvernement propose de fixer à trois ans d'emprisonnement encourus le seuil du placement en détention provisoire en matière correctionnelle. Actuellement, la possibilité de placement en détention provisoire repose sur une distinction entre les délits contre les biens (pour lesquels la peine d'emprisonnement encourue doit être en principe d'au moins cinq ans afin de permettre la détention) et les autres délits (pour lesquels la peine doit être de trois ans d'emprisonnement). Est également supprimée la prise en considération de l'état de réitération introduite par la loi du 4 mars 2002 et inapplicable en raison de sa complexité.

En deuxième lieu, en cas de prolongation de la détention, la limitation du recours au critère du trouble à l'ordre public qui résultait de la loi du 15 juin 2000 est supprimée.

Le rôle du procureur de la République est par ailleurs renforcé lors de la procédure de placement en détention provisoire.

En effet, le juge d'instruction qui ne suit pas les réquisitions du parquet en cas de demande de placement en détention provisoire et qui, par conséquent, ne saisit pas le juge des libertés et de la détention, devra rendre sans délai une ordonnance motivée, contrairement à ce qui est actuellement prévu. Cette ordonnance devra être immédiatement portée à la connaissance du ministère public.

Il est en outre prévu qu'à l'issue des délais butoirs institués par la loi, il sera possible que la chambre de l'instruction prolonge, à deux reprises en matière correctionnelle (pour les délits punis de dix ans d'emprisonnement) et à trois reprises en matière criminelle, la durée de la détention pendant quatre mois lorsque les investigations du juge d'instruction doivent être poursuivies et que la mise en liberté de la personne mise en examen causerait pour la sécurité des personnes et des biens un risque d'une particulière gravité. Cette disposition a ainsi pour conséquence d'éviter, par le seul effet de l'expiration d'un délai insusceptible d'une prolongation pourtant justifiée par la nature de l'affaire, la remise en liberté de délinquants ou de criminels dangereux.

Des modifications importantes concernent également les demandes de mise en liberté.

Il est en premier lieu institué une procédure de « référé-détention ». Cette procédure permettra au procureur de la République d'obtenir du président de la chambre de l'instruction que son appel formé contre une décision de mise en liberté contraire à ses réquisitions présente un caractère suspensif, et empêche ainsi provisoirement la mise en liberté de la personne mise en examen jusqu'à la décision en appel de la chambre de l'instruction. Le caractère suspensif de l'appel du parquet doit naturellement être confirmé, dans les trois jours ouvrables, par le président de la chambre de l'instruction. Ce dispositif renforce ainsi la cohérence de l'appel du ministère public et rétablit un juste équilibre de la procédure pénale, entre les droits de la société et ceux de la défense.

En second lieu, les délais dans lesquels, à l'issue de l'instruction, il doit être statué sur une demande de mise en liberté sont augmentés au fur et à mesure qu'évolue la situation pénale de la personne concernée du fait des condamnations successives prononcées contre elle. Ainsi, une personne condamnée en premier ressort et ayant fait appel pourra voir ses demandes de mise en liberté examinées dans un délai de deux mois, et celle condamnée en appel et ayant formé un pourvoi dans un délai de quatre mois. Actuellement, ces demandes doivent être examinées (y compris par exemple s'il s'agit d'une personne condamnée par une cour d'assises en appel à la réclusion criminelle à perpétuité) dans un délai de vingt jours.

b) Dispositions relatives à l'instruction

Des modifications de nature diverse, qui tendent à simplifier ou à renforcer la cohérence des règles de droit, ont été apportées à l'instruction :

- les dispositions de l'article 177-2 du code de procédure pénale, permettant actuellement au juge d'instruction de prononcer en cas de non-lieu une amende civile contre la partie civile à l'origine d'une constitution de partie civile qu'il juge abusive ou dilatoire, sont étendues au cas où le juge d'instruction rend une ordonnance de refus d'informer. Par ailleurs, cette amende peut être prononcée contre le représentant légal de la personne morale qui s'est constituée partie civile, si la mauvaise foi de ce dernier est établie ;

- le délit consistant pour un témoin convoqué de refuser de déférer à une convocation du juge d'instruction, puni d'une amende de 3 750 €, est étendu au refus de déférer à une convocation d'un officier de police judiciaire agissant sur commission rogatoire ;

- les cas dans lesquels il peut être recouru à la procédure du témoin anonyme sont élargis. Ce dispositif, qui permet de lutter efficacement contre certaines formes de délinquance opérant dans des quartiers d'habitation où les témoins hésitent à déposer, par peur de représailles, sera étendu pour tous les délits punis d'au moins trois ans d'emprisonnement et non plus cinq ans, permettant par exemple d'y recourir pour des faits de dégradations commises en réunion.

La possibilité donnée à l'avocat d'une personne mise en examen d'assister personnellement aux actes d'instruction que le juge d'instruction a accepté de conduire à sa demande (il peut notamment s'agir d'auditions ou d'interrogatoires), est supprimée. Cette possibilité était largement vécue, par les témoins ou les victimes, comme ajoutant encore aux difficultés inhérentes à ces actes ;

3° Dispositions relatives au jugement des délits

Le domaine de la procédure de la comparution immédiate, actuellement possible pour les délits punis d'une peine comprise entre un an et sept ans d'emprisonnement, est étendu aux délits punis d'une peine comprise entre six mois et dix ans d'emprisonnement. Cette modification permet notamment de faire usage de ce mode de poursuites en matière d'infractions à la législation sur les stupéfiants ou de destruction par substances incendiaires, afin de lutter plus efficacement contre la délinquance urbaine. Pour garantir les droits de la défense, le prévenu qui encourt une peine de dix ans d'emprisonnement pourra toutefois demander à bénéficier d'un délai plus long - entre deux et quatre mois - pour préparer sa défense. Par ailleurs, sont rétablis les délais dans lesquels les personnes détenues doivent être jugées en comparution immédiate (deux mois devant le tribunal, quatre mois devant la cour d'appel), délais qui avaient été réduits par la loi du 15 juin 2000 (à un mois et à deux mois), alors que cette réduction n'était nullement justifiée sur le fond - la détention est décidée par une juridiction collégiale - et qu'elle soulevait d'importantes difficultés pratiques d'audiencement.

La compétence du juge unique est étendue aux délits de rébellion et aux délits pour lesquels une peine d'emprisonnement n'est pas encourue. Cette disposition permettra de faciliter la gestion du contentieux correctionnel.

4° Dispositions relatives à la procédure criminelle et à la cour d'assises

La procédure criminelle est simplifiée sur divers points.

L'exigence de signification par huissier des décisions de mise en accusation est remplacée par une exigence de notification, la contradiction existant sur ce point entre plusieurs dispositions du code de procédure pénale ayant donné lieu à des difficultés dans les juridictions lorsqu'une même affaire concerne des accusés soumis à des régimes différents.

Il est précisé que le point de départ du délai d'audiencement devant la cour d'assises des accusés détenus ne court, si la détention n'a été ordonnée que postérieurement à la décision de mise en accusation (par exemple en cas d'arrestation de l'accusé sur mandat d'arrêt), qu'à compter de cette détention, ce qui facilite la préparation des audiences.

Enfin, les délais d'audiencement institués par la loi du 15 juin 2000 pour les accusés ayant fait appel de la décision de la cour d'assises rendue en premier degré sont supprimés, par cohérence avec ce qui existe en matière correctionnelle (qui ne connaît des délais d'audiencement que pour le premier degré de jugement). Il n'est en effet pas justifié de prévoir de tels délais en instance d'appel, alors que l'accusé a déjà été condamné par une cour d'assises composée d'un jury souverain, surtout lorsque ces délais sont plus courts que ceux applicables aux accusés renvoyés devant la cour d'assises par le juge d'instruction, et qui n'ont encore jamais été jugés. En tout état de cause, l'accusé peut, à tout moment, demander sa mise en liberté devant la chambre de l'instruction.

5° Disposition relative à l'application des peines

Le projet de loi simplifie les dispositions relatives à l'application des peines en prévoyant que les mesures d'aménagement de peine juridictionnalisées pourront être décidées sans débat contradictoire lorsque la demande du condamné reçoit l'accord du ministère public, ce qui évitera des débats purement formels qui avaient lieu au détriment des activités d'action publique des magistrats du parquet.

L'AMÉLIORATION DU FONCTIONNEMENT ET DE LA
SÉCURITÉ DES ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES

Les condamnés exécutent leur peine dans des établissements pour peines après avoir fait l'objet d'une décision d'affectation soit du directeur régional des services pénitentiaires, soit du garde des Sceaux à la suite de la constitution d'un dossier d'orientation. La répartition des condamnés dans l'une des trois catégories d'établissements pour peines (centre de détention régional, centre de détention national, maison centrale) s'effectue en fonction du quantum ou du reliquat de la peine prononcée.

Ainsi, les centres de détention régionaux ne peuvent accueillir en vertu de la loi (article 717 du code de procédure pénale) que les condamnés à une ou plusieurs peines d'emprisonnement dont la durée totale n'excède pas cinq ans et les condamnés à une ou plusieurs peines dont la durée totale est inférieure à sept ans, si la durée de l'incarcération restant à subir au moment où leur condamnation ou la dernière de leurs condamnations est devenue définitive, est inférieure à cinq ans.

La loi nouvelle n'instaurera en conséquence que deux catégories d'établissements : les maisons d'arrêt et les établissements pour peines. Ainsi les condamnés seront-ils affectés en fonction de leur profil dans les établissements pour peines, sans que les critères liés au reliquat ou au quantum de la peine ne revêtent de dimension impérative.

Ces nouvelles dispositions, qu'il conviendra de préciser par décret simple, auront un impact sur la sécurité.

Elles permettront en effet d'affecter les condamnés dans des établissements adaptés sur la base de critères liés à leur éventuelle dangerosité et à leur personnalité et non plus sur celui du seul quantum de leur peine qui n'est pas un révélateur en soi de la réelle dangerosité d'un condamné.

Par ailleurs, la suppression des centres de détention régionaux élargira le panel des établissements d'affectation possibles et permettra l'affectation plus rapide de condamnés en attente d'affectation dans des maisons d'arrêt dont le taux moyen de suroccupation rend encore plus difficile pour les personnels de surveillance la maîtrise de la population pénale.

Toujours dans le même objectif de renforcement de la sécurité, plusieurs raisons fondent aujourd'hui la nécessité de rendre inopérante l'utilisation de téléphones portables en établissement pénitentiaire.

La découverte de téléphones portables ou leurs accessoires au sein des établissements pénitentiaires est en augmentation constante depuis plusieurs années.

Il est permis de supposer que les téléphones portables sont utilisés notamment pour préparer des évasions voire au cours de celles-ci.

L'administration pénitentiaire doit donc faire preuve d'une extrême vigilance pour lutter contre l'utilisation et l'entrée en détention de ce type d'appareils. Or, il apparaît que les téléphones portables ne sont plus toujours détectables par les portiques de détection de métaux situés à l'entrée des établissements pénitentiaires. De plus, de nombreux téléphones sont projetés au-dessus des murs d'enceinte.

Faute de dispositions législatives, l'administration pénitentiaire ne peut donc lutter efficacement contre l'utilisation des téléphones portables en détention. Il est donc proposé d'ajouter un alinéa à l'article L. 33-3 du code des postes et télécommunications pour donner une base légale à la possibilité de rendre inopérante par des installations radioélectriques, dans un périmètre défini, l'utilisation de ces téléphones.

Le projet comporte également des dispositions tendant à une meilleure prise en charge des détenus hospitalisés.

La pratique montre que les SMPR (services médico-psychologiques régionaux) mis en place en 1986, permettent des prises en charges ambulatoires psychiatriques de qualité des personnes détenues qui consentent aux soins. Ces prises en charge sont diversifiées et incluent les hospitalisations de jour. Lors de leur création, il a été confié à ces services la possibilité de réaliser, au sein des locaux qui leur sont affectés en détention, des hospitalisations à temps complet. Cependant, il apparaît que les contraintes du contexte carcéral ne permettent pas un accès direct et permanent de l'équipe de soins aux patients la nuit et plus largement invalident toute idée d'hospitalisation psychiatrique à temps complet dans la prison.

Or, les textes actuels ne prévoient que les hospitalisations d'office des personnes détenues dont les troubles mentaux compromettent l'ordre public ou la sûreté des personnes, et ne peuvent de ce fait être maintenues dans un établissement pénitentiaire. Aujourd'hui, les critères de l'hospitalisation à la demande d'un tiers ne sont pas applicables aux personnes détenues.

En outre, actuellement, tant les critères que les modalités de l'hospitalisation des personnes détenues pour troubles mentaux ne figurent que dans des dispositions réglementaires alors que dans le code de la santé publique, les hospitalisations pour troubles mentaux relèvent de la partie législative et notamment les hospitalisations sous contrainte qui portent atteinte à la liberté individuelle et sont donc nécessairement du domaine de la loi.

Le projet de loi comporte en conséquence d'importantes modifications du code de la santé publique. Il est crée un chapitre IV au titre I er du livre II de la troisième partie du code de la santé publique intitulé « Hospitalisation des personnes détenues atteintes de troubles mentaux ».

Le nouvel article L. 3214-1 du code la santé publique vise à exclure la possibilité d'hospitalisation psychiatrique à temps complet au sein d'un établissement pénitentiaire et à prévoir que toutes les hospitalisations psychiatriques à temps complet seront réalisées en milieu hospitalier qui seul offre les normes sanitaires et les méthodes de prises en charge nécessaires.

Il est précisé que ces hospitalisations sont effectuées dans des unités adaptées à recevoir des personnes détenues et donc, spécifiquement aménagées.

L'évolution de l'organisation des soins de santé mentale en France doit, en effet, intégrer la question de l'hospitalisation des personnes détenues. Les services ouverts ne sont pas adaptés à l'hospitalisation des personnes détenues qui nécessitent une surveillance particulière pour prévenir tout risque d'évasion. Certaines unités fermées disposent déjà d'un protocole de soins défini et adapté à la prise en charge de personnes détenues : il s'agit des UMD (unités pour malades difficiles) actuellement au nombre de quatre.

Certaines unités peuvent être spécifiquement aménagées lors de l'accueil de personnes détenues : il s'agit des unités pouvant avoir un fonctionnement partiellement ou temporairement fermé permettant des hospitalisations de proximité et de courte durée. La création d'unités psychiatriques sécurisées spécifiquement aménagées et destinées à recevoir exclusivement des personnes détenues devrait compléter utilement le dispositif. Ces unités pourront recevoir les personnes détenues hospitalisées avec ou sans leur consentement, pour une durée indéterminée, notamment lorsqu'elles ne relèvent pas d'une prise en charge dans une unité pour malades difficiles. La définition plus précise de ce nouveau dispositif, de ses modalités de fonctionnement, et de la garde des personnes détenues, relève du domaine réglementaire.

L'article L. 3214-2 rappelle par ailleurs que les personnes détenues ont les mêmes droits que toute personne hospitalisée sous réserve de certaines restrictions.

Ensuite, l'article L. 3214-3 énonce les critères permettant l'hospitalisation d'une personne détenue en milieu psychiatrique. Il est nécessaire, s'agissant des personnes détenues, de viser toutes les indications d'hospitalisation sous contrainte, c'est-à-dire également les troubles mentaux qui constituent un danger pour la personne elle-même, qui rendent impossible son consentement, alors que son état impose des soins immédiats assortis d'une surveillance constante en milieu hospitalier. Cela permettra de répondre à des situations actuellement insolubles, et qui conduisent à un maintien en détention parfois sans traitement de personnes dont les troubles mentaux graves n'affectent pas la vie en détention. Il s'agit de personnes qui restent dans une attitude de retrait, d'isolement, et dont l'état de santé mentale s'aggrave en milieu pénitentiaire, qui refusent des soins ambulatoires mais qui ne présentent aucun élément de dangerosité pour autrui.

Ces dispositions sont en parfaite cohérence avec le projet de refonte de la loi du 27 juin 1990 qui devrait proposer la fusion des régimes d'hospitalisation sous contrainte (hospitalisations d'office et hospitalisation à la demande d'un tiers) au profit d'un régime fondé en premier sur la nécessité des soins, suivant les recommandations du Conseil de l'Europe.

La loi n 97-1159 du 19 décembre 1997 a consacré le placement sous surveillance électronique comme modalité d'exécution des peines privatives de liberté - le juge de l'application des peines a compétence pour décider d'accorder le bénéfice de cette mesure aux condamnés dont la peine ou le reliquat de peine restant à purger n'excède pas un an ou à titre probatoire à la libération conditionnelle.

En insérant un article 144-2 dans le code de procédure pénale, la loi n 2000-516 du 15 juin 2000 conférait au juge des libertés et de la détention, la faculté de prescrire que la détention provisoire prononcée puisse s'effectuer sous le régime du placement sous surveillance électronique. En raison des difficultés pratiques et de principe rencontrées, cette possibilité est supprimée. En revanche, il est proposé de recourir à cette possibilité dans le cadre d'un contrôle judiciaire.

Il est également prévu que les condamnés faisant l'objet de cette mesure devront répondre aux convocations des autorités de contrôle et le retrait de la mesure pourra intervenir, comme en cas de libération conditionnelle, en cas de mauvaise conduite.

Depuis la publication du décret pris pour l'application de la loi n 97-1159 du 19 décembre 1997, en droit, les autorités judiciaires ont la possibilité de placer des personnes détenues sous surveillance sur l'ensemble du territoire national.

Le projet de loi introduit la possibilité de confier la mise en oeuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance à une personne de droit privée, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État afin de permettre l'accélération et de favoriser la rationalisation du développement du dispositif sur l'ensemble du territoire national.

UN TRAITEMENT PLUS RAPIDE
DE LA JUSTICE ADMINISTRATIVE

La difficulté majeure à laquelle sont confrontés les tribunaux administratifs et, plus encore, les cours administratives d'appel est aujourd'hui celle des délais de jugement. Ceux-ci s'élèvent à 1 an et 9 mois devant les tribunaux administratifs et à 3 ans et 1 mois devant les cours administratives d'appel. Cette situation s'explique principalement par l'augmentation continue du contentieux, représentant plus de 20 % durant les cinq dernières années. Cette tendance, devenue structurelle, va sans aucun doute se poursuivre dans les années qui viennent.

Il est donc indispensable de doter les juridictions administratives des moyens nécessaires à la fois pour résorber le retard actuel et pour faire face à l'afflux prévisible du contentieux. L'objectif visé, à l'issue de la période, est de ramener à un an les délais de jugement devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, comme c'est le cas devant le Conseil d'État.

A cette fin, les effectifs seront augmentés tant en magistrats qu'en fonctionnaires.

Pour accompagner l'augmentation des effectifs, le projet de loi prévoit de proroger pendant 5 ans le régime du recrutement complémentaire dans le corps des magistrats administratifs, institué à titre provisoire par la loi n 80-511 du 7 juillet 1980 ainsi que de pérenniser la possibilité ouverte aux membres de ce corps de continuer à exercer une activité juridictionnelle en surnombre, au-delà de la limite d'âge dans la fonction publique.

Il est également institué un cadre juridique permettant le recrutement d'assistants de justice qui apporteront leur concours aux tâches juridictionnelles, auprès des membres du Conseil d'Etat et des magistrats des cours et tribunaux administratifs à l'instar du dispositif existant déjà dans l'ordre judiciaire.

Ces assistants, qui seront recrutés à titre temporaire, devront répondre à des exigences de qualification.

Le dispositif du projet de loi sera ultérieurement complété par d'autres réformes, relevant pour l'essentiel de la compétence du pouvoir réglementaire. En particulier, une réforme du régime de l'appel visera à lutter contre l'encombrement des cours administratives d'appel.

UNE MEILLEURE PRISE EN CHARGE DES VICTIMES

Malgré les initiatives entreprises notamment au cours de ces dernières années, le sort réservé aux victimes d'infractions reste insatisfaisant.

Au sentiment d'insécurité que génère l'augmentation de la délinquance s'ajoute celui d'être délaissé, voire oublié.

Les victimes plus que jamais ont besoin de la solidarité de l'État.

Un plan d'action en leur faveur sera entrepris au cours des cinq prochaines années. Il dessinera une nouvelle politique en faveur des victimes en les replaçant au centre des préoccupations de l'institution judiciaire.

Ce plan sera décliné autour de plusieurs axes suivants dont deux sont déjà arrêtés dans le projet de loi.

1° Il s'agit d'abord de la simplification et de la généralisation de l'accompagnement juridique de la victime au cours des procédures.

Celle-ci est encore trop souvent astreinte à devoir multiplier les démarches et débourser des fonds pour être indemnisée de son préjudice.

• A cet égard, le projet de loi met fin à cette anomalie choquante qui consiste à réserver à la victime un traitement moins favorable, au cours des procédures, qu'au prévenu.
Il prévoit la possibilité pour la victime de demander la désignation d'un avocat d'office dès sa première audition par les services de police et de gendarmerie lesquels auront l'obligation de l'informer de cette faculté.

Ainsi la victime pourra organiser plus facilement la défense de ses intérêts.

Le fait qu'un avocat d'office puisse être désigné à la victime le plus en amont possible de la procédure est particulièrement important en cas de renvoi du prévenu à bref délai devant la juridiction, ce qui représente 63,5 % des procédures (comparution immédiate, convocation sur procès verbal ou par OPJ).
• Le projet de loi prévoit en second lieu que la victime des infractions les plus graves pourra bénéficier de plein droit de l'aide juridictionnelle, sans condition de ressources.
Il en sera ainsi des crimes suivants : meurtre, atteintes volontaires aggravées à la vie, actes de torture et de barbarie, violences et viols aggravés, actes de terrorisme ayant généré des violences corporelles qualifiées de crime.

Cette mesure permettra ainsi aux victimes les plus fragilisées de bénéficier d'un dispositif existant déjà devant le tribunal des pensions.

2° Le projet de loi propose ensuite, par analogie avec l'enquête ou l'information pour recherche des causes de la mort, que prévoit l'article 74 du code de procédure pénale, d'instituer dans deux nouveaux article 74-1 et 74-2, deux procédures judiciaires d'enquête ou d'information pour recherche des causes d'une disparition suspecte.

Est ainsi comblée une lacune résultant de l'article 26 de la loi du 21 janvier 1995 sur la sécurité qui a réglementé les conditions et les modalités de l'enquête administrative susceptible d'intervenir en cas de disparition d'une personne. En effet, il n'existe aujourd'hui aucune possibilité intermédiaire entre cette enquête administrative - pour laquelle les enquêteurs ne disposent que de peu de moyens juridiques - et le recours à des investigations dans un cadre judiciaire qui suppose l'existence d'indices objectifs de commission d'un crime ou d'un délit.

Par ailleurs, l'article 26 de cette même loi est modifié afin de procéder à l'articulation de l'enquête administrative avec les deux nouvelles procédures judiciaires ainsi créées.

A ces premières mesures s'ajouteront au cours de l'exécution de la loi de programme un volet d'actions tendant à :

- une information plus large et plus rapide de la victime sur ses droits et sur le déroulement de l'ensemble de la procédure en mettant en place des dispositifs de renseignement d'urgence accessibles à tout moment, et en lui communiquant les informations qu'elle pourrait souhaiter sur l'exécution de la peine. Sur ce dernier point, un projet de décret sera prochainement élaboré permettant à la victime d'être renseignée si elle le désire sur le déroulement de la sanction ;

- une indemnisation plus juste et plus transparente en recherchant une plus grande clarification des postes de préjudice, une amélioration du déroulement des expertises et une harmonisation des méthodes d'évaluation des dommages.

Tel est le sens du projet de loi que j'ai l'honneur de soumettre à votre approbation.

PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du garde des Sceaux, ministre de la justice,

Vu l'article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi d'orientation et de programmation pour la justice, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'État, sera présenté au Sénat par le garde des Sceaux, ministre de la justice, qui sera chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.

TITRE I er

DISPOSITIONS DE PROGRAMMATION

Article 1 er

Les orientations et la programmation des moyens de la justice pour les années 2003 à 2007 figurant dans le rapport annexé à la présente loi sont approuvées.

Article 2

Pour la mise en oeuvre de ces orientations, il est prévu d'allouer 3,65 milliards d'euros sur les années 2003 à 2007 au titre des créations d'emplois, des mesures relatives à la situation des personnels, du fonctionnement, des actions d'intervention et des équipements des juridictions de l'ordre judiciaire et de l'ordre administratif ainsi que des services chargés de l'exécution des décisions de justice.

Le montant des autorisations de programme prévues pour l'exécution de cette programmation est fixé à 1 750 millions d'euros en masse.

Les crédits prévus par la présente loi s'ajoutent à la reconduction annuelle des moyens d'engagement et de paiement ouverts en 2002, à l'évolution du point fonction publique et aux effets du glissement-vieillesse technicité sur le coût des rémunérations.

Seront créés sur la période 2003-2007, 10 100 emplois budgétaires permanents.

Par ailleurs, il est prévu le recrutement sur crédits de vacations de juges de proximité et d'assistants de justice pour un équivalent à temps plein de 580 emplois.

Article 3

L'article 2 de la loi n° 87-432 du 22 juin 1987 relative au service public pénitentiaire est ainsi rédigé :

« Art. 2 . - Par dérogation aux dispositions des articles 7 et 18 de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée, l'État peut confier à une personne ou à un groupement de personnes, de droit public ou de droit privé, une mission portant à la fois sur la conception, la construction et l'aménagement d'établissements pénitentiaires.

« L'exécution de cette mission résulte d'un marché passé entre l'État et la personne ou le groupement de personnes selon les procédures prévues par le code des marchés publics. Si le marché est alloti, les offres portant simultanément sur plusieurs lots peuvent faire l'objet d'un jugement global.

« Les marchés passés par l'État pour l'exécution de cette mission ne peuvent comporter de stipulations relevant des conventions mentionnées aux articles L. 34-3-1 et L. 34-7-1 du code du domaine de l'État et à l'article L. 1311-2 du code général des collectivités territoriales .

« Dans les établissements pénitentiaires, les fonctions autres que celles de direction, de greffe et de surveillance peuvent être confiées à des personnes de droit public ou de droit privé habilitées, dans des conditions définies par un décret en Conseil d'État. Ces personnes peuvent être choisies dans le cadre des marchés prévus au deuxième alinéa. »

Article 4

La procédure prévue à l'article L. 15-9 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique pourra être appliquée en vue de la prise de possession immédiate par l'État des terrains bâtis ou non bâtis dont l'acquisition est nécessaire aux opérations de construction ou d'extension d'établissements pénitentiaires réalisées en application de la présente loi.

Les décrets sur avis conforme du Conseil d'État prévus au premier alinéa de l'article L. 15-9 de ce code devront être pris au plus tard le 30 juin 2007.

Article 5

Les dispositions des articles L. 314-1 à L. 314-8 du code de l'urbanisme s'appliquent, le cas échéant, aux opérations de construction ou d'extension d'établissements pénitentiaires réalisées en application de la présente loi.

Article 6

Les dispositions de la présente loi feront l'objet d'une évaluation annuelle par une instance extérieure aux services concernés, permettant de mesurer les résultats obtenus par rapport aux objectifs retenus et de les rapporter aux moyens engagés.

Cette évaluation portera notamment sur :

1° L'instauration de la justice de proximité ;

2° La réduction des délais de traitement des affaires civiles et pénales et la résorption du stock des affaires à juger ;

3° L'efficacité de la réponse pénale à la délinquance et en particulier celle des mineurs ;

4° L'effectivité de la mise à exécution des décisions de justice ;

5° Le développement de l'aide aux victimes ;

6° L'amélioration du fonctionnement et de la sécurité des établissements pénitentiaires.

TITRE II

DISPOSITIONS INSTITUANT UNE JUSTICE DE PROXIMITÉ

Article 7

I. - L'intitulé du livre III du code de l'organisation judiciaire (partie législative) est ainsi rédigé :

« LIVRE III

« LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE, LE TRIBUNAL D'INSTANCE

« ET LA JURIDICTION DE PROXIMITÉ »

II. - Il est inséré, après le titre II du livre III du code de l'organisation judiciaire (partie législative), un titre III ainsi rédigé :

« TITRE III

« LA JURIDICTION DE PROXIMITÉ

« CHAPITRE UNIQUE

« Dispositions générales

« Section 1

« Institution, compétence et fonctionnement

« Art. L. 331-1 . - Il est institué, dans le ressort de chaque cour d'appel, des juridictions de première instance dénommées juridictions de proximité.

« Art. L. 331-2 . - En matière civile, la juridiction de proximité connaît en dernier ressort des affaires personnelles mobilières dont elle est saisie par une personne physique pour les besoins de sa vie non professionnelle, jusqu'à la valeur de 1 500 € ou d'une valeur indéterminée mais qui ont pour origine l'exécution d'une obligation dont le montant n'excède pas 1 500 €.

« Elle connaît aussi des procédures d'injonction de payer ou de faire, dans les limites prévues à l'alinéa précédent.

« Art. L. 331-3 . - En matière civile, la juridiction de proximité statue selon les règles de procédure applicables devant le tribunal d'instance. Elle se prononce après avoir cherché à concilier les parties.

« Les parties peuvent se faire assister et représenter devant elle dans les mêmes conditions que devant le tribunal d'instance.

« Art. L. 331-4 . - Lorsque, en matière civile, le juge de proximité se heurte à une difficulté juridique sérieuse portant sur l'application d'une règle de droit ou sur l'interprétation de l'obligation liant les parties, il peut, à la demande d'une partie ou d'office, après avoir recueilli préalablement l'avis, selon le cas, de l'autre ou des autres parties, renvoyer l'affaire au tribunal d'instance qui statue alors en tant que juridiction de proximité. »

« Art. L. 331-5 . - En matière pénale, les règles concernant la compétence et le fonctionnement de la juridiction de proximité ainsi que celles relatives au ministère public près cette juridiction sont fixées par l'article 706-72 du code de procédure pénale et, en ce qui concerne les mineurs, par l'article 20-1-1 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.

« Section 2

« Organisation

« Art. L. 331-6 . - Le siège et le ressort de la juridiction de proximité sont fixés par décret en Conseil d'État.

« Art. L. 331-7 . - La juridiction de proximité statue à juge unique.

« Art. L. 331-8. - La juridiction de proximité peut tenir des audiences foraines en tout lieu public approprié dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.

« Art. L. 331-9. - En cas d'absence ou d'empêchement du juge de proximité ou lorsque le nombre de juges de proximité se révèle insuffisant, les fonctions de ce juge sont exercées par un juge du tribunal d'instance territorialement compétent, désigné à cet effet par le président du tribunal de grande instance. »

Article 8

A l'article L. 811-1 du code de l'organisation judiciaire, il est ajouté après les mots : « en matière pénale », les mots : « ainsi que des juridictions de proximité  ».

Article 9

Il est ajouté, après le titre XXIII du livre IV du code de procédure pénale, un titre ainsi rédigé :

« TITRE XXIV

« DISPOSITIONS RELATIVES A LA JURIDICTION
DE PROXIMITÉ

« Art. 706-72 . - La juridiction de proximité est compétente pour juger des contraventions de police dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État. Elle statue alors selon la procédure applicable devant le tribunal de police, conformément aux dispositions des articles 521 à 549.

« La juridiction de proximité peut également valider, sur délégation donnée par le président du tribunal de grande instance, les mesures de composition pénale prévues aux articles 41-2 et 41-3.

« Pour le jugement des contraventions mentionnées au premier alinéa et relevant des quatre premières classes, les fonctions du ministère public sont exercées par un officier du ministère public, conformément aux dispositions des articles 45 à 48. »

TITRE III

DISPOSITIONS PORTANT RÉFORME
DU DROIT PÉNAL DES MINEURS


Section 1

Dispositions relatives à la responsabilité pénale des mineurs

Article 10

L'article 122-8 du code pénal est ainsi rédigé :

« Art. 122-8 . - Les mineurs capables de discernement sont pénalement responsables des crimes, délits ou contraventions dont ils ont été reconnus coupables, dans des conditions fixées par une loi particulière qui détermine les mesures de protection, d'assistance, de surveillance et d'éducation dont ils peuvent faire l'objet.

« Cette loi détermine également les sanctions éducatives qui peuvent être prononcées à l'encontre des mineurs de dix à dix-huit ans ainsi que les peines auxquelles peuvent être condamnés les mineurs de treize à dix-huit ans, en tenant compte de l'atténuation de responsabilité dont ils bénéficient en raison de leur âge. »

Article 11

Le deuxième alinéa de l'article 2 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante est remplacé par les dispositions suivantes :

« Ils pourront cependant, lorsque les circonstances et la personnalité des mineurs l'exigent, soit prononcer une sanction éducative à l'encontre des mineurs de dix à dix-huit ans, conformément aux dispositions de l'article 15-1, soit prononcer une peine à l'encontre des mineurs de treize à dix-huit ans en tenant compte de l'atténuation de leur responsabilité pénale, conformément aux dispositions des articles 20-2 à 20-9. »

Article 12

Il est ajouté après l'article 15 de l'ordonnance du 2 février 1945 précitée un article 15-1 ainsi rédigé :

« Art. 15-1. - Le tribunal pour enfants pourra prononcer par décision motivée une ou plusieurs des sanctions éducatives suivantes :

« 1° Confiscation d'un objet détenu ou appartenant au mineur et ayant servi à la commission de l'infraction ou qui en est le produit ;

« 2° Interdiction de paraître, pour une durée qui ne saurait excéder un an, dans le ou les lieux dans lesquels l'infraction a été commise et qui sont désignés par la juridiction, à l'exception des lieux dans lesquels le mineur réside habituellement ;

« 3° Interdiction, pour une durée qui ne saurait excéder un an, de rencontrer ou de recevoir la ou les victimes de l'infraction désignées par la juridiction ou d'entrer en relation avec elles ;

« 4° Mesure d'aide ou de réparation mentionnée à l'article 12-1 ;

« 5° Obligation de suivre un stage de formation civique, d'une durée qui ne peut excéder un mois, ayant pour objet de rappeler au mineur les obligations résultant de la loi et dont les modalités d'application sont fixées par décret en Conseil d'Etat.

« Le tribunal pour enfants désignera le service de la protection judiciaire de la jeunesse chargé de veiller à la bonne exécution de la sanction. Ce service fera rapport au juge des enfants de l'exécution de la sanction éducative.

« En cas de non-respect par le mineur des sanctions éducatives prévues au présent article, le tribunal pour enfants pourra prononcer à son égard une mesure de placement dans l'un des établissements visés à l'article 15. »

Article 13

I. - Au 3° de l'article 768 du code de procédure pénale, les mots : « des articles 8, 15, 16 et 28 » sont remplacés par les mots : « des articles 8, 15, 15-1, 16, 16 bis et 28 ».

II. - Au 1° de l'article 769-2 du code de procédure pénale, les mots : « des articles 8, 15, 16, 16 bis et 28 » sont remplacés par les mots : « des articles 8, 15, 15-1, 16, 16 bis et 28 ».

III. - Au 1° de l'article 775 du code de procédure pénale les mots : « des articles 2, 8, 15, 16, 18 et 28 » sont remplacés par les mots : « des articles 2, 8, 15, 15-1, 16, 16 bis, 18 et 28 ».

Section 2

Dispositions relatives à la rétention des mineurs de dix à treize ans

Article 14

Le premier alinéa du I de l'article 4 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante est ainsi modifié :

I. - Dans la deuxième phrase, les mots : « des indices graves et concordants » sont remplacés par les mots : « des indices graves ou concordants », les mots : « un délit puni d'au moins sept ans d'emprisonnement » sont remplacés par les mots : « un délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement » et les mots : « qui ne saurait excéder dix heures » sont remplacés par les mots : « qui ne saurait excéder douze heures ».

II. - Dans la troisième phrase, les mots : « pour une durée qui ne saurait non plus excéder dix heures » sont remplacés par les mots : « pour une durée qui ne saurait non plus excéder douze heures ».

Section 3

Dispositions relatives au placement des mineurs

dans des centres éducatifs fermés, sous contrôle judiciaire ou en détention provisoire

Article 15

I. - Au troisième alinéa de l'article 8 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, les mots : « de l'article 11 » sont remplacés par les mots : « des articles 10-1 et 11 ».

II. - Après l'article 10 de l'ordonnance précitée, il est inséré un article 10-1 ainsi rédigé :

« Art. 10-1 . - I. - Les mineurs âgés de treize à dix-huit ans peuvent être placés sous contrôle judiciaire dans les conditions prévues par le code de procédure pénale, sous réserve des dispositions du présent article.

« II. - Le contrôle judiciaire est décidé par ordonnance motivée, prise, selon les cas, par le juge des enfants, le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention. Ce magistrat doit notifier oralement au mineur les obligations qui lui sont imposées, en présence de son avocat et de ses représentants légaux ou ceux-ci dûment convoqués ; ce magistrat informe également le mineur qu'en cas de non respect de ces obligations, il pourra être placé en détention provisoire ; ces formalités sont mentionnées par procès-verbal, qui est signé par le magistrat et le mineur. Lorsque cette décision accompagne une mise en liberté, l'avocat du mineur est convoqué par tout moyen et sans délai et les dispositions du deuxième alinéa de l'article 114 du code de procédure pénale ne sont pas applicables.

« Le contrôle judiciaire dont fait l'objet un mineur peut également comprendre une ou plusieurs des obligations suivantes :

« 1° Se soumettre aux mesures de protection, d'assistance, de surveillance et d'éducation confiées à un service de la protection judiciaire de la jeunesse ou à un service habilité, mandaté à cette fin par le magistrat ;

« 2° Respecter les conditions d'un placement dans un centre éducatif de la protection judiciaire de la jeunesse ou relevant d'un service habilité auquel le mineur a été confié par le magistrat en application des dispositions de l'article 10 et notamment dans un centre éducatif fermé prévu à l'article 33.

« Toutefois, les obligations prévues au 2° ne peuvent être ordonnées que pour une durée de six mois et ne peuvent être renouvelées qu'une seule fois pour une durée au plus égale à six mois. Elles font l'objet d'une ordonnance motivée.

« Le responsable des services ou centres désignés en application des 1° et 2° ci-dessus doit faire rapport au juge des enfants ou au juge d'instruction en cas de non-respect par le mineur des obligations qui lui ont été imposées ; copie de ce rapport est adressée au procureur de la République par ce magistrat.

« III. - En matière correctionnelle, les mineurs âgés de moins de seize ans ne peuvent être placés sous contrôle judiciaire que lorsque la peine d'emprisonnement encourue est supérieure ou égale à cinq ans et lorsque le mineur a déjà fait l'objet d'une ou plusieurs mesures de placement prononcées en application des dispositions des articles 8, 10, 15, 16 et 16 bis .

« Le contrôle judiciaire auquel peuvent être astreints en matière correctionnelle les mineurs âgés de moins de seize ans ne peut comporter que l'obligation de respecter les conditions d'un placement, conformément aux dispositions du 2° du II ci-dessus. Le mineur est alors placé dans un centre éducatif fermé prévu à l'article 33.

« Le juge des enfants, le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention statue sur le placement sous contrôle judiciaire en audience de cabinet, après un débat contradictoire au cours duquel ce magistrat entend le ministère public qui développe ses réquisitions prises conformément aux dispositions de l'article 137-2 du code de procédure pénale, puis les observations du mineur ainsi que celles de son avocat. Le magistrat peut, le cas échéant, recueillir au cours de ce débat les déclarations du représentant du service qui suit le mineur. »

Article 16

I. - Le premier alinéa de l'article 11 de l'ordonnance précitée du 2 février 1945 est remplacé par les dispositions suivantes :

« Les mineurs de treize à dix-huit ans mis en examen par le juge d'instruction ou le juge des enfants ne peuvent être placés en détention provisoire par le juge des libertés et de la détention saisi soit par le juge d'instruction, soit par le juge des enfants, conformément aux dispositions des articles 137 à 137-4, 144 et 145 du code de procédure pénale, que dans les cas prévus par le présent article, à la condition que cette mesure soit indispensable ou qu'il soit impossible de prendre toute autre disposition et à la condition que les obligations du contrôle judiciaire prévues par l'article 10-1 soient insuffisantes.

« Les mineurs âgés de seize ans révolus ne peuvent être placés en détention provisoire que dans l'un des cas suivants :

« 1° S'ils encourent une peine criminelle ;

« 2° S'ils encourent une peine correctionnelle d'une durée égale ou supérieure à trois ans ;

« 3° S'ils se sont volontairement soustraits aux obligations d'un contrôle judiciaire prononcé conformément aux dispositions de l'article 10-1.

« Les mineurs âgés de treize ans révolus et de moins de seize ans ne peuvent être placés en détention provisoire que dans l'un des cas suivants :

« 1° S'ils encourent une peine criminelle ;

« 2° S'ils se sont volontairement soustraits aux obligations d'un contrôle judiciaire prononcé conformément aux dispositions du III de l'article 10-1.

« La détention provisoire est effectuée soit dans un quartier spécial de la maison d'arrêt, soit dans un établissement pénitentiaire spécialisé pour mineurs ; les mineurs détenus sont, autant qu'il est possible, soumis à l'isolement de nuit.

« Lorsque les mineurs ayant fait l'objet d'un placement en détention provisoire sont remis en liberté au cours de la procédure, ils font l'objet, dès leur libération, des mesures éducatives ou de liberté surveillée justifiées par leur situation et déterminées par le juge. Lorsque le juge des enfants, le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention estime qu'aucune de ces mesures n'est nécessaire, il statue par décision motivée. »

II. - Après l'article 11-1, il est inséré un article 11-2 ainsi rédigé :

« Art 11-2 . - Lorsqu'à l'égard d'un mineur de treize à seize ans, la détention provisoire est ordonnée à la suite de la révocation d'un contrôle judiciaire prononcé conformément aux dispositions du III de l'article 10-1, la durée de la détention provisoire ne peut excéder quinze jours, renouvelable une fois.

« S'il s'agit d'un délit puni d'au moins dix ans d'emprisonnement, la durée de la détention provisoire ne peut excéder un mois, renouvelable une fois.

« Lorsque interviennent plusieurs révocations du contrôle judiciaire, la durée cumulée de la détention ne peut excéder une durée totale d'un mois dans le cas visé au premier alinéa et de deux mois dans le cas visé au deuxième alinéa. »

Section 4

Dispositions instituant une procédure de jugement à délai rapproché

Article 17

I. - Le deuxième alinéa de l'article 5 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il pourra également saisir le tribunal pour enfants conformément à la procédure de jugement à délai rapproché prévue par l'article 14-2. »

II. - Au troisième alinéa de l'article 12 de l'ordonnance précitée, la référence aux articles 8-2 et 8-3 est remplacée par la référence aux articles 8-2, 8-3 et 14-2.

III. - Il est inséré après l'article 14-1 de la même ordonnance, un article 14-2 ainsi rédigé :

« Art. 14-2. - I. - Les mineurs de 16 à 18 ans qui ont été déférés devant le procureur de la République peuvent être poursuivis devant le tribunal pour enfants selon la procédure de jugement à délai rapproché dans les cas et selon les modalités prévues par le présent article.

« II. - La procédure de jugement à délai rapproché est applicable aux mineurs qui encourent une peine d'emprisonnement supérieure ou égale à trois ans en cas de flagrance, ou supérieure ou égale à cinq ans dans les autres cas. Elle ne peut être engagée que si des investigations sur les faits ne sont pas nécessaires et que si des investigations sur la personnalité du mineur ont été accomplies, le cas échéant, à l'occasion d'une procédure antérieure de moins de dix-huit mois.

« III. - Après avoir versé au dossier de la procédure les éléments de personnalité résultant des investigations mentionnées au II ci-dessus, le procureur de la République vérifie l'identité du mineur qui lui est déféré et lui notifie les faits qui lui sont reprochés en présence de l'avocat de son choix ou d'un avocat désigné par le bâtonnier à la demande du procureur de la République si le mineur ou ses représentants légaux n'ont pas fait le choix d'un avocat. Dès sa désignation, l'avocat peut consulter le dossier et communiquer librement avec le mineur.

« Après avoir recueilli ses observations éventuelles et celles de son avocat, le procureur de la République informe le mineur qu'il est traduit devant le tribunal pour enfants pour y être jugé, à une audience dont il lui notifie la date et l'heure et qui doit avoir lieu dans un délai qui ne peut être inférieur à dix jours ni supérieur à un mois.

« A peine de nullité de la procédure, les formalités mentionnées aux deux alinéas précédents font l'objet d'un procès-verbal dont copie est remise au mineur et qui saisit le tribunal pour enfants.

« IV. - Aussitôt après avoir procédé aux formalités prévues au III ci-dessus, le procureur de la République fait comparaître le mineur devant le juge des enfants afin qu'il soit statué sur ses réquisitions tendant soit au placement sous contrôle judiciaire, soit au placement en détention provisoire du mineur jusqu'à l'audience de jugement.

« Le juge des enfants statue par ordonnance motivée qui doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision, par référence, selon les cas, aux dispositions des articles 137-2 ou 144 du code de procédure pénale. Il statue en audience de cabinet, après un débat contradictoire au cours duquel il entend le procureur de la République, qui développe ses réquisitions, puis les observations du mineur et celles de son avocat. Le juge des enfants peut, le cas échéant, entendre au cours de ce débat les déclarations du représentant du service auquel le mineur a été confié.

« Les représentants légaux du mineur sont avisés de la décision du juge des enfants par tout moyen. L'ordonnance peut faire l'objet d'un appel devant la chambre de l'instruction ; les dispositions des articles 187-1 et 187-2 du code de procédure pénale sont alors applicables.

« Dans tous les cas, lorsque le juge des enfants ne fait pas droit aux réquisitions du procureur de la République, il peut ordonner les mesures prévues aux articles 8 et 10, le cas échéant, jusqu'à la comparution du mineur.

« V. - Le tribunal pour enfants saisi en application du présent article statue conformément aux dispositions de l'article 13, premier alinéa, et de l'article 14.

« Il peut toutefois, d'office ou à la demande des parties, s'il estime que l'affaire n'est pas en état d'être jugée, renvoyer à une prochaine audience dans un délai qui ne peut être supérieur à un mois, en décidant, le cas échéant, de commettre le juge des enfants pour procéder à un supplément d'information ou d'ordonner une des mesures prévues aux articles 8 et 10. Si le mineur est en détention provisoire ou sous contrôle judiciaire, le tribunal statue alors par décision spécialement motivée sur le maintien de la mesure. Lorsque le mineur est en détention provisoire, le jugement au fond doit être rendu dans un délai d'un mois suivant le jour de sa première comparution devant le tribunal. Faute de décision au fond à l'expiration de ce délai, il est mis fin à la détention provisoire.

Le tribunal pour enfants peut également, s'il estime que des investigations supplémentaires sont nécessaires compte tenu de la gravité ou de la complexité de l'affaire, renvoyer le dossier au procureur de la République. Lorsque le mineur est en détention provisoire, le tribunal pour enfants statue au préalable sur le maintien du mineur en détention provisoire jusqu'à sa comparution devant le juge des enfants ou le juge d'instruction. Cette comparution doit avoir lieu le jour même, à défaut de quoi le prévenu est remis en liberté d'office.

« VI. - Les dispositions du présent article sont également applicables aux mineurs de 13 à 16 ans, à condition que la peine encourue soit d'au moins cinq ans d'emprisonnement, sans qu'elle puisse excéder sept ans. Le procureur de la République ne peut alors requérir que le placement sous contrôle judiciaire du mineur jusqu'à sa comparution devant le tribunal pour enfants, conformément aux dispositions du III de l'article 10-1, à une audience qui doit se tenir dans un délai de dix jours à deux mois. »

Section 5

Dispositions relatives au jugement des mineurs
par la juridiction de proximité

Article 18

I. - L'article 1 er de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les mineurs sont également poursuivis devant la juridiction de proximité dans les conditions prévues au dernier alinéa de l'article 21. »

II. - L'article 21 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les contraventions de police des quatre premières classes relevant de l'article 706-72 du code de procédure pénale, le juge de proximité exerce les attributions du tribunal de police dans les conditions prévues au présent article. »

Section 6

Dispositions relatives au sursis avec mise à l'épreuve

Article 19

I. - Il est inséré au quatrième alinéa de l'article 20-2 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, après les mots : « par les mineurs », les mots : « soit dans un quartier spécial d'un établissement pénitentiaire, soit dans un établissement pénitentiaire spécialisé pour mineurs ».

II. - Après l'article 20-8 de l'ordonnance précitée, il est inséré un article 20-9 ainsi rédigé :

« Art. 20-9. - En cas de condamnation d'un mineur de treize à dix-huit ans à une peine d'emprisonnement assortie d'un sursis avec mise à l'épreuve par le tribunal pour enfants ou, s'il s'agit d'un mineur de seize ans révolus, par la cour d'assises des mineurs, le juge des enfants et le tribunal pour enfants dans le ressort duquel le mineur a sa résidence habituelle exercent les attributions dévolues au juge de l'application des peines et au tribunal correctionnel par les articles 739 à 744-1 du code de procédure pénale jusqu'à l'expiration du délai d'épreuve.

« La juridiction de jugement peut, si la personnalité du mineur le justifie, assortir cette peine de l'une des mesures définies aux articles 16, 19 et 27 de la présente ordonnance, ces mesures pouvant être modifiées pendant toute la durée de l'exécution de la peine par le juge des enfants. Elle peut notamment décider de placer le mineur dans un centre éducatif fermé prévu par l'article 33.

« La juridiction de jugement peut alors astreindre le condamné, dans les conditions prévues à l'article 132-43 du code pénal, à l'obligation de respecter les conditions d'exécution des mesures visées à l'alinéa précédent ; le non-respect de cette obligation peut entraîner la révocation du sursis avec mise à l'épreuve et la mise à exécution de la peine d'emprisonnement.

« Le responsable du service qui veille à la bonne exécution de la peine doit faire rapport au procureur de la République ainsi qu'au juge des enfants en cas de non-respect par le mineur des obligations qui lui ont été imposées. »

III. - L'article 744-2 du code de procédure pénale est abrogé.

Section 7

Des centres éducatifs fermés

Article 20

Dans le chapitre V de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, il est inséré, après l'article 32, un article 33 ainsi rédigé :

« Art. 33 . - Les centres éducatifs fermés sont des établissements publics ou des établissements privés habilités dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, dans lesquels les mineurs sont placés en application d'un contrôle judiciaire ou d'un sursis avec mise à l'épreuve. Au sein de ces centres, les mineurs font l'objet des mesures de surveillance et de contrôle permettant d'assurer un suivi éducatif et pédagogique renforcé et adapté à leur personnalité. La violation des obligations auxquelles le mineur est astreint en vertu des mesures qui ont entraîné son placement dans le centre peut entraîner, selon le cas, le placement en détention provisoire ou l'emprisonnement du mineur.

« L'habilitation prévue à l'alinéa précédent ne peut être délivrée qu'aux établissements offrant une éducation et une sécurité adaptées à la mission des centres ainsi que la continuité du service.

« A l'issue du placement en centre éducatif fermé ou en cas de révocation soit du contrôle judiciaire, soit du sursis avec mise à l'épreuve ou en cas de fin de la mise en détention, le juge des enfants prend toute mesure permettant d'assurer la continuité de la prise en charge éducative du mineur en vue de sa réinsertion durable dans la société. »

TITRE IV

DISPOSITIONS TENDANT À SIMPLIFIER
LA PROCÉDURE PÉNALE

ET À ACCROÎTRE SON EFFICACITÉ


CHAPITRE I er

Dispositions relatives à la composition pénale

Article 21

I. - L'article 41-2 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Il est ajouté au premier alinéa, après la référence à l'article 314-6 du code pénal, une référence à l'article 321-1 de ce code ;

2° Au 3°, les mots : « quatre mois » sont remplacés par les mots : « six mois » ;

3° Il est ajouté, après le 4°, un 5° ainsi rédigé :

« 5° Suivre un stage ou une formation dans un service ou organisme sanitaire, social ou professionnel pour une durée qui ne peut excéder trois mois dans un délai qui ne peut être supérieur à dix-huit mois. »

4° Cet article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les compositions pénales exécutées sont inscrites au bulletin du casier judiciaire de l'intéressé qui n'est accessible qu'aux seules autorités judiciaires, dans les conditions prévues à l'article 769. Cette inscription est sans incidence sur l'application des règles sur la récidive. »

II. - Le premier alinéa de l'article 41-3 du même code est complété par les mots : « ainsi que pour les contraventions dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État ».

III. - L'article 768 du même code est complété par un 9° ainsi rédigé :

« Les compositions pénales, dont l'exécution a été constatée par le procureur de la République. »

IV. - L'article 769 du même code est complété par un 6° ainsi rédigé :

« Les mentions relatives à la composition pénale, à l'expiration d'un délai de trois ans à compter du jour où l'exécution de la mesure a été constatée, si la personne n'a pas, pendant ce délai, soit subi de condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle, soit exécuté une nouvelle composition pénale. »

V. - L'article 775 du même code est complété par un 14° ainsi rédigé :

« 14° Les compositions pénales mentionnées à l'article 768. »

CHAPITRE II

Dispositions relatives à la détention provisoire et à l'instruction

Section 1

Dispositions relatives à la détention provisoire

Paragraphe 1

Dispositions renforçant la cohérence des règles relatives aux conditions de placement en détention provisoire ou de prolongation des détentions

Article 22

I. - L'article 137-4 du code de procédure pénale est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. 137-4. - Lorsque, saisi de réquisitions du procureur de la République tendant au placement en détention provisoire, le juge d'instruction estime que cette détention n'est pas justifiée et qu'il décide de ne pas transmettre le dossier de la procédure au juge des libertés et de la détention, il est tenu de statuer sans délai par ordonnance motivée, qui est immédiatement portée à la connaissance du procureur de la République. »

II. - L'article 137-5 du même code est abrogé.

III. - Le quatrième alinéa de l'article 143-1 du code de procédure pénale est supprimé.

IV. - La deuxième phrase du quatrième alinéa de l'article 144 du même code est supprimée.

V. - L'article 145-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« A titre exceptionnel, lorsque les investigations du juge d'instruction doivent être poursuivies et que la mise en liberté de la personne mise en examen causerait pour la sécurité des personnes et des biens un risque d'une particulière gravité, la chambre de l'instruction peut prolonger pour une durée de quatre mois la durée de deux ans prévue au présent article. La chambre de l'instruction, saisie par ordonnance motivée du juge des libertés et de la détention, statue conformément aux dispositions de l'article 207. Cette décision peut être renouvelée une fois sous les mêmes conditions et selon les mêmes modalités. »

VI. - A l'article 145-2 du même code, il est inséré, après le deuxième alinéa, un alinéa ainsi rédigé :

« A titre exceptionnel, lorsque les investigations du juge d'instruction doivent être poursuivies et que la mise en liberté de la personne mise en examen causerait pour la sécurité des personnes et des biens un risque d'une particulière gravité, la chambre de l'instruction peut prolonger pour une durée de quatre mois les durées prévues au présent article. La chambre de l'instruction, saisie par ordonnance motivée du juge des libertés et de la détention, statue conformément aux dispositions de l'article 207. Cette décision peut être renouvelée deux fois sous les mêmes conditions et selon les mêmes modalités. »

Paragraphe 2

Dispositions relatives aux demandes de mise en liberté

et instituant la procédure de référé-détention

Article 23

I. - Il est inséré après l'article 148-1 du code de procédure pénale un article 148-1-A ainsi rédigé :

« Art. 148-1-A. - Si le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention ordonne la mise en liberté de la personne mise en examen alors que le procureur de la République avait pris des réquisitions s'opposant à cette mise en liberté, l'ordonnance est alors immédiatement communiquée au procureur de la République. Ce magistrat la retourne sans délai au juge des libertés et de la détention ou au juge d'instruction s'il n'entend pas s'opposer à la mise en liberté de la personne. Dans le cas contraire, il forme appel sans délai de la décision devant le greffier du juge des libertés et de la détention ou du juge d'instruction, en saisissant le président de la chambre de l'instruction d'un référé-détention dans les conditions prévues par l'article 187-3. Dans ce dernier cas, la personne mise en examen en est avisée en même temps que lui est notifiée l'ordonnance, qui ne peut être mise à exécution, la personne restant détenue tant que n'est pas intervenue la décision du président de la chambre de l'instruction et, lorsqu'il est fait droit aux réquisitions du procureur de la République, celle de la chambre de l'instruction. »

II. - Il est inséré après l'article 187-2 du même code un article 187-3 ainsi rédigé :

« Art. 187-3. - Dans le cas prévu par l'article 148-1-A, en cas d'appel d'une ordonnance de mise en liberté rendue par le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention, le procureur de la République peut, si l'appel est formé sans délai après la notification de l'ordonnance, demander au président de la chambre de l'instruction ou, en cas d'empêchement, au magistrat qui le remplace, de déclarer cet appel suspensif. Cette demande doit, à peine d'irrecevabilité, être formée en même temps que l'appel. Le procureur de la République joint à sa demande les observations écrites justifiant le maintien en détention de la personne. La personne mise en examen ou son avocat peuvent également présenter toutes les observations écrites qu'ils jugent utiles.

« Le président de la chambre de l'instruction ou le magistrat qui le remplace statue au plus tard le troisième jour ouvrable suivant la demande. Pendant cette durée, les effets de l'ordonnance de mise en liberté sont suspendus et la personne reste détenue. A défaut pour le magistrat de statuer dans ce délai, la personne est immédiatement remise en liberté.

« Le président de la chambre de l'instruction ou le magistrat qui le remplace statue au vu des éléments du dossier de la procédure, par une ordonnance motivée qui n'est pas susceptible de recours. A sa demande, l'avocat de la personne mise en examen peut présenter des observations orales devant ce magistrat, lors d'une audience de cabinet dont est avisé le ministère public pour qu'il y prenne, le cas échéant, ses réquisitions.

« Si le président de la chambre de l'instruction ou le magistrat qui le remplace estime, au vu des dispositions de l'article 144, que la personne doit rester détenue jusqu'à ce que la chambre de l'instruction statue sur l'appel du ministère public, il ordonne la suspension des effets de l'ordonnance de mise en liberté jusqu'à cette date.

« Dans le cas contraire, il ordonne la mise en liberté de la personne.

« Les dispositions du dernier alinéa de l'article 187-1 sont applicables à la procédure prévue par le présent article. »

III. - Le deuxième alinéa de l'article 148-2 du même code est remplacé par les dispositions suivantes :

« Lorsque la personne détenue n'a pas encore été jugée en premier ressort, la juridiction saisie statue dans les dix jours ou les vingt jours de la demande, selon qu'elle est du premier ou du second degré. Lorsque la personne a déjà été jugée en premier ressort et qu'elle est en instance d'appel, la juridiction saisie statue dans les deux mois de la demande. Lorsque la personne a déjà été jugée en second ressort et qu'elle a formé un pourvoi en cassation, la juridiction saisie statue dans les quatre mois de la demande.

« Toutefois, lorsqu'au jour de la réception de la demande il n'a pas encore été statué soit sur une précédente demande de mise en liberté ou de mainlevée de contrôle judiciaire, soit sur l'appel d'une précédente décision de refus de mise en liberté ou de mainlevée du contrôle judiciaire, les délais prévus ci-dessus ne commencent à courir qu'à compter de la décision rendue par la juridiction compétente. »

IV. - Au début du deuxième alinéa de l'article 183 du même code, la référence à l'article 145, premier alinéa est remplacée par une référence à l'article 137-3, deuxième alinéa.

V. - Le cinquième alinéa de l'article 199 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Si la personne a déjà comparu devant la chambre de l'instruction moins de quatre mois auparavant, le président de cette juridiction peut, en cas d'appel d'une ordonnance rejetant une demande de mise en liberté, refuser la comparution personnelle de l'intéressé par une décision motivée qui n'est susceptible d'aucun recours. »

Section 2

Dispositions relatives à l'instruction

Article 24

I. - Au premier alinéa de l'article 80-2 du code de procédure pénale, les mots : « un mois » sont remplacés par les mots : « deux mois ».

II. - L'article 82-2 du même code est abrogé et au septième alinéa de l'article 116 du même code, la référence à cet article est supprimée.

III. - L'article 86 du même code est complété par l'alinéa suivant :

« Lorsque le juge d'instruction rend une ordonnance de refus d'informer, il peut faire application des dispositions des articles 177-2 et 177-3 ».

IV. Il est inséré, après l'article 177-2 du même code, un article 177-3 ainsi rédigé :

« Art. 177-3. - Lorsque la partie civile est une personne morale, l'amende civile prévue par l'article 177-3 peut être prononcée contre son représentant légal, si la mauvaise foi de ce dernier est établie. »

V. - Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 706-58 du même code, les mots : « cinq ans » sont remplacés par les mots : « trois ans ».

VI. - Sont insérés à l'article 434-15-1 du code pénal, après les mots : « devant le  juge d'instruction »,  les mots : « ou devant un officier de police judiciaire agissant sur commission rogatoire ».

CHAPITRE III

Dispositions relatives au jugement des délits

Section 1

Dispositions relatives à la procédure de comparution immédiate

Article 25

I. - Au premier alinéa de l'article 395 du code de procédure pénale, les mots : « sans excéder sept ans » sont supprimés.

II. - Au deuxième alinéa de l'article 395 du même code, les mots : « au moins égal à un an sans excéder sept ans » sont remplacés par les mots : « au moins égal à six mois ».

III. - Au troisième alinéa de l'article 396 du même code, les références aux articles 135 et 145-1, quatrième alinéa, sont remplacées par une référence au premier alinéa de l'article 137-3.

IV. - L'article 397-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque la peine encourue est supérieure à sept ans d'emprisonnement, le prévenu, informé de l'étendue de ses droits, peut demander que l'affaire soit renvoyée à une audience qui devra avoir lieu dans un délai qui ne peut être inférieur à deux mois, sans être supérieur à quatre mois. »

V. - L'article 397-3 du même code est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa, les références aux articles 145, alinéa premier et 145-1, quatrième alinéa, sont remplacées par une référence au premier alinéa de l'article 137-3.

2° Le troisième alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :

« Lorsque le prévenu est en détention provisoire, le jugement au fond doit être rendu dans les deux mois qui suivent le jour de sa première comparution devant le tribunal. Faute de décision au fond à l'expiration de ce délai, il est mis fin à la détention provisoire. Le prévenu, s'il n'est pas détenu pour une autre cause, est mis d'office en liberté. »

3° L'article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu'il a été fait application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 397-1, le délai prévu à l'alinéa précédent est porté à quatre mois. »

VI. - Le deuxième alinéa de l'article 397-4 du même code est remplacé par les dispositions suivantes :

« La cour statue dans les quatre mois de l'appel du jugement rendu sur le fond interjeté par le prévenu détenu, faute de quoi celui-ci, s'il n'est pas détenu pour une autre cause, est mis d'office en liberté. »

Section 2

Dispositions étendant la compétence du juge unique

en matière correctionnelle

Article 26

L'article 398-1 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

I. - Il est ajouté au 5°, après la référence à l'article 433-5 du code pénal, une référence aux articles 433-6 à 433-8 (premier alinéa) et 433-10 de ce code.

II. - Après le 7°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les délits pour lesquels une peine d'emprisonnement n'est pas encourue, à l'exception des délits de presse. »

CHAPITRE IV

Dispositions relatives à la procédure criminelle et à la cour d'assises

Article 27

I. - L'article 215 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'arrêt de mise en accusation est notifié à l'accusé conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 183 et il lui en est laissé copie. »

II. - A l'article 215-2 du même code, les mots : « à compter de la date à laquelle la décision de mise en accusation est définitive » sont remplacés par les mots : «  à compter soit de la date à laquelle la décision de mise en accusation est définitive s'il était alors déjà détenu, soit de la date à laquelle il a été ultérieurement placé en détention provisoire ».

III. - L'article 268 du même code est abrogé.

IV. - Le deuxième alinéa de l'article 367 du même code est ainsi modifié :

1° La première phrase est complétée par les mots : « , sans préjudice pour l'accusé de son droit à demander sa mise en liberté conformément aux dispositions des articles 148-1 et 148-2 ».

2° Le reste de l'alinéa est supprimé.

CHAPITRE V

Disposition relative à l'application des peines

Article 28

Il est inséré après le sixième alinéa de l'article 722 du code de procédure pénale un alinéa ainsi rédigé :

« Le juge de l'application des peines peut, avec l'accord du procureur de la République et celui du condamné ou de son avocat, octroyer une des mesures mentionnées à l'alinéa précédent sans procéder à un débat contradictoire. »

TITRE V

DISPOSITIONS RELATIVES À L'AMÉLIORATION DU FONCTIONNEMENT ET DE LA SÉCURITÉ DES ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES

CHAPITRE I ER

Disposition relative aux communications téléphoniques

Article 29

Après le 6° de l'article L. 33-3 du code des postes et télécommunications, il est ajouté un 7° ainsi rédigé :

« 7° Les installations radioélectriques permettant de rendre inopérants dans l'enceinte des établissements pénitentiaires, tant pour l'émission que pour la réception, les téléphones mobiles de tous types. »

CHAPITRE II

Dispositions relatives à l'hospitalisation des personnes détenues

atteintes de troubles mentaux.

Article 30

I. - Il est créé au titre I er du livre II de la troisième partie du code de la santé publique un chapitre IV intitulé : « Hospitalisation des personnes détenues atteintes de troubles mentaux ».

Le chapitre IV devient le chapitre V et les articles L. 3214-1 à L. 3214-4 deviennent les articles L. 3215-1 à 3215-4.

Sont créés dans le nouveau chapitre IV les articles L. 3214-1 à L. 3214-5 ainsi rédigés :

« Art. L. 3214-1 . - Les personnes détenues, lorsqu'elles sont atteintes de troubles mentaux, sont hospitalisées dans des établissements de santé au sein d'unités spécialement aménagées.

« Art. L. 3214-2 . - Les droits des personnes détenues hospitalisées ne peuvent être soumis à des restrictions qu'en relation avec celles imposées par les décisions judiciaires privatives de liberté ou rendues nécessaires par leur qualité de détenu ou leur état de santé.

« Les articles L. 3211-4, L. 3211-6, L. 3211-8, L. 3211-9 et L. 3211-12 du code de la santé publique sont applicables aux détenus hospitalisés en raison de leurs troubles mentaux. Lorsque le juge des libertés et de la détention ordonne en application de l'article L. 3211-12 une sortie immédiate d'une personne détenue hospitalisée sans son consentement, cette sortie est notifiée sans délai à l'établissement pénitentiaire par le procureur de la République, afin que le retour en détention soit organisé dans les conditions prévues par voie réglementaire.

« Lorsqu'un détenu est hospitalisé en application de l'article L. 3214-3, les droits mentionnés à l'article L. 3211-3 du code de la santé publique lui sont applicables. Les relations du détenu avec l'extérieur sont cependant soumises aux mêmes conditions qu'en détention.

« Art. L. 3214-3. - Lorsqu'une personne détenue nécessite des soins immédiats assortis d'une surveillance constante en milieu hospitalier, en raison de troubles mentaux rendant impossible son consentement et constituant un danger pour elle-même ou pour autrui, le préfet de police à Paris ou le représentant de l'Etat du département siège de l'établissement pénitentiaire dans lequel est affecté le détenu prononce par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié, son hospitalisation dans une unité spécialement aménagée d'établissement de santé visée à l'article L. 3214-1 du présent code.

« Le certificat médical ne peut émaner d'un psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil.

« Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l'hospitalisation nécessaire.

« Dans les vingt-quatre heures suivant l'admission, le directeur de l'établissement d'accueil transmet au représentant de l'Etat dans le département ou, à Paris, au préfet de police, ainsi qu'à la commission mentionnée à l'article L. 3222-5, un certificat médical établi par un psychiatre de l'établissement.

« Ces arrêtés sont inscrits sur le registre prévu au troisième alinéa de l'article L. 3213-1.

« Art. L. 3214-4 . - Les dispositions des articles L. 3213-3 et L. 3213-5 sont applicables à la situation des détenus.

« Le renouvellement des arrêtés d'hospitalisation des personnes détenues s'effectue dans les conditions définies à l'article L. 3213-4.

« Art L. 3214-5 . - Les modalités de garde, d'escorte et de transport des détenus hospitalisés en raison de leurs troubles mentaux sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »

II. - Dans l'attente de la prise en charge par les unités hospitalières spécialement aménagées mentionnées à l'article L. 3214-1 du code de la santé publique, l'hospitalisation des personnes détenues atteintes de troubles mentaux continue d'être assurée par un service médico-psychologique régional ou un établissement habilité dans les conditions prévues par les dispositions réglementaires prises sur le fondement des articles L. 6112-1 et L. 6112-9 du même code.

CHAPITRE III

Dispositions relatives au placement sous surveillance électronique

Article 31

I. - L'article 138 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

a) Il est inséré, après le 16°, un alinéa ainsi rédigé :

« L'obligation prévue au 2° peut être exécutée, avec l'accord de l'intéressé recueilli en présence de son avocat, sous le régime du placement sous surveillance électronique, à l'aide du procédé prévu par l'article 723-8. Les articles 723-9 et 723-12 sont applicables, le juge d'instruction exerçant les compétences attribuées au juge de l'application des peines. »

b) Dans le dernier alinéa, il est inséré, après le mot : « judiciaire », les mots : « et au placement sous surveillance électronique ».

II. - L'article 144-2 du même code est abrogé.

III. - Le dernier alinéa de l'article 723-7 du même code est complété par la phrase suivante :

« Le placement sous surveillance électronique emporte également pour le condamné l'obligation de répondre aux convocations de toute autorité publique désignée par le juge de l'application des peines. »

IV. - L'article 723-9 du même code est ainsi modifié :

a) Il est inséré, après le deuxième alinéa, un alinéa ainsi rédigé :

« La mise en oeuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance peut être confiée à une personne de droit privé habilitée dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. »

b) Le troisième alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :

« Dans la limite des périodes fixées dans la décision de placement sous surveillance électronique, les agents de l'administration pénitentiaire chargés du contrôle peuvent se rendre sur le lieu de l'assignation pour demander à rencontrer le condamné. Ils ne peuvent toutefois pénétrer au domicile de la personne chez qui le contrôle est pratiqué sans l'accord de celle-ci. Ces agents font aussitôt rapport au juge de l'application des peines de leurs diligences. »

V. - Au premier alinéa de l'article 723-13 du même code, les mots : « d'inobservation des conditions d'exécution constatée au cours d'un contrôle au lieu d'assignation » sont remplacés par les mots : « d'inobservation des interdictions ou obligations prévues au dernier alinéa de l'article 723-7, d'inconduite notoire, ».

CHAPITRE IV

Disposition relative à la répartition des détenus

Article 32

Les deux premiers alinéas de l'article 717 du code de procédure pénale sont remplacés par les dispositions suivantes :

« Les condamnés purgent leur peine dans un établissement pour peines. »

TITRE VI

DISPOSITIONS RELATIVES A LA JUSTICE ADMINISTRATIVE

Article 33

L'article L. 233-6 du code de justice administrative est ainsi rédigé :

« Art. L. 233-6 . - Jusqu'au 31 décembre 2007, il peut être procédé au recrutement complémentaire de conseillers par voie de concours.

« Le nombre de postes pourvus au titre de recrutement complémentaire ne peut excéder trois fois le nombre de postes offerts chaque année dans le corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel aux élèves sortant de l'Ecole nationale d'administration et aux candidats au tour extérieur.

« Le concours est ouvert :

« 1° Aux fonctionnaires et autres agents publics civils ou militaires appartenant à un corps de la catégorie A ou assimilé et justifiant au 31 décembre de l'année du concours de sept ans de services publics effectifs dont trois ans effectifs dans la catégorie A ;

« 2° Aux magistrats de l'ordre judiciaire ;

« 3° Aux titulaires de l'un des diplômes exigés pour se présenter au premier concours d'entrée à l'École nationale d'administration. »

Article 34

A l'article L. 233-7 du code de justice administrative, les mots : « A titre exceptionnel et jusqu'au 31 décembre 2004 » sont supprimés.

Article 35

Après la section 5 du chapitre III du titre III du livre II du code de justice administrative, il est inséré une section 6 ainsi rédigée :

« Section 6

« Fin de fonctions

« Art. L. 233-9. - Les membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont maintenus en fonctions, sauf demande contraire, jusqu'au 30 juin ou au 31 décembre de l'année en cours selon qu'ils ont atteint la limite d'âge au cours du premier ou du second semestre. »

Article 36

Les articles 1 er , 2 et 5 de la loi n° 80-511 du 7 juillet 1980 relative au recrutement des membres des tribunaux administratifs sont abrogés.

Article 37

Après la section 3 du chapitre II du titre II du livre I er du code de justice administrative, il est inséré une section 4 ainsi rédigée :

« Section 4

« Les assistants de justice

« Art. L. 122-2. - Peuvent être nommées au Conseil d'Etat, en qualité d'assistants de justice, les personnes répondant aux conditions prévues à l'article L. 227-1.

« Ces assistants sont nommés pour une durée de deux ans renouvelable une fois. Ils sont tenus au secret professionnel sous les peines prévues à l'article 226-13 du code pénal.

« Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application du présent article. »

Article 38

Après le chapitre VI du titre II du livre II du code de justice administrative, il est inséré un chapitre VII ainsi rédigé :

« CHAPITRE VII

« Les assistants de justice

« Art. L. 227-1 . - Peuvent être nommés, en qualité d'assistants de justice auprès des membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, les personnes titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation juridique d'une durée au moins égale à quatre années d'études supérieures après le baccalauréat et que leur compétence qualifie particulièrement pour exercer ces fonctions.

« Ces assistants sont nommés pour une durée de deux ans renouvelable une fois. Ils sont tenus au secret professionnel sous les peines prévues à l'article 226-13 du code pénal.

« Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application du présent article. »

TITRE VII

DISPOSITIONS RELATIVES A L'AIDE AUX VICTIMES

Article 39

L'article 53-1 et le troisième alinéa de l'article 75 du code de procédure pénale sont remplacés par les dispositions suivantes :

« Les officiers et les agents de police judiciaire informent par tout moyen les victimes de leur droit :

« 1° D'obtenir réparation du préjudice subi ;

« 2° De se constituer partie civile si l'action publique est mise en mouvement par le parquet ou en citant directement l'auteur des faits devant la juridiction compétente ou en portant plainte devant le doyen des juges d'instruction ;

« 3° D'être alors assistées d'un avocat qu'elles pourront choisir ou qui, à leur demande, sera désigné d'office par le bâtonnier de l'ordre des avocats près la juridiction compétente, les frais étant à la charge des victimes sauf si elles remplissent les conditions d'accès à l'aide juridictionnelle ou si elles bénéficient d'une assurance de protection juridique ;

« 4° D'être aidées par un service relevant d'une ou de plusieurs collectivités publiques ou par une association conventionnée d'aide aux victimes. »

Article 40

Il est inséré après l'article 9-1 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique un article 9-2 ainsi rédigé :

« Art. 9-2 . - La condition de ressources n'est pas exigée des victimes de crimes d'atteintes volontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne prévus et réprimés par les articles 221-1 à 221-5, 222-1 à 222-6, 222-8, 222-10, 222-14 (1° et 2°), 222-24 à 222-26, 421-1 (1°) et 421-3 (1° à 4°) du code pénal, ainsi que de leurs ayants droit pour bénéficier de l'aide juridictionnelle en vue d'exercer l'action civile en réparation des dommages résultant des atteintes à la personne. »

Article 41

I. - Il est inséré, après l'article 74 du code de procédure pénale, un article 74-1 ainsi rédigé:

« Art. 74-1. - Lorsque la disparition d'un mineur ou d'un majeur protégé vient d'intervenir ou d'être constatée, les officiers de police judiciaire, assistés le cas échéant des agents de police judiciaire, peuvent, sur instructions du procureur de la République, procéder aux actes prévus par les articles 56 à 62, aux fins de découvrir la personne disparue. A l'issue d'un délai de huit jours à compter des instructions de ce magistrat, ces investigations peuvent se poursuivre dans les formes de l'enquête préliminaire.

« Le procureur de la République peut également requérir l'ouverture d'une information pour recherche des causes de la disparition.

« Les dispositions du présent article sont également applicables en cas de disparition d'un majeur présentant un caractère inquiétant ou suspect eu égard aux circonstances, à l'âge de l'intéressé ou à son état de santé, notamment parce que cette disparition est subite et inexpliquée. »

II. - Il est inséré, après l'article 80-3 du même code, un article 80-4 ainsi rédigé :

« Art. 80-4. - Pendant le déroulement de l'information pour recherche des causes de la mort ou des causes d'une disparition mentionnée aux articles 74 et 74-1, le juge d'instruction procède conformément aux dispositions du chapitre I er du titre III du livre I er . Les interceptions des correspondances émises par la voie des télécommunications sont effectuées sous son autorité et son contrôle dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 100 et aux articles 100-1 à 100-7. Les interceptions ne peuvent excéder une durée de deux mois renouvelable.

« Les membres de la famille de la personne décédée ou disparue peuvent se constituer partie civile à titre incident. Toutefois, en cas de découverte de la personne disparue, l'adresse de cette dernière et les pièces permettant d'avoir directement ou indirectement connaissance de cette adresse ne peuvent être communiquées à la partie civile qu'avec l'accord de l'intéressé s'il s'agit d'un majeur et qu'avec l'accord du juge d'instruction s'il s'agit d'un mineur ou d'un majeur protégé. »

III. - L'article 26 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité est ainsi modifié :

1° A la fin du premier alinéa, les mots : « à son âge ou à son état de santé » sont remplacés par les mots : « à l'âge de l'intéressé ou à son état de santé, notamment parce que cette disparition est subite et inexpliquée » ;

2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« La disparition déclarée par le conjoint, le concubin, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité, un descendant, un ascendant, un frère, une soeur, un proche, le représentant légal ou l'employeur doit immédiatement faire l'objet d'une enquête par les services de police et de gendarmerie. » ;

3° Le quatrième alinéa est supprimé ;

4° Après le quatrième alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« Les chefs de service de la police nationale ou des unités de la gendarmerie nationale font procéder à toutes recherches et auditions utiles à l'enquête, dont ils font dresser un rapport détaillé ou un procès-verbal si nécessaire.

« Dans le cadre de cette enquête, les chefs de service de la police nationale ou des unités de la gendarmerie nationale peuvent directement requérir des organismes publics ou des établissements privés détenant des fichiers nominatifs, sans que puisse leur être opposée l'obligation au secret, que leur soit communiqué tout renseignement permettant de localiser la personne faisant l'objet des recherches.

« Le procureur de la République est informé de la disparition de la personne, dès la découverte d'indices laissant présumer la commission d'une infraction ou lorsque les dispositions de l'article 74-1 du code de procédure pénale sont susceptibles de recevoir application. » ;

5° Le dernier alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :

« Lorsque le procureur de la République fait application des dispositions de l'article 74-1 du code de procédure pénale, il est mis fin aux recherches administratives prévues par le présent article. »

TITRE VIII

DISPOSITIONS RELATIVES A L'APPLICATION
À L'OUTRE-MER

Article 42

L'article L. 142-5 du code de la route est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. L. 142-5 . - Outre les agents cités à l'article L. 130-4, les fonctionnaires de la police de Mayotte, dans les conditions prévues à l'article 879-1 du code de procédure pénale, ont compétence pour constater par procès-verbal les contraventions prévues par la partie réglementaire du présent code ou par d'autres dispositions réglementaires dans la mesure où elles se rattachent à la sécurité et à la circulation routières. La liste des contraventions que les fonctionnaires de police de Mayotte sont habilités à constater est fixée par décret en Conseil d'État. »

Article 43

I. - Conformément aux dispositions du I de l'article 3 de la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte, les dispositions des titres III et IV, de l'article 29 et des I et II de l'article 41 sont applicables à Mayotte.

II. - Le Gouvernement est autorisé, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution et sous réserve de la compétence de la loi organique, à prendre par ordonnances les mesures de nature législative permettant de :

1° Rendre applicable la présente loi, le cas échéant avec les adaptations nécessaires, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises et de rendre applicables à Mayotte les titres I er et II, les chapitres II à IV du titre V, les articles 38, 39 et 40 et le III de l'article 41 de la présente loi ;

2° Rendre applicables, dans les mêmes collectivités, avec les adaptations nécessaires, les dispositions des articles 20 à 26 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative ;

3° Intégrer, dans la fonction publique de l'État, les agents du territoire de la Polynésie française et de la collectivité départementale de Mayotte affectés dans les services pénitentiaires ;

4° Supprimer le conseil du contentieux administratif des îles Wallis et Futuna et rendre applicables, dans ce territoire, les dispositions législatives du code de justice administrative.

III. - Les projets d'ordonnances sont soumis pour avis :

1° Lorsque leurs dispositions sont relatives à la Polynésie française, à la Nouvelle-Calédonie ou à Mayotte, aux institutions compétentes prévues respectivement par la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, par la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie et par l'article L. 3551-12 du code général des collectivités territoriales ;

2° Lorsque leurs dispositions sont relatives aux îles Wallis et Futuna, à l'assemblée territoriale des îles Wallis et Futuna. L'avis est alors émis dans le délai d'un mois ; ce délai expiré, l'avis est réputé avoir été donné.

Les projets d'ordonnances comportant des dispositions relatives à la Polynésie française sont en outre soumis à l'assemblée de ce territoire.

IV. - Les ordonnances seront prises, au plus tard, le dernier jour du douzième mois suivant la promulgation de la présente loi. Le projet de loi portant ratification de ces ordonnances sera déposé devant le Parlement au plus tard le dernier jour du quinzième mois suivant la promulgation de la présente loi.

TEXTE DU RAPPORT ANNEXE

La loi d'orientation et de programmation a pour objectifs d'améliorer l'efficacité de la justice en renforçant ses moyens, de faciliter l'accès au juge et de développer l'effectivité de la réponse pénale à la délinquance des majeurs comme des mineurs.

Ces objectifs sont fixés par le présent rapport.

I - AMELIORER L'EFFICACITÉ DE LA JUSTICE
AU SERVICE DES CITOYENS

A - Permettre à la justice de faire face à l'accroissement de ses charges et au développement de ses missions.

1 - Réduire les délais de traitement des affaires civiles et pénales

Répondant à une attente essentielle des français, les moyens des juridictions seront développés afin de réduire les délais de jugement et les stocks d'affaires en attente.

L'objectif visé consiste à ramener les délais moyens de traitement des affaires civiles à 12 mois dans les cours d'appel, six mois dans les tribunaux de grande instance et 3 mois dans les tribunaux d'instance. De même, les effectifs des juridictions seront adaptés afin de supprimer les goulets d'étranglement qui affectent la chaîne de traitement des affaires pénales, dont les moyens spécifiques seront désormais précisément identifiés.

Il est parallèlement nécessaire d'accroître de façon significative le nombre d'agents placés, qu'il s'agisse de magistrats, de greffiers en chef ou de greffiers afin de pallier les vacances d'emploi et d'assurer la continuité du service dans l'ensemble des cours et tribunaux.

La création de ces emplois s'accompagnera d'une modernisation de l'organisation et des méthodes de travail des juridictions :

- la politique de contractualisation par objectifs avec les juridictions, initiée avec les contrats de résorption de stocks dans les cours d'appel, sera généralisée ;

- la participation des magistrats de l'ordre judiciaire à des commissions administratives représente une charge lourde, correspondant à environ 130 000 heures de travail par an. Il est ainsi prévu d'engager une démarche de retrait de ces magistrats des commissions à caractère purement administratif ou dans lesquelles l'institution judiciaire n'a pas vocation à figurer, eu égard à ses missions ;

- le magistrat doit se recentrer sur ses tâches juridictionnelles et être entouré d'une équipe. C'est pourquoi les missions des greffiers seront étendues, pour assister véritablement le magistrat dans le cadre de la mise en état des dossiers et des recherches documentaires. Ces greffiers rédigeront également des projets de décisions et de réquisitoires selon les indications des magistrats ;

- par ailleurs, sans porter atteinte au maillage territorial des implantations judiciaires, il est envisagé de mutualiser les ressources humaines et les moyens budgétaires, dans le cadre d'un futur « Tribunal de Première Instance », pour parvenir à une gestion plus cohérente des juridictions de grande instance, d'instance et de proximité.

2 - Maîtriser les politiques publiques appelant l'intervention de l'autorité judiciaire

Phénomène récent, la conduite de politiques publiques par l'institution judiciaire, et notamment par les parquets, s'est fortement développée ces dernières années. Il s'agit là d'une condition essentielle de l'action de la justice et spécialement de la politique d'action publique des parquets liée à ses missions de lutte contre la délinquance.

Qu'elles soient menées par la justice ou en partenariat avec d'autres institutions, le maintien et le développement de ces actions requièrent la création d'emplois de magistrats et de fonctionnaires à défaut desquels, soit elles ne peuvent être pleinement remplies, soit le traitement du contentieux en est affecté.

B - Rapprocher la justice du citoyen et créer une véritable justice de proximité

Afin de répondre au besoin d'une justice plus accessible, plus simple et capable de résoudre plus efficacement les litiges de la vie quotidienne en matière tant civile que pénale, il est prévu de créer une nouvelle juridiction de proximité.

Il ne s'agira pas de juges de carrière, mais de personnes disposant d'une compétence et d'une expérience professionnelle les qualifiant tout particulièrement pour exercer des fonctions judiciaires.

La juridiction d'instance verra ses compétences élargies.

La généralisation des guichets uniques de greffe améliorera l'accueil personnalisé du justiciable en lui offrant un seul point d'entrée commun à plusieurs juridictions.

Par ailleurs, les courriers et requêtes des justiciables, appelant l'attention du garde des Sceaux sur les problèmes de fonctionnement des juridictions méritent une attention particulière ainsi qu'un traitement rapide, cohérent et adapté. La création à la Chancellerie d'un service centralisé traitant l'ensemble des requêtes des particuliers aura pour effet d'apporter une réponse précise aux requérants dans les meilleurs délais. Elle permettra également de définir les actions générales à engager pour améliorer le fonctionnement de la justice sur la base de l'analyse des problèmes rencontrés et des dysfonctionnements éventuels.

C - Renforcer la justice administrative dans le sens de la célérité

L'augmentation continue du contentieux devant les juridictions administratives (plus de 20 % durant les cinq dernières années) engendre des délais de jugement trop longs : 1 an et 9 mois devant les tribunaux administratifs et 3 ans et 1 mois devant les cours d'appel.

Les juridictions administratives doivent être dotées des moyens nécessaires pour résorber le retard actuel et faire face à l'afflux prévisible du contentieux dans les années à venir.

L'objectif est de ramener à un an l'ensemble des délais de jugement à l'issue de la période de programmation, comme c'est le cas devant le Conseil d'État.

Trois volets sont prévus :

1 - Augmenter les effectifs

Les effectifs seront renforcés par le recrutement de magistrats et par la création d'emplois de fonctionnaires destinés à renforcer les greffes des juridictions et les services administratifs du Conseil d'État. Des assistants de justice seront en outre recrutés afin d'apporter leurs concours aux tâches juridictionnelles des membres du Conseil d'État et des magistrats des cours et tribunaux administratifs.

L'attractivité du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sera renforcée.

2 - Renforcer les moyens en fonctionnement et en investissement

Des investissements seront engagés afin de permettre la réhabilitation, l'extension ou le relogement des juridictions existantes, ainsi que la création de trois nouvelles juridictions (une cour administrative d'appel en région parisienne et deux tribunaux administratifs).

Des moyens nouveaux seront affectés au fonctionnement des juridictions administratives ainsi qu'à l'amélioration de l'outil informatique.

3 - Engager des réformes

D'ores et déjà, le projet de loi comporte des dispositions nécessaires à la réalisation de ces objectifs : prorogation pendant la durée de la loi de programmation du régime du concours de recrutement complémentaire et pérennisation de la possibilité pour les magistrats administratifs d'être maintenus en surnombre au-delà de la limite d'âge ; création d'un cadre juridique permettant le recrutement des assistants de justice.

D'autres réformes devront être mises en oeuvre pour améliorer l'efficacité de la justice administrative et, en particulier, pour lutter contre l'encombrement des cours administratives d'appel.

En outre, après la création, en région parisienne, d'une nouvelle cour administrative d'appel, interviendra le transfert du Conseil d'État aux cours administratives d'appel, de l'appel contre les jugements relatifs aux arrêtés de reconduites à la frontière, dont le principe a été posé par l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France.

D - Développer l'efficacité de l'administration judiciaire

1 - Efficacité des services centraux

L'administration centrale n'est pas en capacité suffisante de faire face aux tâches de préparation de textes ou de suivi de négociations internationales alors que la complexité de ces champs d'intervention ne cesse de croître. De même, les moyens de gestion dont elle est dotée n'ont pas suivi ceux qu'elle est chargée globalement d'administrer. Les études d'impact des projets de textes législatifs et réglementaires sont encore insuffisantes de même que les fonctions de pilotage des services d'administration déconcentrée.

De façon à atteindre les objectifs énoncés par la présente loi de programmation, l'organisation de l'administration centrale du ministère de la justice doit être adaptée mais également renforcée.

Les fonctions de gestion et d'expertise technique et juridique seront renforcées quantitativement et qualitativement de même que l'attractivité des fonctions d'administration centrale. Ces renforts seront en grande partie affectés aux fonctions de support des juridictions et des services déconcentrés (immobilier, informatique). Les conditions de travail de ses agents seront améliorées. La politique immobilière du ministère, ainsi que la politique de développement informatique seront réévaluées et développées.

2 - Mettre à niveau les services de formation et d'administration des juridictions judiciaires

Pour répondre à l'élargissement de ses missions et à l'accroissement des effectifs à former, l'École nationale de la magistrature verra son encadrement pédagogique et administratif ainsi que ses moyens logistiques et financiers renforcés. Ses implantations à Bordeaux et à Paris seront adaptées en conséquence. Un contrat d'objectif sur cinq ans sera établi à cette fin.

L'École nationale des greffes disposera de moyens accrus afin d'être en mesure de former les personnels dans le cadre de départs massifs à la retraite (60 % des corps de catégorie A et B entre 2002 et 2020) et d'assurer en sus la formation initiale de plus de 3 500 stagiaires environ dans les cinq prochaines années. Dans le même temps, une réforme statutaire redéfinira la durée et le contenu des formations dispensées.

Pour conduire efficacement la gestion d'un parc immobilier dont l'ensemble représente 1 800 000 m 2 ,les cours d'appel bénéficieront de l'expertise de techniciens de haut niveau.

Dans le cadre de la déconcentration mise en oeuvre au sein des services judiciaires pour les personnels et les crédits, les services administratifs régionaux et les cellules budgétaires d'arrondissement judiciaire seront développés en tenant compte de la mise en oeuvre de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

La professionnalisation des personnels et le renforcement des moyens des services administratifs régionaux en matière budgétaire, immobilière et informatique, seront poursuivis.

3 - Mesures intéressant le traitement financier et le déroulement de carrière des agents en juridiction

La formation, les responsabilités et le professionnalisme des magistrats et fonctionnaires des juridictions doivent être mieux reconnus et pris en compte.

Pour les fonctionnaires des greffes, la spécificité de leurs fonctions liées aux contraintes de l'activité juridictionnelle sera également reconnue.

Une meilleure cohérence entre les métiers de greffe et les statuts des personnels concernés sera recherchée.

La prise en compte de la charge effective de l'activité exercée sera assurée par une modulation des régimes indemnitaires.

E - Équipement et fonctionnement matériel, notamment informatique, des juridictions judiciaires

1 - Immobilier

Le patrimoine des juridictions représente un million de mètres carrés de surface utile judiciaire, soit 1 800 000 m 2 SHON (surface hors oeuvre nette), répartis sur plus de mille juridictions et près de huit cents sites.

Malgré un premier programme de constructions neuves réalisé au cours de la dernière décennie, il demeure vétuste et insuffisant, et trop souvent en deçà des normes de sécurité et d'accessibilité des bâtiments publics.

En outre, le déficit des surfaces judiciaires reste important. Un renforcement significatif des crédits affectés à cette fin sera prévu.

Les mesures de protection et, en particulier, celles relatives au gardiennage des palais de justice, notamment grâce à une externalisation accrue de la prestation à des entreprises spécialisées, doivent également bénéficier de crédits supplémentaires. Il en va de la protection des personnels, des usagers et du patrimoine immobilier de l'État.

2 - Fonctionnement

L'installation des nouveaux magistrats et fonctionnaires induit des besoins de premier équipement mobilier et informatique et engendre des dépenses de fonctionnement pérennes, liées à leur activité. Ces moyens, indissociables des créations d'emplois, sont indispensables pour garantir l'efficacité de l'activité judiciaire.

3 - Informatique

Les juridictions doivent être dotées de moyens informatiques modernes et performants.

Le développement des réseaux informatiques internes et externes favorisera la communication électronique avec les auxiliaires de justice, tant en matière civile que pénale, les échanges avec les autres administrations, en particulier avec les services de police et de gendarmerie, ainsi que le partage d'informations entre l'administration centrale et les juridictions.

La réalisation de ces objectifs, permettant à la justice de faire face à l'accroissement de ses charges et au développement de ses missions, se traduira par la création de 4 397 emplois dont 3 737 pour les services judiciaires, 480 pour les juridictions administratives et 180 pour l'administration centrale ; 1 329 M€ (coût des emplois compris) seront consacrés à ces objectifs en dépenses ordinaires ainsi que, pour les investissements, 382 M€ en autorisations de programme.

Les crédits de fonctionnement comprendront les crédits de vacations, permettant le recrutement de 3 300 juges de proximité.


II - ADAPTER LE DROIT PÉNAL A L'ÉVOLUTION DE LA DÉLINQUANCE ET DÉVELOPPER L'EFFECTIVITÉ DE LA RÉPONSE PÉNALE

A- Adapter le droit pénal et la procédure pénale à l'évolution de la délinquance

Les réformes successives de la procédure pénale introduites au cours des dernières années ont conduit à une complexité croissante des règles applicables qui, dans de nombreux cas, affaiblissent l'efficacité de la répression et compromettent largement l'autorité de l'Etat en laissant se développer un sentiment d'impunité chez les auteurs d'infractions et d'exaspération chez nos concitoyens.

Il importe d'ores et déjà de procéder à des simplifications pour permettre de recentrer les magistrats intervenant en matière pénale sur leurs missions premières. Il conviendra également de faciliter l'exercice des poursuites pénales et de mieux prendre en compte les formes nouvelles de criminalité.

B - Mettre en place les conditions d'un traitement judiciaire rénové de la réponse pénale

1 - Réduire les délais de jugement des affaires pénales

Une forte augmentation du nombre de magistrats et de greffiers nécessaires pour renforcer de manière significative les délais de traitement des affaires sera prise en compte dans le renforcement des moyens en personnel des services judiciaires.

Ces renforts permettront d'augmenter le nombre des poursuites et d'améliorer le délai de traitement du contentieux pénal.

2 - Accroître le soutien aux associations oeuvrant en amont des condamnations pénales

Ce renforcement permettra le développement des enquêtes sociales rapides, des enquêtes de personnalité et des mesures de contrôle judiciaire socio-éducatives afin de donner aux juridictions pénales les moyens de mieux ajuster la sanction.

3 - Réduire les délais d'exécution des peines

Les emplois de magistrats du parquet et de fonctionnaires créés pour contribuer à réduire les délais de jugement pénaux seront utilisés, pour partie, pour renforcer les services de l'exécution des peines, afin de mettre rapidement à exécution les peines prononcées et, notamment, de ramener à environ trois mois le délai d'exécution des jugements contradictoires. Afin de mieux cerner les besoins, une grille d'évaluation et des indicateurs de résultats et de délais seront développés.

C - Développer la capacité de mise à exécution des peines en milieu pénitentiaire

1 - Augmenter la capacité des établissements pénitentiaires et améliorer les conditions de détention

Le parc pénitentiaire souffre d'une capacité d'accueil insuffisante et de la vétusté de certains de ses établissements. Pour remédier à ces difficultés, un programme de construction des établissements pénitentiaires sera mis en oeuvre. Il comportera 11 000 places, dont 7 000 consacrées à l'augmentation de la capacité du parc et 4 000 en remplacement de places obsolètes. En outre, la réalisation des établissements pourra être fortement accélérée grâce à des dispositions prévues par la présente loi.

2 - Développer fortement le placement sous surveillance électronique

Le dispositif de placement sous surveillance électronique de personnes condamnées à une peine d'emprisonnement ferme a été mis en oeuvre de façon expérimentale depuis plus de dix huit mois dans quatre, puis neuf sites.

Ce dispositif doit maintenant être généralisé, ce qui suppose l'externalisation d'une partie des fonctions de gestion des alarmes. L'objectif est de permettre, à l'échéance d'un délai de cinq ans, le placement simultané sous surveillance électronique de 3 000 personnes.

3 - Renforcer les services pénitentiaires d'insertion et de probation

Pour assurer le suivi et le contrôle de l'ensemble des 180 000 personnes dont ils ont la charge, les services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP) de l'administration pénitentiaire disposent aujourd'hui de 2 000 agents directement au contact du public placé sous main de Justice. Pour raccourcir les délais de prise en charge et intensifier le suivi des personnes prévenues et condamnées à l'égard desquelles les risques de récidive sont les plus importants, il est nécessaire de renforcer les effectifs de ces services.

D - Améliorer le fonctionnement des services pénitentiaires

1 - Accroître le niveau de sécurité des établissements

Les évasions et tentatives d'évasion survenues au cours de l'année 2001 sont venues rappeler la nécessité de renforcer les dispositifs de sécurité dans les établissements pénitentiaires.

L'administration pénitentiaire devra, au cours de la période des cinq prochaines années, mettre en place, dans les établissements pénitentiaires les plus exposés, un dispositif de brouillage des communications par téléphones portables et un tunnel d'inspection à rayons X pour éviter des contacts non contrôlés avec l'extérieur. Les miradors et les dispositifs de filins anti-hélicoptères seront adaptés pour prévenir les risques d'évasion et préserver la sécurité des personnels. Un programme spécifique de renforcement de la sécurité dans les maisons centrales sera mis en place.

2 - Améliorer la prise en charge et le taux d'activité des détenus

Afin d'améliorer la prise en charge des personnes détenues et de préparer leur sortie dans un souci de réinsertion et de prévention de la récidive, il est primordial de renforcer la lutte contre l'indigence, de veiller au maintien des liens familiaux, d'améliorer les conditions d'exercice du travail des personnes détenues et de valoriser leurs acquis sociaux et professionnels.

3 - Favoriser l'accès des détenus aux soins médicaux et psychologiques

Les personnes détenues doivent pouvoir bénéficier du même accès aux soins que celui qui est donné à la population générale tout en respectant les règles de sécurité liées à leur condition de détenus.

Les hospitalisations d'urgence et de très courte durée des personnes incarcérées ont lieu dans les hôpitaux de rattachement qui ne sont toutefois pas encore tous dotés des équipements de sécurité nécessaires. Il convient de parfaire les conditions de sécurité pendant les transferts et le séjour des personnes détenues hospitalisées.

Les contraintes carcérales ne permettent pas un suivi médical continu des patients atteints de troubles mentaux. Pour répondre à ce besoin seront créées des unités hospitalières sécurisées psychiatriques en établissements de santé.

S'agissant de l'incarcération des personnes âgées et des personnes handicapées, il convient d'accroître le nombre de cellules aménagées et d'améliorer leur prise en charge socio-sanitaire.

Les conditions de transfert à l'administration pénitentiaire de missions nouvelles (surveillance des détenus hospitalisés et, plus généralement, gardes et escortes des détenus) feront l'objet d'une réflexion interministérielle.

4 - Mettre à niveau les services d'administration déconcentrée et de formation

Il est impératif que les directions régionales soient en mesure de mettre en oeuvre les politiques publiques, de gérer les moyens financiers qui leur sont délégués et d'assurer la gestion des ressources humaines de leurs services.

Par ailleurs, la capacité de formation de l'école nationale de l'administration pénitentiaire sera accrue pour pourvoir aux besoins de recrutement dans les prochaines années.

5 - Revaloriser le statut des personnels pénitentiaires et améliorer les conditions d'exercice de leur mission

Le statut des personnels pénitentiaires devra mieux prendre en compte les obligations particulières auxquelles ces personnels sont astreints.




La réalisation de l'ensemble des actions consacrées à l'effectivité de la réponse pénale se traduira par la création de 3 600 emplois dont 410 dans les services judiciaires et 3 190 dans les services pénitentiaires.

762 M€ seront affectés à cet objectif en dépenses ordinaires ainsi que, pour l'investissement, 1 198 M€ en autorisations de programme.

III - TRAITER PLUS EFFICACEMENT
LA DELINQUANCE DES MINEURS

Le nombre des mineurs mis en cause par les services de police et de gendarmerie a augmenté de 14,95 % entre 1997 et 2001, passant de 154 037 à 177 017. Ils représentent à eux seuls 21 % du total des mis en cause.

La délinquance des mineurs est principalement une délinquance de voie publique, donc une délinquance visible. Elle se caractérise notamment par une augmentation significative des faits de violence (+ 16,4 % de vols avec violences entre 1997 et 2000, + 39,5 % d'atteintes aux personnes) et d'atteintes aux moeurs (+ 18,5 %).

Ces caractéristiques appellent des réponses fortes de la part des pouvoirs publics. Il convient donc d'adapter les conditions procédurales de la réponse pénale à cette délinquance ainsi que de réaffirmer la valeur de la sanction, tout en poursuivant et en développant les actions de prévention et de réinsertion.

Il est ainsi nécessaire d'adapter l'ordonnance du 2 février 1945 aux nouvelles caractéristiques de cette délinquance dans le respect de ses principes directeurs, à savoir la spécialisation des magistrats et la primauté de l'action éducative, en diversifiant les sanctions éducatives pour les mineurs de 10 à 13 ans, en permettant aux magistrats de la jeunesse de placer les mineurs délinquants, y compris les moins de 16 ans, dans des centres éducatifs fermés dans le cadre d'un contrôle judiciaire ou d'un sursis avec mise à l'épreuve dont la révocation peut entraîner la détention, et en instaurant une procédure de jugement à délai rapproché.

Pour permettre la mise en oeuvre et rendre effectives ces dispositions, il est prévu de développer, d'une part, un dispositif de prise en charge fortement renforcé pour les mineurs récidivistes, dans un double souci de protection de l'ordre public et de traitement des difficultés des mineurs concernés, d'autre part, des actions de prévention et de réinsertion.

A - Renforcer et encadrer le dispositif de traitement des mineurs récidivistes ou violents

1 - Sous la responsabilité de la protection judiciaire de la jeunesse, créer des centres éducatifs fermés destinés à accueillir les mineurs délinquants dans un cadre permettant de s'assurer de leur présence effective

Sur les 65 000 mineurs jugés en matière pénale en 2001, 3 800 ont fait l'objet d'une mesure de placement dans les établissements du secteur public et du secteur associatif habilité, 3 200 ont été incarcérés. Il est parfois difficile, notamment dans les régions les plus concernées par la délinquance juvénile (Île-de-France, Nord, Rhône-Alpes, PACA) de trouver dans les délais très brefs imposés par la procédure pénale, notamment en alternative à l'incarcération, un lieu de placement adapté pour les mineurs multirécidivistes.

Il convient d'augmenter les capacités d'accueil des centres éducatifs renforcés tout en développant un contrôle plus strict de ces mineurs délinquants de manière à prévenir les fugues afin de mieux répondre aux demandes des magistrats. Les moyens des centres éducatifs existants devront être renforcés et leur action éducative développée.

Par ailleurs, le présent projet créé des centres éducatifs fermés dans le secteur public et dans le secteur associatif habilité en vue d'accueillir, d'une part, des mineurs placés sous contrôle judiciaire, d'autre part, des mineurs ayant fait l'objet d'une peine de prison avec sursis et mise à l'épreuve. En outre, il prévoit que les mineurs placés au sein des centres éducatifs fermés, dont ceux âgés de 13 à 16 ans, pourront être mis en détention en cas de violation des conditions du placement, et notamment en cas de fugue. Le placement au sein des centres éducatifs fermés répondra ainsi à la nécessité d'une prise en charge renforcée des mineurs multiréitérants. Parallèlement, une prise en charge éducative, fondée sur l'enseignement et l'insertion professionnelle sera mise en oeuvre sur la base d'un programme rigoureux élaboré en étroite collaboration avec les autres départements ministériels concernés et notamment le ministère de l'éducation nationale. 600 places seront créées dans les centres éducatifs fermés.

Des outils d'évaluation de l'action éducative et de suivi de la trajectoire des mineurs suivis seront élaborés conformément aux orientations de la loi du 1 er août 2001 relative aux lois de finances et de celle du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale.

2 - Sous la responsabilité de l'administration pénitentiaire et avec la protection judiciaire de la jeunesse, créer de nouveaux quartiers mineurs dans les établissements pénitentiaires et créer des établissements pénitentiaires autonomes pour mineurs

Le nombre de places dans les établissements pénitentiaires pour l'accueil des mineurs détenus est insuffisant. De nombreux quartiers mineurs sont très dégradés. 500 places devront être créées dans les quartiers mineurs et des travaux de rénovation vont être engagés. 400 places seront créées dans de nouveaux établissements pénitentiaires spécialisés pour l'accueil des mineurs.

L'intervention continue des services de la protection judiciaire de la jeunesse sera organisée auprès de l'ensemble des mineurs incarcérés, car ceux-ci justifient d'une prise en charge pluridisciplinaire et d'un soutien personnalisé.

B - Développer la prévention de la récidive

La justice des mineurs doit apporter une contribution majeure à la prévention de la récidive et de la réitération des infractions commises par les mineurs.

Cet objectif doit être atteint grâce à trois réformes de procédure opérées par le présent projet, ainsi que par un plan de relance de mesures de milieu ouvert :

1 - L'intervention du juge de proximité en matière de répression de la délinquance des mineurs

Le juge de proximité, dont la spécialisation sera garantie à l'instar des assesseurs des tribunaux pour enfants, pourra connaître de certaines contraventions des quatre premières classes commises par les mineurs.

A l'initiative du procureur de la République, il pourra ainsi intervenir rapidement dans le champ des petites infractions commises par des primo-délinquants, et dans un cadre plus solennel et ferme que celui de l'alternative aux poursuites, prononcer des mesures éducatives et préventives telles que l'admonestation, la remise à parents et l'aide ou réparation. S'il estime qu'une autre mesure ou une peine sont nécessaires, il renverra le dossier au parquet pour qu'il saisisse le juge des enfants.

2 - La procédure de jugement à délai rapproché

De la rapidité de l'intervention du juge des enfants dépend souvent l'efficacité répressive et préventive de sa décision. Le présent projet permet ainsi au procureur de la République, dès lors que des investigations suffisantes auront été opérées quant aux faits et à la personnalité du mineur, de saisir le juge des enfants afin qu'il comparaisse devant le tribunal pour enfants dans un délai rapproché pour y être jugé.

Ainsi la comparution en justice et la décision du tribunal pour enfants seront en raison de leur proximité dans le temps avec les infractions commises, de nature à dissuader effectivement le mineur de réitérer ou récidiver.

3 - La retenue et les sanction éducatives pour les mineurs de 10 à 13 ans

La délinquance des mineurs de 10 à 13 ans connaît depuis quelques années une progression importante et inquiétante (augmentation de 8 % du nombre de mineurs de 12 ans déférés devant les juges des enfants en 2001). Il est donc indispensable de faciliter les conditions de l'enquête en portant de dix à douze heures renouvelables une seule fois la retenue dont ils peuvent faire l'objet et en diminuant le seuil des sanctions permettant cette retenue. Il convient aussi de créer pour cette classe d'âge très jeune une réponse pénale originale à vocation éducative et préventive, le cas échéant plus ferme et dissuasive qu'une simple mesure éducative.

Ces sanctions éducatives sont la confiscation de l'objet ayant servi à la commission de l'infraction, l'interdiction de paraître en certains lieux et notamment celui de l'infraction, l'interdiction d'entrer en rapport avec la victime, l'accomplissement d'un stage de formation civique, une mesure d'aide ou de réparation.

4 - Améliorer la prise en charge en milieu ouvert (relance des mesures de réparation, augmentation des classes relais)

Le renforcement d'une politique pénale tendant à traiter de manière immédiate et systématique les infractions commises par les mineurs, l'accélération des procédures devant les juridictions ont créé un goulet d'étranglement au moment de la mise à exécution des mesures et des peines prononcées par les tribunaux. Le délai moyen des prises en charge des mesures éducatives et des peines est de 51,9 jours.

Les objectifs sont donc pour fin 2007 de réduire les délais de prise en charge des mesures éducatives et des peines de 51,9 jours à 15 jours, d'augmenter le nombre de mesures de réparation, et d'accroître la participation de la protection judiciaire de la jeunesse aux 200 classes-relais supplémentaires qui seront créées.

C - Mise à niveau des services de formation et d'administration des services de la protection judiciaire de la jeunesse

1 - Renforcer les capacités de pilotage et d'administration des services de la protection judiciaire de la jeunesse au niveau territorial

La direction de la protection judiciaire de la jeunesse doit renforcer l'inscription de son action dans les politiques publiques concernant l'enfance et la coordination avec les responsables territoriaux (notamment conseils régionaux et départementaux). Elle doit aussi améliorer ses capacités de gestion au plan local afin de renforcer son expertise et poursuivre le processus de déconcentration qui n'est réalisé actuellement que pour les crédits de fonctionnement. Cela nécessite un renforcement quantitatif et qualitatif de la filière administrative.

2 - Adapter le dispositif de formation aux besoins

Pour faire face aux besoins de recrutement dans les prochaines années, la direction de la protection judiciaire de la jeunesse devra adapter ses moyens de formation et de recrutement.

Les objectifs sont de renforcer la professionnalisation de la formation, d'allonger la formation initiale et continue des directeurs de service et de développer la formation des directeurs territoriaux notamment en matière de gestion, de transformer le Centre national de formation et d'étude de la protection judiciaire de la jeunesse en établissement public administratif et de mener à bien sa délocalisation.

3 - Améliorer le patrimoine immobilier des établissements qui accueillent des mineurs de la protection judiciaire de la jeunesse

Il est indispensable de développer au sein des structures régionales l'expertise et les capacités en termes de conduite de projets immobiliers pour réaliser les opérations d'entretien et de maintenance des installations ainsi que la réalisation des nouveaux dispositifs prévus par la loi de programmation.

1 988 emplois seront créés pour la mise en oeuvre de cet objectif de traitement plus efficace de la délinquance des mineurs, dont 188 dans les services judiciaires, 550 dans les services pénitentiaires et 1 250 dans les services de la protection judiciaire de la jeunesse. 423 M€ seront affectés à cet effet sur la période couverte par la loi de programme, ainsi que 170 M€ en autorisations de programme.

IV - AMELIORER L'ACCÈS DES CITOYENS
AU DROIT ET A LA JUSTICE

1 - Améliorer l'aide aux victimes

Un plan national d'aide aux victimes sera mis en oeuvre.

Il comprend les volets suivants dont les deux premiers figurent d'ores et déjà dans le présent projet :

- informer la victime, dès son audition par les services de police et de gendarmerie, de la possibilité de se voir désigner immédiatement un avocat d'office par le bâtonnier ;

- accorder de droit l'aide juridictionnelle sans condition de ressources aux victimes des atteintes les plus graves à la personne ou à leurs ayants droit. Les personnes, gravement blessées et psychologiquement fragilisées ou qui viennent de perdre un proche dans des circonstances dramatiques à la suite des infractions criminelles les plus graves telles que le meurtre, les violences et viols aggravés bénéficieront systématiquement de l'aide juridictionnelle, quel que soit le montant de leurs ressources ;

- informer plus largement et plus rapidement la victime sur ses droits et sur le déroulement de l'ensemble de la procédure ;

- indemniser les préjudices de façon plus juste et plus transparente en améliorant notamment le déroulement des expertises et en harmonisant les méthodes d'évaluation.

2 - Faciliter l'accès au droit

La loi de programmation permettra de rationaliser et de compléter l'implantation des différentes structures oeuvrant en faveur de l'accès au droit (maisons de justice et du droit, antennes de justice...).

3 - Permettre un accès effectif à la justice

A cette fin, l'amélioration du dispositif d'aide juridictionnelle doit être recherchée de telle sorte que l'accès à la justice soit mieux garanti.

Cet objectif doit tout à la fois prendre en considération les seuils d'admission et la rémunération des auxiliaires de justice intervenant en matière d'aide juridictionnelle.

262 M€ et 115 emplois seront mis en place sur la période de la loi pour la mise en oeuvre de ces objectifs d'amélioration de l'accès au droit et à la Justice.

Au total, la loi d'orientation et de programmation pour la Justice prévoit la création de 10 100 emplois, et de 2 775 M€ en dépenses ordinaires (coût des emplois compris). Pour financer les investissements correspondants, 1 750 M€ d'autorisations de programme viendront s'ajouter au niveau actuel des autorisations de programme du ministère de la Justice.

En dépenses ordinaires et en crédits de paiement, la ressource totale consacrée à la loi s'élèvera à 3 650 M€.

Les services judiciaires bénéficieront de 4 450 emplois (950 magistrats et 3 500 fonctionnaires), de 1 207 M€ en dépenses ordinaires et de 277 M€ d'autorisations de programme.

Le Conseil d'État et les juridictions administratives bénéficieront de 480 emplois, de 114 M€ en dépenses de fonctionnement et de 60 M€ en autorisations de programme.

L'administration pénitentiaire bénéficiera de 3 740 emplois, de 801M€ en dépenses de fonctionnement et de 1 313 M€ en autorisations de programme.

Les services de la protection judiciaire de la jeunesse bénéficieront de 1 250 emplois, de 293 M€ en dépenses de fonctionnement et de 55 M€ en autorisations de programme.

L'administration centrale bénéficiera de 180 emplois, de 360 M€ en dépenses de fonctionnement et de 45 M€ en autorisations de programme.

Fait à Paris, le 17 juillet 2002

Signé : JEAN-PIERRE RAFFARIN

Par le Premier ministre :

Le Garde des sceaux, ministre de la justice,

Signé : DOMINIQUE PERBEN

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