EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Depuis plusieurs années, notamment depuis le début du quinquennat d'Emmanuel Macron en 2017, rarement un Président de la République n'aura été aussi jacobin. Cela a commencé dès son premier quinquennat avec la suppression progressive de la taxe d'habitation qui s'est faite sans jamais consulter les Maires. Méprisés, nombreux ont été également jetés en pâture à la vindicte des réseaux sociaux, à travers le hashtag #BalanceTonMaire.

Pourtant les Maires de France font battre le coeur de notre démocratie locale. Ce sont eux qui sont en première ligne pour répondre aux attentes quotidiennes des citoyens. L'action municipale est par nature indispensable mais aussi tellement difficile dans son exercice.

Malheureusement, suivant le constat de la Cour des comptes, le ministre chargé des Comptes publics, a demandé 1 ( * ) aux collectivités de participer au redressement des comptes publics dès 2023 : « Elles sont dans une situation très favorable avec une épargne supérieure de 6 % par rapport à 2019 » a-t-il rappelé.

Force des de constater qu'actuellement, alors que de nombreux Maires ont de plus en plus de difficultés à équilibrer leur budget, l'État leur impose de nouvelles obligations qui pèsent sur leurs finances.

C'est par exemple le cas de l'entretien des lignes téléphoniques. Jusqu'à la loi n° 96-659 du 16 juillet 1996 de réglementation des télécommunications, cet entretien était à la charge de France Télécom (du moins pour les lignes dites aériennes, impliquant élagage, débroussaillage...).

Mais l'article L. 51 du code des postes et des communications électroniques (CPCE) 2 ( * ) , précise la procédure d'entretien des réseaux de communications électroniques. Comme l'a rappelé le Ministère de la Cohésion des Territoires en 2020 3 ( * ) : « cet article introduit une chaîne de responsabilité incitative entre propriétaires de terrains et exploitants de réseaux en matière d'entretien des abords des réseaux. ». Le Gouvernement estime que la législation (qui implique notamment les exploitants en leur imposant de proposer une convention 4 ( * ) aux riverains) est équilibrée. Pourtant, de nombreux Maires dénoncent cette charge, à l'image le Maire de Mimet et Président des Maires des Bouches-du-Rhône, Georges Cristiani qui déplore que : « les Mairies doivent désormais assumer toutes les dépenses d'entretien inhérentes au passage des câbles d'opérateurs de téléphonie. ».

Aussi, à l'occasion de la seizième édition de Ruraltic, l'Association des Maires Ruraux de France (AMFR) et l'opérateur Orange, ont signé le 24 août 2021 une charte, complémentaire du plan d'urgence pour le réseau de cuivre, visant à promouvoir et organiser l'élagage autour des réseaux télécom aériens. De nombreux élus ruraux indiquent que le défaut d'élagage expliquerait 50 % des incidents réseau. Avec cette Charte, l'AMRF et Orange se sont engagés « à coopérer afin de fluidifier le processus d'élagage, qu'il se réfère au domaine privé ou public, en renforçant notamment l'information auprès des élus et des habitants. Un correspondant élagage Orange devra accompagner les Maires afin de sensibiliser les propriétaires à élaguer régulièrement et être en conformité. ».

En effet, face à la complexité et les difficultés de mise en oeuvre de la réglementation actuelle conduisent malheureusement à l'absence d'entretien réel le long du réseau.

Les conséquences sont une dégradation constante du réseau de lignes téléphoniques, facteur d'interruption de service pouvant se compter en semaines ou en mois. Tandis que l'opérateur historique répond aux maires qui les sollicitent qu'il n'a aucune légitimité à intervenir sur le domaine privé afin d'assurer un entretien préventif des abords de son réseau 5 ( * ) .

C'est pourquoi, pour ne plus « asphyxier » nos communes, nous devons remettre l'entretien des lignes téléphoniques à la charge des exploitants des réseaux. Tel est le sens de l' article 1 er .

Par ailleurs, de trop nombreuses communes ne perçoivent pas la Redevance d'Occupation du Domaine Public (RODP), s'agissant des infrastructures et réseaux de transports de communications électroniques. Pour d'autres, le montant est sous-évalué car ne tenant pas compte de la présence de nouveaux réseaux : Fibre to the office (FttO), Fiber to the Home (FttH), câbles modernisés, réseaux de « Groupe Fermé d'Utilisateurs » (GFU)...

Cet écart tient à ce que la démarche de collecte de l'information, nécessaire à l'émission du titre de recettes, incombe aujourd'hui aux collectivités. Or celles-ci n'ont souvent pas les moyens d'effectuer les relevés terrain, sachant de surcroît que certains réseaux sont sécurisés et donc non accessibles pour lesdites collectivités.

Aussi , comme le prévoit l' article 2 , nous devrions envisager que ce soit l'opérateur propriétaire de l'infrastructure de génie civil (ou les différents opérateurs propriétaires, car plusieurs infrastructures peuvent cohabiter dans certaines communes) qui déclarent de manière documentée, le linéaire de fourreaux, de supports aériens et de câbles (et idéalement la nature du câble : cuivre téléphonique, câble coaxial, FttH, FttO...), afin que le gestionnaire de voirie ait uniquement à se charger du titre de recettes, quand bien même il conserverait un droit de contrôle sur les déclarations des opérateurs.


* 1 Interview aux Echos donnée le 8 août 2022

* 2 Introduit par l'article 85 de la loi n° 2016-131 du 7 octobre 2016

* 3 Réponse du Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales publiée dans le JO Sénat du 29/10/2020 - page 4962 https://www.senat.fr/questions/base/2020/qSEQ200717473.html

* 4 Alinéa 1 er de l'article L46 du Code des postes et des communications électroniques : « Les autorités concessionnaires ou gestionnaires du domaine public non routier, lorsqu'elles donnent accès à des exploitants de réseaux de communications électroniques, doivent le faire sous la forme de convention, dans des conditions transparentes et non discriminatoires et dans toute la mesure où cette occupation n'est pas incompatible avec son affectation ou avec les capacités disponibles. La convention donnant accès au domaine public non routier ne peut contenir de dispositions relatives aux conditions commerciales de l'exploitation. Elle peut donner lieu à versement de redevances dues à l'autorité concessionnaire ou gestionnaire du domaine public concerné dans le respect du principe d'égalité entre les opérateurs. Ces redevances sont raisonnables et proportionnées à l'usage du domaine ».

* 5 Question écrite n° 17473 de M. Mathieu Darnaud (Ardèche - Les Républicains) publiée dans le JO Sénat du 30/07/2020 - page 3350 https://www.senat.fr/questions/base/2020/qSEQ200717473.html

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