EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le principe fondamental d'une démocratie républicaine est de respecter la volonté exprimée par le peuple lors des élections. Il en résulte que la Constitution doit être le socle d'un édifice républicain qui s'impose à toutes les normes juridiques, qu'elles soient nationales ou a fortiori d'origine étrangère. Et si des limitations à la souveraineté peuvent éventuellement être admises à titre exceptionnel et sous réserve de réciprocité, ce ne peut être qu'en vertu d'un consentement exprès et à tout moment révocable figurant dans la Constitution elle-même.

Or sous prétexte du pseudo principe dit « d'état de droit », les eurocrates défendent une forme de supranationalité qui non seulement ne reposerait sur aucun fondement constitutionnel, mais ne tiendrait pas compte de la volonté clairement exprimée par le peuple de tel ou tel état européen. On le constate actuellement dans les conflits opposant les institutions européennes à la Pologne et à d'autres états européens, alors que pourtant, personne ne peut contester la légitimité élective des gouvernements en cause.

La « primauté du droit européen » n'a d'ailleurs aucun fondement car comme le souligne la Pologne, cette notion ne figure dans aucun des traités de l'UE. L'article 19 du traité sur l'UE se borne à indiquer à propos de la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) que « les États membres établissent les voies de recours nécessaires pour assurer une protection juridictionnelle effective dans les domaines couverts par le droit de l'Union ».

La Constitution française prévoit que le droit européen s'impose à nos lois et règlements mais ce n'est pas pour autant que le droit européen s'impose à la Constitution elle-même. Le droit européen n'a en effet une primauté que sur le reste du droit national.

Or en France, les partisans d'une évolution de l'Union européenne vers une organisation supranationale prétendent que le droit européen pourrait même avoir la primauté sur la Constitution de la Pologne et de tous les états membres. Il faut dire que le juge européen les y encourage depuis des décennies en considérant que « le droit né du traité ne pourrait (...) se voir judiciairement opposer un texte interne quel qu'il soit , sans perdre son caractère communautaire et sans que soit mise en cause la base juridique de la Communauté (devenue l'UE) elle-même » (« Costa contre Enel », 1964), « l'invocation d'atteintes portées (...) aux principes d'une structure constitutionnelle nationale ne saurait affecter la validité d'un acte de la Communauté » (« Internationale Handelsgesellschaft », 1970).

Notre Conseil constitutionnel lui-même oppose une bien timide résistance en affirmant qu'une directive « ne saurait aller à l'encontre d'une règle ou d'un principe inhérent à l'identité constitutionnelle de la France »... ce qui est la moindre des choses, mais donne par avance un blanc-seing à des atteintes à la Constitution qui n'iraient pas jusqu'à porter sur l'identité constitutionnelle de la France, notion beaucoup moins large que la Constitution elle-même et au demeurant au contenu non défini.

C'est extrêmement préoccupant car cela revient à nier le droit du peuple de chaque État, à commencer par le peuple français, à fixer librement et démocratiquement son système constitutionnel. Le but de la présente proposition de loi constitutionnelle est donc de réaffirmer la primauté absolue de la Constitution française sur toutes les autres normes juridiques, y compris celles résultant des stipulations des engagements internationaux ou issues de l'Union européenne.

Ce faisant, les juges français, au premier rang desquels le Conseil constitutionnel, disposeront d'une base juridique claire pour réaffirmer notre souveraineté nationale. Ce dispositif ne bloquera d'ailleurs pas notre diplomatie, mais subordonnera l'effectivité d'une norme supranationale contraire à notre Constitution à une modification préalable de celle-ci.

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