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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Ministère de l'Europe

et des affaires étrangères

Projet de loi

autorisant l'approbation de l'amendement de la convention relative à la collecte, au dépôt et à la réception des déchets survenant en navigation rhénane et intérieure et de son règlement d'application, partie B, par des dispositions concernant le traitement

de résidus gazeux de cargaison liquide (vapeurs), issu de la

résolution CDNI-2017-I-4, adoptée le 22 juin 2017

NOR : EAEJ2134026L/Bleue-1

ÉTUDE D'IMPACT

I- Situation de référence

Plus de 80 % du transport fluvial en Europe est assuré sur le réseau de navigation intérieure nord-ouest européen (Rhin, Moselle, Meuse, réseau de canaux). De grandes quantités de cargaisons liquides y sont transportées annuellement, dont de nombreux composés organiques volatils (COV), tels que le benzène ou l'acétone, et d'autres matières dangereuses pour l'environnement.

Après le déchargement des marchandises liquides des citernes d'un bateau de navigation intérieure, une partie de la cargaison subsiste dans la citerne sous la forme de vapeurs (gaz). Ces vapeurs doivent être évacuées des citernes à cargaison afin que le bateau soit suffisamment propre pour le transport d'une cargaison suivante. Cette opération se dénomme dégazage.

Le dégazage peut être réalisé soit à l'air libre (on parle alors de « ventilation » dans la convention relative à la collecte, au dépôt et à la réception des déchets survenant en navigation rhénane et intérieure - CDNI) soit dans des stations de réception prévues à cet effet. Lorsque le dégazage est réalisé à l'air libre, les gaz contenus dans les citernes sont libérés directement dans l'atmosphère. Lorsque le dégazage a lieu en station de réception, ces vapeurs sont récupérées et traitées de manière appropriée.

Le dégazage à l'air libre pose deux problèmes : d'une part, les vapeurs peuvent précipiter dans l'eau et aboutir ainsi dans le milieu aquatique ; d'autre part, ces vapeurs sont souvent libérées en un laps de temps très court, car on observe un pic de concentration au début de l'opération de dégazage, et sur une zone très étroite, ce qui entraîne localement des pics de pollution dans l'atmosphère, notamment dans les zones portuaires.

Ce phénomène a notamment été mis en évidence par des mesures et estimations effectuées dans le port de Rotterdam entre 2011 et 2013 1 ( * ) . De nombreuses industries y sont établies, entraînant de fortes concentrations dans l'atmosphère en vapeurs nocives. Sur cette concentration, on a relevé des pics significatifs au moment où un bâtiment de navigation intérieure dégazant à l'air libre passait devant les appareils de mesure.

Dans son ensemble, le bassin du Rhin, densément peuplé, présente des concentrations d'industries pétrochimiques. Les émissions de vapeurs volatiles organiques et toxiques y sont donc une menace directe à la fois pour l'environnement et la santé publique. Il apparaît ainsi urgent de réduire les émissions de COV et de matières dangereuses pour l'environnement provenant des bateaux-citernes de navigation intérieure.

L'Union européenne (UE) s'est saisie du sujet de la libération des substances toxiques dans l'atmosphère dès les années quatre-vingt-dix 2 ( * ) , et a élaboré un certain nombre d'instruments normatifs. Cependant, il n'existe pas de prescriptions visant à empêcher la libération de ces matières dans l'atmosphère qui soient spécifiques à la navigation intérieure.

Il n'existe jusqu'à présent qu'une réglementation fragmentée, mise en oeuvre par chacun des Etats riverains du Rhin, et pouvant conduire à ce que l'on a appelé un « tourisme des déchets » en navigation intérieure. Ce phénomène a par exemple été observé à la frontière germano-néerlandaise à la suite de la décision des provinces néerlandaises de prendre des mesures pour interdire le dégazage à l'air libre, alors que celui-ci restait autorisé en Allemagne. Pour répondre à la problématique du dégazage, une réglementation internationale uniforme et adaptée à l'échelle du bassin rhénan est ainsi nécessaire, afin que les émissions de matières nocives soient limitées de façon intégrée sur l'ensemble de la voie d'eau tout en évitant, par l'application de règles du jeu équitables, les distorsions de concurrence entre Etats riverains.

Cette problématique est particulièrement sensible aux Pays-Bas, qui accueillent une part importante de la navigation rhénane, et dont les installations portuaires sont implantées dans des zones densément peuplées. Le sujet est une préoccupation majeure portée par les provinces, en raison de la multiplication des plaintes et d'actions en justice pour lutter contre la pollution et les implications en matière de santé publique.

Le ministère des transports néerlandais a donc pris l'initiative de travaux sur l'amélioration de la gestion des vapeurs de cargaisons, dans le cadre de la CDNI, laquelle est administrée par le Secrétariat de la Commission centrale pour la navigation du Rhin.

La CDNI, signée à Strasbourg le 9 septembre 1996, comporte six Etats parties, à savoir le Luxembourg, la Suisse, les Pays-Bas, la Belgique, l'Allemagne et la France. Elle s'applique à l'ensemble du Rhin et à toutes les voies de navigation intérieure en Allemagne, aux Pays-Bas et en Belgique mais aussi à la Moselle au Luxembourg. Pour la France, outre le Rhin, sont concernés la Moselle, la Meuse et les canaux du Nord.

La convention a été ratifiée par la France en 2001 mais sa publication a été différée jusqu'en 2010 3 ( * ) , en concertation avec l'ensemble des Etats parties qui souhaitaient disposer d'un laps de temps suffisant pour prendre les mesures techniques nécessaires à sa mise en oeuvre.

La convention encadre la gestion et le traitement des déchets produits par la navigation rhénane et intérieure, et s'articule en trois parties relatives aux obligations de collecte et de traitement des différents types de déchets : déchets huileux ou graisseux (partie A), résidus de cargaisons (partie B) ou déchets ménagers (partie C).

La partie B de la convention définit les obligations de prise en charge des déchets de cargaison et de remise en état des cales, par application du principe du « pollueur-payeur » : l'expéditeur ou le destinataire d'une cargaison supporte les coûts du nettoyage des cales ou citernes des bateaux. Les déchets concernés sont les résidus de cargaison laissés par les opérations de déchargement, les eaux de lavage des cales et citernes, ainsi que les slops (boues et résidus de cargaison s'accumulant au fond des citernes et dans les compartiments des bateaux).

La révision a ainsi pour objet d'ajouter à la partie B une nouvelle catégorie de déchets : les vapeurs de cargaisons liquides. Les vapeurs sont définies comme étant les composés gazeux qui s'évaporent d'une cargaison liquide (résidus gazeux de cargaison liquide). La question des vapeurs de cargaison liquide n'avait pas été traitée dans la version initiale de la CDNI car la convention s'est construite à l'origine autour de la problématique de la protection de l'eau et non de la protection de l'atmosphère. La question du dégazage, déjà présente dans les esprits dans les années 1990, a d'abord été discutée dans le cadre de la Commission centrale pour la navigation du Rhin (CCNR), avant que la CDNI n'apparaisse comme le meilleur vecteur pour en traiter.

Bien que des textes européens ou internationaux encadrent en partie la gestion des vapeurs des cargaisons en navigation intérieure, notamment l'accord européen relatif au transport international des marchandises dangereuses par voies de navigation intérieures (ADN) 4 ( * ) et la directive 94/63/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 1994, relative à la lutte contre les émissions de composés organiques volatils (COV) résultant du stockage de l'essence et de sa distribution des terminaux aux stations-service 5 ( * ) , ces textes sont spécifiques à des types de substances (matières dangereuses, carburants) ; ils ne définissent pas de règles uniformes de gestion de ces déchets ou de répartition des responsabilités des acteurs de la chaîne logistique.

Ainsi, la révision de la CDNI permet de définir un cadre uniforme au niveau international pour la gestion des vapeurs et de faciliter l'appropriation de la règle par les entreprises et le contrôle par les Etats parties. Elle précise également la répartition des coûts et les modalités de gestion, et propose un outil de suivi et de contrôle avec l'attestation de déchargement.

II - Historique des négociations

Le projet de révision de la convention est issu des travaux d'un groupe de travail impliquant des représentants des industries rhénanes concernées (transport, chimie, bâtiment et travaux publics), et de discussions de représentants des Etats parties au sein d'un groupe de travail de la CDNI entre 2014 et 2017.

L'organe décisionnel de la CDNI, la Conférence des parties contractantes (CPC) a entériné le projet de révision le 22 juin 2017 (résolution CDNI 2017-I-4 6 ( * ) ).

Les principaux points ayant fait l'objet de discussions ont été le seuil en-deçà duquel le dégazage à l'air libre est autorisé et le calendrier de mise en oeuvre des interdictions de dégazage à l'air libre.

Concernant les seuils de concentration autorisant le dégazage à l'air libre, en l'absence d'un consensus ou d'une analyse exhaustive des seuils de toxicité ou de nuisance des différentes substances (notamment pour les substances odorantes et non toxiques), le compromis retenu a consisté à reprendre et à adapter les limites de concentration explosive figurant par l'accord européen relatif au transport international des marchandises dangereuses par voies de navigation intérieure (ADN), soit 10 % des limites inférieures d'explosivité (LIE) des produits hors des seuils réels de toxicité ou de nuisance. En effet, l'ensemble des Etats parties à la CDNI sont déjà parties à cet accord, dans lequel ce principe est inscrit.

Concernant les modalités d'application, après des débats sur la faisabilité et la soutenabilité d'une interdiction générale des rejets, il a été convenu aux termes d'un compromis d'effectuer une mise en oeuvre progressive, l'interdiction du dégazage à l'air libre des substances les plus dangereuses étant effective dès l'entrée en vigueur des amendements à la convention (benzène, composés cancérigènes, mutagènes ou reprotoxiques). Les autres substances bénéficient d'une période de transition de deux ou trois ans, suivant leur nature, après l'entrée en vigueur pour permettre la mise en place de stations de collecte des vapeurs et l'adaptation des chaînes logistiques.

III - Objectifs des modifications

La convention telle que révisée ajoute à présent les résidus gazeux de cargaisons liquides, appelés « vapeurs », au champ d'application de la partie B de la CDNI, afin de prévenir la pollution de l'environnement occasionnée par la libération dans l'atmosphère de vapeurs nocives. Elle édicte ainsi une réglementation uniforme au niveau international pour les rejets dans l'atmosphère. Les opérateurs seront selon ses termes tenus d'éliminer ou de limiter les vapeurs de manière appropriée, suivant le principe « pollueur-payeur ».

A cet effet, aux articles 3, 11 et 12, où figure l'interdiction du « déversement dans la voie d'eau », est ajoutée l'interdiction de la « libération des vapeurs dans l'atmosphère » sauf exceptions mentionnées dans le règlement d'application. Les articles 8 et 13 prévoient que l'affréteur se voie imputer les coûts du dégazage. En outre, est imposé un devoir général de vigilance, auquel est tenu l'ensemble des parties prenantes à la navigation, qui doivent éviter la pollution de la voie d'eau et de l'atmosphère, limiter au maximum la quantité de déchets survenant à bord et éviter autant que possible tout mélange de différentes catégories de déchets (article 11).

Les articles 7.01 à 7.04 du règlement d'application définissent les obligations des parties prenantes et l'intégration de la prise en charge des vapeurs à l'attestation de déchargement, document utilisé pour documenter le respect des obligations définies par la partie B de la CDNI.

Des dispositions transitoires ont été prévues dans le règlement d'application, visant à ménager plusieurs phases dans l'interdiction de dégazage dans l'atmosphère. Il a en effet été considéré que les capacités de dégazage des installations déjà existantes seraient insuffisantes pour effectuer le dégazage de l'ensemble des matières concernées. L'article 11.01 du règlement prévoit donc une introduction progressive de l'interdiction avec, selon les types de vapeurs, une application sans délai (après l'entrée en vigueur des modifications) ou avec un délai de deux ans ou encore de trois ans à compter de l'entrée en vigueur des amendements. Ces délais sont jugés suffisants pour mettre en place des stations de dégazage et obtenir ou délivrer les permis nécessaires.

L'appendice IIIa définit les standards de dégazage. Il indique les conditions de dégazage en station de réception ou de ventilation à l'air libre des résidus de cargaison, et présente des tableaux de substances avec les valeurs admissibles pour une ventilation libre (AVFL), seuils de concentration au-delà desquels la libération des vapeurs est interdite, imposant leur dépôt dans une station de dégazage.

IV - Conséquences estimées de la mise en oeuvre de la résolution

Les présents amendements à la convention soumis à approbation emportent des conséquences dans les domaines juridique, environnemental, financier, administratif, ainsi qu'économique.

a. Conséquences juridiques

Articulation avec les accords ou conventions internationales existantes

Les parties contractantes de la CDNI sont également signataires de l'accord européen relatif au transport international des marchandises dangereuses par voies de navigation intérieure (ADN). L'accord ADN précise les conditions du dégazage dans l'atmosphère, ou dans des stations de réception, des citernes à cargaison vides ou déchargées et des tuyauteries de chargement et de déchargement, sous réserve que cela ne soit pas interdit par d'autres prescriptions légales (sous-section 7.2.3.7).

Les présents amendements à la convention soumis à approbation introduisent une interdiction de dégazage dans l'atmosphère. Des exceptions sont prévues mais conditionnées à certains types de substances et à certaines concentrations limites. La CDNI révisée est donc plus restrictive que l'accord ADN et introduit également d'autres dispositions notamment en matière de responsabilité.

Ils s'articulent cependant pleinement avec l'accord ADN. D'une part, l'introduction d'une interdiction de dégazage dans l'atmosphère par la CDNI n'est pas contradictoire avec les dispositions de l'ADN, puisque son article 7.2.3.7.0 prévoit la possibilité d'une telle interdiction par d'autres stipulations internationales. D'autre part, les dispositions relatives aux conditions de dégazage, dans l'atmosphère pour les substances autorisées ou dans des stations de réception, sont reprises dans la CDNI amendée.

Articulation avec le droit européen

L'accord ADN a été rendu décliné au niveau européen par la directive 2008/68/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 septembre 2008 relative au transport intérieur des marchandises dangereuses. La CDNI révisée s'applique sans préjudice de l'accord ADN et de la directive 2008/68/CE conformément à son nouvel article 5.04.

La CDNI amendée s'applique également sans préjudice de la directive 94/63/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 1994 relative à la lutte contre les émissions de COV résultant du stockage de l'essence et de sa distribution des terminaux aux stations-service. Les bateaux utilisés pour le stockage, le chargement et le transport de l'essence d'un terminal à un autre ou d'un terminal à une station-service sont inclus dans le champ d'application de la directive. Celle-ci définit les conditions de récupération des vapeurs, notamment lors des opérations de chargement et de déchargement.

Néanmoins, d'une part, mais la directive n'interdit pas formellement les opérations de dégazage dans l'atmosphère, comme en cas de transport incompatible. Ainsi, l'article 5 dispose : « Si, après déchargement de l'essence, le réservoir mobile est utilisé pour des produits autres que l'essence, et dans la mesure où il n'est pas possible de récupérer les vapeurs ou de procéder à leur stockage intermédiaire, sa ventilation peut être autorisée dans une zone géographique où l'environnement et la santé ne devraient pas être affectés de manière significative par les émissions ». La CDNI révisée précise davantage les conditions d'un dégazage dans l'atmosphère (substances autorisées, concentrations, etc.) et prévoit des dispositions dans le cas où cela serait interdit, dans le respect des prescriptions de la directive.

D'autre part, la CDNI amendée ne concerne pas uniquement l'essence, comme la directive. Elle couvre un panel plus large de matières.

D'autres règlementations identifient également un certain nombre de ces matières dites « substances extrêmement préoccupantes » ou Substances of Very High Concern (SVHC) , dont le niveau de libération dans l'atmosphère doit autant que possible être ramené à zéro. C'est ce que visent notamment le règlement REACH (CE) 1907/2006, la convention OSPAR, la directive-cadre relative à l'eau 2000/60/CE et le règlement POP (UE) 2019/1021. L'industrie est également tenue de réduire de plus en plus ce type de rejets. Cependant, dans le domaine de la navigation intérieure, il n'existait pas, avant les présents amendements apportés à la CDNI, de prescriptions visant à empêcher la libération de ces matières dans l'atmosphère.

• Articulation avec le droit interne

Le code de l'environnement comporte des dispositions visant à limiter la pollution atmosphérique définie par son article L. 220-2 comme : « l'introduction par l'homme, directement ou indirectement, ou la présence, dans l'atmosphère et les espaces clos, d'agents chimiques, biologiques ou physiques ayant des conséquences préjudiciables de nature à mettre en danger la santé humaine, à nuire aux ressources biologiques et aux écosystèmes, à influer sur les changements climatiques, à détériorer les biens matériels, à provoquer des nuisances olfactives excessives . »

L'article L. 226-9 dispose : « Lorsqu'une entreprise industrielle, commerciale, agricole ou de services émet des substances polluantes constitutives d'une pollution atmosphérique, telle que définie à l'article L. 220-2, en violation d'une mise en demeure prononcée en application des articles L. 171-7 ou L. 171-8, l'exploitant est puni de deux ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. »

Les vapeurs de cargaisons liquides peuvent être considérées comme une pollution atmosphérique. Cependant, pour que le régime de sanctions prévu par le code de l'environnement soit applicable, il est nécessaire de vérifier la présence ou non de conséquences préjudiciables. La CDNI amendée permet très clairement de définir des seuils à partir desquels le dégazage dans l'atmosphère est interdit.

Le code de l'environnement interdit également de rejeter dans la voie d'eau des substances polluantes lorsque son impact pour la faune et la flore est nuisible. L'article L. 216-6 dispose : « Le fait de jeter, déverser ou laisser s'écouler dans les eaux superficielles, souterraines ou les eaux de la mer dans la limite des eaux territoriales, directement ou indirectement, une ou des substances quelconques dont l'action ou les réactions entraînent, même provisoirement, des effets nuisibles sur la santé ou des dommages à la flore ou à la faune [...], est puni de deux ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. Lorsque l'opération de rejet est autorisée par arrêté, les dispositions de cet alinéa ne s'appliquent que si les prescriptions de cet arrêté ne sont pas respectées. »

La CDNI amendée est donc complémentaire des dispositions prévues par le code de l'environnement et clarifie les seuils pour lesquels le dégazage dans l'atmosphère des cuves des bateaux est interdit.

Concernant les données personnelles, la convention ne prévoit pas de dispositions qui impliqueraient un traitement de ces données. Des réflexions sont en cours sur la numérisation de certains documents de transport (carnets de contrôle des huiles usagées et attestations de déchargement). Les problématiques de protection des données personnelles sont prises en compte dans ces réflexions et les évolutions envisagées sont appelées à s'inscrire dans le cadre des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, ainsi que celles du règlement général sur la protection des données (RGPD).

b. Conséquences environnementales

L'étude des effets attendus de cette interdiction indique que l'interdiction de ventilation proposée dans la CDNI préviendrait 95 % des dégazages nocifs à l'air libre causés par le transport fluvial dans le champ d'application géographique de la convention. Cela ne signifie pas pour autant que l'intégralité des dégazages dans l'atmosphère soit remplacée par des dégazages dans une station de réception des vapeurs : les experts du secteur s'attendent à ce que plus de 60 % des dégazages puissent être évités grâce à des solutions logistiques intelligentes, par exemple en faisant naviguer les bateaux avec la même cargaison ou avec des cargaisons qui sont parfaitement compatibles entre elles. Le dégazage dans une station de réception des vapeurs n'est nécessaire que lorsque la cargaison suivante du bateau est incompatible et que doit être fourni un bateau propre.

La CDNI est basée sur le principe du « pollueur-payeur ». C'est pourquoi les coûts des dégazages nécessaires sont imputés à l'affréteur. Pour les cargaisons liquides aussi, les coûts sont imputés à l'affréteur des marchandises qui pourraient polluer les eaux de surface.

c. Conséquences financières

En vue d'installer les équipements, dénommés « stations de réception », qui sont nécessaires aux opérations de dégazage, les Etats souscrivent à des engagements ainsi précisés à l'article 5.02 : « Les Etats contractants s'engagent à mettre en place ou à faire mettre en place les infrastructures et autres conditions nécessaires au dépôt et à la réception de cargaisons restantes, de résidus de manutention, de résidus de cargaison, d'eaux de lavage et de vapeurs . »

On observe que cette disposition se borne à fixer des objectifs à atteindre. Elle n'oblige pas l'Etat contractant à mettre lui-même en place de telles infrastructures. Dans la pratique, on peut penser que des acteurs privés, tels des groupements de chargeurs concernés, sont en mesure de s'en charger, à l'exemple des montages utilisés pour la mise en place de dépôts pétroliers portuaires. Au demeurant, les besoins en équipements semblent déjà en partie couverts par le parc existant. Pour ceux qui apparaîtront à un stade ultérieur de l'application des mesures prises, l'initiative de la mise en place d'équipements supplémentaires reviendra en priorité aux Etats parties dont sont issus les trafics fluviaux les plus importants sur le Rhin (Pays-Bas, Allemagne).

Ainsi, le rôle de l'Etat et de ses services déconcentrés se limite, aux termes des dispositions nouvelles, à des activités de contrôle de leur mise en oeuvre. L'Etat exerce ce contrôle par le biais des « attestations de déchargement » déjà existantes (partie B de la CDNI) et dans le cadre des compétences qu'il détient au titre notamment de la police de la navigation et de la police de l'eau.

d. Conséquences administratives

L'application de la convention n'aura pas de conséquences sensibles sur l'administration française, les obligations définies par celle-ci et les outils de contrôle étant déjà existants, et faisant l'objet d'un contrôle par les autorités en charge de la police de l'eau et de la police de la navigation dans le cadre de leurs missions existantes.

L'information des services déconcentrés apparait comme la seule contrainte en matière administrative liée à l'approbation de la résolution.

e. Conséquences économiques

L'incidence économique des contraintes nouvelles à mettre en oeuvre en application des modifications apportées à la convention paraît peu significative pour la flotte française.

Le transport de cargaisons liquides sur le territoire français est très majoritairement du transport exclusif (transport de la même substance) ou compatible (transport de substances similaires ne nécessitant pas de nettoyage), par définition non soumis aux obligations de dégazage (article 7.04 (3) du règlement d'application). Hors des frontières, les entreprises françaises sont peu présentes sur le marché du transport rhénan de cargaisons liquides, donc peu exposées aux coûts supplémentaires de mise en oeuvre de la convention.

Une enquête réalisée auprès des professionnels par le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) dans le cadre de l'étude d'impact a montré qu'en cas de besoins de dégazage (travaux sur les bateaux, inspection des citernes), la profession fait appel aux services d'entreprises spécialisées équipées de matériels mobiles et intervenant également sur les citernes fixes, notamment les cuves à fioul domestique. Cette offre de service peut répondre aux besoins ponctuels de dégazage sur le territoire sans nécessiter d'investissements dans des stations de réception fixes dédiées exclusivement au transport fluvial.

V - État des signatures et ratifications

Conformément à l'article 19, paragraphe 4, de la CDNI, la résolution CDNI 2017-I-4 entrera en vigueur le premier jour du sixième mois après le dépôt auprès du dépositaire du dernier instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation. Il est donc indispensable que la France, comme les cinq autres Etats parties à la CDNI, dépose dans les prochains mois son instrument d'approbation pour que la résolution puisse entrer en vigueur.

Le Luxembourg a déposé son instrument d'approbation le 7 février 2020. Les Pays-Bas ont déposé le leur le 3 juillet 2020. L'Allemagne a déposé son instrument le 9 février 2021.

En Belgique, la ratification est prévue pour la fin de l'année 2021. La Suisse n'envisage cependant une ratification qu'au-delà de 2022.

En ce qui concerne la mise en oeuvre en France des nouvelles dispositions de la convention, la transposition en droit national de la CDNI pourrait être jugée trop longue, la résolution ayant été adoptée le 22 juin 2017.

Toutefois, s'il est vrai que la France est l'un des derniers États à achever le processus d'approbation de la convention ainsi amendée, cela peut s'expliquer par sa portée réduite pour notre pays. En effet, les bénéfices qu'elle comporte sont limités, dans la mesure où les rejets de vapeurs par la navigation intérieure sont déjà partiellement encadrés par la réglementation nationale (code de l'environnement, réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement).

Il est par ailleurs à noter que les autres Etats parties n'ont initié leurs procédures d'approbation qu'en 2020.


* 1 CE Delft, « Update estimate emissions degassing inland tank vessels », novembre 2013.

* 2 Directive 92/112/CEE du Conseil du 15 décembre 1992 fixant les modalités d'harmonisation des programmes de réduction, en vue de sa suppression, de la pollution provoquée par les déchets de l'industrie du dioxyde de titane JO L 409 du 31.12.1992, p. 11 ; directive 94/63/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 1994, relative à la lutte contre les émissions de composés organiques volatils (COV) résultant du stockage de l'essence et de sa distribution des terminaux aux stations-service ; directive 1999/13/CE du Conseil du11 mars 1999 relative à la réduction des émissions de composés organiques volatils dues à l'utilisation de solvants organiques dans certaines activités et installations JO L 85 du 29/3/1999, p. 1 ; directive 2000/76/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 décembre 2000 sur l'incinération des déchets JO L 332 du 28/12/2000, p. 91 ; directive 2001/80/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2001 relative à la limitation des émissions de certains polluants dans l'atmosphère en provenance des grandes installations de combustion JO L 309 du 27/11/2001, p. 1 et directive 2008/1/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 janvier 2008 relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution.

* 3 Décret n° 2010-197 du 23 février 2010 portant publication de la convention relative à la collecte, au dépôt et à la réception des déchets survenant en navigation rhénane et intérieure, signée à Strasbourg le 9 septembre 1996.

* 4 Accord européen relatif au transport international des marchandises dangereuses par voies de navigation intérieures (ADN) . Décret n° 2008-495 du 22 mai 2008 portant publication de l'accord européen relatif au transport international des marchandises dangereuses par voies de navigation intérieures (ADN), fait à Genève le 26 mai 2000.

* 5 Directive n° 94/63/CEE du 20/12/94 relative à la lutte contre les émissions de composés organiques volatils (COV) résultant du stockage de l'essence et de sa distribution des terminaux aux stations-service.

* 6 Résolution CDNI 2017-I-4 du 22 juin 2017 relative à la modification de la convention relative à la collecte, au dépôt et à la réception des déchets survenant en navigation rhénane et intérieure et de son règlement d'application - Dispositions concernant le traitement de résidus gazeux de cargaison liquide (vapeurs).

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