L'ORGANISATION DE LA MEDECINE DU TRAVAIL

Table des matières




NOTE DE SYNTHESE

En France, la médecine du travail, d'abord mise en place dans les établissements privés de l'industrie et du commerce, a peu à peu été étendue aux autres secteurs d'activité, de sorte qu'elle s'applique actuellement presque à tous les salariés. Le médecin du travail est un docteur en médecine spécialisé, c'est-à-dire titulaire du certificat d'études spéciales de médecine du travail ou du diplôme d'études spécialisées de médecine du travail.

Il est salarié . Son employeur est le chef d'entreprise lorsque le service médical est constitué à l'intérieur de l'entreprise ; ce qui est le cas dans les plus importantes. En revanche, les entreprises de moindre importance adhèrent en général à un service interentreprises, constitué sous la forme d'un organisme à but non lucratif, doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière, et dont le président est l'employeur du médecin du travail.

Quel que soit son statut juridique, le médecin du travail est soumis au secret professionnel. De plus, sa nomination et son licenciement sont entourés de garanties : ils ne peuvent avoir lieu qu'avec l'accord d'instances représentatives du personnel (comité d'entreprise, comité interentreprises ou commission de contrôle ad hoc ).

La présente étude analyse quatre points relatifs à l'organisation de la médecine du travail : le statut juridique du médecin du travail, son indépendance à l'égard de l'employeur, sa formation, ainsi que les instances qui contrôlent ses activités. Cet examen porte sur cinq pays européens : l' Allemagne , la Belgique , l' Espagne , la Grande-Bretagne et le Luxembourg .

Dans la mesure où tous les pays sous revue ont transposé la directive 89/391/CEE du 12 juin 1989 sur l'amélioration de la santé des travailleurs sur les lieux de travail, l'organisation de la médecine du travail varie assez peu d'un pays à l'autre.

Cependant l'analyse permet de mettre en évidence que :

- en Grande-Bretagne, la médecine du travail n'est pas nécessairement pratiquée par un médecin spécialisé ;

- salarié en Espagne et au Luxembourg, le médecin du travail peut avoir un statut libéral en Allemagne, en Belgique et en Grande-Bretagne ;

- en Belgique, une loi spécifique protège le médecin du travail lorsqu'il est envisagé de mettre fin à son contrat.

1) La Grande-Bretagne est le seul pays où la médecine du travail ne soit pas nécessairement pratiquée par un médecin spécialisé


En effet, dans ce pays, aucun texte n'impose ni présence d'un médecin du travail dans l'entreprise, ni visite médicale préalable à l'embauche, ni surveillance médicale constante. L'employeur a pour seule obligation de faire en sorte que les conditions de travail ne nuisent pas à la santé des travailleurs. Par conséquent, la médecine du travail est organisée selon des formules variables, essentiellement dictées par des considérations économiques. Elle peut être pratiquée par des infirmières spécialisées, par des médecins généralistes ou par des médecins spécialistes de médecine du travail, spécialité officiellement reconnue seulement depuis 1978.

En revanche, dans les quatre autres pays étudiés, la loi confie la surveillance médicale des travailleurs sur les lieux de travail à des médecins du travail spécialisés, c'est-à-dire à des docteurs en médecine spécialistes en médecine du travail ou détenteurs d'un autre diplôme autorisant l'exercice de la médecine du travail.

2) Salarié en Espagne et au Luxembourg, le médecin du travail peut avoir un statut libéral en Allemagne, en Belgique et en Grande-Bretagne

Qu'il appartienne à un service médical propre à une entreprise donnée ou commun à plusieurs, le médecin du travail espagnol ou luxembourgeois est toujours salarié.

En revanche, en Allemagne, les entreprises qui n'ont pas de service de santé autonome et qui n'ont pas choisi d'adhérer à un centre de médecine du travail interentreprises peuvent recourir à un médecin du travail qui exerce sa profession de manière libérale et dont la clientèle est constituée, totalement ou en partie, d'entreprises. De même, en Belgique, les entreprises qui n'ont pas créé un service interne de prévention et de protection au travail disposant d'un département chargé de la surveillance médicale doivent recourir à un service externe. Ces services sont créés par des employeurs qui se regroupent en une association sans but lucratif. Or, une telle association n'est pas nécessairement liée par un contrat de travail au médecin qu'elle emploie. En effet, la loi exige seulement que le contrat passé entre l'association et le médecin garantisse " une collaboration durable avec l'entreprise auprès de laquelle il remplit sa mission ". En Grande-Bretagne, où la médecine du travail s'exerce dans des cadres très différents selon la taille de l'entreprise, le médecin du travail peut également fournir ses prestations dans un cadre libéral.

3) En Belgique, une loi spécifique protège le médecin du travail lorsqu'il est envisagé de mettre fin à son contrat

La loi du 28 décembre 1977 garantissant la protection des médecins du travail a institué une procédure particulière lorsque le chef d'entreprise ou le conseil d'administration de l'association d'employeurs envisage de rompre le contrat qui le lie au médecin du travail.

En effet, l'intéressé et les instances paritaires compétentes doivent être préalablement informés. La loi organise de plus un recours devant la commission de concertation des services médicaux du ministère de l'Emploi et du Travail, puis devant les tribunaux si la commission ne s'est pas prononcée. En cas de transgression de l'interdiction de licenciement émise par la commission de concertation ou par le tribunal, une indemnité est accordée au médecin du travail.

ALLEMAGNE



La loi du 12 décembre 1973 sur la sécurité au travail a rendu obligatoire la nomination d'un médecin du travail par l'employeur dans toutes les entreprises et a établi les missions de celui-ci.

Par ailleurs, elle a autorisé les associations professionnelles industrielles, c'est-à-dire les organismes d'assurance légale contre les accidents du travail, qui sont regroupés par branche professionnelle, " à fixer les obligations légales d'une façon détaillée dans des prescriptions relatives à la prévention des accidents ". Ces prescriptions sont soumises au ministère du Travail et des Affaires sociales, qui doit les approuver.

La loi exige que le médecin du travail ait " une qualification particulière en matière de médecine du travail ". Deux diplômes permettent d'exercer la médecine du travail : celui de médecin du travail et celui de médecin d'entreprise .

La loi exige aussi que le médecin du travail soit lié à l'employeur par un contrat écrit, qui peut être soit un contrat de travail soit un contrat de louage de services . En effet, le médecin du travail peut exercer ses fonctions sous une forme libérale et avoir une clientèle privée constituée exclusivement ou non d'entreprises.

Bien qu'il relève directement de l'employeur, le médecin du travail conserve toute son indépendance sur le plan médical et technique . Il est lié par les règles du secret médical .

I. L'EXERCICE DE LA MEDECINE DU TRAVAIL

1) La place du médecin du travail dans l'entreprise

a) Le statut juridique du médecin du travail

La loi de 1973 sur la sécurité du travail fait obligation à l'employeur de " nommer le médecin du travail par écrit ". Celui-ci est nommé avec " l'accord du conseil d'entreprise ", qui doit aussi donner son accord en cas d'" élargissement ou de réduction des fonctions du médecin du travail ".

La loi indique que le médecin du travail peut être nommé en " qualité de salarié (...) ou non ". La nature du contrat qui lie le médecin du travail à l'entreprise dépend notamment du temps que le médecin doit consacrer à sa mission dans l'entreprise. Ce temps " médical ", qui est fixé par les prescriptions des associations professionnelles industrielles, varie entre quinze minutes et deux heures par an et par salarié, en fonction du nombre de salariés dans l'entreprise et du secteur d'activité.

Le médecin du travail peut être salarié de l'entreprise (à temps complet ou partiel) et donc titulaire d'un contrat de travail . L'entreprise peut aussi conclure avec lui un contrat de louage de services . Dans ce cas, la rémunération du médecin du travail est librement fixée par les parties. C'est l'employeur qui en supporte le coût, estimé entre 150 et 180 DEM par heure (soit entre 500 et 600 FRF).

Les grandes entreprises mettent volontiers en place un service de santé du travail autonome , où le médecin du travail, salarié de l'entreprise, est employé à plein temps.

Les autres entreprises utilisent généralement les services d' un centre de médecine du travail interentreprises , qui peut être géré ou non par une association professionnelle industrielle. La loi de 1973 prévoit en effet que " l'employeur peut s'acquitter de son obligation de nommer des médecins d'entreprise (...) en en chargeant un service commun de médecins d'entreprise ".

Les entreprises, lorsque leurs besoins sont limités, ont aussi la possibilité de recourir à un médecin du travail qui exerce sa profession de manière libérale . Ces médecins du travail exercent leurs activités dans un cadre très concurrentiel , et certains proposent leurs services à des prix très attractifs, parfois au détriment de la qualité des prestations fournies. C'est pourquoi un dispositif de contrôle de qualité des services de médecine du travail s'est mis en place à l'initiative de l'association allemande des médecins du travail, et une grille de critères d'évaluation de qualité vient d'être élaborée.

b) L'indépendance et le secret professionnel

La loi sur la sécurité du travail indique que, quel que soit son statut juridique, " le médecin du travail relève directement " de l'employeur, car ce dernier est responsable de l'application de la loi et de la réglementation en matière de sécurité et de protection du travail.

Cependant, ceci ne porte pas atteinte à son indépendance sur le plan médical et technique, car la loi de 1973 déclare que " les médecins du travail font usage de leurs connaissances professionnelles sans être liés par aucune directive " .

Le médecin du travail est lié par le secret médical . La loi de 1973 indique qu'" ils n'obéiront qu'à leur seule conscience et observeront les règles du secret médical ".

2) La formation du médecin du travail

La loi de 1973 précise que les médecins du travail doivent être " des personnes habilitées à exercer la profession de médecin et qui possèdent des connaissances professionnelles nécessaires en matière de travail pour s'acquitter des tâches qui leur seront confiées ".

Lors de la mise en oeuvre de ce texte, en 1974, l'insuffisance du nombre de médecins qualifiés a conduit les associations professionnelles industrielles et les Länder à habiliter des médecins généralistes et des médecins spécialisés dans d'autres disciplines, sous certaines conditions d'expérience professionnelle. Créée pour des raisons historiques, la catégorie des médecins habilités est appelée à disparaître.

Par ailleurs, il existe deux niveaux de qualification en médecine du travail qui permettent de remplir les missions prévues par la loi.

a) Le médecin spécialiste ou médecin du travail

Il fait quatre années d'études après le doctorat en médecine , qui s'obtient en six ans. Cette formation complémentaire se décompose ainsi :

- vingt-quatre mois de formation supplémentaire en médecine interne, dont douze en hôpital ;

- vingt et un mois de stage en médecine du travail ;

- trois mois de formation théorique en médecine du travail.

b) Le médecin compétent ou médecin d'entreprise

Il fait trois années d'études après le doctorat en médecine . Cette formation complémentaire se décompose ainsi :

- vingt-quatre mois d'activité clinique, comprenant au moins douze mois de formation supplémentaire en médecine interne ;

- neuf mois de formation supplémentaire en médecine du travail ou en médecine d'entreprise dans un centre de formation agréé ;

- trois mois d'enseignement théorique en médecine du travail.

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D'après les données fournies par l'Ordre fédéral des médecins, il y avait, au 31 décembre 1997, 12.776 médecins du travail (temps complet et temps partiel confondus), dont 3.966 avaient la qualification de " médecin du travail " et 6.212 avaient la qualification de " médecin d'entreprise ".

A titre de comparaison, à la même époque, il y avait environ 70.000 ingénieurs et autres spécialistes de la sécurité du travail.

II. LES INSTANCES DE CONTROLE

1) Les médecins-inspecteurs du travail

Chargés de contrôler l'application de la réglementation en médecine du travail , les médecins-inspecteurs du travail sont des fonctionnaires des Länder . Ils n'ont aucun pouvoir hiérarchique sur les médecins du travail et ne peuvent intervenir dans les rapports de ceux-ci avec les salariés.

L'organisation des services des médecins-inspecteurs du travail diffère d'un Land à l'autre.

2) Les inspecteurs des associations professionnelles industrielles

L'observation des prescriptions sur la protection du travail et la protection des accidents est aussi contrôlée par les inspecteurs des associations professionnelles industrielles . Dans cette tâche, ils travaillent en collaboration avec les inspecteurs du travail, dont la mission est de contrôler l'application de l'ensemble des dispositions du droit du travail. L'inspection du travail est une administration technique gérée par les Länder.

3) Le ministère du Travail et des Affaires sociales

La loi du 12 décembre 1973 prévoit que le ministère du Travail et des Affaires sociales peut, avec l'assentiment du Bundesrat, déterminer les mesures que les employeurs, ou certaines catégories d'employeurs, doivent prendre pour s'acquitter des obligations qui leur incombent en vertu de la loi sur la sécurité du travail, dans la mesure où les organismes d'assurance légale contre les accidents du travail n'auraient pas édicté de prescriptions appropriées. Il n'intervient dans le domaine de compétence des organismes d'assurance légale contre les accidents du travail qu'en dernier recours.

BELGIQUE



La loi du 4 août 1996 relative au bien-être des travailleurs lors de l'exécution de leur travail, qui a permis de transposer la directive 89/391/CEE, inclut la protection de la santé au travail dans la politique du bien-être au travail et impose à l'employeur de créer un service interne de prévention et de protection au travail ou, à défaut, de recourir à un service externe agréé qui l'assiste dans la mise en oeuvre de cette politique.

Au sein du service de prévention et de protection au travail, qu'il soit interne ou externe, la surveillance médicale est confiée à un médecin du travail qui assume les fonctions de " conseiller en prévention ". En cette qualité, il fait partie du personnel de l'entreprise ou est lié à l'employeur de façon à " garantir une collaboration durable avec l'entreprise auprès de laquelle il remplit sa mission ". Quel que soit son statut, sa nomination fait l'objet d'une procédure particulière.

La loi du 28 décembre 1977 garantissant la protection des médecins du travail prévoit également une procédure spécifique lorsqu'il est envisagé de mettre fin au contrat du médecin du travail et organise un recours devant la commission de concertation des services médicaux du ministère de l'Emploi et du Travail, puis devant les tribunaux. Le non-respect de l'interdiction de licenciement prononcée par une de ces deux autorités est sanctionné par l'octroi d'une indemnité. L'indépendance technique et morale du médecin, inscrite dans la loi, se trouve ainsi garantie.

Le règlement général pour la protection du travail (RGPT) est un recueil de textes réglementaires qui contient des dispositions relatives notamment aux services médicaux du travail, aux examens médicaux d'embauchage, à la surveillance médicale périodique et au secret médical. On y trouve par exemple le mode de calcul du " temps médical " annuel : une heure par travailleur soumis à des risques définis ; vingt minutes par travailleur soumis à des contraintes ergonomiques (manutention, travail sur écran, poste de sécurité) et huit minutes par travailleur ne subissant aucune contrainte.

I. L'EXERCICE DE LA MEDECINE DU TRAVAIL

1) La place du médecin du travail dans l'entreprise

La loi du 4 août 1996 oblige chaque entreprise à créer un service, interne ou externe, de prévention et de protection au travail, au sein duquel la surveillance médicale est confiée à un médecin du travail qui assume les fonctions de " conseiller en prévention ".

a) Le statut juridique du médecin du travail

Les services de prévention et de protection au travail

La loi du 4 août 1996 impose à l'employeur de créer un service interne de prévention et de protection au travail (SIPP), dont la mission est de l'assister, ainsi que l'ensemble des salariés, dans la mise en oeuvre de la politique de bien-être au travail, étant entendu que les " mesures qui ont trait à la protection de la santé des travailleurs au travail " font partie de cette politique.

L'arrêté royal du 27 mars 1998 relatif au service interne, pris pour l'application de la loi de 1996, indique que l'employeur " crée au sein de ce service interne un département chargé de la surveillance médicale ". Ce département, qui est donc institué et géré par l'employeur, a une direction propre confiée à un (ou plusieurs) médecin(s) du travail, qui assume(nt) les fonctions de conseiller en prévention. Le personnel de ce département exerce ses missions sous la responsabilité exclusive du médecin du travail.

Il a été indiqué au cours des travaux législatifs que les services médicaux d'entreprise mis en place en application de la législation précédente seraient intégrés dans les services internes de prévention et de protection au travail.

La loi de 1996 précise que, " si le service interne ne peut pas exécuter lui-même toutes les missions qui lui ont été confiées (...), l'employeur doit faire appel en complément à un service externe agréé de prévention et de protection au travail (SEPP) ". C'est le cas notamment quand le service interne ne dispose pas d'un département chargé de la surveillance médicale. C'est aussi toujours le cas dans les entreprises de moins de 20 salariés, où l'employeur occupe lui-même la fonction de conseiller en prévention, et dans celles de moins de 200 salariés qui n'appartiennent pas à des secteurs d'activité précisés par l'arrêté du 27 mars 1998 relatif au service interne, dans la mesure où le conseiller en prévention n'a pas de formation spécifique.

Le service externe est créé par des employeurs qui se regroupent en une association sans but lucratif. Il suffit que ces employeurs soient au nombre de trois.

Les services externes se composent de deux sections : l'une chargée de la gestion des risques et l'autre de la surveillance médicale. Les médecins du travail de cette section sont des conseillers en prévention et sont responsables des activités du personnel qui les assiste.

Les employeurs ont jusqu'au 1 er avril 2000 pour conclure un contrat avec un service externe agréé. Les anciens services médicaux communs à plusieurs entreprises peuvent se transformer en section " surveillance médicale " d'un service externe, à condition d'obtenir un agrément avant le 1 er avril 1999.

La nomination des médecins du travail

Pour procéder à la nomination, dans son entreprise, d'un conseiller en prévention (et donc d'un médecin du travail), l'employeur doit obtenir l'accord préalable du comité pour la prévention et la protection au travail. A défaut, l'employeur demande l'avis de l'administration de l'hygiène et de la médecine du travail, qui entend les parties concernées et tente de concilier les positions de chacun. En l'absence de conciliation, cette administration donne un avis notifié à l'employeur par pli recommandé. L'employeur informe alors à son tour le comité pour la prévention et la protection au travail dans un délai de trente jours, avant de prendre sa décision.

De même, le conseil d'administration de l'association créée par les employeurs doit obtenir l'accord préalable des membres du comité d'avis paritaire, composé de membres représentant les employeurs associés et de membres représentant les travailleurs des employeurs contractants, pour désigner le conseiller en prévention qu'est nécessairement le médecin du travail.

Le contrat entre le médecin du travail et l'entreprise

C'est l'employeur, ou le conseil d'administration de l'association sans but lucratif dans le cas du service interentreprises, qui engage le médecin du travail.

S'agissant du contrat qui s'établit entre les deux parties, la doctrine et la jurisprudence ont longtemps hésité entre deux qualifications : contrat de travail, qui implique un lien de subordination, ou contrat d'entreprise, qui n'en implique pas. En vertu de ce dernier, la partie appelée entrepreneur s'engage vis-à-vis de l'autre, le maître d'ouvrage, à réaliser un travail donné pour un prix déterminé en effectuant des actes matériels ou intellectuels, sans avoir de pouvoir de représentation.

Dans le service interne , le médecin du travail, comme tout conseiller en prévention, " fait partie du personnel de l'employeur ". Il est donc lié par un contrat de travail .

Dans le service externe , le médecin du travail peut être lié à l'association sans but lucratif par un contrat de travail ou par un contrat d'entreprise, la loi exigeant seulement que " cette relation contractuelle soit établie de façon à donner des garanties suffisantes pour parvenir à une collaboration durable " entre le médecin du travail et l'entreprise auprès de laquelle il remplit sa mission. Ainsi, il peut donc avoir le statut de salarié ou d'indépendant .

La fin du contrat

La loi du 28 décembre 1977 garantissant la protection des médecins du travail a institué une procédure particulière lorsque le chef d'entreprise ou le conseil d'administration de l'association d'employeurs envisage de rompre le contrat qui le lie au médecin du travail.

Ainsi il est prévu :

- une notification préalable écrite " des motifs de rupture du contrat et de la preuve de l'existence de ces motifs ", ainsi que de l'intention de rompre le contrat, au médecin du travail et aux membres du comité pour la prévention et la protection au travail ou du comité d'avis paritaire ;

- l'avis du comité pour la prévention et la protection au travail ou du comité d'avis paritaire en cas de désaccord du médecin du travail, qui " doit avoir été entendu et appelé " ;

- un recours devant la commission de concertation des services médicaux du ministère de l'Emploi et du Travail , qui tente de concilier les points de vue et qui, en cas d'échec, se prononce sur la question de l'indépendance technique et morale du médecin du travail ou de sa compétence ;

- un recours devant les tribunaux si la commission de concertation ne s'est pas prononcée ou n'a pas pu se prononcer dans un délai de deux mois ;

- une indemnité en cas de transgression de l'interdiction de licenciement émise par la commission de concertation ou le tribunal compétent.

b) L'indépendance et le secret professionnel

La loi du 4 août 1996 prévoit que le conseiller en prévention " remplit sa mission en toute indépendance vis-à-vis de l'employeur et des travailleurs ". Les arrêtés d'application indiquent que les divergences relatives à l'indépendance du conseiller en prévention sont soumises à l'avis de l'administration de l'hygiène et de la médecine du travail s'agissant d'un service interne, ou à celui de la commission de suivi (1( * )) dans le cas d'un service externe.

La loi du 28 décembre 1977 garantissant la protection des médecins du travail prévoit, à l'article 5, qu'il ne peut y avoir rupture du contrat lorsque " les motifs invoqués portent atteinte à l'indépendance technique et morale de ce médecin ". Cette indépendance est confortée par les dispositions du règlement général pour la protection du travail (RGPT), qui lui laisse des initiatives quant à la fréquence et la nature des examens médicaux à pratiquer.

L'article 148 septiès du RGPT impose au médecin du travail de garder confidentielles les données médicales concernant les personnes, ainsi que toutes les informations qu'il a eu à connaître concernant l'entreprise (installations, procédés de fabrication, composition des produits...).

Par ailleurs, le code de déontologie médicale, dans son chapitre sur le secret professionnel du médecin, précise que celui-ci est d'ordre public et que " le médecin du travail peut partager avec le personnel de l'équipe médicale, lui-même tenu au secret professionnel, les seuls renseignements indispensables à la réalisation de sa mission ". De plus, " la fiche d'examen médical prévue par la loi par laquelle le médecin du travail communique à l'employeur sa décision, ne peut contenir aucune indication diagnostique ". Le code de déontologie reprend ainsi les dispositions figurant déjà dans le RGPT.

En revanche, le médecin du travail communique au salarié toutes les informations relatives à l'exposition à certains risques, comme les radiations ionisantes par exemple.

2) La formation du médecin du travail

L'arrêté royal du 27 mars 1998 relatif aux services externes pour la prévention et la protection du travail indique, pour les services externes et internes, la formation requise du conseiller en prévention qui s'occupe de la médecine du travail. C'est un docteur en médecine qui :

" - soit est porteur d'un diplôme qui autorise l'exercice de la médecine du travail et qui, à la date d'entrée en vigueur du présent arrêté, est attaché en qualité de médecin du travail à un ou plusieurs services médicaux du travail agréés ", la liste des diplômes d'enseignement complémentaire de la médecine du travail étant fixée par un arrêté royal du 12 janvier 1968 ;

" - soit est porteur du titre de médecin spécialiste en médecine du travail ;

" - soit a réussi la formation théorique pour obtenir le titre de médecin spécialiste en médecine du travail et obtient ce titre au plus tard dans les trois ans qui suivent
".

La formation de base en médecine dure six ans. Selon l'arrêté ministériel du 11 mai 1995, l'agrément autorisant à porter le titre professionnel de médecin spécialiste en médecine du travail s'obtient après une formation correspondant au moins à quatre années à temps plein, comprenant une formation spécifique de deux ans et des stages agréés, ainsi que la présentation d'un travail scientifique et personnel.

II. LES INSTANCES DE CONTROLE

La surveillance du respect de ces dispositions est confiée à l'administration de l'hygiène et de la médecine du travail qui a recours, pour accomplir sa mission, aux services de l'inspection médicale du travail composée de médecins-inspecteurs du travail et d'inspecteurs adjoints d'hygiène du travail.

ESPAGNE



La loi 31/1995 sur la prévention des risques professionnels a permis non seulement de transposer la directive 89/391/CEE, mais aussi de moderniser le droit espagnol en matière d'hygiène et de sécurité au travail.

La loi, qui se fixe notamment comme objectif l'amélioration de la santé des travailleurs, prévoit la création, dans chaque entreprise, d'un service interdisciplinaire de prévention , dont la taille et la composition varient avec l'importance de l'entreprise et les risques auxquels les travailleurs sont soumis.

Le décret royal 39/1997 sur les services de prévention, pris pour l'application de la loi de 1995, énumère, parmi toutes les missions de ces services, " la surveillance et le contrôle de la santé des travailleurs ". Il précise que les services de prévention qui sont habilités à assumer de telles fonctions doivent comporter un médecin spécialiste en médecine du travail ou un médecin diplômé en médecine d'entreprise . Il existe en effet deux qualifications permettant d'exercer la médecine du travail.

I. L'EXERCICE DE LA MEDECINE DU TRAVAIL

1) La place du médecin du travail dans l'entreprise

Les services de prévention, prévus par la loi de 1995 et qui remplacent les services médicaux d'entreprise qui existaient précédemment, peuvent, d'après le décret royal de 1997, prendre plusieurs formes.

- Dans les entreprises les plus petites, le chef d'entreprise peut assumer lui-même les activités de prévention, à l'exception de celles qui se rapportent à la surveillance de la santé des travailleurs.

- Le chef d'entreprise peut désigner des travailleurs chargés de s'occuper des activités de prévention, à l'exception de celles qui supposent une compétence particulière.

- Il doit créer un service interne de prévention lorsqu'il y a plus de 500 salariés, lorsqu'il y en a entre 250 et 500 et que l'entreprise exerce ses activités dans un secteur dangereux, ou lorsque l'administration compétente le lui a demandé. Le service interne doit comporter au moins deux spécialistes de l'une des disciplines suivantes : médecine du travail, sécurité du travail, hygiène du travail, ergonomie et psychosociologie appliquée.

- Il doit recourir à un (ou plusieurs) service(s) de prévention externe(s) agréé(s) lorsque la désignation de délégués à la prévention est insuffisante, mais que la taille de l'entreprise ne justifie pas la création d'un service interne. Le service externe peut être organisé par la Mutuelle des accidents du travail et des maladies professionnelles. Les services externes doivent comporter au moins un expert de chacune des disciplines suivantes : médecine du travail, sécurité du travail, hygiène du travail, ergonomie et psychosociologie appliquée.

- Plusieurs entreprises d'un même secteur d'activité ou d'une même zone géographique peuvent se grouper pour créer un service commun, doté ou non de la personnalité morale. Ces services communs doivent répondre aux mêmes critères que les services propres à une entreprise.

En tout état de cause, les services de prévention qui ont des activités de " surveillance et de contrôle de la santé des travailleurs " doivent comporter un médecin spécialiste en médecine du travail ou diplômé en médecine d'entreprise , ainsi qu'un " aide technique sanitaire ", c'est-à-dire un infirmier d'entreprise.

a) Le statut juridique du médecin du travail

Le médecin du travail est toujours salarié : de l'entreprise, du service de prévention externe ou de la Mutuelle des accidents du travail et des maladies professionnelles.

b) L'indépendance et le secret professionnel

Malgré la nécessité de coordonner les travaux des différents membres des services de prévention, la confidentialité des données médicales personnelles doit être assurée. Comme n'importe quel autre médecin, le médecin du travail est tenu au respect du secret professionnel.

2) La formation du médecin du travail

Deux types de diplômes, accessibles en fin d'études médicales, permettent d'exercer la médecine du travail : le diplôme de médecin d'entreprise et celui de spécialiste en médecine du travail .

- Le premier est obtenu après un an de scolarisation à raison de trois heures par jour. L'enseignement, essentiellement technique, est réalisé sous la tutelle de l'Institut national d'hygiène et de médecine du travail (qui est l'organisme qui dépend du ministère du Travail et qui est chargé de l'élaboration de la réglementation en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles).

- Le second permet d'accéder à la spécialité reconnue que constitue la médecine du travail. La qualification de médecin du travail s'obtient en trois ans. Pendant cette période, les étudiants suivent des cours théoriques adaptés (ergonomie, législation et organisation du travail, traumatologie et réadaptation, toxicologie, pathologies liées au travail...), ainsi que des enseignements pratiques dans les laboratoires de la faculté, en milieu hospitalier et à l'occasion de visites dans des entreprises. La troisième année se déroule essentiellement sous forme de stages. Le futur spécialiste doit en réaliser au moins trois dans des entreprises qui ont des activités différentes.

II. LES INSTANCES DE CONTROLE

La sécurité et l'hygiène du travail font traditionnellement partie des compétences de l'inspection du travail .

De plus, la loi de 1995 a créé la Commission nationale de sécurité et de santé au travail . Composée de représentants de chacune des communautés autonomes et de l'administration nationale, ainsi que des organisations patronales et syndicales, cette commission est chargée de coordonner les actions de toutes les administrations en matière de prévention des risques et de faire des propositions pour améliorer la politique et la réglementation relatives à la santé et à la sécurité au travail.

GRANDE-BRETAGNE



La médecine du travail s'est constituée sur une base volontaire , puisqu'aucun texte de portée générale n'impose ni médecin du travail dans l'entreprise, ni visite médicale préalable à l'embauche, ni surveillance médicale.

La loi du 31 juillet 1974 (2( * )) relative à la santé et à la sécurité du travail oblige l'employeur " à assurer dans la mesure du possible la santé (...) des salariés ", comme celle des tiers, et exige en retour du salarié " qu'il prenne raisonnablement soin de sa santé ", ainsi que de celle de ses collègues.

Par ailleurs, selon la loi du 26 août 1992 relative à la gestion de la santé et de la sécurité au travail , " l'employeur est tenu de se livrer à une évaluation suffisante et adéquate des risques pour la santé et la sécurité auxquels sont exposés ses salariés au travail ". Il doit " veiller à procurer à ses salariés une surveillance médicale adéquate, en considération des risques pour la santé et la sécurité qu'il a identifiés dans l'évaluation des risques ". L'organisation de la santé au travail est donc laissée à la libre appréciation de l'employeur, qui a pour seule obligation de faire en sorte que les conditions de travail ne nuisent pas à la santé.

La loi de 1981 sur les premiers secours n'impose à l'employeur que de prévoir des soins de premiers secours adaptés et ne requiert en aucune façon la présence d'un médecin du travail. L'employeur peut satisfaire à ses obligations en désignant une personne ayant un diplôme de secouriste et en fournissant une trousse de premiers secours.

A côté de ces textes de portée générale, des textes réglementaires spécifiques à certaines professions ou à certains secteurs particulièrement dangereux, ainsi que des codes de bonne conduite agréés prévoient une surveillance médicale régulière , qui est alors effectuée par les médecins du Service consultatif de médecine du travail, service appartenant à l'Exécutif de santé et de sécurité, un des deux organismes publics mis en place par la loi de 1974.

L'employeur n'étant tenu qu'à une obligation de résultat, la santé au travail prend des formes variées, surtout dictées par des considérations économiques . La médecine du travail peut être pratiquée par une infirmière spécialisée, un médecin généraliste, ou un médecin spécialiste de la médecine du travail, et ceci dans des cadres différents selon la taille de l'entreprise : service autonome, service interentreprises ou simple contrat de louage de services.

I. L'EXERCICE DE LA MEDECINE DU TRAVAIL

1) La place du médecin du travail dans l'entreprise

a) Le statut juridique du médecin du travail

Les services de santé au travail existent en dehors de toute obligation et sont librement organisés par l'employeur, qui a toute latitude pour juger de la qualification du personnel employé.

Ces services doivent répondre à une double exigence de rentabilité et de qualité, car l'employeur, qui recherche une protection au moindre coût, n'hésite pas à changer de prestataire s'il n'est pas satisfait.

L'employeur peut choisir de recourir à des infirmières spécialisées en santé du travail . Celles-ci sont salariées ou exercent de manière libérale en se regroupant avec d'autres infirmières. Elles font une première sélection des problèmes de santé du personnel au cours d'un entretien et dirigent les cas les plus sérieux vers un médecin généraliste.

L'employeur peut également passer un accord avec un médecin généraliste pour qu'il effectue des actes de médecine du travail pendant une période déterminée ou à intervalles réguliers.

Dans les grandes entreprises cependant, on trouve des services de santé autonomes avec des équipes médicales composées d'infirmières, souvent spécialisées, de médecins généralistes ou de médecins spécialistes en médecine du travail.

Les entreprises moyennes utilisent davantage les prestations offertes par des services interentreprises de médecine du travail , qui sont des organismes privés à but lucratif : groupements de médecins indépendants ou centres médicaux appartenant à des organismes de prévoyance, des mutuelles, ou des assurances médicales privées, comme la British United Provident Association Ltd (BUPA). Il peut aussi s'agir de centres intégrés dans des hôpitaux, car ceux-ci fonctionnent comme des établissements publics autonomes et doivent s'autofinancer en trouvant de nouveaux clients.

Ainsi, le médecin du travail peut être lié au chef d'entreprise par un contrat de travail si ce dernier a créé un service de santé autonome. Dans les autres cas, c'est-à-dire si le chef d'entreprise s'est entendu avec un médecin pour que celui-ci effectue à titre libéral certaines missions ou s'il utilise les prestations commerciales offertes par un centre de médecine du travail interentreprises, il s'agit d'un contrat de louage de services.

b) L'indépendance et le secret professionnel

L'employeur a la possibilité de demander au médecin du travail la communication des dossiers médicaux des salariés, des anciens salariés, des candidats à l'emploi et des travailleurs intérimaires. Cette possibilité est toutefois encadrée par la loi de 1988 sur l'accès au dossier médical , qui prévoit une procédure essentiellement écrite, destinée à protéger le salarié en l'informant, d'une part, de ses droits et, d'autre part, de la volonté de son employeur, et en établissant la preuve du consentement de l'intéressé.

Le médecin du travail, quant à lui, doit :

- s'assurer du consentement du salarié, qui peut être exprès ou tacite selon que le salarié s'est ou non manifesté au cours du délai de vingt et un jours mentionné ci-dessous ;

- porter au dossier les modifications demandées, sauf à mentionner qu'elles sont portées à la demande du salarié, s'il a des objections de nature médicale ;

- respecter un délai de vingt et un jours avant de communiquer le dossier à l'employeur.

Le médecin du travail peut toujours refuser de communiquer un dossier à l'employeur :

- si ceci risque de porter préjudice au salarié ;

- si le dossier contient des informations que le médecin préfère garder secrètes ;

- si un tiers est en jeu dans le dossier.

Cependant, il est arrivé que certains médecins, pour maintenir de bonnes relations commerciales, réalisent des dépistages en matière de toxicomanie, d'alcoolisme et de sida, à la demande des employeurs, et leur transmettent directement les résultats sans que les salariés en soient informés.

2) La formation du médecin du travail

Le plus souvent, le médecin du travail est un généraliste.

La formation des généralistes comporte : deux ans de cours théoriques, trois ans de cours cliniques, période pendant laquelle l'étudiant suit aussi des cours théoriques sur tous les aspects de la médecine, et une année " préalable à l'inscription définitive à l'ordre des médecins " accomplie en hôpital.

Au cours de ces études, l'étudiant en médecine reçoit très peu d'enseignements en médecine du travail, mais peut, une fois devenu médecin, préparer un diplôme de médecine du travail sans pour autant devenir un spécialiste.

Par ailleurs, pour devenir médecin diplômé en médecine du travail, spécialité officiellement reconnue depuis 1978, et être inscrit à l'ordre des médecins spécialistes, la formation est la suivante :

- deux ans de formation professionnelle générale après l'année de formation en hôpital ;

- quatre ans de formation spécialisée supérieure essentiellement effectués dans des postes agréés à cet effet, avec remise d'un mémoire sur un sujet de médecine du travail.

Il y a encore assez peu de médecins spécialistes en médecine du travail. Un sondage récent indique que les services de santé au travail qui utilisent du personnel qualifié en médecine du travail (médecins ou infirmières) existent dans 68 % des entreprises de plus de 25 personnes, et dans 5 % seulement des entreprises de moins de 25 employés.

II. LES INSTANCES DE CONTROLE

La loi relative à la santé et à la sécurité de 1974 a institué deux organismes publics, la Commission de santé et de sécurité (HSC) et l' Exécutif de santé et de sécurité (HSE) .

1) La Commission de santé et de sécurité

Elle est chargée de conseiller le gouvernement et de faire progresser la réglementation en matière de santé et de sécurité, notamment par l'élaboration de codes de conduite.

Ainsi, elle a approuvé les codes de bonne conduite qui prévoient une surveillance médicale particulière dans plusieurs domaines : substances dangereuses, plomb, amiante, radiations ionisantes.

2) L'Exécutif de santé et de sécurité

Il veille à la mise en oeuvre de la réglementation, par l'intermédiaire de son service consultatif de médecine du travail et de ses inspecteurs de l'hygiène et de la sécurité.

a) Le Service consultatif de médecine du travail (EMAS)

Ce service, qui fait partie de l'Exécutif de santé et de sécurité, est composé d'environ 40 médecins et 60 infirmières spécialisés en médecine du travail.

Sa mission s'effectue auprès du gouvernement, de la Commission santé et sécurité, des organisations d'employeurs, des syndicats et des praticiens en médecine du travail, et consiste à les informer et à les conseiller en matière de santé et d'emploi.

Par ailleurs, ces médecins et infirmières réalisent des enquêtes dans le domaine des maladies professionnelles. Ils ont les mêmes pouvoirs que les inspecteurs de l'Exécutif de santé et de sécurité.

La surveillance médicale des personnels exposés à certains risques comme le plomb, l'amiante et les radiations, prévue par des textes spécifiques, est mise en oeuvre par les médecins du Service consultatif de médecine du travail ou par des médecins agréés par ce service.

b) Les inspecteurs de l'hygiène et de la sécurité

Au sein de l'Exécutif de santé et de sécurité il existe un corps d'inspecteurs de l'hygiène et de la sécurité dont la mission, assortie de pouvoirs très larges, est de contrôler la bonne application de la réglementation, y compris dans le domaine de la médecine du travail.

Ces inspecteurs ne contrôlent pas l'activité des médecins du travail, mais le respect par l'employeur de ses obligations dans le domaine de la santé et de la sécurité. Ils peuvent notamment adresser des mises en demeure aux employeurs.

* *

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A côté de ce corps d'inspecteurs, il existe des inspecteurs de santé environnementale , qui sont nommés par les autorités locales et qui ont les mêmes attributions que les précédents, mais qui n'interviennent que dans les entreprises commerciales et de service.

Leur rôle tend à se développer et leur nombre dépasse celui des inspecteurs de l'Exécutif de santé et de sécurité.

LUXEMBOURG



La loi du 17 juin 1994 relative aux services de santé au travail, qui a transposé la directive 89/391/CEE dans le secteur privé, organise une surveillance médicale des travailleurs sur les lieux de travail. Elle la confie à des médecins du travail exerçant dans des services de santé au travail d'entreprise, dans des services de santé interentreprises ou dans le Service national de santé au travail (SNST).

La loi prévoit un médecin du travail pour 5.000 travailleurs, sans définir ni le nombre d'heures de surveillance médicale par salarié et par an, ni le temps que le médecin du travail doit consacrer à sa mission.

Le médecin du travail est en général occupé à plein temps et ne peut exercer ses fonctions à titre libéral. Il pratique une médecine préventive. Son indépendance professionnelle est garantie. Il est soumis au secret médical et au secret professionnel.

I. L'EXERCICE DE LA MEDECINE DU TRAVAIL

1) La place du médecin du travail dans l'entreprise

a) Le statut juridique du médecin du travail

La loi de 1994 confie l'organisation de la surveillance médicale et de la prévention des accidents et des maladies professionnelles à trois catégories de services de santé au travail , qui constituent les cadres dans lesquels le médecin du travail exerce ses fonctions et qui se substituent aux anciens services de santé, autonomes ou interentreprises, qui s'étaient créés sur une base volontaire.

Les services de santé au travail d'entreprise

Ils sont obligatoirement organisés à l'intérieur de l'entreprise par :

- " tout employeur occupant régulièrement plus de 5.000 travailleurs " ;

- " tout employeur occupant régulièrement plus de 3.000 travailleurs dont au moins 100 travailleurs occupés à un poste les exposant à un risque de maladie professionnelle ou à un poste de sécurité ".

Le médecin du travail est alors lié à l'employeur par un contrat de travail .

En pratique, seules deux grandes entreprises, Dupont de Nemours et les Chemins de fer luxembourgeois, ont créé chacune un service autonome dans lequel elles emploient un médecin du travail.

Les services de santé au travail interentreprises

Ils sont créés par des entreprises qui se regroupent. Il y a quatre grands services interentreprises correspondant aux secteurs sidérurgique, bancaire, industriel et hospitalier. Ils emploient respectivement trois, trois, six et deux médecins du travail.

Le nombre des médecins du travail est considéré comme insuffisant dans les services interentreprises du secteur bancaire (trois médecins pour environ 23.000 salariés) et du secteur industriel (six médecins pour environ 41.000 salariés).

Les médecins du travail sont alors, comme dans les services de santé d'entreprise, liés à l'employeur, c'est-à-dire à l'association d'entreprises à l'origine de la création du service, par un contrat de travail .

A côté de leurs centres médicaux, ces grands services interentreprises ont aménagé dans certaines entreprises des locaux pour pratiquer des examens médicaux.

Le Service national de santé au travail (SNST)

Selon la loi du 17 juin 1994, les entreprises qui n'ont pas opté pour l'un des deux systèmes précités doivent recourir au SNST.

C'est un établissement public doté de la personnalité juridique, placé sous la surveillance du ministère de la Santé et sous l'autorité d'un comité directeur paritaire (représentants des salariés et des employeurs) dont le président est un fonctionnaire de l'Etat. Il emploie actuellement vingt médecins du travail et dispose de quatre grands centres régionaux pour s'occuper d'environ 112.000 salariés.

Son financement est assuré " intégralement par une cotisation à la charge de tous les employeurs optant pour le recours à ce service ".

Ce service assure la santé au travail dans les petites et moyennes entreprises, notamment celles du commerce et de l'artisanat et couvre ainsi la grande majorité des salariés du secteur privé.

Dans le SNST, les médecins du travail ont à ce jour le statut de salarié du secteur privé. Cependant, des modifications devraient être adoptées, car la loi précitée devrait être amendée prochainement et un règlement grand-ducal relatif au statut du personnel du SNST devrait paraître.

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Quel que soit leur employeur, l'ensemble des médecins du travail est soumis à la législation du travail de droit commun : il n'existe aucune procédure particulière pour les nommer ou pour mettre fin à leur contrat.

Il y a actuellement trente-six médecins du travail exerçant à plein temps dans les différents services de santé au travail. Ils sont aidés par cinquante secrétaires et assistants médicaux.

b) L'indépendance et le secret professionnel

L'indépendance technique et professionnelle des médecins du travail est garantie par la loi de 1994. De plus, la loi, si elle impose des examens médicaux, n'en précise cependant pas la nature, sauf dans des textes spécifiques relatifs à la surveillance médicale de salariés exposés à certains risques.

Le secret médical doit être strictement observé. Le médecin du travail ne fait état que de l'aptitude ou de l'inaptitude du salarié pour le poste envisagé " sans indication de diagnostic ". L'employeur ne peut en aucun cas consulter le dossier médical du salarié.

Par ailleurs, l'article 17 interdit le dépistage direct ou indirect du sida à l'occasion d'examens médicaux en relation avec le contrat de travail.

Pour réaliser sa mission, " le médecin du travail a libre accès à tous les lieux de travail, aux installations, aux informations ayant trait aux procédés, normes de travail, produits, matières et substances ". En contrepartie, il est tenu de " garder le secret de toute information confidentielle " qu'il pourrait recueillir.

2) La formation du médecin du travail

L'article 11 de la loi de 1994 prévoit que le médecin du travail doit remplir l'une des conditions de qualification suivantes :

- être un médecin spécialiste en médecine du travail ;

- " être autorisé à exercer la profession de médecin spécialiste dans une spécialité autre que la médecine du travail et justifier en outre d'une formation spécifique en médecine du travail de deux ans au moins, sanctionnée par un diplôme ou titre ".

Pour tenir compte du nombre insuffisant de médecins du travail au moment de l'entrée en vigueur de la loi, celle-ci a prévu que les médecins ayant pratiqué la médecine du travail à temps plein pendant au moins cinq ans et qui en ont fait la demande au ministre de la Santé peuvent être autorisés à exercer.

A titre transitoire, pendant une période de cinq ans, la loi autorise les services de santé au travail " à avoir recours à des médecins ne remplissant pas les conditions de formation précitées et exerçant également la médecine de manière libérale ".

Il n'y a pas d'universités au Luxembourg. Les étudiants en médecine luxembourgeois partent donc à l'étranger pour suivre leurs études : 80 % vont en Belgique, les 20 % restant choisissent l'Allemagne ou l'Autriche, puis la France. L'autorisation d'exercice de la médecine est soumise à la reconnaissance du diplôme obtenu par le Luxembourg. La moitié des médecins du travail sont de nationalité étrangère : française, belge ou allemande.

II. LES INSTANCES DE CONTRÔLE

L'article 7 de la loi de 1994 a créé " une division de la santé au travail auprès de la direction de la santé " dépendant du ministère de la Santé.

" Elle remplit sa mission en étroite collaboration avec l'inspection du travail et des mines " qui dépend du ministère du Travail et de l'Emploi.

Sa mission est la suivante :

- " elle assure la coordination et le contrôle des services de santé au travail en ce qui concerne leur organisation et leur fonctionnement ;

- " elle assure conjointement avec l'inspection du travail et des mines "
l'application de la réglementation.

Le médecin du travail ne fait donc l'objet d'aucun contrôle direct de la part de la division de la santé au travail.

Par ailleurs, cette division fait office d'instance de recours contre les constats d'aptitude ou d'inaptitude établis par le médecin du travail.



(1) La commission de suivi, créée auprès du ministère de l'Emploi et du Travail, est composée de deux fonctionnaires de ce ministère assurant la présidence et la vice-présidence, de trois membres représentant respectivement les travailleurs et les employeurs et de six membres siégeant en qualité d'experts.

(2) La loi s'applique aussi en Ecosse sous réserve de quelques dispositions réglementaires.



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