L'arrêt rendu le 12 juillet 1906 par la cour de cassation n'a guère convaincu les plus fervents antidreyfusards. Faute de pouvoir attaquer directement cette décision, c'est sur les écrits de Zola que se focalisent les adversaires de la proposition de loi. Même ceux qui ont admis l'innocence de Dreyfus, tel le sénateur René Bérenger, acceptent mal de récompenser une œuvre qui les emplit d'indignation, parce qu'elle est jugée immorale et antipatriotique. Les orateurs qui se succèdent semblent ne pas trouver de mots assez forts pour exprimer leur dégoût. Pour Henri Ponthier de Chamaillard], « l'œuvre d'Emile Zola charrie un fleuve trop large de boue, d'immondices et d'obscénités. [...] [Elle] a contribué plus que toute autre à développer, à propager cette plaie honteuse, odieuse, cette gangrène hideuse de la pornographie littéraire. »

Citant avec délectation des critiques d'Anatole France antérieures à l'Affaire et à la réconciliation des deux écrivains, il qualifie la Terre de « Géorgiques de la crapule » et se refuse à envoyer son auteur au Panthéon. René Bérenger adopte le même ton. Il reproche à Zola d'avoir « avili son talent par de honteuses et habituelles obscénités » ou encore d'avoir rendu la pornographie « générale et publique ». A l'appui de sa demande d'ajournement, Emmanuel de Las-Cases dénonce un « matérialisme terre à terre des plus déplorables. » D'autres encore, comme Gustave de Lamarzelle ou Dominique Delahaye, estiment qu'il faudrait demander un huis-clos pour pouvoir citer l'écrivain.

Tous reprochent à Zola les portraits peu révérencieux qu'il brosse de chaque couche sociale, notamment ceux de la bourgeoisie dans Pot-Bouille et de la paysannerie dans La Terre. Plus que tout, on ne lui pardonne pas La Débâcle , où l'armée française est dépeinte comme « un troupeau indiscipliné, lâche, fuyard » (Las-Cases). L'ouvrage est considéré comme un trophée indûment offert à l'ennemi triomphant, un camouflet pour la patrie. Las-Cases met en garde : Zola est un « miroir déformant » de la société. En le consacrant, on ratifie son analyse et on humilie la France.