LE JARDIN DU LUXEMBOURG DURANT LA GUERRE DE 1870

La haine et la peur suscitées par les Communards, les péchés dont ils se sont rendus coupables aux yeux des Versaillais, impliquent un châtiment. Si Thiers promet une expiation dans un cadre légal, les exécutions sommaires sont pourtant nombreuses pendant la Semaine sanglante et une justice expéditive se met en place. Des cours prévôtales - cours martiales sous la responsabilité d'un prévôt - sont instituées : leur nombre, leur siège et leur juridiction avaient été fixés avant l'entrée des troupes dans Paris.

Le Palais du Luxembourg, placé sous la direction du général de Cissey, accueille l'une de ces cours. « Ce général d'Empire - rapporte Lissagaray dans son Histoire de la Commune de 1871 - perdu de sales dettes dont il mourut et qui, ministre de la Guerre, laissa surprendre par sa maîtresse, une Allemande, le plan d'un des nouveaux forts de Paris, avait fait du Luxembourg l'un des abattoirs de la rive gauche »

Un conseil de guerre est installé dans le Palais. Cours et caves sont aménagées en prison. Selon Lissagaray, « les victimes de la cour prévôtale étaient d'abord jetées dans une cave en forme de long boyau où l'air ne pénétrait que par une étroite ouverture ». Les interrogatoires, menés par le prévôt, un capitaine de gendarmerie, laissent peu de chance aux présumés coupables. Il suffit alors d'avoir soigné des fédérés ou d'avoir professé des idées socialistes pour être condamné à mort sans avoir commis d'autre délit. On dit ainsi au docteur Tony-Moilin : « Vous êtes l'un des chefs du socialisme et un des hommes les plus dangereux : ces gens-là, on s'en débarrasse. Avez-vous quelque chose à ajouter pour votre défense ? »