Réunion de la commission des affaires européennes du jeudi 25 juin 2009


Table des matières

-->

Disponible au format Acrobat (135 Koctets)


Institutions européennes

Présentation des priorités de la
présidence suédoise de l'Union européenne

Audition de M. Gunnar Lund, ambassadeur de Suède en France

M. Hubert Haenel :

Monsieur l'Ambassadeur, dans quelques jours, la Suède va accéder pour la seconde fois à la présidence de l'Union européenne. Assurer la présidence de l'Union européenne constitue toujours un évènement important pour l'État concerné. De plus, votre présidence intervient à un moment où l'Europe est confrontée à de nombreux défis avec la ratification en cours du traité de Lisbonne, la gestion de la crise financière, les progrès nécessaires dans la lutte contre le changement climatique ou encore le programme des réformes dans le domaine de la justice et des affaires intérieures.

Je vous remercie donc d'avoir accepté de venir aujourd'hui au Palais du Luxembourg devant la commission des affaires européennes du Sénat pour préciser le programme de la présidence suédoise. Suivant une tradition désormais bien établie, nous vous entendons aujourd'hui en tant qu'ambassadeur de l'État accédant à la présidence et nous recevrons prochainement notre ambassadeur en Suède afin d'avoir une vision complète du contexte et des enjeux de celle-ci.

M. Gunnar Lund :

C'est un honneur et un plaisir d'évoquer devant vous les perspectives de la deuxième présidence suédoise de l'Union européenne. En effet, la Suède a adhéré à l'Union européenne en 1995 et a déjà assuré la présidence de l'Union européenne en 2001. Et cette expérience nous sera très utile dans les mois à venir. La priorité était alors à l'élargissement de l'Union européenne vers l'est, élargissement qui a depuis été réalisé. Mais cette présidence a surtout constitué un tournant dans les relations entre l'Union européenne et les Suédois car ces derniers étaient auparavant eurosceptiques. Elle a en effet représenté ce moment décisif à partir duquel le peuple suédois a véritablement adhéré à l'Union européenne. Et ce sentiment d'appartenance à l'Union européenne ne cesse de se renforcer.

Depuis 2006, le gouvernement suédois est composé d'une coalition de quatre partis de centre droit tous favorables à l'Union européenne et il souhaite, pendant sa présidence, mettre la Suède au coeur de l'Europe. Les différentes formations politiques ont d'ailleurs décidé de mettre entre parenthèses les débats nationaux au profit de l'agenda européen durant notre présidence. Les meilleures conditions sont donc réunies pour le déroulement de cette dernière.

Cependant, vous l'avez souligné, la présidence suédoise va intervenir dans une période de crise, qui prend trois formes principales :

- il s'agit d'abord d'une crise économique et financière, qui dominera la présidence suédoise comme elle avait dominé les présidences française et tchèque ;

- il s'agit ensuite d'une crise climatique et énergétique. Cette crise est présente depuis des années, mais il convient maintenant d'y apporter des solutions ;

- enfin, depuis les « Non » français et néerlandais lors des référendums sur le traité établissant une Constitution pour l'Europe, l'Union européenne connaît une crise institutionnelle.

La période qui s'ouvre est donc déterminante pour l'avenir de l'Union : soit elle surmonte la crise actuelle que je viens d'évoquer et elle sortira renforcée de cette dernière, soit elle n'y parvient pas et elle sera alors plutôt fragilisée.

Les trois priorités principales de la présidence suédoise consistent donc à trouver des réponses satisfaisantes à la crise économique et financière actuelle, à adopter une stratégie ambitieuse en matière de lutte contre le changement climatique et de politique énergétique, et à résoudre les difficultés institutionnelles.

En premier lieu, face à la crise économique et financière, la Suède va mener trois actions distinctes.

Elle va d'abord s'attacher à mettre en oeuvre au plus vite les décisions du Conseil européen des 18 et 19 juin relatives à la régulation financière, fondées sur le rapport du groupe d'experts présidé par M. de Larosière et les recommandations de la Commission européenne. Le manque de supervision financière au niveau européen a facilité le déclenchement de la crise que nous connaissons. Bien sûr, il existe encore des réticences britanniques. Par ailleurs, les spécificités du système bancaire allemand ne vont pas sans poser quelques difficultés. Mais il existe à l'heure actuelle une opportunité exceptionnelle pour améliorer le fonctionnement des marchés financiers.

Dans le domaine de la politique économique, tout en soutenant les efforts actuels de stimulation des économies, la Suède va inciter à l'élaboration rapide d'une stratégie européenne de retour à la discipline budgétaire et fiscale à moyen terme, afin de rétablir la confiance des marchés et des investisseurs.

Enfin, la Suède, qui est très attachée au libre-échange, va lutter contre les réflexes protectionnistes de plus en plus prégnants en dehors comme au sein de l'Union européenne, en demandant le respect strict des règles du Marché intérieur et celles du commerce international.

En deuxième lieu, la présidence suédoise désire obtenir des résultats ambitieux dans l'élaboration de la réponse européenne aux défis posés par le changement climatique. Elle espère donc que, à la réunion prévue à Copenhague en décembre prochain, l'Union européenne pourra signer un accord prévoyant une réduction sensible des émissions de gaz à effet de serre susceptible de remplacer les accords de Kyoto. En pratique, nous avons déjà des contacts intenses avec le gouvernement américain sur ce sujet, qui fera aussi l'objet d'une discussion lors du sommet du G8 au mois de juillet.

Sous la forme d'une boutade, je dirai donc que la Suède a un double objectif « modeste » pour sa présidence : sauver l'économie mondiale et sauver la Planète !

En troisième lieu, nous souhaitons faire sortir l'Union européenne de la crise institutionnelle actuelle. Le nouveau Parlement européen va se réunir en juillet, mais la Commission européenne en fonction achève son mandat. Aussi est-il indispensable pour la stabilité de l'Union européenne de pouvoir reconduire M. Barroso, dont la candidature a fait l'objet d'un consensus lors du Conseil européen, à la tête de la Commission au plus vite. Nous consultons à l'heure actuelle les formations politiques du Parlement européen pour savoir si cette option que nous souhaitons est envisageable.

Et, dans l'hypothèse d'une ratification du traité de Lisbonne à l'automne par le peuple irlandais, la Suède aura un rôle déterminant dans les nominations de personnalités importantes de l'Union européenne, telles que le président permanent du Conseil européen ou le haut représentant pour les affaires étrangères. Le choix des hommes ou des femmes exerçant ses fonctions sera en effet crucial pour le bon fonctionnement et le rayonnement de l'Europe.

La Suède a d'autres priorités. Tout d'abord, dans le domaine de la justice et des affaires intérieures, elle espère que l'actualisation pour les cinq prochaines années du programme de La Haye qui arrive à son terme, sera effective à la fin de sa présidence. Cette actualisation pourra alors prendre le nom de « programme de Stockholm ».

Le gouvernement suédois est également attaché au lancement de la stratégie pour la mer Baltique, qui part du constat que les États riverains de cette mer sont tous membres de l'Union européenne, à l'exception d'un pays, et constitue l'un des compléments de l'Union pour la Méditerranée pour les États du nord de l'Europe.

Mais la présidence suédoise sera aussi attentive à la mise en oeuvre du partenariat oriental mis en place par la présidence tchèque en faveur de l'Ukraine, de la Biélorussie, de la Moldavie et les trois pays du Caucase sud, car ces États enclavés entre l'Union européenne et la Russie connaissent de graves difficultés économiques et ont besoin du soutien européen.

Elle s'attachera également à la pérennisation de l'Union pour la Méditerranée qu'elle a toujours soutenue. A cet égard, la réunion qui a lieu aujourd'hui à Paris entre les 43 ministres de l'environnement des États membres de l'Union pour la Méditerranée constitue un signe positif de reprise de ses activités, après plusieurs mois de gel en raison du conflit israélo-palestinien.

L'élargissement de l'Union européenne constitue un autre dossier important pour la présidence suédoise. La Suède est très favorable à la poursuite de ce processus. Tout d'abord en faveur des pays des Balkans et notamment à la Croatie dès lors que son contentieux territorial avec la Slovénie sera résolu. Mais également au profit de la Turquie, avec laquelle nous avons l'intention d'ouvrir un à deux nouveaux chapitres de négociations.

Car l'élargissement continu de l'Union européenne est à l'origine de la stabilité extraordinaire du continent européen et a pu dans le passé « faire des miracles » en transformant certains États. Nous serons aussi attentifs aux démarches de l'Islande, qui pourrait déposer une demande d'adhésion à l'Union européenne en juillet.

La présidence suédoise tentera de faire preuve d'autant de volontarisme que la présidence française. Et, confortée par sa tradition de rassemblement et de consensus, elle prendra garde à ne pas diviser les États membres de l'Union européenne dans les choix proposés.

M. Robert del Picchia :

Les États qui prennent la présidence de l'Union européenne ont en général tendance à afficher des objectifs modestes, ce qui leur permet ultérieurement de se féliciter des succès obtenus. Je constate, à l'inverse, que la future présidence suédoise présente des perspectives ambitieuses ce qui est une bonne chose.

Je voudrais revenir sur vos propos relatifs à l'élargissement de l'Union européenne. L'Islande va peut-être déposer une demande d'adhésion, mais il faudra nécessairement qu'elle mette de l'ordre dans ses finances publiques. Et je m'interroge sur les raisons pour lesquelles les Norvégiens demeurent rétifs à une adhésion éventuelle de leur pays à l'Union européenne. Je me souviens que, en 1994, le gouvernement norvégien était optimiste sur les perspectives d'adhésion avant le référendum qui se conclut pourtant par le refus des Norvégiens d'entrer dans l'Union européenne.

Confirmez-vous par ailleurs que la Suède est favorable à l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne ?

Je voudrais évoquer de nouveau la résolution de la crise institutionnelle. Si l'Irlande ratifie bien le traité de Lisbonne à l'automne, ce dernier pourra-t-il alors entrer rapidement en vigueur ?

M. Pierre Fauchon :

Je voudrais vous faire partager deux réflexions :

- tout d'abord, je considère que la paralysie actuelle de l'Union européenne, dont l'avenir est suspendu aux voeux du peuple irlandais, n'est pas satisfaisante. Est-il impensable que les États qui souhaiteraient aller plus loin dans l'approfondissement de l'Union européenne puissent le faire sans être dépendants des autres ?

- Par ailleurs, n'est-ce pas un souci pour votre pays de présider l'Union européenne tout en n'étant pas membre de la zone euro ?

Mme Annie David :

J'ai bien entendu vos propos sur la candidature de M. Barroso à la présidence de la Commission et je tiens à rappeler que cette candidature n'est pas souhaitable car M. Barroso incarne cette Europe libérale qui a été rejetée par les électeurs irlandais.

J'approuve votre volonté d'aboutir à un accord ambitieux à la réunion de Copenhague dans la lutte contre le changement climatique, mais les résultats de la conférence préparatoire sont, semble-t-il, mitigés. Les propositions de réduction d'émission de gaz à effet de serre rendues publiques par les États-Unis et la Chine sont insuffisantes.

Vous avez indiqué que la présidence suédoise avait l'intention de mieux réguler les marchés financiers sur le fondement des propositions du rapport du groupe d'experts présidé par M. de Larosière ; mais ces experts appartiennent justement à cette sphère financière dont les dysfonctionnements sont à l'origine de la crise que nous connaissons. Il conviendrait de trouver d'autres solutions. En particulier, il faudrait encadrer la rémunération des dirigeants des grandes entreprises.

Vous paraissez revendiquer la mise en place d'une politique industrielle européenne. Mais n'est ce pas contradictoire avec vos propos dénonçant le protectionnisme ? Quelles peuvent être alors les mesures à adopter contre le « dumping social » ?

Enfin, je voulais évoquer deux points du programme de Stockholm dont vous n'avez pas fait mention. Ce dernier comprend des dispositions relatives à la lutte contre la traite des êtres humains que je soutiens. En revanche, je suis opposée à la mise en place d'une carte bleue en faveur des ressortissants non communautaires qualifiés ; en effet, la rupture du contrat de travail de l'intéressé pourrait alors mettre fin à son droit au séjour sur le territoire d'un État membre de l'Union européenne, ce qui n'est pas acceptable.

De même, ce n'est pas acceptable qu'on laisse entendre qu'il y a, dans certains États comme l'Inde des « fabriques d'ingénieurs » dont pourrait bénéficier l'Union européenne. Cela me choque. Je tenais à connaître votre sentiment sur ces propos.

M. Robert Badinter :

Je voulais revenir sur l'Europe de la justice. Vous nous avez indiqué que le programme de Stockholm entrerait en vigueur pour les cinq années à venir. Mais, dans l'hypothèse d'une ratification du traité de Lisbonne, serait-il possible d'envisager en la matière des coopérations renforcées ?

Ayant suivi le dossier depuis 16 ans, je voudrais savoir si la Suède compte prendre de nouvelles initiatives pour régler le contentieux territorial entre la Slovénie et la Croatie afin de permettre l'adhésion de cette dernière à l'Union européenne ? De même, votre gouvernement a-t-il une stratégie pour le Kosovo où la situation est fragile ?

Enfin, comment la future présidence suédoise envisage-t-elle la position de l'Union européenne face au conflit israélo-palestinien ? Et sur la question iranienne?

M. Simon Sutour :

Je voudrais avant tout préciser que je trouve rassurant que la présidence de l'Union européenne soit bientôt assurée par un État particulièrement réputé pour son sérieux ayant une vraie tradition de rassemblement politique.

La candidature de M. Barroso pour la présidence de la Commission européenne résulte du rapport de forces issu des élections européennes, mais confirmez-vous que la Suède va tenter d'obtenir la reconduction de ce dernier à la tête de la Commission dès le mois de juillet ?

J'ai écouté attentivement vos propos sur la nécessaire poursuite de l'élargissement de l'Union européenne. Dans cette perspective, la Suède est-elle favorable à une adhésion de l'Ukraine ?

M. Serge Lagauche :

Sous présidence suédoise, l'Union européenne va-t-elle pouvoir apporter un soutien réitéré à la Lettonie, petit État membre qui, à l'heure actuelle, connaît de grandes difficultés économiques et subit une pression politique importante de la part du gouvernement russe ?

Mme Colette Mélot :

J'ai écouté avec intérêt votre plaidoyer pour le libre échange en Europe et je pense que nous pourrions aller encore plus loin en la matière.

Pour renforcer la cohésion au sein de l'Union européenne, la Suède ne souhaite-t-elle pas rejoindre la zone euro et inciter d'autres États à faire de même ?

Enfin, je voulais à mon tour vous demander si vous pensez que les négociations d'adhésion de la Croatie vont pouvoir avancer sous votre présidence ?

M. Gunnar Lund :

La question des rapports entre la Norvège et l'Union européenne est sensible pour le représentant d'un État voisin. Le peuple norvégien ne veut pas adhérer à l'Union européenne aujourd'hui, à la fois parce qu'il est soucieux de son indépendance et parce que sa situation économique, qui lui garantit cette indépendance, ne l'incite pas à s'engager dans un tel processus. L'adhésion possible de l'Islande à l'Union européenne, si elle était accompagnée d'accords intéressants dans le domaine de la pêche, pourrait faire évoluer cette position.

M. Robert del Picchia :

Malgré leur souci d'indépendance, les Norvégiens sont très actifs au sein de l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN).

M. Gunnar Lund :

La Suède, après avoir longuement hésité, est effectivement très favorable à l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne dès lors que ce pays remplit les conditions entre autres exigées des autres candidats. Cette position claire résulte de négociations difficiles en 1999 au cours desquelles notre gouvernement avait été convaincu par la France de la pertinence d'une telle adhésion. Depuis, nous sommes restés fidèles à cette position.

Sur la crise institutionnelle, je partage le sentiment selon lequel si le « Oui » irlandais au traité de Lisbonne et la signature par les présidents de la République tchèque et polonais n'interviennent pas rapidement, le processus risque d'être remis en cause par les conservateurs britanniques, dans l'hypothèse où ceux-ci remporteraient les prochaines élections au Royaume-Uni.

M. Pierre Fauchon :

N'est-il pas possible d'avancer dans la construction européenne même si tous les États membres ne sont pas d'accord?

M. Gunnar Lund :

Il faut garder en mémoire que, en 2005, l'Union européenne a respecté les « Non » français et néerlandais, les processus référendaires alors en cours ayant même été abandonnés. La moindre des choses est aujourd'hui de respecter le « Non » initial irlandais et d'attendre les résultats du deuxième référendum. L'Union européenne n'est pas une fédération, mais une Union d'États souverains. Il convient de respecter la volonté des peuples.

Le fait pour la Suède de ne pas appartenir à la zone euro constitue un handicap alors qu'elle va prendre la présidence de l'Union européenne, mais les Suédois, par référendum en 2003, ont clairement refusé toute perspective d'adhésion. A l'heure actuelle, l'opinion publique évolue en raison de la crise financière qui a souligné la solidité de l'euro, mais certainesformations politiques estiment que si une autre consultation des électeurs devait avoir lieu sur ce sujet, elle ne pourrait intervenir avant 2014. L'adoption de l'euro nécessite en outre le respect de plusieurs critères.

Le traité de Lisbonne va apporter d'importantes améliorations au fonctionnement actuel de l'Union européenne, en particulier en instituant une continuité de la présidence du Conseil européen.

Si, dans les négociations en cours relatives à la préparation de la réunion de Copenhague, l'Union européenne est légitimement déçue par les premières propositions américaines, il faut néanmoins souligner que la nouvelle administration dirigée par le président Obama a, contrairement à l'administration Bush, su créer les conditions favorables à un accord global pour la lutte contre les effets du changement climatique.

Sur la réforme des marchés financiers et du système bancaire, la Suède, comme la plupart des États membres, ne souhaitent pas de révolution, mais des améliorations des mécanismes actuels destinés à mieux les réguler, à l'exemple du futur comité européen du risque systémique. En cela, les recommandations du rapport du groupe présidé par M. de Larosière sont pertinentes.

Les mesures relatives à l'immigration constituent effectivement un chapitre important du programme de Stockholm. Ces mesures ne sont qu'un programme de travail composé de multiples propositions, à l'exemple du pacte pour l'immigration qui avait été adopté sous présidence française et auquel nous avons souscrit. La Suède souhaite désormais préciser le droit en vigueur en matière de droit d'asile, en particulier pour améliorer l'accueil des demandeurs d'asile et pour créer un bureau d'appui qui peut soulager les pays membres sujets à des flux importants et rendre l'accès plus facile aux demandeurs d'asile.

Par principe, la Suède n'est pas opposée à l'utilisation de coopérations renforcées pour permettre à certains États membres d'aller de l'avant dans certains domaines. Mais elles ne doivent pas conduire à une division de l'Europe entre un groupe d'États membres ayant des ambitions plus grandes et un autre groupe d'États aux objectifs plus modestes. Comme je l'ai déjà indiqué, il est essentiel pour l'Union européenne de faire l'effort de rassembler tous les États membres autour de ses projets.

M. Robert Badinter :

Pourtant, certaines avancées majeures de l'Europe, comme l'espace Schengen et la zone euro, ont pu être mises en oeuvre grâce à la mobilisation initiale d'un groupe d'États membres.

M. Gunnar Lund :

Sur le contentieux territorial entre la Croatie et la Slovénie, tout comme le commissaire européen Olli Rehn, qui vient de déclarer, après des mois de négociations, qu'il abandonnait ses démarches de conciliation, la Suède estime que les deux États devaient désormais faire preuve de responsabilité pour trouver un compromis. De même, la présidence suédoise n'a pas prévu d'initiative spécifique pour le Kosovo, mais notre ministre des affaires étrangères, Carl Bildt, qui a été représentant de l'Union européenne en Bosnie, surveille attentivement la situation des Balkans.

Les dernières évolutions du conflit israélo-palestinien et de la situation iranienne semblent prometteuses. L'Iran va sortir affaibli de la crise qui a suivi l'élection présidentielle et aura donc moins d'influence sur les États voisins. De plus, contrairement à l'administration Bush qui avait renforcé le régime actuel en prétendant le changer, l'administration Obama a permis de réunir les conditions pour relancer le dialogue régional. Toutes les opportunités devront être saisies pour que ce dernier se mette en place.

Effectivement, mon gouvernement est favorable à une reconduction du président Barroso à la tête de la Commission européenne dès le mois de juillet car si cette nomination n'intervient pas rapidement, nous devrons attendre la ratification éventuelle du traité de Lisbonne. Mais cette reconduction dépend de la volonté du Parlement européen, où les discussions sont aujourd'hui très intenses sur ce dossier.

La Suède serait ouverte à une adhésion à terme de l'Ukraine à l'Union européenne. De même, elle partage le constat selon lequel la Lettonie a besoin d'un soutien important de l'Union européenne. Notre gouvernement est déjà beaucoup intervenu en faveur de ce pays où les banques suédoises sont très implantées, en lui octroyant des prêts ou en l'épaulant pour négocier une aide du fonds monétaire international. Il le fera encore s'il le faut et vient d'effectuer un emprunt auprès de la banque centrale européenne pour cela.

Je voulais enfin préciser, comme vous l'avez souligné, que la présidence suédoise ne travaillera pas directement à l'élargissement de la zone euro, mais va pouvoir contribuer à réunir les conditions économiques favorables à cet élargissement. Je pense en particulier aux nouveaux États membres dont la situation financière actuelle peut constituer un risque pour l'ensemble de l'Union européenne.