Mercredi 13 avril 2016, le Président de la République a promulgué la loi n° 2016-444 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées.

 Les étapes de la discussion

Les apports du Sénat sur la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel

Le Sénat a apporté des améliorations substantielles aux dispositions sociales de la proposition de loi. Il a ainsi :

  • élargi le champ de compétence des inspecteurs du travail à la constatation des infractions de traite des êtres humains, mesure qui traduit en droit la mesure n° 13 du plan d'action national contre la traite des êtres humains 2014-2016 (article 1er quinquies) ;
  • amélioré le parcours de sortie de la prostitution et d’insertion sociale et professionnelle, notamment en ouvrant à l’ensemble des associations ayant pour objet l'aide et l'accompagnement des publics en difficulté la possibilité de demander un agrément pour participer à la mise en œuvre de ce parcours (article 3) ;
  • introduit un article 3 bis visant à faciliter l'accès au logement des personnes engagées dans un parcours de sortie de la prostitution et de celles victimes du proxénétisme ou de la traite des êtres humains en les incluant dans la catégorie des publics prioritaires pour l'obtention d'un logement social ;
  • renforcé les financements consacrés à la mise en œuvre de ce parcours en prévoyant l’affectation au fonds dédié de toutes les recettes provenant de la confiscation des biens et produits des proxénètes ainsi que les produits et biens prélevés sur les personnes reconnues coupables de traite des êtres humains (article 4) ;
  • facilité la délivrance d’un titre de séjour aux victimes de la traite ou du proxénétisme qui dénoncent les auteurs de ces infractions en prévoyant que le préfet a une compétence liée pour sa délivrance, dès lors que les conditions fixées par la loi sont remplies (article 6).

Le Sénat a également amélioré les dispositions de lutte contre les réseaux de traite des êtres humains en prévoyant que les personnes prostituées qui contribuent par leur témoignage au démantèlement de ces réseaux pourront bénéficier de la protection spécifique prévue par l'article 706-63-1 du code de procédure pénale (protection physique, nouvelle domiciliation, mesures de réinsertion, identité d'emprunt) (article 1er ter).

  Promulgation de la loi (13 avril 2016)

Mercredi 13 avril, le Président de la République a promulgué la loi n° 2016-444 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées. Elle est parue au Journal officiel n° 88 du 14 avril 2016.

 Lecture définitive à l'Assemblée nationale (6 avril 2016)

Mercredi 6 avril, l'Assemblée nationale a définitivement adopté la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel.

 Adoption en nouvelle lecture au Sénat (10 mars 2016)

Jeudi 10 mars, les sénateurs ont procédé à la discussion générale.

À l’issue de celle-ci, ils ont entamé l'examen des articles. Au cours de cet examen, ils ont notamment décidé, comme voté en commission, de ne pas créer un dispositif de pénalisation des clients de personnes prostituées (rejet des amts 1 rect. bis, 4 et amt 6 du Gvt par 195 voix contre et 113 pour – rét. art 16).

À l’issue de cet examen le texte, les sénateurs se sont prononcés, par scrutin public, sur l'ensemble du texte. Ils l'ont adopté par 195 voix pour et 123 contre.

 Examen en commission au Sénat (16 février 2016)

Mardi 16 février, la commission spéciale chargée d'examiner la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel a examiné le rapport de Michelle MEUNIER et le texte proposé par la commission sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées.

Nouvelle lecture à l’Assemblée nationale (3 février 2016)

Mercredi 3 février 2016, l'Assemblée nationale a adopté en nouvelle lecture la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées.

 Commission mixte paritaire

Mercredi 18 novembre 2015, la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées n'est pas parvenue a un accord.

 Deuxième lecture au Sénat (14 et 15 octobre 2015)

Mercredi 14 octobre, les sénateurs ont procédé à la discussion général.

À l'issue de celle-ci, ils ont examiné les articles du texte. Au cours de cet examen, ils ont notamment :

- autorisé l'autorité administrative à demander aux fournisseurs d'accès le blocage des sites qui auraient été identifiés comme permettant aux réseaux de traite et de proxénétisme d'organiser leur activité en France (amdt 7 rect - art. 1er) ;

- supprimé l'exigence de cessation de l'activité de prostitution pour la délivrance d'une carte de séjour temporaire "vie privée et familiale" délivrée à des victimes qui ont déposé plainte contre les réseaux et proxénétisme (amdt 21 rect. - art. 6) ;

- abrogé le délit de racolage, confirmant ainsi le texte voté par la commission spéciale en deuxième lecture.

Les sénateurs se sont ensuite prononcés sur l'ensemble du texte qu'ils ont adopté par 172 voix pour et 31 contre (scrutin).

 Examen en commissions au Sénat (7 octobre 2015)

Mercredi 7 octobre 2015, la commission spéciale a examiné le rapport de Michelle Meunier sur la proposition de loi et adopté 8 amendements, dont 4 présentés par la rapporteure. Elle a notamment :

  • renforcé la protection des personnes prostituées en prévoyant que celles qui contribuent par leur témoignage au démantèlement de ces réseaux pourront bénéficier de la protection spécifique prévue par le code de procédure pénale (protection physique, nouvelle domiciliation, mesures de réinsertion, identité d'emprunt) - COM-17 à l'art 1er ter ;
  • précisé que toutes les associations qui aident et accompagnent les personnes en difficulté pourront participer à l'élaboration du parcours de sortie de la prostitution avec la personne prostituée, et non les seules associations spécialisées dans l'accompagnement des personnes prostituées, afin de ne pas exclure du dispositif des associations potentiellement compétentes et expérimentées mais qui n'interviendraient pas spécifiquement dans l'aide aux personnes prostituées - COM-3 à l'art 3 ;
  • supprimé la nouvelle incrimination de l'achat d'actes sexuels et la création d'une peine complémentaire de stage de sensibilisation à la lutte contre l'achat d'actes sexuels - COM-1 à l'article 16 et COM-2 à l'article 17

L'article 13 prévoyant l'abrogation du délit de racolage n'a pas été modifié.

Deuxième lecture à l’Assemblée nationale (12 juin 2015)

L'Assemblée nationale a adopté, avec modifications, en deuxième lecture, la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées.

 Première lecture au Sénat (30 mars 2015)

Le Sénat a examiné la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, renforçant la lutte contre le système prostitutionnel, en séance publique le lundi 30 mars 2015.

À l’issue de la discussion générale, les sénateurs ont notamment :

• chapitre Ier - Renforcement des moyens de lutte contre le proxénétisme et la traite des êtres humains aux fins d'exploitation sexuelle

- adopté l’article 1er qui modifie la loi n° 2004-575 pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN) afin de renforcer la lutte contre les réseaux de traite des êtres humains et de proxénétisme qui utilisent le réseau internet dans le but d'organiser leur activité. En séance, ils ont modifié cet article pour autoriser l’autorité administrative à demander aux fournisseurs d’accès le blocage des sites qui auraient été identifiés comme permettant aux réseaux de traite et de proxénétisme d'organiser leur activité sur notre territoire (amdts 33 et 37 rect. au nom de la commission spéciale) ;

- adopté l’article 1er ter qui vise à protéger les personnes victimes de la traite des êtres humains, du proxénétisme ou de la prostitution ;

 • chapitre II - Protection des victimes de la prostitution et création d'un projet d'insertion sociale et professionnelle

- adopté l’article 3 qui crée un dispositif de protection et d'assistance pour les personnes victimes de la prostitution, du proxénétisme et de la traite des êtres humains ainsi qu'un parcours de sortie de la prostitution, largement modifié en commission spéciale, notamment pour substituer aux termes "parcours de sortie de la prostitution" ceux de "projet d'insertion sociale et professionnelle" ; ce changement vise à mieux tenir compte de ce que sera la réalité du suivi des personnes concernées en leur proposant, sur le long terme, un projet personnalisé pour une réinsertion durable ;

 - supprimé l’article 13 qui abrogeait le délit de racolage public (amdt 1 rect.) par 162 voix pour et 161 voix contre (voir le scrutin public) ;

 • chapitre II bis - Prévention et accompagnement vers les soins des personnes prostituées pour une prise en charge globale

- maintenu la suppression votée par la commission spéciale de l’article 16 qui introduisait la notion de « pénalisation du client » (voir le scrutin sur l'amdt 31 rect. bis et sur les amdts 3 rect. bis et 12 rect.bis) ;

• Sur l’ensemble du texte :

Les sénateurs ont ensuite adopté par 162 voix pour et 42 voix contre l’ensemble de la proposition de loi dont l'intitulé est ainsi rédigé : proposition de loi visant à la lutte contre la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle, contre le proxénétisme et pour l’accompagnement des personnes prostituées (consulter le scrutin public).

 Examen en commission au Sénat (juillet 2014 - mars 2015)

Réunie le 25 mars 2015, la commission spéciale a examiné les amendements déposés sur son texte en vue de leur examen en séance.

Le 8 juillet 2014, après avoir entendu sa rapporteure, Michelle MEUNIER (Soc - Loire-Atlantique), la commission spéciale a établi un texte qui confirme l’essentiel des dispositions de la proposition de loi - dont l'abrogation du délit de racolage - à l'exclusion de l'article 16 relatif à la pénalisation du recours à la prostitution.

S’agissant de la pénalisation du recours à la prostitution, contre l’avis de sa rapporteure qui estime que la responsabilité des clients ne peut plus être indéfiniment éludée et qu'il est temps d'affirmer dans la loi le principe fort selon lequel l'achat d'actes sexuels n'est aujourd'hui plus acceptable, et à l'issue d'un long débat, la commission spéciale a estimé que le risque d'accroître l'isolement et l'insécurité des personnes prostituées était trop grand au regard des bénéfices qui pouvaient être attendus de la création de cette infraction pour lutter contre les réseaux de traite des êtres humains et de proxénétisme. L'ensemble des membres de la commission spéciale se sont accordés sur ce point : cette lutte doit constituer une priorité pour les forces de l'ordre, pour la justice et, au-delà, pour le Gouvernement, auquel incombe la responsabilité de faire progresser la coopération européenne et internationale sur le sujet.

Les autres volets de la proposition de loi ont fait l'objet d'un quasi-consensus. L'ensemble des améliorations proposées par la rapporteure et le président de la commission spéciale concernant l'accompagnement des personnes prostituées et la lutte contre la traite ont été adoptées. La commission considère qu'il s'agit là d'un progrès substantiel par rapport au droit existant. En particulier, la création d'un « parcours de sortie », renommé « projet d'insertion sociale et professionnelle » et doté de financements accrus, permettra d'offrir aux personnes qui le souhaitent des alternatives crédibles à la prostitution.


Désignation d’un nouveau rapporteur (16 avril 2014)

La commission spéciale a nommé Michelle MEUNIER (Soc - Loire-Atlantique) rapporteure, à la suite de la nomination de Laurence ROSSIGNOL comme Secrétaire d’État chargée de la Famille, des Personnes âgées et de l’Autonomie, auprès de la ministre des Affaires sociales et de la Santé.

Création de la commission spéciale (5 février 2014)

La commission spéciale est créée et a nommé Jean-Pierre GODEFROY (Soc - Manche), comme président, et Laurence ROSSIGNOL, alors sénatrice, rapporteure de la proposition de loi.

Première lecture à l’Assemblée nationale (4 décembre 2013)

L’Assemblée nationale a adopté la proposition de loi en première lecture le 4 décembre 2013.

 Comprendre les enjeux

La législation actuelle ne punit pas directement le fait de recourir à la prostitution, mais le proxénétisme, l’ouverture d'un établissement ou la prostitution de mineurs.

Les personnes prostituées seraient, en France, au nombre de 20 000 environ, dont 85 % de femmes, alors que 99 % des clients sont des hommes, selon un rapport de l’Assemblée nationale publié en 2011.

La présente proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel a été déposée à l’Assemblée nationale le 10 octobre 2013, à l’initiative du groupe socialiste, républicain et citoyen et apparentés. Les députés l’ont adoptée en première lecture le 4 décembre 2013, consacrant l’une des mesures phares du texte : la pénalisation du client.

L’objectif principal du texte est, selon ses auteurs, de "faire prendre conscience que la prostitution est dans l'immense majorité des cas une violence à l'égard de personnes démunies et une exploitation des plus faibles par des proxénètes, qu'ils agissent de manière individuelle ou dans des réseaux réalisant des profits très élevés, la traite se cumulant souvent avec d'autres trafics".

Le texte prévoit de :

  • renforcer les moyens d’enquête et de poursuite des auteurs de la traite des êtres humains et de proxénétisme ;
  • améliorer la protection et l’accompagnement global dont peuvent bénéficier les victimes du proxénétisme : l’article 3 ouvre le droit à toute personne victime de la prostitution de bénéficier d’un système de protection et d’assistance et de se voir proposer un parcours de sortie de la prostitution auprès d’une association compétente et agréée à cet effet ;
  • renforcer l’action de prévention et d’information qui incombe aux pouvoirs publics pour réduire à l’avenir le recours à la prostitution, notamment par la prévention destinée aux élèves de l’enseignement secondaire, plus particulièrement du lycée (article 15) ;
  • instaurer la pénalisation du client en instituant une interdiction d’achat d’acte sexuel, par une contravention sanctionnant le recours à la prostitution, allant jusqu’à 1 500 euros et 3 750 euros en cas de récidive (article 16).

Le Sénat s’est déjà saisi du sujet de la prostitution : en octobre 2013, les sénateurs Chantal JOUANNO (UDI-UC - Paris) et Jean-Pierre GODEFROY (Soc - Manche), rapporteurs de la mission sur la situation sociale des personnes prostituées pour la commission des affaires sociales, ont publié un rapport intitulé "Situation sanitaire et sociale des personnes prostituées : inverser le regard".

La commission spéciale du Sénat chargée d’examiner la présente proposition de loi a adopté le texte en juillet 2014, en supprimant l’amendement visant à pénaliser le client. Dans un sondage réalisé par l’institut CSA réalisé en novembre 2013, deux Français sur trois (68 %) s’étaient déclarés opposés à la condamnation judiciaire des clients de prostitués.

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