Proposition de loi visant à améliorer la santé au travail des salariés et à prévenir les risques professionnels auxquels ils sont exposés.

Cette proposition de loi , déposée sur le Bureau du Sénat par Mme Michelle Demessine et plusieurs de ses collègues, comprenant cinquante-trois articles, avait pour ambition, selon ses auteurs « de lever nombre d'obstacles à la construction d'une politique de prévention de tous les risques professionnels, de répondre aux impératifs de la santé au travail et de nourrir le débat sur le sens à donner au travail ».

Dans le cadre de huit titres distincts, la proposition de loi prévoyait de :

- renforcer le rôle de prévention de la branche accidents du travail et maladies professionnelles en matière de risques professionnels en dotant la prévention d'un budget significatif, en proposant un système de bonus-malus applicable aux entreprises surexposant leurs salariés aux risques professionnels, en répondant au phénomène de l'externalisation des risques par une répartition claire des responsabilités en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles entre les donneurs d'ordre et les sous-traitants, en augmentant la place des salariés au sein de la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles de la sécurité sociale, en précisant les obligations des employeurs en matière d'évaluation et de prévention des risques professionnels ;

- préciser et élargir les obligations des employeurs en matière d'évaluation et de prévention des risques professionnels en réaffirmant le caractère central et essentiel du document unique d'évaluation des risques qui doit être transmis au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) et en proposant de faire remettre aux salariés un livret complet sur les risques professionnels et les obligations des employeurs en la matière ;

- donner aux salariés et à leurs représentants les moyens d'être « acteurs de la prévention » en donnant à l'inspecteur du travail le pouvoir d'imposer la mise en place d'un CHSCT en cas de risques graves pour la santé des travailleurs et en permettant aux salariés de pouvoir se retirer de leur poste de travail lorsque des risques identifiés et analysés, présentant un danger grave et imminent pour leur vie ou leur santé, le justifient ;

- faciliter la déclaration et la reconnaissance des maladies professionnelles grâce à la mise en place d'un dossier médical personnel, à la reconstitution des parcours professionnels et des éventuelles expositions aux risques, à la prise en charge des victimes et à la réforme du droit de l'inaptitude ;

- compléter et renforcer les instruments de la politique pénale concernant les infractions à la réglementation relative à l'hygiène et à la sécurité au travail en prévoyant de sanctionner l'obligation pour l'employeur de remettre au salarié une attestation d'exposition à certaines substances et les entraves à la procédure de déclaration, de reconnaissance des maladies professionnelles, d'une part, et de renforcer les peines, d'autre part, tout en introduisant la référence à une incapacité permanente partielle ou totale en matière de répression des atteintes involontaires à l'intégrité de la personne ;

- réformer la médecine du travail en créant une Agence nationale de la santé au travail garantissant l'indépendance des professionnels de santé chargée d'organiser et de coordonner les services de santé au travail dans un strict objectif de prévention de tous les risques professionnels et de préservation de la santé des salariés, en généralisant la « consultation médicale professionnelle » et en portant sa fréquence à douze mois, en supprimant la fiche d'aptitude ;

- mettre en oeuvre des mesures particulières de protection des travailleurs contre les risques liés à l'amiante en renforçant les pouvoirs de l'inspection du travail sur les travaux d'entretien ou de maintenance liés au confinement ou retrait d'amiante, en réduisant la durée de travail sur les sites de désamiantage, en garantissant le maintien du salaire et en créant un registre des salariés étant ou ayant été exposés à l'amiante pour faciliter leur suivi médical ;

- traiter de la réparation intégrale de l'ensemble des victimes du travail en l'inscrivant clairement dans le code de la sécurité sociale, en alignant les taux de rente sur le taux d'incapacité permanente médicalement reconnu, en prévoyant le versement d'une indemnité en capital fixée en proportion de la gravité de la faute commise par l'employeur et en posant le principe de parité des indemnités journalières avec le salaire net journalier et améliorer les droits particuliers des victimes de l'amiante en pérennisant l'action du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante.

Rejet de la proposition de loi par le Sénat.

La proposition de loi a été examinée dans le cadre de l' ordre du jour réservé au titre du droit de tirage du groupe CRC. Au cours de la discussion générale , le Sénat a successivement entendu Mme Michelle Demessine, auteur de la proposition de loi, Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur de la commission des affaires sociales, Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité, puis MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, Jean-Pierre Godefroy, Mmes Isabelle Debré et Marie-Christine Blandin et M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales.

À propos de la médecine du travail, Mme Sylvie Desmarescaux a considéré qu'il convenait d'attendre les propositions des partenaires sociaux devant être rendues au mois de juin et d'inscrire la réflexion dans un cadre plus large que celui de la proposition de loi en réfléchissant au problème de la démographie médicale et en prévoyant de mettre la logique de prévention au centre de l'activité des médecins du travail. En ce qui concerne la prévention des risques ou le régime des accidents du travail et des maladies professionnelles, après avoir fait observer que certaines dispositions avaient déjà été rejetées au Sénat ou étaient déjà partiellement satisfaites, elle a estimé que ces mesures feraient peser des contraintes trop lourdes sur les petites et moyennes entreprises et que la consultation préalable des partenaires sociaux était indispensable. Enfin, concernant le dossier de l'amiante, tout en convenant de la nécessité de revoir ce « système à la fois trop coûteux et insuffisamment focalisé sur ses destinataires naturels », elle a rappelé la création d'un groupe de travail chargé de rendre des conclusions en vue du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009. Mme Sylvie Desmarescaux, tout en reconnaissant que la proposition de loi suggérait des mesures intéressantes, a déclaré qu'il serait inopportun de légiférer sans attendre le résultat des consultations en cours.

Après les explications de vote de Mmes Anne-Marie Payet, Michelle Demessine et Sylvie Desmarescaux, le Sénat a adopté les conclusions négatives de la commission des affaires sociales rejetant ainsi la proposition de loi .