Loi n° 2004-130 du 11 février 2004 réformant le statut de certaines professions judiciaires ou juridiques , des experts judiciaires, des conseils en propriété industrielle et des experts en ventes aux enchères publiques ( Journal officiel du 12 février 2004) .

Ce projet de loi , déposé en première lecture sur le Bureau du Sénat, tend à adapter le statut de diverses professions judiciaires et juridiques en matière d'accès à la profession, de déontologie et de discipline, leur permettant ainsi de faire face aux profondes mutations de leurs pratiques professionnelles . Les avocats, les experts judiciaires, les greffiers des tribunaux de commerce et les huissiers de justice sont concernés par ces dispositions . Ce projet tend également à introduire en droit interne les dispositions de la directive 98/5/CE destinée notamment à assurer le libre établissement en France des avocats des États membres de la Communauté européenne.

Première lecture.

En première lecture 1 ( * ) , le Sénat , partageant pleinement l'objectif du projet de loi, lequel reprend nombre de recommandations de la mission d'information sénatoriale sur l'évolution des métiers de la justice, a cependant tenu à compléter et préciser le dispositif sur lequel un assez large consensus s'est dégagé.

En première lecture, l' Assemblée nationale a supprimé le tutorat des jeunes avocats, a renvoyé à un décret la détermination du contenu de l'obligation de formation et a chargé le Conseil national des barreaux d'en déterminer les modalités.

En matière disciplinaire, elle a aligné la composition des formations administratives des barreaux comprenant au moins cinq cents avocats sur celle des actuelles formations disciplinaires de ces mêmes barreaux et a renforcé et précisé les mesures relatives à la déontologie et à la discipline, tout en tenant compte de la spécificité des professionnels exerçant à Paris.

La responsabilité civile professionnelle des notaires a été aménagée dans le sens d'une meilleure garantie. L'Assemblée nationale a par ailleurs prévu que les personnes désignées en dehors des listes d'experts doivent prêter serment. Elle a précisé les mesures relatives aux sociétés de participations financières.

Enfin, sur proposition du Gouvernement, un article assurant la transposition de la directive du 4 décembre 2001 sur la prévention de l'utilisation du système financier aux fins de blanchiment des capitaux a été introduit.

Deuxième lecture.

Lors de la discussion générale en deuxième lecture au Sénat, le 29 janvier 2004, M. Dominique Perben, garde des Sceaux, ministre de la justice, a présenté les modifications apportées par l'Assemblée nationale. Il a rappelé la nécessité de réformer et de moderniser les conditions d'exercice des professions judiciaires et juridiques afin de fournir les gages d'une compétence accrue et d'une confiance renforcée. Soulignant le soutien des professions concernées et le consensus trouvé entre les deux assemblées, le garde des Sceaux a invité le Sénat à voter le projet de loi en l'état.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur de la commission des lois, a exposé les objectifs du projet de loi transposant une directive du 16 février 1998 ouvrant la profession d'avocat aux ressortissants communautaires et modernisant le statut des autres professions réglementées en matière de discipline, de déontologie et de formation.

Le rapporteur s'est félicité que l'Assemblée nationale ait retenu l'essentiel des dispositions adoptées en première lecture par le Sénat, tout en apportant des innovations concernant notamment la réglementation en matière d'affiliation des avocats aux réseaux pluridisciplinaires et la lutte contre le blanchiment des capitaux.

Tout en manifestant son accord sur le projet de loi ainsi amendé et en proposant au Sénat de l'adopter sans modification, le rapporteur a présenté trois remarques. Tout d'abord, il a insisté sur la nécessité d'affirmer la compatibilité de la profession d'avocat avec celle d'assistant de sénateur ou de collaborateur de député. Puis, il a demandé qu'une circulaire précise que le recours aux experts judiciaires non inscrits sur les listes officielles doit demeurer exceptionnel. Enfin, suite à la suppression du principe de l'exécution immédiate des jugements de première instance rendus en matière civile, il a réaffirmé la nécessité de mettre en oeuvre une « modernisation de la procédure civile en vue d'améliorer l'efficacité de la justice ».

Quatre orateurs sont intervenus dans la discussion générale de ce projet de loi : M. Charles Gautier qui a salué la concertation et le consensus ayant marqué l'élaboration de cette loi, initiée par Mme Marylise Lebranchu, et a évoqué la question de la compatibilité des professions d'avocat et d'assistant parlementaire ; M. Pierre Fauchon qui s'est interrogé sur les notions d'effet suspensif de l'appel et d'exécution provisoire des jugements ; M. Laurent Béteille qui a fait part de son soutien au projet de loi et a salué l'initiative de l'Assemblée nationale en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et Mme Josiane Mathon qui, tout en souscrivant à l'essentiel du projet de loi, a manifesté son inquiétude à propos du tutorat, de l'organisation future de la profession d'avocat, de l'emprise du droit anglo-saxon et de l'absence de mesures en faveur de l'accès à la justice et à l'aide juridique annonçant ainsi la décision du groupe CRC de s'abstenir sur le vote du projet de loi.

Le Sénat a alors abordé la discussion des articles. Il a adopté successivement sans les modifier :

- l' article 3, relatif à l'information des clients et des tiers quant au titre obtenu, à l'organisation professionnelle ou à la juridiction dont relève l'intéressé dans son État d'origine et à son barreau d'inscription en France ;

- l' article 5, déterminant les modalités d'exercice professionnel offertes aux avocats inscrits sous leur titre professionnel d'origine ;

- l' article 9, fixant les conditions de l'intégration ;

- l' article 10, relatif à l'interdiction de participer à une activité juridictionnelle ;

- l' article 18 bis, relatif au caractère obligatoire de la formation continue des avocats ;

- l' article 20, sur les attributions du conseil de l'ordre des avocats ;

- l' article 24, relatif aux décrets d'application de la loi de 1971 ;

- l' article 25, portant abrogation de certains dispositifs transitoires devenus sans objet ;

- l' article 31, définissant le régime de la suspension provisoire des fonctions d'un avocat faisant l'objet de poursuites pénales ou disciplinaires ;

- l' article 32 bis, sur la confidentialité des correspondances échangées entre avocats ;

- l' article 32 ter, imposant aux avocats, aux sociétés ou aux associations d'avocats l'obligation de mentionner leur appartenance à un réseau pluridisciplinaire, national ou international ;

- l' article 38 quater, portant sur les garanties de la responsabilité civile professionnelle des notaires ;

- l' article 38 quinquies, relatif à la compétence disciplinaire de la chambre interdépartementale des notaires de Paris ;

- l' article 39, portant sur le choix des experts par les juges ;

- l' article 40, relatif à l'établissement des listes d'experts ;

- l' article 42, sur le serment des experts ;

- l' article 43 bis, sur le régime d'inscription sur les listes des experts en diagnostic d'entreprise ;

- l' article 49 A, sur l'obligation de création d'un compte affecté à la réception des fonds destinés aux clients des huissiers de justice ;

- l' article 51, tendant à introduire l'obligation pour les conseils de respecter le secret professionnel et à définir un régime d'incompatibilités applicables aux personnes exerçant cette profession ;

- l' article 51 bis A, visant à moderniser le régime des garanties d'emprunt accordées aux candidats à un office de notaire, d'avoué près une cour d'appel, de greffier de tribunal de commerce, d'huissier de justice ou de commissaire-priseur judiciaire ;

- l' article 51 bis, relatif à l'exécution immédiate des jugements de première instance rendus en matière civile ;

- l' article 51 ter, portant sur la procédure disciplinaire applicable aux administrateurs et aux mandataires judiciaires ;

- l' article 51 quater, sur les obligations des professions juridiques en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux ;

- l' article 51 quinquies, permettant l'accès des géomètres-experts au livre foncier d'Alsace-Moselle ;

- l' article 51 sexies, relatif à l'extension de l'objet des sociétés de participations financières de professions libérales ;

- l' article 51 septies, portant mesures de coordination ;

- l' article 51 octies, relatif à l'indemnisation des huissiers de justice et des notaires en raison du préjudice subi du fait de la réforme des sociétés de ventes aux enchères publiques ;

- l' article 53, portant sur l'application du projet de loi à Mayotte ;

- l' article 54, relatif aux dispositions transitoires applicables aux avocats ;

- l' article 55, sur l'entrée en vigueur de la réforme du régime disciplinaire ;

- et l 'article 58, concernant le rapport au Parlement sur la formation des avocats .

Dans le cadre de cette discussion en deuxième lecture, le Sénat n'a pas retenu l'amendement présenté par M. Michel Dreyfus-Schmidt et des membres du groupe socialiste tendant à affirmer la compatibilité de la profession d'avocat avec la fonction d'assistant parlementaire, des dispositions préparées suite à une concertation avec les représentants de la profession d'avocat portant sur cette question devant être prochainement introduites par un décret fixant notamment des règles de déontologie.

Le Sénat a ainsi adopté définitivement le projet de loi .

Travaux préparatoires

Sénat :

Première lecture (2 avril 2003) : n°s 176, 226 et adoption 97 (2002-2003).

Nombre d'amendements déposés 84

Nombre d'amendements adoptés 75

Assemblée nationale :

Première lecture (6 janvier 2004) : n°s 768, 1250 et adoption 230 (12ème législ.).

Sénat :

Deuxième lecture (29 janvier 2004) : n°s 141, 157 et adoption 47 (2003-2004).

Nombre d'amendements déposés 3

Nombre d'amendements adoptés 0

Rapporteur au Sénat : M. Jean-René Lecerf, commission des lois.