Indivision successorale et logement outre-mer (Suite)

M. le président.  - Nous reprenons la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, visant à faciliter la sortie de l'indivision successorale et à relancer la politique du logement en outre-mer.

Discussion générale (Suite)

M. Michel Magras .  - Cette proposition de loi est une contribution utile à la résolution de la question de l'indivision outre-mer. Elle s'inspire du rapport de la délégation sénatoriale sur l'outre-mer sur le foncier, dont je salue les auteurs, Thani Mohamed Soilihi, Mathieu Darnaud et Robert Laufoaulu. Nos rapporteurs, qui avaient relevé combien l'indivision paralyse les outre-mer, prônaient une adaptation des normes nationales, y compris en matière de succession et vous savez combien je suis attaché au principe de différenciation.

Saint-Barthélemy a souhaité que ce texte lui soit appliqué, y compris l'article 2 bis qui supprime jusqu'en 2028 les droits d'enregistrement au titre du partage. Or la matière fiscale relève de la compétence de la collectivité. Je l'avais relevé dès la première lecture, le compte rendu en attestera, sans que cela ait été entendu. Je crois néanmoins que le texte doit être vu comme un ensemble : dès lors que l'on facilite juridiquement la sortie de l'indivision, il est cohérent de la conforter par des dispositions fiscales. Malgré cet empiètement, ladite collectivité ne s'opposera pas aux dispositions fiscales de l'article 2 bis. Si elle voulait rétablir la fiscalité sur le partage, elle aurait la faculté de demander au Conseil Constitutionnel de constater que la loi est intervenue dans son domaine de compétences. (Applaudissements)

M. Maurice Antiste .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) En première lecture, je m'inquiétais que ce texte fondamental pour nos territoires d'outre-mer soit, par le jeu de nos institutions, rediscuté en seconde lecture. N'y voyez pas une mise en cause du travail parlementaire mais j'aimerais parfois que les textes transpartisans, comme cela a été le cas dans le passé, fassent l'objet d'une procédure plus rapide. Disant cela, je pense aussi à la proposition de loi de MM. Bourquin et Pointereau pour la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs.

Notre chambre haute a enrichi ce texte en l'élargissant aux collectivités de Saint-Martin et Saint-Barthélemy. S'il ne résout pas tous les problèmes de foncier outre-mer, nous aurons besoin de cet outil dérogatoire, d'une durée limitée, pour s'attaquer aux biens immobiliers en indivision en outre-mer, qui représentent 30 à 44 % du total et parfois 83 % dans certaines communes. On sait leurs conséquences : insalubrité, insécurité, programmes immobiliers ralentis, déstructuration familiale...

Nos populations attendent ce texte avec impatience. L'adopter aujourd'hui serait un beau cadeau de Noël. (Applaudissements)

Mme Annick Girardin, ministre .  - Je me félicite de l'aboutissement de ce processus législatif. Le texte est utile. Effectivement, monsieur Magras, vous aviez souligné en première lecture l'erreur matérielle à l'article 2 bis. Je vous présente toutes mes excuses. Je n'étais pas en séance ce jour-là. Cette erreur sera corrigée.

Discussion des articles

L'article 2 est adopté, ainsi que l'article 2 bis.

L'article 5 A demeure supprimé.

ARTICLE 5

M. Stéphane Artano .  - Favorable comme la majorité du RDSE à ce texte, je m'abstiendrai néanmoins par attachement au statut de Saint-Pierre-et-Miquelon. Soumettre au code général des impôts une collectivité à statut particulier me pose problème. Mes amendements étaient d'appel. Je prends acte de la correction mais je suis contraint de m'abstenir.

L'article 5 est adopté, de même que l'article 6.

Explications de vote

M. Maurice Antiste .  - L'outre-mer peut et doit être force de proposition. C'est ce qu'a fait Serge Letchimy avec ce texte qui facilitera le développement urbain car la maîtrise foncière est un élément essentiel de l'aménagement.

Je salue le travail transpartisan effectué sur ce sujet technique. Les tribunaux ne seront plus la seule voie de sortie des indivisions et les familles ne se déchireront plus.

J'espère que ce texte sera mis en oeuvre rapidement au niveau local.

Enfin, cette proposition de loi illustre l'excellent travail que réalise le Sénat pour la défense des collectivités. Que nos détracteurs s'en souviennent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

Mme Catherine Conconne .  - Nous nous acheminons vers un vote conforme. Serge Letchimy, pour paraphraser un célèbre slogan publicitaire, le vaut bien, lui qui depuis trente ans a fait de la lutte contre le mal-logement son cheval de bataille, lui qui est reconnu pour être un grand aménageur.

Par ce texte, l'outre-mer montre qu'il peut apporter un oxygène revigorant à la nation française dont les pratiques sont parfois poussiéreuses. L'horizon, c'est le lointain. Nous, outre-mer, sommes cet horizon qui ouvre vers des routes inexplorées. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR et quelques applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur .  - Certains voulaient que le Sénat adopte le texte conforme en première lecture. Il fallait pourtant consolider le texte pour éviter la censure du Conseil constitutionnel au motif que les dérogations étaient excessives au regard du droit de propriété.

Je m'étais engagé à aller vite, engagement que j'ai tenu. Je remercie le Gouvernement d'avoir trouvé un temps pour examiner ce texte provenant de la Nouvelle gauche et d'avoir levé le gage sur l'incitation fiscale nécessaire, indispensable au succès du dispositif.

Nous n'en avons pas fini pour autant avec la question du foncier outre-mer. Les réflexions devront se poursuivre.

La proposition de loi est définitivement adoptée.

Prochaine séance demain, mercredi 19 décembre 2018, à 14 h 30.

La séance est levée à 18 h 15.

Jean-Luc Blouet

Direction des comptes rendus