Mercredi 29 septembre 2021

- Présidence de M. Jean-Marc Boyer, président -

La réunion est ouverte à 16 h 40.

Examen du projet de rapport de la mission d'information

M. Jean-Marc Boyer, président. - Notre réunion de ce jour marque la dernière étape de notre mission d'information : l'adoption formelle du rapport. Permettez-moi de remercier très vivement notre collègue Nathalie Delattre, qui a mené, en sa qualité de rapporteure, un très important travail. Elle avait une grande expérience du sujet et elle s'est déplacée à plusieurs reprises pour aller à la rencontre des acteurs. Ces sept mois et demi de travaux nous ont permis de partager de nombreux constats et propositions sur l'enseignement agricole, lequel apparaît comme un outil indispensable pour l'avenir de nos filières agricoles et alimentaires et, plus généralement, des territoires ruraux.

Pour nous permettre d'avoir un échange de vues complet sur la base du projet de rapport, dont vous avez été destinataires, à l'issue de la présentation de notre rapporteure, je vous propose d'organiser le débat en deux temps. Tout d'abord, une discussion générale permettant à chacun de s'exprimer sur la thématique d'ensemble des travaux de notre mission. Pour permettre une expression pluraliste, je donnerai la parole à un représentant par groupe, puis à tous ceux qui se seront inscrits. Dans un deuxième temps, je vous demanderai de nous présenter, si vous en avez, vos propositions de modification du projet de rapport. Nous nous prononcerons enfin sur le titre que la rapporteure souhaite donner à son rapport et, bien évidemment, sur l'adoption de l'ensemble du rapport.

Une conférence de presse de présentation sera organisée le mardi 5 octobre, à 11 heures 30. Nos travaux devront donc rester confidentiels jusqu'à cette date.

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Je tiens à vous remercier, mes chers collègues, ainsi que notre président Jean-Marc Boyer, de la qualité des échanges que nous avons eus au cours de cette mission d'information ; j'ai apprécié votre présence à tous.

Nous avons beaucoup écouté les acteurs : douze auditions ou tables rondes en mission plénière, treize auditions ou tables rondes en format rapporteure, soit plus de quarante organismes et près de quatre-vingts personnes entendus au Sénat. Des délégations de la mission ont en outre effectué cinq déplacements sur le terrain, en Gironde, dans le Nord, dans la Drôme, à l'École nationale vétérinaire d'Alfort ainsi que dans le Puy-de-Dôme. À ces déplacements s'ajoutent les échanges que plusieurs d'entre vous ont eus avec les acteurs de l'enseignement agricole dans vos départements, ainsi que les témoignages qui nous sont parvenus, soit par vidéo ou courrier, soit à l'occasion de l'échange que le président Boyer a eu dans le cadre d'un webinaire organisé par le Conseil national de l'enseignement agricole privé (Cneap).

Au terme de ce travail, nous sommes plus que jamais convaincus que l'enseignement agricole est un outil indispensable pour nos filières agricoles et alimentaires, pour nos jeunes, pour nos territoires ruraux, en métropole comme dans les outre-mer. Je tiens à souligner cette dimension ultramarine dont nous avons longuement parlé avec Catherine Conconne. L'enseignement agricole d'aujourd'hui n'est plus celui du début du XXe siècle. Il a su évoluer avec son temps, s'adapter aux enjeux, mais aussi s'élargir. Aujourd'hui, il ne forme plus uniquement de futurs agriculteurs : 42 % des élèves suivent des formations dédiées aux services et 19 % à l'aménagement de l'espace et à la protection de l'environnement. C'est un point important, même si la focale de notre rapport nous conduit à mettre l'accent sur l'importance de l'enseignement agricole pour les filières agricoles et alimentaires.

Cet enseignement est innovant et ses résultats sont excellents. Les taux de réussite aux examens sont ainsi bien supérieurs à la moyenne nationale, alors même qu'il accueille souvent des élèves en échec scolaire. Il est pourtant trop méconnu et trop souvent déprécié au moment de l'orientation. Il obtient également les meilleurs résultats en termes d'insertion, même si les chiffres ne sont pas aisés à collecter en la matière.

Un autre constat est apparu clairement : la situation financière du réseau est préoccupante et il est fragilisé, sur fond de baisse du nombre d'apprenants en formation initiale scolaire au cours des dernières années. Les dernières données transmises par la direction générale de l'enseignement et de la recherche (DGER) du ministère de l'agriculture et de l'alimentation indiquent toutefois une remontée du nombre d'élèves inscrits en formation initiale scolaire, jusqu'au baccalauréat, en cette rentrée : ceux-ci seraient 135 682, soit une hausse de 1,4 %. C'est peu, mais cela brise la dynamique de baisse des effectifs, suscitant ainsi de l'espoir. Les effectifs de l'enseignement agricole supérieur court seraient, en revanche, en baisse de 4,5 %.

Les contraintes budgétaires sont réelles et j'observe un décalage entre les chiffres généraux que fait valoir la direction du budget et la réalité constatée et vécue sur le terrain. La concurrence entre les établissements de l'enseignement agricole et, surtout, avec l'Éducation nationale, est un autre facteur évident de fragilisation du réseau. Le dernier point que je veux souligner - et qui m'a marqué comme beaucoup d'entre vous -, est la fragilité institutionnelle du ministère de l'agriculture et de l'alimentation, perçu comme suiveur et affaibli, contesté par le syndicat majoritaire chez les enseignants de l'enseignement technique agricole public.

Face à ces constats, le projet de rapport contient quarante-trois propositions, organisées en trois axes.

Le premier axe consiste à réaffirmer le rôle de pilotage du ministère de l'agriculture et de l'alimentation en renforçant son positionnement au sein de la maquette gouvernementale et en établissant un nouveau projet stratégique pour l'enseignement agricole, confortant la spécificité de son enseignement. Ce ministère est, à mes yeux, devenu trop faible. Pour piloter réellement l'enseignement agricole, comme je l'avais dit au ministre en lui demandant de « mouiller le maillot », ce dernier doit s'impliquer et le défendre au moment de l'examen du budget ; il lui faut développer ses outils de suivi et de pilotage, objectiver les questions de coût et élaborer un nouveau projet stratégique clair et ambitieux pour l'enseignement agricole pour la période 2022-2027, assorti d'indicateurs de suivi et de performance. Il ne peut toutefois pas faire cela seul et il doit associer à cet effort l'Éducation nationale, les régions ainsi que les branches professionnelles.

Face aux besoins constatés sur le terrain, je propose également d'annuler, au titre de 2022, les suppressions d'emplois prévues dans le schéma prévisionnel d'emplois pluriannuel 2019-2022 et de réévaluer, dans le cadre du nouveau projet stratégique, les moyens humains affectés au secteur afin de renforcer son attractivité. À la suite des échanges que j'ai eus avec Julien Denormandie, nous avons très récemment reçu les dernières données de la DGER. Il en ressort que, dans le projet de loi de finances pour 2022, l'enseignement agricole subirait une diminution de 16 équivalents temps plein (ETP) au lieu des 110 emplois initialement prévus, et ce grâce à notre travail, car nos auditions ont été très commentées au sein du ministère et du réseau, qui attendent de connaître le contenu du rapport. Le budget consacré à l'enseignement technique agricole augmenterait, quant à lui, de 43,5 millions d'euros et permettrait, notamment, de financer certaines primes, comme cela est évoqué dans notre rapport. La DGER souligne également que ce budget permettra de lancer un grand plan de modernisation et de renforcement de la capacité d'accueil des quatre écoles nationales vétérinaires, ce qui fait écho, en partie, à la proposition n° 24. Nous examinerons ces données de très près lors de la discussion du projet de loi de finances. Nous sentons la volonté du ministre d'aller de l'avant et il me semble que notre mission n'y est pas pour rien ; nous l'encourageons donc et nous serons à ses côtés pour défendre encore l'enseignement agricole, s'il partage effectivement notre vision !

Enfin, dans le cadre d'un étroit partenariat entre les autorités académiques, je suggère une politique offensive de développement et d'accompagnement des initiatives pour valoriser et consolider le maillage territorial de l'enseignement agricole.

Le deuxième axe vise à consolider les fondamentaux de l'enseignement agricole pour que celui-ci contribue à relever les défis de l'agriculture et des territoires ruraux. Cela passe par une simplification et une adaptation de la cartographie des formations proposées, afin de la rendre plus attractive et plus en phase avec les attentes du monde agricole ainsi, plus largement, qu'avec les besoins des territoires ruraux. Le rapport recommande de revoir l'équilibre des référentiels de formation pour mieux valoriser les enseignements économiques et de gestion, mais aussi en matière réglementaire et de santé-sécurité au travail. C'est un point que plusieurs d'entre vous ont souligné.

Le projet envisage aussi d'utiliser pleinement le bio comme élément de réflexion sur les pratiques agronomiques, sans pour autant enfermer les apprenants dans le cadre d'une filière spécifique d'enseignement. Il me semble, en effet, ainsi que nous en avons notamment débattu à VetAgro Sup, que la force de l'enseignement agricole consiste à donner un socle de connaissances suffisamment large pour permettre aux futurs agriculteurs de bâtir leur modèle et de l'adapter, le cas échéant, en cours de carrière. Cette force doit demeurer.

Plusieurs propositions visent à renforcer les liens entre l'enseignement agricole et les acteurs du monde agricole, notamment au travers de la composition de la commission professionnelle consultative et des liens noués avec les entreprises de la transformation alimentaire.

Enfin, j'insiste sur le renforcement des relations entre enseignement technique, enseignement supérieur et recherche, et je formule plusieurs propositions en ce sens, en vue, notamment, de renforcer les interactions entre organismes de recherche et établissements de l'enseignement supérieur agricole, d'expérimenter un enrichissement du rôle de l'alliance Agreenium, de renforcer les aides à la recherche en matière agronomique et agricole et d'accroître la diffusion des pratiques innovantes dans les exploitations agricoles, dont je souhaite souligner combien elles représentent un atout pour l'enseignement agricole. Les instituts de recherche et les établissements d'enseignement supérieur devraient, par ailleurs, être mieux associés à l'élaboration des référentiels de formation des enseignements techniques agricoles. Le rôle de l'École nationale supérieure de formation de l'enseignement agricole (ENSFEA) doit à ce titre être davantage valorisé et les moyens dévolus aux réseaux mixtes technologiques renforcés.

Le projet de rapport avance également des propositions pour poursuivre et renforcer la lutte contre les stéréotypes de genre, sur la base des recommandations formulées par la délégation aux droits des femmes dans son rapport d'information intitulé Femmes et agriculture : pour l'égalité des territoires.

À la suite des échanges que nous avons eus à VetAgro Sup, je demande également que soit ouvert un accès pleinement diversifié aux cursus de l'enseignement agricole supérieur long, notamment en soulevant la question de l'accès via la formation professionnelle continue. Le rapport met l'accent sur l'enjeu de la désertification vétérinaire ainsi que sur la nécessité, en particulier, d'ajuster le nombre de vétérinaires formés aux besoins des territoires et d'assurer le bon déploiement du dispositif d'incitation à l'installation dans les territoires ruraux que nous avons voté au Sénat.

Enfin, je propose que l'enseignement agricole soit pleinement mobilisé sur la thématique du bien-être de l'agriculteur. Cultiver ou élever ne doit pas se faire dans la pénibilité et dans la douleur. Au-delà des aspects économiques et de gestion, qu'il convient de renforcer, l'enseignement agricole, par sa capacité à intégrer les problématiques liées au changement climatique, à la maîtrise des charges et à l'évolution des différentes normes, est un dispositif essentiel pour permettre aux futurs agriculteurs d'améliorer, demain, leurs conditions de vie. Nos débats récents ont d'ailleurs illustré l'importance de protéger la rémunération des agriculteurs.

Le dernier axe consiste à renforcer l'attractivité de l'enseignement agricole pour les élèves, les familles et les personnels. À cette fin, les propositions nos 26 à 37 visent à améliorer le dispositif d'orientation, lequel, nous l'avons vu, constitue un enjeu majeur. Je voudrais en particulier insister sur la nécessité de renforcer l'information des enseignants sur le contenu des métiers proposés par l'enseignement agricole et de permettre une réelle présentation de l'enseignement agricole au sein des collèges. Le rapport contient également plusieurs propositions offensives pour mieux communiquer sur l'enseignement agricole, au travers d'une nouvelle grande campagne de communication, mais aussi en utilisant différents leviers, comme les stages, le service national universel (SNU) ou un réseau d'ambassadeurs métiers dont j'appelle de mes voeux la création. Après avoir rencontré dans chaque établissement visité des apprenants dynamiques et motivés, je crois qu'il faut davantage s'appuyer sur eux !

Je suggère également qu'un dispositif d'aide financière soit mis en place au niveau des directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (Draaf) pour aider les établissements de l'enseignement agricole à participer aux salons d'information et d'orientation, qui sont des moments importants. Il est enfin essentiel d'instaurer un correspondant de l'enseignement agricole à l'échelle du département, pour faire pendant au directeur académique des services de l'éducation nationale (Dasen).

L'effort de communication doit, en outre, passer par des dénominations de diplômes plus parlantes, mais je propose également de changer le nom de l'enseignement agricole, cette appellation ne rendant plus compte de la diversité des débouchés proposés, en « enseignement agricole, des sciences du vivant et des territoires ».

Le rapport appelle à travailler sur les enjeux d'attractivité pour les élèves en termes d'options, de transport et d'hébergement. Il propose, enfin, de redonner envie aux enseignants et aux personnels de travailler dans ce secteur en mettant l'accent sur les questions salariales ; il affirme ainsi la nécessité de respecter le principe de parité salariale prévu entre l'Éducation nationale et l'enseignement agricole et de revaloriser rapidement les auxiliaires de vie scolaire (AVS) et les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH). C'est, là encore, un point que plusieurs d'entre vous avaient souligné au cours de nos auditions.

Mes chers collègues, tels sont les principaux constats et propositions du projet de rapport. Sur ces bases, je vous propose de donner au rapport le titre suivant : Enseignement agricole : l'urgence d'une transition agro-politique, afin de souligner à la fois l'urgence d'agir et la nécessité de mettre en oeuvre une politique claire et ambitieuse pour cet enseignement absolument nécessaire.

Mme Nadia Sollogoub. - Je vous remercie de votre excellent travail. Nous sommes tous déterminés à améliorer l'attractivité des professions agricoles. Dans mon département, l'agriculture est en crise, mais si les agriculteurs gagnaient correctement leur vie, il serait plus facile de convaincre de la nécessité de travailler dans ce secteur ; à défaut, ils disent à leurs enfants de faire autre chose.

Ensuite, je suis témoin de beaucoup de désirs de reconversion professionnelle vers l'agriculture dans mon département, qu'il faudrait évaluer. Ce n'est pas oublié dans le rapport, mais il reste des besoins que l'on ne peut pas nier et il importe de mettre en regard les moyens pour permettre à ces installations de réussir et de pallier le défaut de renouvellement des générations.

Mme Céline Brulin. - L'état d'esprit constructif qui a régné durant nos travaux ressort bien dans ce rapport, qui aborde des sujets très vastes. Certains de nos interlocuteurs sont inquiets de son contenu, mais beaucoup d'acteurs ont été ravis que cette mission mette en lumière un enseignement dont la reconnaissance est inversement proportionnelle au rôle. Ses acteurs nous nourrissent, embellissent nos paysages, il est bon de les mettre en lumière en ce moment.

Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste avait entendu cette demande et nous avions organisé un débat au Sénat sur ce sujet. Je trouve très forte l'affirmation de la nécessité d'un pilotage pour l'enseignement agricole et de moyens afférents, avec la proposition n° 6 visant à annuler la trajectoire triennale de suppression des emplois, ainsi que l'accent mis sur l'importance de mettre en place des moyens de pilotage au sein de la DGER. Il nous faudrait en effet une sorte d'homologue du Dasen, même si cela ne peut être entièrement le cas. Je serais ravie que ce travail conduise à infléchir le budget en ce sens ; rappelons que nous avions rejeté ces crédits dans le projet de loi de finances pour 2021 et que cela avait fait bouger les lignes.

Des débats sont posés, autour de l'école Hectar dont nous serons amenés à reparler, ou du rôle du syndicat majoritaire, je trouve cela très positif. Je rejoins, en outre, ce qui vient d'être dit : l'attractivité des professions agricoles repose aussi sur les prix agricoles ; de ce point de vue, l'enseignement ne réglera pas tout, et il importe d'insister sur l'enjeu que constitue le renouvellement des générations ainsi que la formation tout au long de la vie.

J'exprimerai enfin, durant la deuxième partie de cette réunion, quelques petites nuances.

Mme Marie-Pierre Monier. - Ce rapport très attendu est très riche, nourri de nombreux déplacements et brosse un tableau complet. Cet enseignement est à la croisée des chemins. Il constitue une spécificité française, une pépite, mais il fait face à des difficultés matérielles et de coordination avec l'Éducation nationale, alors qu'il est un outil important dans un contexte de transition agroécologique et de renouvellement des générations. Nous avons su nous réunir pour définir une ligne de défense commune de ce secteur.

Je suis d'accord avec le titre proposé, car le rôle de cet enseignement s'étend, mais nous pourrons en débattre.

Globalement, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, au nom duquel je m'exprime, partage les constats et les propositions du rapport, avec quelques petites réserves, sur lesquelles nous reviendrons en deuxième partie.

M. Gilbert Favreau. - Le monde agricole évolue très vite. Le contexte fait certes ressortir certaines faiblesses mais doit nous incliner à réfléchir aux atouts qu'il contient en germes. Le public va évoluer. Auparavant, l'enseignement agricole n'accueillait que des agriculteurs. Aujourd'hui, on y trouve beaucoup d'autres profils, alors que les préoccupations environnementales rejoignent les préoccupations agricoles et que l'enseignement agricole est plus mobile et adaptable que l'Éducation nationale, dont les lourdeurs sont gênantes, pour l'enseignement agricole comme pour sa propre évolution.

Le secteur a des atouts mais il a aussi des faiblesses : notre pays est hyper administré et cela pose des problèmes en termes d'orientation, de financements et de tutelles différentes. À mon sens, nous n'exploitons pas assez les compétences des conseils régionaux alors que l'orientation et la formation en relèvent. Nous devrions demander aux régions de promouvoir davantage l'enseignement agricole, car elles y ont intérêt.

Les propositions qui sont faites dans ce rapport sont autant d'avancées possibles et je suis optimiste sur l'avenir : l'agriculture telle qu'on la conçoit traditionnellement est, certes, en perte de vitesse, mais l'enseignement agricole peut s'adapter.

M. Joël Labbé. - Les missions d'information sont de véritables outils qui permettent de passer ensemble du temps pour travailler sur un sujet, ce qui permet, malgré nos conceptions différentes, de trouver des convergences. Je m'interroge pourtant sur le titre proposé pour le rapport. J'aime l'audace mais je souhaite avoir des explications supplémentaires.

Ce rapport contient beaucoup d'éléments positifs, il souligne l'importance de l'enseignement agricole face au défi climatique, face à la nécessité de produire une nourriture saine, de répondre aux préoccupations des citoyens en matière de bien-être animal - cela relève d'un fait de société -, d'assurer le renouvellement des générations et de garantir la souveraineté alimentaire.

Le manque de moyens consacrés à l'enseignement agricole, malgré ses atouts, est mis en avant. Le Sénat avait d'ailleurs unanimement demandé une amélioration dans ce domaine.

J'apprécie que le rapport fasse référence aux projets alimentaires territoriaux (PAT), aux circuits courts, aux plantes à parfum et médicinales ainsi qu'au développement de la formation pour ces filières, à l'enseignement du bien-être au travail, à l'amélioration de l'autonomie et de la gestion des agriculteurs et au travail sur la captation de la valeur ajoutée. Sur le bio, il nous semble toutefois manquer des éléments fondamentaux. Le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires souhaite aller plus loin dans les propositions à ce sujet et nous déposerons une contribution annexe.

M. Frédéric Marchand. - Ce rapport replace l'église au centre du village. Je ne connaissais pas ce monde et il me semble bon de le remettre au coeur de l'éducation. Le projet de rapport contient des informations intéressantes. Cet enseignement agricole est à la croisée des chemins, la question des moyens est abordée, mais ce n'est pas le seul problème : il souffre d'un déficit de communication et de perception.

Le rôle des collectivités est essentiel, je suis très attentif aux projets alimentaires territoriaux et mon département recèle en particulier l'Institut de Genech, notre pépite, que la mission a visité et qui rencontre un très grand succès. Cet établissement démontre, en effet, que l'enseignement agricole est également essentiel en matière d'aménagement du territoire et de développement durable.

Le titre proposé me semble aussi très audacieux, mais le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants se retrouve dans la quasi-totalité des propositions.

M. Olivier Jacquin. - Les coupes claires réalisées dans les postes du secteur étaient très inquiétantes et le signal envoyé par ce rapport, demandé par le groupe RDSE, est une excellente chose. J'ai moi-même été éduqué dans l'enseignement agricole et j'y suis particulièrement sensible. Je suis à mon tour interrogatif sur le titre que vous proposez, qui me semble également très audacieux.

La proposition n° 11, « utiliser pleinement le bio comme élément de réflexion sur les pratiques agronomiques, sans enfermer les apprenants dans un cadre de filière spécifique d'enseignement », m'intéresse particulièrement. J'ai longtemps exercé dans le secteur conventionnel et je suis maintenant passé en bio. Dans ce domaine, les besoins en matière de recherche et de formation sont considérables, et dans les deux sens. En effet, beaucoup d'outils ont été imaginés en bio et servent maintenant en conventionnel. De ce point de vue, la seconde partie de la phrase me semble poser question : dans certaines formations, on enferme surtout les apprenants dans l'agriculture conventionnelle et nous avons besoin d'enseignements spécialisés en bio. Ainsi, dans mon département, un grand lycée agricole de Nancy, desservi par le TGV et les transports en commun, donc attractif, est très avancé sur l'agroécologie. L'exploitation attenante était en cours de conversion en bio, dans une logique non pas dogmatique, mais d'adaptation à son contexte agronomique, mais le conseil d'administration a refusé, de manière un peu dogmatique, pour le coup, la conversion partielle, ce qui me semble très dommageable.

M. Vincent Segouin. - Au nom du groupe Les Républicains, je voudrais dire que ce sujet a été soulevé lors du dernier projet de loi de finances, il est aujourd'hui mis au clair dans ce rapport que nous approuvons. C'était une réalité, elle est aujourd'hui écrite. Comme rapporteur spécial de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », je m'interroge toutefois. Le budget va être augmenté dans des proportions plus importantes que prévu, la baisse des équivalents temps plein a été limitée - tant mieux ! -, mais est-ce que cela permettra de compenser la différence de salaire, les difficultés dues au covid que rencontrent les maisons familiales rurales (MFR) et les difficultés financières graves auxquelles est confronté un tiers des établissements, ou s'agit-il seulement d'un effet d'annonce ? Un plan sur plusieurs années est-il prévu ?

En tout état de cause, nous sommes favorables à ce rapport.

M. Pierre Louault. - Ce rapport est très complet. Nous n'avons toutefois pas été assez sévères avec l'orientation apportée par l'Éducation nationale, qui consiste toujours à envoyer les élèves qui ne sont pas très bons en lycée agricole et les plus mauvais en apprentissage. Nous aurions pu taper plus fort à ce sujet.

S'agissant du bio, nous n'allons peut-être pas assez loin. J'ai trois petits-enfants qui sont en enseignement agricole et leur impression est que l'enseignement du bio est philosophique et partisan, mais insuffisamment technique. Selon moi, une formation technique et scientifique des enseignants manque.

J'approuve toutefois sans réserve cet excellent rapport.

Mme Marie-Christine Chauvin. - L'enseignement agricole souffre d'un déficit de notoriété, j'espère que la publication de ce rapport et la conférence de presse vont mettre un coup de projecteur sur ce secteur qui subit trop d'idées préconçues.

J'insiste à mon tour sur les difficultés que rencontrent les MFR.

Mme la rapporteure a souligné la baisse d'effectifs dans l'enseignement supérieur agricole court, je l'en remercie, car cela suscite de réelles inquiétudes ; si l'enseignement supérieur agroalimentaire - j'ai à l'esprit l'École nationale d'industrie laitière (ENIL) à Poligny - forme de moins en moins de fromagers, la filière du lait risque d'en pâtir. L'agriculture est un tout, il est important de souligner ces problèmes pour que chacun en prenne conscience.

Mme Marie-Pierre Richer. - Je me souviens des premières auditions durant lesquelles nos interlocuteurs défendaient leur pré carré et je remercie tous ceux qui sont intervenus pour que l'on bouscule un peu ces acteurs.

À la proposition n° 3, je voudrais ajouter « au nom du monde agricole et du vivant », cela résume bien ce qu'entendait montrer ce rapport, qui répond à une attente de l'ensemble du monde agricole.

M. Jean-Marc Boyer, président. - Je retiens que la spécificité de l'enseignement agricole est bien valorisée par rapport à l'éducation nationale, qu'il faut absolument augmenter l'attractivité du secteur, en faisant des efforts sur l'orientation et la communication, pour le faire connaître.

Je garde à l'esprit également la place qu'il faut ménager aux régions, car celles-ci sont un financeur important de la rénovation des lycées, laquelle joue un rôle sur leur attractivité et permet de donner une autre image du territoire.

S'agissant du versant écologique de ce travail, je comprends les propos de Joël Labbé. La mise en place de PAT fait partie des attentes sur les territoires. On parle beaucoup aujourd'hui de maltraitance animale, mais nous avons discuté récemment en séance de la rémunération des agriculteurs, et j'ai évoqué la maltraitance des agriculteurs dans notre monde. Ce secteur peut-il être attractif pour des jeunes avec de tels revenus ? Il est important que les agriculteurs, qui travaillent beaucoup, puissent gagner leur vie. Le juste revenu des agriculteurs passe aussi par leur bien-être et leurs conditions de vie. Un rapport peut favoriser une prise de conscience. Celui-ci sera, n'en doutons pas, important aux yeux de nos collègues.

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Nous avons mené un combat très important, ensemble, sur cette partie du budget dont j'étais rapporteure pour avis. Notre vote négatif, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2021 a été un signal fort. Je me suis alors demandé comment poursuivre ce combat et j'ai utilisé le droit de tirage de mon groupe sur les missions d'information. Cependant, ce projet est véritablement collectif et nous allons le porter ensemble. J'ai voulu que ce rapport soit le reflet de tout ce que nous avons pu nous dire en auditions et je suis très touchée que cela fasse aujourd'hui l'unanimité. J'ai une pensée pour tous les jeunes formidables et passionnés que nous avons rencontrés, et j'ai envie que ce rapport leur soit spécialement dédicacé.

Concernant le budget, les crédits octroyés à l'enseignement agricole ne rattrapent pas encore ceux qui sont consacrés à l'éducation nationale ; l'augmentation de 43 millions prévue concerne notamment les crédits dédiés à l'inclusion sociale des élèves en situation de handicap, les aides sociales versées aux élèves, à hauteur de 14,2 millions d'euros, ainsi que la modernisation des systèmes d'information.

La conférence de presse sera importante pour mettre en lumière notre rapport. Il conviendra également de communiquer dans les territoires. Surtout, l'examen du projet de loi de finances est le moment idoine pour nous permettre de contribuer à infléchir cette politique. Nous devons poursuivre notre combat.

L'enseignement agricole fait sa transition en intégrant des modules bio. Dans le cadre de la transition environnementale, les établissements scolaires ont la volonté d'aller de plus en plus vers un enseignement bio. Toutes les personnes que nous avons rencontrées sont très motivées pour dispenser un enseignement bio. Toutefois, il importe que les jeunes connaissent tous les modèles pour qu'ils soient en capacité de bâtir le leur, entre agriculture conventionnelle et agriculture bio.

J'en viens au titre : « Enseignement agricole : l'urgence d'une transition agro-politique. »

L'enseignement agricole doit être le reflet des défis actuels : certes, la transition agro-écologique en fait partie, mais la gestion, par exemple, doit également constituer un volet important. En parallèle, une transition politique est indispensable, qui soit sous-tendue par une volonté politique forte. Or le ministère de l'agriculture et de l'alimentation est avant-dernier dans l'ordre protocolaire. Cela n'est pas de nature à envoyer un bon signal politique. Dans le cadre du PLF pour 2021, Julien Denormandie a quasiment perdu tous ses arbitrages face à Bercy !

Certes, on voit les prémices d'une nouvelle trajectoire, mais montrons que nous avons une exigence de transition politique en matière d'enseignement agricole.

M. Jean-Marc Boyer, président. - Comme l'a dit la rapporteure, 43,5 millions d'euros de crédits supplémentaires pourraient être inscrits dans le PLF. Saluons le fait que notre collègue ait pu interpeller le ministre. Sur le plan politique, nous continuerons à apporter notre soutien au ministre de l'agriculture et de l'alimentation pour obtenir une augmentation de crédits.

Nous allons maintenant examiner les différentes propositions de modification.

Mme Nadia Sollogoub. - Ne peut-on pas quantifier les besoins financiers en matière de reconversion ?

Mme Marie-Pierre Monier. - À la page 22, vous écrivez que « la mission ressent un traitement inégal en défaveur des établissements privés, notamment dans les aides financières attribuées à l'occasion de la crise de la covid-19... ». Or, à la page 60, vous notez que les agents contractuels publics n'ont pas bénéficié du chômage partiel. Ne faudrait-il pas expliciter ces points ?

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Nous avons utilisé le verbe « ressentir ». Même si nous modifions la rédaction, il importe de faire figurer le ressenti du privé, car il est très fort.

Mme Marie-Pierre Monier. - Certes, mais concernant les aides, elles n'ont pas été traitées de la même façon, car les revenus diffèrent, vous l'expliquez d'ailleurs dans les pages suivantes.

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Nous modifierons la rédaction.

Mme Marie-Pierre Monier. - À la page 44, vous dites que « le monde enseignant véhicule [...] un discours "idéologisé" et partisan ».

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Je comprends que ces propos passent mal, mais ils ont été tenus lors d'une audition en format rapporteure.

Mme Marie-Pierre Monier. - Il faudrait dire explicitement que ce sont les propos d'une personne auditionnée, et ne pas les reprendre au nom de la mission.

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Nous avons noté qu'il s'agit « d'autres témoignages », mais peut-être devons-nous être plus explicites encore.

Mme Céline Brulin. - À la page 90, vous écrivez : « A minima, le gel de toute suppression d'ETP par rapport au schéma prévisionnel initial est nécessaire. À cet égard, elle [la mission] sera tout particulièrement vigilante à d'éventuels effets d'annonces sur une potentielle réduction des suppressions envisagées en 2017, qui ne seraient dans les faits qu'un rattrapage par rapport à une sur-exécution les années précédentes ». Pouvez-vous m'expliquer ce paragraphe ?

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - En 2019, il était prévu de supprimer 50 ETP ; or, dans les faits, 53 postes ont été supprimés. En 2020, 85 ETP ont été supprimés, contre 60 prévus. D'où le terme de « sur-exécution ».

Mme Céline Brulin. - Je comprends, merci pour cette explication.

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Je me demande si nous ne devrions pas actualiser les chiffres pour 2022.

Pour en revenir à la question de Vincent Segouin, 22,2 millions seront consacrés à la mise en oeuvre de la revalorisation du Grenelle de l'éducation - primes d'équipement, primes d'attractivité, revalorisation indemnitaire des conseillers principaux d'éducation (CPE).

Mme Marie-Pierre Monier. - Dans le cadre de la proposition n° 6, nous souhaitons annuler les suppressions d'emplois prévues dans le schéma prévisionnel d'emplois pluriannuel 2019-2022. Mais vise-t-on le rétablissement des emplois supprimés dans l'enseignement agricole public et privé sur toute cette période ?

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Dès lors que l'on demande une revalorisation de l'enseignement agricole, cela impliquera à terme des emplois supplémentaires.

Procédons en deux étapes : demandons cette année le maintien des 110 ETP, puis inscrivons-nous dans une trajectoire plus large, en demandant que le nombre de postes soit en adéquation avec les nouveaux effectifs des élèves.

Mme Marie-Pierre Monier. - À la page 90, même si c'est un détail, vous avez plus développé le point de vue de l'administration que celui des enseignements.

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Nous pouvons rééquilibrer ces deux paragraphes.

Mme Marie-Pierre Monier. - Il me semble que le terme « agro-écologie » inclut les exploitations et la taille de celles-ci. J'aimerais que l'on ajoute que l'agro-écologie s'inscrit dans un cadre un peu plus large. Au-delà de la question spécifique de l'agriculture biologique, elle doit veiller à rendre accessibles les modèles d'exploitation à chaque apprenant. Je propose l'ajout suivant à la page 98 : « Par ailleurs, le bio n'est pas la seule composante des évolutions portées par la transition écologique. Il est important que chaque apprenant ait accès au cours de sa formation à une présentation exhaustive du fonctionnement des exploitations de petite taille et de l'ensemble des pratiques agro-écologiques. »

M. Jean-Marc Boyer, président. - Vous proposez donc d'ajouter ce paragraphe entre l'avant-dernier paragraphe et le dernier ?

Mme Marie-Pierre Monier. - La proposition n° 11 pourrait être complétée par : « veiller à ce que les modèles d'exploitation agricole de petite taille... ».

M. Jean-Marc Boyer, président. - Pourquoi « de petite taille » ?

Mme Marie-Pierre Monier. - J'ai le sentiment que l'on ne parle que des grosses structures.

M. Jean-Marc Boyer, président. - Non.

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Je crains que votre proposition n'alourdisse la proposition n° 11. Il serait préférable d'apporter cette précision auparavant.

Mme Marie-Pierre Monier. - J'en suis d'accord.

M. Joël Labbé. - « Utiliser pleinement le bio comme élément de réflexion sur les pratiques agronomiques » : ces pratiques sont évidemment à la base du bio. Mais pourquoi ajouter « sans enfermer les apprenants dans un cadre de filière spécifique d'enseignement » ? Là n'est pas le sujet, cette précision m'apparaît même réductrice.

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Le verbe « enfermer » est peut-être inapproprié, mais les jeunes doivent bénéficier de tous les enseignements. Ils doivent avoir toutes les clés à la fin de leurs études. Si l'on cantonne l'enseignement au bio, comment feront-ils s'ils travaillent dans l'agriculture conventionnelle ?

M. Joël Labbé. - Les pratiques agronomiques sont au coeur de cette proposition. À terme, elles devraient recouvrir l'ensemble des modes d'agriculture. Laissons tout ouvert.

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Cette idée est reprise au c) « Ne pas faire de filière spécifique bio mais utiliser pleinement le bio comme élément de réflexion sur les pratiques agronomiques ».

M. Olivier Jacquin. - On pourrait s'entendre si l'on distinguait l'enseignement de base de spécialisations ultérieures. Les élèves doivent effectivement connaître tous les modèles d'agriculture, mais inscrire, de manière aussi martiale, « ne pas faire de filière spécifique bio » me gêne beaucoup. Il faut préciser « dans l'enseignement de base ».

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Vous avez raison, n'envoyons pas un signal négatif.

M. Olivier Jacquin. - La proposition de Marie-Pierre Monier allait en ce sens. Il faut que toutes les composantes de l'enseignement soient dispensées ; n'ayons pas une approche sectaire.

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - En effet, nous allons nous inspirer de vos propositions.

M. Olivier Jacquin. - Vous allez réécrire le c) ?

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Tout à fait, nous allons trouver une formulation positive.

M. Jean-Marc Boyer, président. - Il faut trouver une formulation équilibrée, car les enseignants ont choisi de ne pas faire une filière bio spécifique.

M. Joël Labbé. - Envisagez-vous de ne pas mettre la seconde partie de la proposition n° 11 ?

M. Vincent Segouin. - On ne va pas modifier tout le rapport non plus.

M. Joël Labbé. - Cela ne modifie pas tout le rapport.

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Nous allons enlever le verbe « enfermer ».

M. Joël Labbé. - Il y a une demande de formation bio spécifique. C'est pourquoi je ferai une annexe sur ce point.

Mme Marie-Pierre Monier. - À la page 105, dans la proposition n° 17, vous parlez de la recherche. Vise-t-on les appels à projets ou la recherche de manière plus pérenne ? Soit on l'explicite dans le paragraphe précédent soit on modifie la proposition avec la rédaction suivante : « Renforcer le soutien à la recherche en matière agro-économique et agricole par la création de postes pérennes dans ce domaine ainsi que par des appels à projets de l'ANR... ».

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Votre proposition est judicieuse.

Mme Marie-Pierre Monier. - Des chercheurs m'ont confié qu'ils passaient leur temps à chercher des financements pour les appels à projets.

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - En effet, ils nous l'ont tous dit.

Mme Marie-Pierre Monier. - À la page 116, il faudrait écrire : « la venue d'un proviseur de lycée agricole et d'un directeur de maison familiale rurale » et non pas « ou. »

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Nous en sommes tous d'accord.

Mme Marie-Pierre Monier. - La proposition n° 40 parle de mutualisation. Veillons à ce que cette logique ne conduise pas à une logique de rationalisation des postes. Vous avez beaucoup insisté sur la qualité de l'enseignement à distance, vous avez raison, mais cela ne doit pas être de nature à déréglementer le secteur.

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - La mutualisation concerne plutôt les locaux. Dans le Nord, plutôt que de construire dans dix ans un nouveau lycée, on a préféré ouvrir une classe de seconde générale dans des locaux d'un établissement d'enseignement agricole. Cette classe est en réalité un véritable vivier pour cet établissement.

Vous avez raison, par mutualisation, il ne faut pas que l'on entende « mutualisation de postes ».

Mme Céline Brulin. - Dans le même esprit, il conviendrait de bannir le terme « visioconférence ». L'enseignement agricole, plus encore que les autres, ne peut être dispensé à distance.

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - La visioconférence ne concerne que des options. De nombreux établissements peinent à introduire certaines options, car seuls deux ou trois élèves sont intéressés. La visioconférence permettrait de développer certaines options, ce qui serait de nature à favoriser l'attractivité de ces établissements.

M. Vincent Segouin. - Ne nous interdisons pas le recours aux outils modernes.

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Sans en abuser, il faut avancer. La proposition n° 40 résume nos développements sur ces options qui pourraient être dispensées en visioconférence.

Mme Céline Brulin. - Ces options peuvent en effet être un enrichissement. Mais, vu les difficultés budgétaires actuelles, des enseignements de base pourraient être dispensés sous cette forme. Or, nous l'avons vu pendant le confinement, la visioconférence n'est pas la panacée.

M. Jean-Marc Boyer, président. - Permettez-moi de revenir sur la question des mutualisations. La ville de Rochefort-Montagne, qui compte un collège et un lycée agricole, a le projet de développer une cité scolaire pour permettre aux élèves d'y suivre leur scolarité jusqu'au baccalauréat, alors qu'ils doivent pour l'heure aller en internat dans une autre ville. Les ministères de l'agriculture et de l'éducation nationale demandent des mutualisations : un seul centre de documentation et d'information, un seul self, afin que la région et le département mutualisent leurs moyens. Mutualisation ne signifie pas suppression de postes : on peut supprimer un poste dans un service, mais en créer un autre dans un autre service. C'est ainsi que j'entends la mutualisation.

Mme Marie-Pierre Monier. - Certes, cela peut se passer comme cela dans une intercommunalité, mais il en va différemment au niveau de l'État. En témoigne la suppression de trésoreries ! Si l'on écrit le terme « mutualisation », quel usage en sera-t-il fait ?

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Madame Brulin, on va préciser que les visioconférences concernent les options.

M. Joël Labbé. - Oui à l'utilisation intelligente de la visioconférence, mais sinon...

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Je ne voudrais pas que Bercy prenne cette proposition au pied de la lettre.

M. Jean-Marc Boyer, président. - Page 129, Mme Monier demande que la proposition n° 42 soit reformulée.

Mme Marie-Pierre Monier. - On peut dans le paragraphe précédant cette proposition : « Elle [la mission d'information] attire en particulier l'attention sur l'enseignement agricole privé dont le rôle est bien plus important que dans l'éducation nationale. » Le terme « rôle » me semble inapproprié. Ne pourrait-on pas dire : qui représente une part de formation plus importante.

Dans la proposition n° 42, il faudrait peut-être modifier la formulation : « à ne pas négliger l'enseignement agricole » en ajoutant : « qu'il soit public ou privé ou dans la diversité de ses structures. » La formulation retenue donne l'impression que l'on se focalise sur le privé.

M. Jean-Marc Boyer, président. - Certes, je comprends, mais l'on sait que l'enseignement privé représente une part plus importante.

Mme Marie-Pierre Monier. - Sur le fond, je suis d'accord. C'est pourquoi je propose d'écrire : « l'enseignement agricole privé qui représente une part de formation plus importante que dans l'éducation nationale. »

M. Jean-Marc Boyer, président. - On peut ajouter cette précision en effet.

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Cela me fait penser à la proposition de Gilbert Favreau : il importe que les régions se mobilisent plus activement en faveur de l'orientation dans l'enseignement agricole. Cela pourrait faire l'objet d'une proposition complémentaire.

M. Gilbert Favreau. - Les régions seront intéressées.

Mme Nathalie Delattre, rapporteure. - Souvent, ce sont des acteurs privés ou des associations qui organisent les salons d'orientation. Les établissements d'enseignement agricole n'ont pas les moyens de promouvoir leur enseignement dans les salons. C'est pourquoi nous proposons que les DRAAF apportent leur aide. De manière ambitieuse, j'envisageais de proposer que les salons soient obligés d'accueillir tous les établissements d'enseignement agricole. Mais nous pourrions tout au moins alerter les régions sur la nécessité de voir l'ensemble des établissements et des filières représentés lors des salons.

Soit nous reformulerons notre proposition, soit nous ferons une proposition supplémentaire sur ce sujet.

M. Jean-Marc Boyer, président. - Permettez-moi de vous rappeler le titre du rapport : « Enseignement agricole : l'urgence d'une transition agro-politique »

Le titre du rapport est adopté.

La mission d'information adopte à l'unanimité le rapport d'information, dans la rédaction issue de ses travaux, et en autorise la publication.

M. Jean-Marc Boyer, président. - Le compte rendu de cette réunion sera inséré dans le rapport. Les groupes politiques qui souhaiteraient annexer au rapport des contributions écrites pour faire état de positions spécifiques sont invités à communiquer ces documents au secrétariat d'ici le vendredi 1er octobre à midi.

La réunion est close à 18 h 20.