Mardi 21 septembre 2021

- Présidence de Mme Sabine Van Heghe, présidente -

La réunion est ouverte à 16 h 05.

Examen du rapport de la mission

Mme Sabine Van Heghe, présidente. - Mes chers collègues, dans le prolongement de notre échange de vues informel de la fin du mois de juillet, notre réunion de ce jour marque la dernière étape juridique de notre mission. Il s'agit, sur la base du projet de rapport qui a été mis à votre disposition depuis vendredi, de procéder à l'adoption formelle du rapport de notre mission d'information.

Permettez-moi, à titre liminaire, de remercier très vivement, en votre nom à tous, notre collègue Colette Mélot d'avoir conduit de bout en bout nos travaux en sa qualité de rapporteure.

Grâce à nos travaux, chacun peut mieux mesurer à quel point le harcèlement scolaire représente, pour notre société, un drame, individuel et collectif, qu'il est plus que jamais urgent de combattre. Le mouvement de harcèlement à l'encontre des élèves de sixième nés en 2010 qui se déroule actuellement dans nos collèges en montre encore, s'il en était besoin, la malheureuse actualité.

Si la mobilisation est réelle et si les outils de sensibilisation existent, le dispositif actuel pèche cependant, me semble-t-il, sur le plan du suivi, qui n'est pas suffisamment assuré. Désireux d'améliorer cette politique publique, nous nous y sommes employés avec détermination et dans un climat d'écoute mutuelle, qui est l'ADN de notre assemblée.

Pour nous permettre d'avoir aujourd'hui un échange de vues complet sur la base du projet de rapport de notre collègue Colette Mélot, dont vous avez été destinataires, je vous propose d'organiser le débat en deux temps. Tout d'abord, une « discussion générale » donnera l'occasion à chacun, après avoir entendu notre rapporteure, de s'exprimer sur la thématique d'ensemble des travaux de notre mission. Pour permettre une expression pluraliste, je donnerai d'abord la parole à un représentant par groupe, puis à tous ceux qui se seront inscrits.

Dans un second temps, je vous demanderai de nous présenter, si vous en avez, vos propositions de modification du projet de rapport, afin que nous puissions statuer sur ces dernières. Enfin, nous nous prononcerons sur le titre que la rapporteure souhaite donner à son rapport et, bien évidemment, sur l'adoption de l'ensemble du rapport.

Une conférence de presse de présentation sera organisée ce jeudi 23 septembre, à 14 heures, en salle Médicis. Elle permettra de donner tout le retentissement nécessaire à nos travaux, que nous aurons pris soin de garder confidentiels jusque-là.

Mme Colette Mélot, rapporteure. - Permettez-moi tout d'abord de vous redire le plaisir que j'ai eu à travailler avec vous, sous la présidence de notre collègue Sabine Van Heghe, qui a parfaitement su conduire nos échanges, dans une ambiance studieuse et confiante, qui est bien effectivement la marque de fabrique du Sénat.

Je souhaite, en préambule, rappeler la qualité de notre travail, avec une vingtaine d'auditions et deux déplacements sur le terrain, qui nous auront permis d'avoir un panorama aussi vaste que complet de la situation.

Dans le prolongement de nos échanges informels de la fin du mois de juillet, je vous en rappellerai rapidement les grandes lignes.

Il est incontestable que nous sommes confrontés à un fléau, qui, surtout dans sa dimension « cyber », porte atteinte aux fondements du vivre ensemble. Nous devons donc décréter la mobilisation générale pour mieux prévenir, détecter et traiter, afin de suivre efficacement les victimes et d'avoir un réel suivi des harceleurs. Des outils existent déjà et des progrès ont été réalisés depuis dix ans. Mais ils ne suffisent plus.

Il est nécessaire de bien libérer la parole, à tous les stades et à tous les niveaux, tout en veillant à bien intégrer les parents « dans la boucle ». Il faut que les élèves d'aujourd'hui, qui seront les citoyens de demain, soient intimement persuadés qu'ils seront écoutés par des adultes de confiance et sachent clairement que les actes de harcèlement qu'ils subissent, auxquels ils participent ou auxquels ils assistent sont intolérables.

Nous devons d'autant plus y veiller que le débat s'est très largement renouvelé avec le cyberharcèlement, comme Mme la présidente vient de le rappeler. Ce cyberharcèlement se concentre sur le secondaire, vise surtout les jeunes filles, en particulier lorsqu'il comporte une dimension sexiste et sexuelle avérée. Sa violence est considérable, car il crée un continuum entre l'école et la sphère privée.

Une mobilisation générale contre le cyberharcèlement est nécessaire et passe, pour l'essentiel, par une activation de la sensibilisation au niveau européen. En effet, seuls, nous sommes vite désarmés face à des réseaux qui ont leur siège hors de nos frontières, voire sur d'autres continents.

Voilà rapidement résumée la tonalité d'ensemble du projet de rapport, tel que vous avez pu le lire depuis vendredi dernier.

S'agissant des recommandations elles-mêmes, elles s'articulent autour de trois axes - prévenir, détecter, traiter - et sont au nombre de 35, de portée et d'application différentes, car, vous l'avez bien compris, la lutte contre ce fléau est l'affaire de tous et un combat de chaque instant.

Une première série de recommandations concerne les moyens actuels de lutte. Ils existent, ils sont nombreux - peut-être trop -, mais pas assez connus et mal appliqués.

Ainsi, en tant que législateurs, nous avons, depuis une décennie, pleinement reconnu le harcèlement comme un fléau, déjà pénalement répréhensible et assorti de circonstances aggravantes quand il vise des mineurs ou s'effectue sur les réseaux sociaux. Par conséquent, plus que de créer un délit spécifique de harcèlement scolaire, ce qui reviendrait à alourdir davantage encore notre législation, il faut améliorer le pilotage d'ensemble de cette politique publique.

Il faut lutter contre les difficultés du « dernier kilomètre », c'est-à-dire contre tout ce qui entrave la libération de la parole, développe un sentiment de honte ou de culpabilité chez l'élève, surtout quand il est adolescent, et le conduit à l'autocensure. Il faut ainsi beaucoup mieux faire connaître et rationaliser le fonctionnement du 30 18, pour le cyberharcèlement, ou du 30 20, pour le harcèlement scolaire, et faire de la journée de sensibilisation du début du mois de novembre prochain un temps fort.

Il faut mieux coordonner le pôle de l'éducation nationale avec les autres grands partenaires publics, que sont la Gendarmerie, la Police et la Justice, sans oublier le monde associatif, dont la place, notamment dans l'écoute et la sensibilisation, est centrale. Dans ce cadre, la question est naturellement celle de l'ampleur des moyens financiers ou humains actuels, mais aussi celle de leur meilleure organisation et de leur plus grande rationalisation, notamment pour lutter contre le turn-over, qui démotive les équipes.

Une seconde série de recommandations vise à assurer une implication massive de toute la société autour d'une priorité à accorder à la prévention, qui doit être érigée en grande cause nationale.

Je pense que chaque enfant doit connaître ses droits et devoirs. Pour cela, il faut utiliser et mutualiser les heures de vie scolaire. Il faut surtout que soit largement diffusé, dès le début de l'année, un flyer d'information rappelant le droit existant, les numéros d'appel, ainsi que les sanctions encourues. Son contenu doit être voté en conseil d'administration et annexé au projet d'établissement.

Un volet spécifique doit aussi être consacré, dès le primaire, à la formation à l'utilisation responsable des outils numériques, pour y affirmer la nécessité du savoir-être.

Nous devons ensuite être capables de détecter rapidement les situations de harcèlement. Tous les membres adultes de la communauté éducative doivent y veiller, de sorte que les enfants n'aient pas d'appréhension à aller les voir et à dialoguer avec eux. Au total, dès qu'un fait de harcèlement commence, il faut le traiter systématiquement et rapidement. Pour reprendre les propos tenus par Jean-Pierre Bellon lors de son audition, « la meilleure des préventions, c'est le traitement ». Pour cela, les partenariats avec la Police et la Justice doivent être systématisés, et tout fait avéré doit remonter au niveau de l'académie. Les suites retenues doivent être présentées devant le conseil d'administration de l'établissement, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Pour sa part, la Justice doit développer les stages d'éducation à la citoyenneté et les travaux d'intérêt général pour éviter l'éventuel basculement des harceleurs dans la délinquance.

Nous devons bien veiller à dissocier sanction judiciaire et sanction scolaire. Sans attendre la réponse de la Justice, il me semble important que chaque cas de harcèlement soit pleinement traité. En effet, il constitue le plus souvent une infraction au règlement intérieur de l'établissement. C'est essentiel pour la victime, car, si le temps judiciaire est souvent très long, celle-ci est en attente d'une réponse rapide de la part des adultes de l'établissement pour avoir le sentiment que sa parole et sa situation sont prises en compte. Mais c'est important aussi pour le harceleur et les témoins, pour qu'ils se rendent compte que ces faits, ces moqueries « pour rire » constituent des faits de harcèlement graves, qui ne peuvent demeurer impunis.

Cet effort doit naturellement être partagé par les réseaux sociaux. Ce sont bien évidemment des outils exceptionnels de communication, que nous utilisons d'ailleurs toutes et tous largement pour faciliter et médiatiser l'exercice de notre mandat. Il n'empêche que nous ne pouvons les laisser sans obligation de rendre compte, surtout lorsque plusieurs d'entre eux, et non des moindres, cherchent à se réfugier derrière le respect formel d'obligations vagues et définies par eux-mêmes, sans grande concertation.

Comme vous le savez, le niveau utile et effectif de réglementation est au minimum européen, voire international. Il est donc primordial de s'inscrire dans la perspective de la très prochaine présidence française du Conseil de l'Union européenne. Il faut, à cette occasion, exiger des réseaux sociaux qu'ils soient non seulement plus réactifs lorsqu'un contenu de harcèlement leur est signalé, mais aussi proactifs. Ils doivent se saisir de cette question et participer pleinement à la prévention du cyberharcèlement. Pour vérifier son effectivité, des stress tests, à l'image de ce qui est déjà pratiqué sur les banques, doivent être mis en place pour vérifier que les objectifs assignés aux réseaux sociaux sont bien atteints.

Mes chers collègues, voilà les principaux constats auxquels je suis parvenue et qui figurent dans mon projet de rapport, dans le titre IV. Sur ces bases, je vous propose donc comme sous-titre à mon rapport : « Harcèlement scolaire et cyberharcèlement : vers une mobilisation générale pour mieux prévenir, détecter et traiter ».

Mme Céline Boulay-Espéronnier. - Je vous remercie de ce rapport complet et synthétique. Il est révélateur de la qualité de nos travaux, lesquels se sont déroulés dans une bonne ambiance, avec une volonté commune d'aboutir et d'appeler à la mobilisation de tous les acteurs.

Je souscris au sous-titre proposé, mais on ne saurait écrire que l'on doit aller « vers » une mobilisation, puisque la mobilisation est déjà engagée.

Le Sénat, fidèle à son ADN, a tiré les conséquences de ce problème majeur, qui concerne potentiellement tous les enfants, donc les adultes et les citoyens de demain.

Les propositions, très concrètes, traduisent bien la qualité et la diversité de nos auditions. Nous avons vu que ces questions étaient prises à bras-le-corps, notamment par le ministère de l'éducation nationale, depuis une dizaine d'années. J'ai cependant eu l'occasion de reprocher au ministre l'empilement des mesures et les usines à gaz : il faut plus de simplicité et une grande responsabilité de tous les acteurs - je pense notamment aux réseaux sociaux.

Tous les acteurs sont concernés : la Justice, les acteurs éducatifs, les acteurs socio-économiques, mais aussi les associations, dont le rôle est important dans un contexte de pénurie de moyens, comme l'a montré l'audition des syndicats d'enseignants.

Le sujet est transversal et éminemment d'actualité.

Au triptyque « prévenir, détecter, traiter », il faut ajouter « suivre », car un harceleur peut continuer ses agissements dans sa vie d'adulte. Il est important que le harcèlement et le cyberharcèlement soient considérés comme de vrais délits. Le cyberharcèlement est l'exportation à la maison du harcèlement, qui peut envahir la vie de l'enfant et de toute la famille.

M. Hussein Bourgi. - Je veux vous remercier de ce rapport.

Malheureusement, l'aboutissement de ce travail intervient dans un contexte particulier : celui du harcèlement d'un certain nombre d'enfants nés en 2010. Cette actualité montre combien il était urgent de se pencher sur le sujet et combien le Sénat a été inspiré de créer cette mission d'information.

Nous souscrivons sans réserve à toutes les préconisations. Le rapport est assez complet. Il dresse un état des lieux et pose un diagnostic. Les solutions existent.

Nous avons désormais besoin d'un portage politique qui doit se faire au plus haut niveau de l'État. Lors des auditions a émergé l'idée de faire de la lutte contre le cyberharcèlement, notamment scolaire, une grande cause nationale. Cette décision appartient à l'exécutif. Nous formons le voeu qu'elle soit prise, afin que tous les pouvoirs publics puissent s'impliquer.

Il faut aussi sensibiliser les familles, souvent démunies ou informées tardivement des situations de harcèlement. Nous considérons que le harcèlement et le cyberharcèlement sont aussi l'affaire des parents : lorsqu'un parent offre à son enfant un appareil téléphonique ou une tablette, il doit expliquer qu'il faut l'utiliser de manière responsable.

Il faut inclure toute la société dans ce travail et expliquer au chef d'établissement qu'il n'y a pas d'infraction mineure ni de sujet tabou. Voilà quelques années que je siège dans les conseils d'administration des collèges et lycées. Je me rends compte que des défis nouveaux se posent pour chaque génération. Celui du harcèlement est complexe. Certains groupes ont leur siège social à l'étranger, dans des pays où la liberté d'expression prévaut. À nous de faire preuve d'imagination et de créativité pour contourner de tels obstacles. Nous le ferons dans l'intérêt de nos enfants.

L'école doit redevenir le sanctuaire qu'il a été. Le logement familial doit lui aussi rester un sanctuaire, car aucun enfant ne doit être poursuivi, dans la sérénité de sa chambre, par des messages à caractère injurieux ou violent.

Je vous remercie du travail réalisé depuis des mois. Il appartiendra à chacun de le faire connaître. Les collègues de mon groupe membres de la mission considèrent que la mobilisation commence sur le terrain. Il faut l'amplifier, ce qui commence par prendre la parole pour briser le tabou. Nous serons les ambassadeurs du rapport de la mission.

Mme Jocelyne Guidez. - Je vous remercie de l'initiative de cette mission, vraiment très importante, et de ce rapport d'information. Les auditions ont été très intéressantes.

Aujourd'hui, le harcèlement n'est plus un tabou. Je suis d'accord avec mon collègue : notre travail ne s'arrête pas là. Nous avons tous une mission : celle d'aller discuter avec les jeunes, dans nos départements, pour leur faire comprendre ce qu'est le harcèlement.

Pour avancer, le débat doit associer harcelés et harceleurs. Le harcèlement rejoint la question du vivre ensemble : quand quelqu'un est pris en grippe, c'est généralement parce qu'il est différent des autres. Les jeunes doivent comprendre et accepter les différences.

Le cyberharcèlement frappe surtout les élèves du secondaire et les jeunes filles. En faire une grande cause nationale me semble une bonne idée. Il faut une meilleure prévention. Or, dans mon département de l'Essonne, les gendarmes n'ont plus le temps de se rendre dans les collèges pour discuter du harcèlement. Cette mission finit par être mise de côté, comme me l'a dit le commandant de la gendarmerie.

Grâce à vous, nous avons désormais le devoir d'intervenir dans nos départements pour parler du harcèlement et faire en sorte qu'il diminue.

M. Claude Kern. - Je vous félicite pour cet excellent rapport, auquel je n'ai pas grand-chose à ajouter. Simple question de forme : le titre du III B se conclut par un point d'interrogation. Un point ou un point d'exclamation seraient plus adaptés.

M. Jacques Grosperrin. - En prenant l'initiative de cette mission, votre groupe a eu une idée formidable - je vous en félicite. La proposition n° 35, qui invite à faire de la lutte contre le harcèlement scolaire et le cyberharcèlement une grande cause nationale aurait même pu être placée au tout début du rapport.

Disposer de moyens et agir collectivement, voilà qui est fondamental. Je m'interroge cependant : vous avez souligné que certaines associations oeuvrent depuis longtemps en la matière - nous les avons auditionnées - et qu'une plus grande stabilité des équipes encouragerait une lutte plus efficace contre le harcèlement scolaire. Cependant, vous n'évoquez pas suffisamment l'« effet chef » : quand un chef d'établissement se présente en vrai capitaine de navire, nous constatons que les phénomènes de harcèlement sont réduits. Je propose donc que cette question de la lutte contre le harcèlement soit incluse dans la formation des chefs d'établissement et rendue obligatoire dans leur concours de recrutement.

Dans la recommandation n° 18, vous invitez à des mesures contraignantes à l'égard des réseaux sociaux. Mais comment faire ? C'est une gageure.

Le rapport indique aussi que le problème du harcèlement a été reconnu tardivement France, contrairement aux pays scandinaves, qui l'ont identifié dès les années 1970. Pourquoi ?

Vous notez aussi que tout est prétexte à harcèlement : les questions vestimentaires jouent beaucoup. Instaurer une tenue scolaire, ne serait-ce pas une partie de la solution ? Vous savez que c'est un sujet sur lequel je reviens régulièrement.

J'en viens à un point particulier. J'ai été confronté, dans ma circonscription, à Besançon, à un cas de harcèlement de la part d'une bande de jeunes filles à l'encontre d'un garçon. Voilà un nouveau phénomène, dont nous devons nous méfier. Nous parlons de différenciation, de la notion de genre, d'écriture inclusive, etc. Soyons prudents, car nous voyons les choses dans un seul sens. N'oublions pas que les cas de harcèlement d'un garçon par des filles existent aussi.

Mme Catherine Belrhiti. - Votre rapport est extrêmement fourni, je regrette simplement d'avoir eu à le lire à toute vitesse. La situation est dramatique, et nous la vivons au quotidien. Certains enfants sont même hospitalisés !

Concernant la proposition n° 3, pourrait-on rajouter l'obligation de sensibiliser aussi les parents lors des rentrées scolaires, notamment lors des réunions de prérentrée en sixième et en seconde ? Beaucoup est fait auprès des enfants, mais l'enfant harcelé a du mal à parler. Or le rapport parle peu des parents, qui devraient être plus impliqués.

Mme Sabine Van Heghe, présidente. - Dans la recommandation n° 7, ce point est abordé, mais nous allons ajouter quelques compléments pour insister sur le rôle des parents.

Mme Catherine Belrhiti. - Certes, mais il faudrait insister sur le rôle des parents, en tant que parent d'enfant harcelé, ou harceleur !

Par ailleurs, vous indiquez que les enfants victimes de harcèlement pourraient être déplacés. Voilà qui est très regrettable.

Mme Colette Mélot, rapporteure. - Au contraire ! Nous disons l'inverse ! Il faut éviter cela, sinon ce serait la « double peine ».

Mme Claudine Lepage. - Lors des auditions, nous avions à plusieurs reprises employé les mots « empathie » et « bienveillance ». Dans le rapport, j'ai retrouvé le premier, non le second. Éduquer les enfants dès le plus jeune âge à ces notions fondamentales est crucial. L'enfant comprendrait ce que ressent celui qui est victime de harcèlement et de moqueries. Nous avons évoqué ce point au cours des auditions, le rapport devrait l'indiquer plus clairement.

Mme Sabine Van Heghe, présidente. - Dans la proposition n° 20, nous ajouterons le terme « bienveillance ».

Pour ma part, j'insiste sur la nécessaire augmentation des moyens, au-delà de la mobilisation de toutes les parties prenantes. Les auditions des membres de la communauté éducative ont mis en exergue un manque de personnels tels que les infirmières, assistantes sociales ou psychologues. Trop peu nombreux, ils se partagent entre plusieurs établissements et sont donc trop peu présents, alors que ces personnels constituent un réseau médical auquel les enfants iront plus facilement se confier, plus qu'à un principal ou à un professeur.

Mme Colette Mélot, rapporteure. - Madame Boulay-Espéronnier, vous avez signalé que la formulation du titre n'était pas adéquate.

Mme Céline Boulay-Espéronnier. - Le terme « vers » affaiblit le propos. La mobilisation générale est déjà là, nous avons pris le sujet à bras-le-corps, grâce aux propositions concrètes de notre assemblée !

Mme Colette Mélot, rapporteure. - J'en conviens. Quant à l'ajout du mot « suivre », il me semble superflu. Le verbe « traiter » implique la notion de suivi, par nature. Évitons les redondances.

Monsieur Bourgi, certes, l'école doit être un sanctuaire, tout comme la sphère privée ; nous devons tous faire connaître nos travaux dans nos départements, et y porter la bonne parole.

Madame Guidez, le « vivre ensemble » doit faire l'objet d'un apprentissage à l'école. Apprendre aux enfants à ne pas stigmatiser la différence est nécessaire. La mobilisation de tous les services publics va de soi.

Monsieur Grosperrin, nous devons effectivement insister davantage sur la formation des chefs d'établissement. En effet, ce sont eux qui donnent le ton. Encadrer les réseaux sociaux est difficile, cela est vrai. Concernant le harcèlement filles versus garçons, le rapport indique que ce sont majoritairement les filles qui sont harcelées, mais nous savons que les garçons sont aussi concernés. Personne n'est épargné, cela figure dans le rapport.

M. Jacques Grosperrin. - Dans l'imaginaire collectif, les filles sont harcelées par des garçons, parfois par des filles, mais les garçons sont harcelés uniquement par des garçons... Des filles aussi harcèlent les garçons !

Mme Céline Boulay-Espéronnier. - Cela est d'autant plus juste que, dans un contexte grandissant de méfaits commis en bande, nous nous représentons toujours à l'esprit des bandes de garçons. Or le phénomène des bandes de filles grandit, encouragé par les réseaux sociaux. La violence n'est pas l'apanage des garçons.

Mme Colette Mélot, rapporteure. - Des compléments seront ajoutés pour tenir compte de vos propositions.

Madame Belrhiti, la sensibilisation des parents est mentionnée dans le rapport. En effet, les parents doivent être sensibilisés dès la rentrée scolaire.

Madame Lepage, « empathie » et « bienveillance » sont deux concepts très importants. Dans les pays scandinaves, ces manières d'être sont inculquées dès le plus jeune âge aux enfants.

Mme Claudine Lepage. - Voyons la page 82 du rapport : « cette notion d'empathie, si elle doit être développée, ne doit toutefois pas cacher une réalité, la nécessité d'avoir une tolérance zéro... » La formulation semble peu claire. « Empathie », voilà qui n'a rien à voir avec le laxisme !

Mme Colette Mélot, rapporteure. - Cette tournure signifie simplement qu'il faut faire preuve d'une certaine vigilance, et ne pas masquer la réalité.

En matière de moyens, plus des adultes sont présents dans les établissements, mieux il en est. Pourvoir l'ensemble des postes des personnels sociomédicaux est nécessaire. Ces postes existent, mais manquent les candidats ! D'ailleurs, demain en séance publique, je poserai, au cours des questions d'actualité, une question au ministre sur la pénurie d'infirmières dans les établissements scolaires.

Mme Sabine Van Heghe, présidente. - Nous devons encore nous entendre sur le titre du rapport.

Mme Colette Mélot, rapporteure. - Nous proposons donc : « Harcèlement scolaire et cyberharcèlement : mobilisation générale pour mieux prévenir, détecter et traiter. » Tout est dit !

Il en est ainsi décidé.

La mission d'information adopte à l'unanimité le rapport d'information dans la rédaction issue de ses travaux, et en autorise la publication.

Mme Sabine Van Heghe, présidente. - Les groupes qui souhaiteraient insérer dans le rapport des contributions écrites pour faire état de positions spécifiques sont invités à communiquer ces documents au secrétariat avant le jeudi 23 septembre au soir.

Mme Colette Mélot, rapporteure. - J'attire votre attention sur le hashtag #Anti2010, sur TikTok. Le ministre s'est exprimé le jour même et les établissements ont été très réactifs. La plateforme a retiré ce hashtag très rapidement : c'est la première fois que nous constatons une telle diligence. Voilà qui est remarquable. La mobilisation générale est donc possible.

Mme Sabine Van Heghe, présidente. - Je vous remercie pour l'excellence de votre travail, pour la qualité de nos échanges et la confiance avec laquelle nous avons débattu. Nous pouvons être fiers du travail accompli au service d'une vraie grande cause nationale qui doit tous nous mobiliser, à tous les niveaux. Le rapport sera finalisé sur la base de nos échanges de ce jour, puis présenté à la presse jeudi prochain.

La réunion est close à 17 heures.