Mercredi 4 avril 2018

- Présidence de M. Alain Milon, président -

La réunion est ouverte à 10 heures.

Réforme de l'assurance chômage - Audition de Mme Patricia Ferrand, présidente, Jean-Michel Pottier, vice-président et M. Vincent Destival, directeur général de l'Unédic

M. Alain Milon, président. - Mes chers collègues, la commission des affaires sociales entame ses travaux sur le deuxième grand texte social du quinquennat, le projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel », dont un premier avant-projet a été transmis au Conseil d'État. Nous ne disposons pas encore de ce texte, qui devrait être adopté prochainement en Conseil des ministres, mais nous avons eu la primeur de ses grandes lignes par un journal du soir.

Nous accueillons ce matin Mme Patricia Ferrand, présidente du bureau de l'Unédic (élue CFDT), M. Jean-Michel Pottier, troisième vice-président représentant la CPME, et M. Vincent Destival, directeur général de l'Unédic, pour évoquer la réforme annoncée de l'assurance chômage.

Cette audition s'articule autour de quatre thématiques.

La première est celle du périmètre et du contenu de l'assurance chômage, après l'annonce de l'élargissement du champ de l'indemnisation du chômage des personnes démissionnaires et son extension aux travailleurs indépendants. Le Gouvernement souhaite « garantir une assurance chômage plus universelle et plus juste ». Vous pourrez nous éclairer sur le contenu des discussions et sur votre vision de l'évolution à venir des droits à indemnisation du chômage.

Dans un second temps, nous nous intéresserons au financement et à la situation financière de l'assurance chômage. Les résultats des comptes sociaux se sont révélés meilleurs que prévu. Vous nous exposerez l'impact de ces résultats sur la trajectoire du solde et de la dette de l'Unédic.

Le Gouvernement envisage par ailleurs le remplacement des cotisations salariales par l'affectation à l'assurance chômage d'une fraction de la CSG, alors que l'exonération de ces cotisations est actuellement compensée par de la TVA. Vous nous direz, si vous le souhaitez, ce que ce mode de financement vous inspire.

Enfin, des modifications substantielles sont envisagées sur la gouvernance de l'assurance chômage. Quelques rappels ne seront sans doute pas inutiles sur la place et le rôle de l'État dans le schéma actuel, où les partenaires sociaux se voient déléguer par la loi la responsabilité de déterminer les modalités d'indemnisation.

Sur tous ces sujets, vous avez la parole pour un premier temps d'exposé, avant que je ne la donne à notre rapporteure, notre collègue Frédérique Puissat, puis aux commissaires, à propos du volet relatif à l'assurance chômage.

Mme Patricia Ferrand, présidente de l'Unédic. - Mesdames et messieurs, je tiens tout d'abord à vous remercier pour votre invitation. C'est une première dans ce format, même si les relations entre l'Unédic et le Sénat sont régulières, notamment lorsqu'il s'agit d'évoquer les questions financières.

Nous sommes dans un temps particulier, puisque nous n'avons pas la version définitive du projet de loi. Malgré tout, le ministère a fait quelques annonces aux partenaires sociaux il y a quinze jours. On a donc une connaissance assez détaillée du projet de loi malgré de nombreuses incertitudes.

Je tiens également à préciser notre positionnement. Vous allez sans doute solliciter les organisations syndicales et patronales pour connaître leurs analyses sur le projet de loi. L'Unédic est un organisme paritaire. Sa gouvernance ne devrait pas être modifiée par le projet de loi. Nous sommes gestionnaires du régime d'assurance chômage. Nous jouons le rôle d'experts auprès des partenaires sociaux. Nous les éclairons techniquement et juridiquement, pour bien gérer ce régime et prévoir les conséquences des évolutions législatives proposées.

Ces évolutions touchent des sujets éminemment politiques. Nous avons eu une discussion hier en bureau. Nos positions sont souvent convergentes quant aux évolutions proposées. Notre but sera ici de vous éclairer sur les analyses que nous partageons, mais la parole sera bien évidemment donnée en premier aux organisations syndicales et patronales s'agissant des sujets les plus politiques.

Les principes que partagent unanimement les partenaires sociaux concernent dans un premier temps le rôle de stabilisateur économique et social de l'assurance chômage. Ce  régime protège le niveau de revenu des salariés lorsqu'ils perdent leur emploi, et permet, notamment pendant les périodes de crise, de soutenir également le niveau de consommation dans l'ensemble de l'économie française. Ce rôle de stabilisateur économique et social est donc extrêmement important.

Le deuxième principe fort que nous partageons concerne le caractère contributif et assurantiel du régime actuel. Celui-ci assure un revenu de remplacement lié au niveau de salaire antérieur. C'est sur la base de ce salaire que sont calculées les cotisations. Un financement par l'impôt et les cotisations sociales change donc la nature et le sens du régime.

Le troisième principe auquel nous sommes fortement attachés est le paritarisme. La loi délègue aux partenaires sociaux la définition des règles d'indemnisation et des taux de cotisation du régime. Dans un deuxième temps, les partenaires sociaux délèguent la gestion de ce régime à l'Unédic. L'Unédic a pour mission de mettre en oeuvre l'accord des partenaires sociaux, entre-temps agréé par l'État.

L'Unédic assure la bonne gestion du régime. Dans la mesure où les règles sont décidées par la négociation entre les partenaires sociaux, la gestion paritaire est relativement apaisée.

Dans tous les cas, gestion paritaire et négociation des règles nous semblent extrêmement importantes. Les représentants des entreprises et des salariés adaptent très régulièrement, depuis soixante ans, les règles à la situation du marché du travail.

J'en viens à la situation financière de l'assurance chômage, marquée par la dizaine d'années de crise que nous avons vécues.

L'assurance chômage est très liée aux cycles conjoncturels. Dès lors que la croissance économique est bonne, on collecte plus de cotisations et on indemnise moins de personnes. Inversement, en période de crise, on collecte moins de cotisations et on doit davantage dépenser.

Cela peut sembler une lapalissade, mais il est extrêmement important de comprendre que ce régime n'est pas comme les autres régimes de protection sociale : il est vraiment trés sensible aux cycles conjoncturels, et l'un des objectifs des partenaires sociaux pendant la négociation est de mettre en place des mesures contracycliques, afin que le régime puisse assumer des dépenses en période de crise. Ceci explique le niveau d'endettement après dix années difficiles.

Depuis les dernières négociations de 2014 et 2017, où l'on pressentait déjà une amélioration de la situation économique, les conventions ont permis de réduire le déficit de 1,5 milliard d'euros chaque année. L'équilibre financier devrait être atteint fin 2019. Les conditions de celui-ci à moyen terme ont été complètement rétablies.

Le niveau de la dette est extrêmement élevé après dix années de crise, mais voit son coût complètement maîtrisé par le régime. La dette, fin 2019, devrait atteindre 36 milliards d'euros, soit l'équivalent de onze mois de recettes.

Les partenaires sociaux se sont attachés à comprendre l'origine de la dette. Il est important de vous alerter sur ce point : cette dette comporte deux dimensions. Elle est la conséquence pour moitié de la crise économique, qui sera résorbée très facilement dans la phase positive du cycle économique, et de décisions publiques prises bien avant 2009.

La problématique du financement des travailleurs transfrontaliers dépasse largement l'Unédic et dépend des accords de refinancement avec les États voisins. Ce sujet n'est pas anecdotique, car il représente environ 600 millions d'euros de pertes par an, qui expliquent une grande partie de la dette sur dix ans.

Je rappelle également que l'Unédic finance les deux tiers du budget de Pôle emploi, ce qui représente environ 3,5 milliards d'euros par an, soit 10 % de nos recettes annuelles. Ce montant est beaucoup plus important que ne l'était la part des dépenses dites actives, en 2008, lors de la création de Pôle emploi.

Les charges de la dette sont complètement maîtrisées. Elles représentent aujourd'hui 1 % des recettes de l'assurance chômage. On peut donc assumer cette charge. Par ailleurs, la remontée des taux d'intérêt à venir ne présente pas de risques pour l'Unédic.

La dette est garantie chaque année par l'État, mais les partenaires sociaux sont parvenus à ne pas l'activer durant les dix années de crise.

Le troisième temps de mon intervention concernera la réforme de l'assurance chômage en cours.

Je formulerai mes remarques sur la base de l'accord que les partenaires sociaux ont signé le 22 février dernier, qui permettra d'éclairer les évolutions proposées dans le projet de loi.

Quatre thèmes ont essentiellement retenu notre attention.

L'ouverture de l'assurance chômage aux démissionnaires est un point sur lequel on a beaucoup réfléchi paritairement. Le Gouvernement s'engage d'ailleurs à reprendre a plupart de ces réflexions.

Si, dans le principe, l'assurance chômage bénéficie à ceux qui sont privés involontairement d'emploi, il existe déjà aujourd'hui un certain nombre de cas prévus pour prendre en charge les démissionnaires. Il s'agissait donc pour nous de réfléchir non pas à un cas supplémentaire mais de façon adaptée aux réalités du marché du travail, sans provoquer d'effets d'aubaine ni donner à penser à certaines personnes, surestimant leurs chances, qu'elles pourraient retrouver aisément un emploi après une démission.

Cela peut évidemment être une très bonne chose dès lors qu'un projet professionnel est identifié et accompagné. C'est dans cette optique que les partenaires sociaux ont trouvé pertinent d'élargir le bénéfice de l'assurance chômage aux démissionnaires.

Il s'agit bien aujourd'hui d'ouvrir l'assurance chômage aux salariés qui démissionneraient, à condition qu'ils aient préalablement construit un projet professionnel sérieux et qu'ils aient mobilisé l'ensemble des dispositifs actuels. Ces deux conditions reprennent une revendication forte des organisations syndicales.

Il existe toute sorte de congés pour préparer son projet professionnel. Démissionner constitue un choix très fort pour un salarié. Il est plus sécurisant pour lui de prendre un congé, de préparer son projet professionnel, qui peut échouer ou non, tout en conservant son contrat de travail.

L'idée était aussi que certaines personnes, qui retrouvent facilement un emploi parce qu'elles ont moins besoin d'accompagnement, n'abusent pas du système, les finances n'étant pas extensibles. Il ne s'agit pas de faire bénéficier d'un droit davantage de personnes au détriment de celles qui perdent involontairement leur emploi.

Une fois ces principes posés, les partenaires sociaux ont estimé, notamment grâce à l'Unédic, le coût de cette mesure. Ils ont retenu une condition de sept ans de travail continu avant la démission pour pouvoir bénéficier de ce dispositif, et ont décidé de ne retenir que les projets nécessitant une formation longue.

La création d'entreprise a été exclue par les partenaires sociaux, car il existe déjà plusieurs dispositifs de l'assurance chômage, comme l'ARCE (aide à la reprise ou à la création d'entreprise), qui permet de mobiliser une partie du capital des droits, ou encore le cumul entre allocation et revenu d'emploi, qui soutient les créateurs d'entreprise.

Le Gouvernement, dans le projet de loi, pour ce qu'on en sait, retiendrait quant à lui cinq ans de travail avant la démission et prendrait en compte les projets de création d'entreprise en sus de ce que nous avons prévu.

L'Unédic a fait des estimations du coût supplémentaire qui interviendrait à la suite de ces décisions. La proposition des partenaires sociaux s'élève à une dépense comprise entre 180 millions d'euros et 330 millions d'euros. On n'a aujourd'hui que peu de détails, et ces estimations sont extrêmement délicates à réaliser, faute de référentiel.

Avec la solution du Gouvernement, le coût serait probablement supérieur d'au moins 50 %.

S'agissant des indépendants, les partenaires sociaux ont retenu deux problématiques. Ils ont pris acte du fait que le Gouvernement a saisi les partenaires sociaux en indiquant que le nouveau droit des indépendants ne devait pas conduire à mettre en place une contribution sociale supplémentaire.

Dès lors, les partenaires sociaux ont considéré, en l'absence de cotisation sociale, qu'il s'agissait d'un dispositif de solidarité qui relève de la responsabilité de l'État et non de l'assurance chômage.

Ils ont également examiné la situation des travailleurs indépendants économiquement dépendants, comme les personnes travaillant pour les plateformes numériques, qui sont dans une relation de dépendance économique très forte. Les partenaires sociaux souhaitent se pencher sur ces situations de manière plus approfondie, l'idée étant de réfléchir de façon plus transversale à la protection sociale de ces travailleurs.

Troisième axe : l'emploi durable ou les contrats courts. C'est un sujet extrêmement important, qui fait partie de nos négociations depuis un certain nombre d'années. La réduction de la précarité a été une préoccupation constante.

On a d'abord établi de nombreux diagnostics approfondis, en particulier grâce aux travaux de l'Unédic, afin d'essayer de comprendre le fort accroissement des contrats de travail de moins d'un mois. L'explosion date du début des années 2000, mais cette situation a désormais une dimension structurelle dans quelques secteurs comme l'hébergement, la restauration, le commerce, le transport-entreposage, ou encore le médico-social.

Nombre de ces contrats courts interviennent dans le cadre d'une relation extrêmement durable, du fait d'un phénomène d'emploi chez le même employeur, entrecoupé de période de chômage.

Les partenaires sociaux ont pris acte de la volonté du Gouvernement de mettre en place un bonus-malus. Le choix qui a été arrêté vise à responsabiliser les acteurs. On s'aperçoit que les motifs de recours aux contrats très courts - CDD d'usage, CDD classiques, contrats intérimaires -différent souvent en fonction du modèle économique des branches. L'idée est de responsabiliser chaque secteur en fonction des modèles économiques afin de réduire les contrats courts et de faire d'autres propositions, d'ici la fin de l'année, pour une meilleure gestion de l'emploi dans les branches.

Enfin, les partenaires sociaux ont exprimé leur volonté forte de conserver un régime financé par les contributions des employeurs et des salariés. Il ne s'agit pas d'un régime de solidarité nationale, mais d'un régime qui organise une solidarité interprofessionnelle, et assure un revenu fondé sur des cotisations liées au salaire antérieur. Il est pour nous essentiel de lier le financement à la nature du risque, qui relève de la relation d'emploi.

Malgré tout, le Gouvernement a choisi de supprimer les cotisations salariales qui ne font l'objet que d'une exonération, celles-ci devant être financées et remboursées à l'euro près par la TVA, puis par la CSG.

On se trouve aujourd'hui dans un financement mixte qui remet en cause la philosophie du régime.

Le Gouvernement prévoit le financement par l'impôt du régime pour une part non négligeable. C'est un point sur lequel nous attirons l'attention des parlementaires : il s'agit d'assurer à l'assurance chômage des ressources sécurisées et dynamiques, dont le montant ne varie pas chaque année en fonction d'autres considérations qui pourraient avoir un impact extrêmement fort sur les droits des demandeurs d'emploi.

M. Jean-Michel Pottier, vice-président de l'Unédic. - Cette audition est très intéressante pour les représentants paritaires de l'Unédic que nous sommes. Le sujet n'est pas simple. Il a une grande incidence sur les conditions de vie des salariés et entraine des réflexions dans le cadre de la loi qui se profile.

Les questions qu'elle soulève sont relatives à l'avenir de la gestion paritaire, du paritarisme, et du rôle des corps intermédiaires.

Il existe trois domaines où la gestion paritaire s'exerce pleinement. Ces trois domaines sont les régimes de retraite complémentaire, où les partenaires sociaux ont toujours assumé leurs responsabilités, la gestion des contributions des entreprises à la formation professionnelle, et l'assurance chômage.

Or, ces trois domaines sont concernés par les réformes entreprises actuellement par le Gouvernement dans lesquelles la gestion paritaire est à chaque fois questionnée. Je ne parle pas des autres régimes de sécurité sociale, où l'on ne peut parler de paritarisme, les partenaires sociaux étant présents uniquement au sein des conseils d'administration.

Après l'échec de la négociation de 2016, nous avons modifié les paramètres de l'assurance chômage et de l'indemnisation en soulignant les responsabilités de chaque acteur. On s'est notamment posé la question de savoir si c'est bien au régime assurantiel d'assumer les dépenses qui sont le fait de l'État, comme celles concernant les travailleurs transfrontaliers ou le fonctionnement de Pôle emploi.

Les partenaires sociaux, dans la perspective des élections présidentielles, puis des réformes annoncées, ont continué à mener la réflexion de manière très approfondie et partagée. Ceci est tout à fait exceptionnel. Deux communiqués de presse des huit partenaires sociaux gestionnaires du régime ont été diffusés, en juillet puis septembre 2017, ainsi qu'un document commun.

Ceci a conduit le Gouvernement à reculer la date d'ouverture des négociations. Contre toute attente, nous avons abouti le 22 février à un projet d'accord national interprofessionnel (ANI), après une négociation réussie sur la formation professionnelle et l'apprentissage.

Je voulais insister sur le nombre de points sur lesquels les partenaires sociaux sont d'accord. C'est assez exceptionnel pour être souligné.

Mme Frédérique Puissat, rapporteure. - J'excuse tout d'abord mon collègue, Michel Forissier, rapporteur du volet apprentissage du projet de loi et coordonnateur des travaux que nous allons conduire avec notre collègue Catherine Fournier, également absente.

Seriez-vous favorable à la fixation d'objectifs chiffrés de réduction de la dette de l'Unédic dans le document de cadrage du Gouvernement ?

L'évolution de cette dette nous inquiète fortement, malgré vos propos rassurants, madame la présidente. En effet, en 2019, le taux de croissance de 1,8 % de notre économie ne suffira même pas à dégager un excédent de trésorerie. Il sera donc sans conséquence sur le fardeau de la dette, qui s'élèvera alors à plus de 36 milliards d'euros, soit onze mois de cotisations.

Quel rôle pourrait jouer le Parlement lors de l'élaboration de la convention d'assurance chômage ? Seriez-vous par exemple favorable à ce qu'il puisse s'exprimer sur le document d'orientation que le Gouvernement compte remettre aux partenaires sociaux avant l'ouverture de la négociation ?

Rien n'interdit au Parlement de contrôler en aval la mise en oeuvre de la convention tripartite 2015-2018 entre l'État, l'Unédic et Pôle emploi, qui a pour but d'améliorer l'action de l'opérateur public face à un chômage dont les contours évoluent très rapidement, par exemple à travers la création d'une mission d'information. Toutefois, le Parlement ne participe pas à l'élaboration des objectifs de ladite convention, alors qu'il est crucial de renforcer le pilotage de la performance de Pôle emploi. Seriez-vous favorable à ce que le Parlement soit davantage impliqué dans la fixation de ces objectifs ?

Pensez-vous que le mécanisme très complexe de la négociation des annexes VIII et X relatives aux intermittents du spectacle, instauré par la loi du 17 août 2015, peut être maintenu en l'état, ou doit-il évoluer pour tenir compte du document de cadrage du Gouvernement ? Avez-vous un chiffrage en la matière ?

Enfin, s'agissant de la taxation des contrats courts, estimez-vous que les règles actuelles du CDD d'usage sont satisfaisantes ou seriez-vous favorable à une réforme d'envergure, comme le propose un rapport de l'IGAS de décembre 2015 ?

Mme Patricia Ferrand. - Pour ce qui concerne les objectifs chiffrés de réduction de la dette de l'Unédic, je rappelle que l'équilibre financier de l'assurance chômage est extrêmement conditionné par la conjoncture.

Fin 2019, la dette s'élèvera à 36 milliards d'euros. Cependant, en 2008, le régime était bénéficiaire et la dette estimée était nulle. Aujourd'hui, le régime joue son rôle contracyclique. Il faut pouvoir assumer cette dette. En période de cycle économique favorable, elle doit pouvoir être résorbée.

Toutefois, le cadre de pilotage doit comporter deux caractéristiques. Il doit être à la fois responsabilisant - ce qui suppose que les partenaires sociaux puissent maîtriser les déterminants de l'équilibre -, et s'inscrire dans une logique de moyen terme. Ceci est essentiel. On ne doit pas avoir à notre sens des objectifs de fixation de la dette strictement annuels. Il faut que ces objectifs s'intègre dans une perspective de moyen terme. C'est ce que les partenaires sociaux font depuis début 2000 en opérant une gestion contracyclique, tout en répondant aux besoins des demandeurs d'emploi et des entreprises.

Par ailleurs, nous avons beaucoup réfléchi au diagnostic et aux sources de la dette. Ce n'est pas à nous de dire qui, du Gouvernement ou du Parlement, doit fixer les objectifs. Il faut comprendre les sources de la dette. Les partenaires sociaux sont prêts à assumer ce qui relève de leur responsabilité. Nous demandons que l'État et les pouvoirs publics assument aussi ce qui relève de la leur. Nous tenons à faire état du fait que cette discussion n'a absolument pas eu lieu.

M. Vincent Destival, directeur général de l'Unédic. - Il existe plusieurs façons de considérer la dette. La somme de 36 milliards d'euros constitue effectivement un montant élevé. Toutefois, cette dette est très particulière. Il ne s'agit pas d'une dette structurelle, mais cyclique. C'est pourquoi l'assurance chômage doit se piloter dans une logique de moyen terme.

L'équilibre sera atteint fin 2019, période à partir de laquelle les économistes estiment que l'économie française retrouvera son rythme de croissance moyen. Cela signifie que l'assurance chômage est déficitaire quand le cycle économique est dans sa partie négative, et redevient bénéficiaire quand l'économie française est dans la partie positive de son cycle. Sur la durée du cycle, l'équilibre est donc garanti.

La dette est élevée mais représente toutefois, compte tenu de ses caractéristiques, un coût extrêmement limité pour nos finances. Les intérêts annuels représentent 1 % de nos recettes. On m'interroge souvent sur la remontée des taux d'intérêt, qui constituent un danger. Je réponds aux investisseurs que nous attendons la remontée des taux d'intérêt avec impatience, car elle s'accompagne de la croissance de l'économie, et donc de la baisse du chômage.

Nous avons réalisé des simulations. Dans les prochaines années, si la croissance se maintient un peu en dessous de 2 %, on sera en excédent à partir de 2020. Ceci réduira la dette dont la diminution compensera alors la remontée des taux d'intérêt. La charge d'intérêt payée par l'Unédic au-delà de 2020 restera relativement stable, autour de 1 % des recettes. Le risque n'existe donc pas selon nous. La situation est liée au mode de pilotage et à la nature cyclique de notre dette, qui est assez particulière.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général. - Disposez-vous d'une trajectoire pour résorber la dette de l'assurance chômage ?

Beaucoup de responsables politiques désirent que l'État intervienne en partie dans ce domaine. Je crois également l'avoir entendu au sein de l'Unédic. J'aimerais connaître votre avis.

Mme Pascale Gruny. - Pourquoi augmenter le nombre de contrôleurs ? Je pense en effet que l'intérêt du financement de l'assurance chômage réside plutôt dans le fait de ramener les personnes vers l'emploi.

Il faut cesser de croire que les demandeurs d'emploi se complaisent dans le chômage. C'est vrai pour certains, mais il s'agit d'une minorité, du moins dans ma région. Si les gens abandonnent, c'est généralement parce qu'ils manquent d'accompagnement, de « coachs ».

Par ailleurs, le droit au chômage des indépendants et des démissionnaires est une promesse de campagne du Président de la République. Quand on a peu de moyens, il est dommage d'élargir la base. Les indépendants pensent qu'il s'agit d'une prise en charge totale : or très peu seront concernés. En outre, ce n'est pas le premier souhait des artisans ou des commerçants qui, lorsqu'ils perdent leur entreprise, en recréent une tout de suite.

Enfin, prenons garde aux contrats à court terme et au régime de bonus-malus. Il ne faut pas en faire une « usine à gaz » qui n'amènera rien aux entreprises.

M. Philippe Mouiller. - Je m'inquiète de la capacité réelle de résorber les 36 milliards d'euros de dettes, alors qu'on envisage des droits nouveaux. Ne vont-ils pas rogner les effets d'un retour attendu de la croissance sur les résultats de l'Unédic ? Disposez-vous de scénarios en la matière ? Le Gouvernement annonce une contribution supplémentaire, et vous travaillez sur des trajectoires à moyen-long terme : comment ces éléments se rencontrent-ils ?

Pour ce qui est de la réforme concernant les indépendants et les démissionnaires, attendons d'avoir des textes plus précis. On a toutefois relevé que seuls ceux qui auront un projet professionnel et cinq ans d'ancienneté seront concernés. N'y aura-t-il pas un délai d'attente ? Comment les règles seront-elles fixées ? Quels seront les taux d'indemnisation ?

Concernant les indépendants, le sujet est renvoyé à l'État à travers un régime de solidarité. Quel est votre sentiment à ce sujet ?

Enfin, le problème des contrats courts ne relève-t-il pas du droit du travail ? Dans le domaine médico-social, le système ne fonctionne pas et ne satisfait ni les employeurs ni les personnes concernées. Le vrai débat porte sur le bonus-malus...

Mme Patricia Schillinger. - Je reviens sur le sujet des frontaliers suisses en particulier qui, lorsqu'ils sont au chômage, coûtent très cher à l'Unédic. La Suisse verse en effet une indemnité de trois mois lorsque la France prend quinze mois à sa charge - sachant que le revenu d'un chômeur avoisine en moyenne 5 000 euros, les rémunérations étant très élevées en Suisse.

Nombreux sont ceux qui souhaiteraient une participation plus importante de l'assurance chômage suisse, mais rien n'est fait. Je ne sais quelles sont vos relations avec les autorités diplomatiques transfrontalières, mais il serait important d'y travailler.

M. Jean-Michel Pottier. - S'agissant de la dette, il faudrait pouvoir faire des réserves en période de « vaches grasses » pour affronter la période suivante. On est en effet dans un cycle économique très heurté.

Toute la problématique des partenaires sociaux, en tant que gestionnaires du régime, consiste à savoir dans quel cadre va se situer cette réforme et comment nous allons être amenés à exercer cette gestion paritaire.

La question qui se pose est légale et réglementaire. C'est le Gouvernement qui va fixer des objectifs de réduction du déficit et de la dette, et qui va avoir la main sur les recettes de l'assurance chômage. Comment faire pour avoir une projection financière, avec un versement de l'État dans une quotité inconnue ? Nous ne savons pas à ce stade si la proportionnalité dans la réduction de la dette de l'Unédic, dont on a besoin dans le cadre d'une gestion pluriannuelle, sera garantie dans le temps. Les partenaires sociaux se posent donc beaucoup de questions.

Il appartient à chacun de faire des propositions. D'une manière générale, il est difficile d'établir des projections avec une équation à deux inconnues.

S'agissant des nouvelles dépenses engendrées par les indépendants et les démissionnaires, nous avons acté le principe que celles-ci devaient être compensées par l'augmentation des recettes. Ceux qui veulent bénéficier du système doivent être suffisamment accompagnés et avertis avant de prendre la décision de démissionner. C'est cette orientation que retiendra apparemment le projet de loi.

Les indépendants ne peuvent selon nous relever que d'un régime de solidarité. Toutefois, comment être indemnisé par un régime auquel on n'a pas cotisé ? Même si les indépendants cotisent, ce sera sur de faibles montants, les revenus précédant généralement la liquidation judiciaire étant proches de zéro, voir inférieurs à zéro ! Il faut donc également savoir comment l'État assurera le financement de cette solidarité.

Il semble que le régime paiera tout, mais on ne sait rien des recettes qui lui seront consacrées.

M. Vincent Destival. - La question des frontaliers est un sujet majeur. Ils représentent un coût annuel de 600 millions d'euros, dont les trois quarts pour la Suisse. Tout ceci résulte de règles de coordination européenne entre régimes sociaux, la responsabilité en matière d'assurance chômage reposant essentiellement sur le pays de résidence et non d'activité.

Une discussion est engagée depuis un an environ par le Conseil de l'Union européenne afin de rééquilibrer le partage des responsabilités. Une première estimation, sur la base d'un nouveau réglément présenté il y a un an permettait de réduire la charge de 400 millions d'euros chaque année.

S'agissant de la dette, nous avons commencé à travailler sur ce qu'un cycle de croissance positif pouvait générer en termes de résorption de la dette. L'an dernier, nous avions estimé que le désendettement généré par un cycle positif comme celui qui s'est achevé en 2008 serait de l'ordre de 22 milliards d'euros.

Nous intégrerons probablement dans notre prochain rapport, qui doit être publié en juin prochain, différents scénarios de cycles économiques positifs afin d'étudier les conséquences que cela peut avoir sur le niveau de désendettement.

Mme Patricia Ferrand. - Nous sommes arrivés à partager un certain nombre de convictions s'agissant des contrats courts grâce à des diagnostics approfondis.

On a aujourd'hui environ 20 millions de missions d'intérim par an, dont 5 millions de moins d'un jour !

Quant aux contrats à durée déterminée d'usage (CDDU), ils ne présentent aujourd'hui aucune contrainte : absence de durée maximale, de prime de précarité, de délais de carence, etc.

Dans le domaine médico-social, par exemple, face à des contraintes budgétaires extrêmement fortes, on assiste aujourd'hui à une gestion au jour le jour. Une même personne peut avoir 30 contrats de travail en deux mois. Les partenaires sociaux doivent pouvoir se mettre d'accord sur ces situations de précarité dans chaque branche.

L'idée est de responsabiliser les acteurs. La souplesse doit bien évidemment exister, mais on peut réfléchir à l'organisation du travail afin d'éviter ces contraintes et ces conséquences pour les salariés.

Quant au bonus-malus, on a eu différentes versions du dispositif. Le Gouvernement se dirigerait vers une solution plus simple, faisant dépendre l'éventuelle surcotisation du taux de rupture donnant lieu à inscription à Pôle emploi dans une année, ce qui est moins compliqué que ce qui était envisagé auparavant.

Le nombre de contrôleurs à Pôle emploi intéresse bien sûr l'Unédic, qui négocie avec l'État et Pôle emploi des objectifs pluriannuels, dans la mesure où l'Unédic finance encore deux tiers de son budget. Les organisations syndicales sont membres du conseil d'administration de l'opérateur public et ont pu décider d'orientations propres concernant le contrôle de recherche d'emploi.

L'absence de recherche n'est qu'un des motifs de radiation. Celui qui entraîne le plus de radiation est le fait de ne pas répondre à une convocation. Le Gouvernement a décidé de revoir l'échelle des sanctions face à l'incohérence de certaines d'entre elles.

Le Gouvernement souhaite également augmenter le nombre de contrôleurs de Pôle emploi. Nous avons voulu, dans le cadre des orientations que nous avions fixées lors de la dernière convention tripartie, puis dans le cadre du conseil d'administration, mettre en place un contrôle personnalisé. Certaines personnes sont perdues dans le système. L'objectif n'est pas de les radier à tout prix mais, bien au contraire, de pouvoir les redynamiser.

Il ne s'agit d'ailleurs pas de contrôleurs, mais d'équipes dédiées, dont les membres se définissent comme « conseillers ». Ils sont très liés à l'accompagnement. Ce sont des volontaires issus pour la plupart du métier de l'accompagnement. Cette orientation a démontré qu'une faible partie des personnes ne recherchent pas activement d'emploi - 14 % selon le dernier bilan. Certaines ont toutefois été redynamisées et leur accompagnement a été relancé.

L'objectif du Gouvernement est de passer de 200 personnes dédiées uniquement au contrôle à 600 en fin d'année, et à 1 000 d'ici un an ou deux. Cela se fera-t-il au détriment de l'accompagnement ou grâce à des gains de productivité opérés sur d'autres activités de Pôle emploi ? Ce seront des choix à arrêter.

Je ne connais pas les intentions du Gouvernement. Les partenaires sociaux de l'Unédic, autant que Pôle emploi, ont rappelé que le contrôle ne doit pas avoir d'objectifs chiffrés, que ce soit en termes de volume ou d'euros. J'espère que ceci sera respecté, sans quoi on dénaturerait ce qu'on a voulu mettre en place.

M. Jean-Michel Pottier. - L'expérimentation a porté sur 220 000 vérifications. Ce processus, qui comporte des échanges, s'étale sur un mois. Les contrôles ont porté pour un tiers sur des personnes signalées par les conseillers, pour un autre tiers sur des populations ciblées et, pour le dernier tiers, sur des demandeurs d'emploi choisis de façon aléatoire. Lorsque l'on considère ce dernier groupe, le taux de demandeurs d'emploi en situation non conforme s'élève à 10 %, contre 14 % en moyenne pour les trois groupes.

Sur ces 10 %, deux tiers ne sont plus indemnisés. Dégager des économies sur cette frange paraît donc compliqué. Ce n'est donc pas la bonne piste.

Cependant, 20 % des personnes contrôlées sont renvoyées vers l'accompagnement. On a le sentiment que Pôle emploi fait son mea culpa en reconnaissant ne pas avoir été performant.

Enfin, les personnes qui subissent un contrôle déclenchent une augmentation de 60 % de demandes de rendez-vous avec leur conseiller. L'opération permet donc de remobiliser à la fois les demandeurs d'emploi et l'accompagnement, assuré parfois de manière aléatoire - pour rester politiquement correct. C'est donc assez bénéfique.

Par ailleurs, le bonus-malus, tel qu'il avait été envisagé, repose sur le principe « pollueur-payeur ». On module les cotisations par rapport au coût, avec toutes les limites et les biais que cela peut comporter.

Mon entreprise comporte 80 % de personnel féminin. J'ai connu durant vingt ans un quart de l'effectif en congé maternité ou en congé parental. J'ai toujours accepté, accompagné et réintégré les personnes lorsque le congé était terminé. Je n'ai donc aucun problème avec ce sujet mais si, demain, il faut appliquer le bonus-malus, je reverrai ma politique de ressources humaines !

Par ailleurs, dans l'accord du 22 février dernier, on a demandé aux branches professionnelles d'établir un diagnostic sur toutes les formes de contrats courts, y compris l'intérim, en pointant tous les freins, sociétaux, comportementaux, réglementaires ou légaux. On n'avancera pas tant qu'on ne modifiera pas la législation !

Il existe aussi des phénomènes de connivence entre employeurs et salariés.

Dans l'accord du 28 mars 2017, nous avons revu les paramètres des contrats courts et des contrats longs, et nous avons rétabli un système de prise en charge équitable qui ne favorise pas ces comportements.

Nous n'avons pas le recul suffisant pour en juger, mais je suis intimement persuadé que ceci va avoir des conséquences sur le comportement des acteurs, tant salariés qu'employeurs.

Mme Frédérique Puissat, rapporteure. - Certaines questions n'ont pas été abordées, comme les performances de Pôle emploi, l'élaboration d'objectifs communs, le rôle du Parlement en la matière et le coût que représentent les intermittents du spectacle. Peut-on maintenir ce système et quelle peut être son évolution ?

M. Daniel Chasseing. - Il faut féliciter les partenaires sociaux de l'accord auquel ils sont parvenus, qui n'avait pas été prévu par les spécialistes.

Pourquoi regretter le fait qu'il n'existe pas de cotisation des salariés, alors que la CSG le compense, et que ceci va donc leur bénéficier ?

M. Olivier Henno. - Je suis très attaché au paritarisme. L'accord du 22 février est arrivé à point, alors que certains étaient tentés de le « ringardiser ».

Je suis également attaché à la logique assurantielle. Mais je pense que celle-ci n'est pas contradictoire avec la coexistence d'un autre financement que celui des cotisations sociales ou patronales. Cette nouvelle ressource peut être pérenne et contribuer à renforcer la compétitivité de nos entreprises : il peut s'agir de la CSG, même si je crois plus en la TVA sociale.

Je souhaiterais connaitre votre avis sur cette question.

M. Dominique Watrin. - Vous avez indiqué que le Gouvernement n'a pas prévu dans le prochain projet de loi de modifier le statut de l'assurance chômmage, mais n'assiste-t-on pas à une étation larvée ? Il faut se poser la question.

L'État est déjà présent dans le système à différents titres, et un changement de paradigme majeur est intervenu dans le cadre de la LFSS pour 2018, avec l'exonération de cotisation sociale de l'assurance chômage des salariés, à hauteur de 2,4 % du salaire brut, et l'exonération dégressive des contributions patronales à partir de 2019. Si mes calculs sont exacts, cela va représenter à terme 45 % des recettes de l'assurance chômage. Ce n'est donc pas un changement mineur.

Je pense qu'il y a là un risque de passer progressivement d'une indemnisation liée à l'activité, donc à la cotisation, à un système de prestations sociales, qui tirera automatiquement le système vers le bas.

Ce n'est donc pas seulement la question du financement pérenne qui est posée, mais celle de la philosophie même de l'assurance chômage. Le Président de la République, durant la campagne présidentielle, avait clairement appelé à sortir du système assurantiel, en faisant des déclarations sur le fait que les salariés, ayant cotisé, pourraient penser qu'ils ont droit à une indemnisation. C'est un raisonnement dangereux et faux, que vous avez eu ici raison de contredire.

Je rejoins ce qu'a dit notre collègue Pascale Gruny sur le contrôle des obligations des demandeurs d'emploi.

S'agissant des contrats courts, au vu de ce que dit Mme la présidente, je pense qu'il faut modifier la loi, mais aussi et surtout l'appliquer ! Il existe un système organisé autour de l'intérim dans les entreprises. Les chaînes industrielles, dans l'agroalimentaire, l'automobile, fonctionnent parfois avec 50 %, voire 60 % d'intérimaires.

Ce système est organisé pour détourner la loi. L'Unédic a-t-elle réfléchi à des propositions pour y remédier ? 

M. Jean-Louis Tourenne. - Cette présentation conjointe illustre parfaitement les mérites de la gestion paritaire, de l'efficacité et de la responsabilité des partenaires sociaux. Peut-être avez-vous parfois du mal à vous entendre, mais c'est le sort de tous les ménages qui fonctionnent !

Il est donc dommage de constater que le Gouvernement souhaite revenir sur cette gestion paritaire de l'assurance chômage.  

Vous avez évoqué la prolifération des contrats courts, leur abus et surtout les conséquences très importantes pour ceux qui les subissent, qui sont en majorité des jeunes, dont le premier contrat, extrêmement précaire, tarde souvent à venir. Ceci nécessite sans doute que nous ayons des actions particulières dans ce domaine. La modification du code du travail par ordonnance n'a pas arrangé les choses - au contraire !

Avez-vous connaissance d'une forte augmentation des contrats de chantier, qui font perdre à l'intéressé le droit aux primes de précarité et qui le font considérer comme un CDI, alors qu'ils n'en a aucune des caractéristiques ?

Je découvre par ailleurs que vous financez Pôle emploi. Quelle en est la justification ? Est-ce que cela a évolué ? A-t-on arbitrairement augmenté la participation de l'assurance chômage, ce qui serait regrettable ?

Vous avez dit n'avoir aucune assurance sur les recettes qui vous seront affectées, qui dépendront de dotations de l'État. Il ne suffit pas de dire qu'elles sont assises soit sur la CSG, soit sur la TVA pour garantir leur montant, puisqu'il ne s'agira que d'une part déterminée par l'État !

Avez-vous des idées sur la relation qui devrait s'établir entre l'assurance chômage et le Gouvernement pour garantir et indexer les recettes que vous en retirerez ?

Enfin, vous avez évoqué un certain nombre de dépenses qui vous ont été imposées, qu'on pourrait considérer comme des charges indues. L'horizon s'éclaire-t-il un peu ? Le traitement des frontaliers, comme la participation de l'assurance chômage, ont-ils reçu des assurances du Gouvernement vous garantissant que vous n'auriez plus à supporter ces charges ?

M. Jean-Noël Cardoux. - Quel est le poids du régime des intermittents du spectacle dans le déficit de l'Unédic ? Estimez-vous que ce régime doit être modifié pour faire des économies qui seraient les bienvenues ?

Par ailleurs, nous avons bien senti que vous étiez très attachés au paritarisme - et nous aussi. Je me demande toutefois, comme notre collègue Dominique Watrin, comment il est possible de concevoir le maintien du paritarisme à partir du moment où la contribution à la cotisation des salariés sera assurée par un impôt, en l'occurrence la CSG.

Ce n'est pas possible selon moi. On est devant un régime qui s'effondre. Êtes-vous ou non favorables aux propositions du Gouvernement ?

M. Alain Milon, président. - Il est extraordinaire de constater que ce Gouvernement a réussi à créer un axe Watrin-Cardoux !

Mme Victoire Jasmin. - On a parlé durant la campagne présidentielle de nouveaux modèles économiques. On constate que la situation de l'emploi ne s'améliore pas, bien au contraire, et on s'aperçoit qu'il existe de plus en plus d'incohérence entre les offres et les demandes d'emploi.

De plus en plus de jeunes diplômés sont confrontés au chômage. Faute d'une analyse pertinente, certaines personnes sont obligées de partir travailler ailleurs, et des étrangers viennent travailler en France. Il n'existe pas forcément de cohérence entre les différents dispositifs proposés aux demandeurs d'emploi ni de coordination entre les services de l'État.

Qu'est-il prévu à ce sujet ?

M. Yves Daudigny. - Le paritarisme semble aujourd'hui remis en cause, en particulier le rôle des corps intermédiaires dans la société - le Parlement pour l'aspect politique et les organisations syndicales et patronales pour l'aspect social.

Par rapport aux annonces du candidat à l'élection présidentielle, les modifications contenues dans le projet de loi concernant les démissionnaires et les indépendants ne constituent-elles pas des changements a minima dont les conséquences ne seront pas majeures ?

En second lieu, pensez-vous, en tant qu'observateurs de la conjoncture économique, que la croissance se poursuivra à un rythme favorable pour la France, alors que les résultats du début de 2018 ne semblent pas tout à fait à la hauteur de ceux de 2017 ?

Mme Patricia Ferrand. - Jean-Michel Pottier a mis les mots qui conviennent sur les craintes qu'éprouvent les partenaires sociaux s'agissant du financement et de la mise à mal du paritarisme, ainsi que du rôle des corps intermédiaires dans la société française.

Toutes les organisations font la même analyse. On nous dit que l'Unédic n'est pas modifiée dans sa dimension institutionnelle et statutaire, pas plus que dans ses missions. Cependant, le périmètre de négociation des partenaires sociaux sera restreint et encadré par le Gouvernement. En outre, ce dernier décidera des règles durant une période transitoire, ce qui interroge sur la volonté de prendre ou non en compte l'avis des partenaires sociaux. C'est donc bien le paritarisme de négociation qui est aujourd'hui « sur la sellette ».

S'agissant des questions financières, et notamment celle de la suppression de la cotisation salariale, qui signifierait la mort du paritarisme, les organisations syndicales ont des visions différentes à ce sujet, mais elles se retrouvent néanmoins sur certains points.

En particulier, la participation des partenaires sociaux à la négociation des règles de l'assurance chômage ne se justifie pas uniquement par l'existence de cotisations. En matière de création de la norme, la valeur ajoutée des corps intermédiaires, en particulier les organisations syndicales et patronales, vient du fait que ceux-ci connaissent les réalités du terrain. C'est cette essence-là qui est en jeu. La formation professionnelle n'est financée que par une cotisation patronale. Il faut donc bien établir la distinction entre le rôle de la négociation et la nature du financement. Malgré tout, les organisations syndicales revendiquent, pour l'assurance chômage, le maintien du caractère contributif basé sur des cotisations à la fois salariales et patronales.

Vous avez posé une question essentielle sur la volonté de baisser le coût du travail pour des raisons de compétitivité, ce que permettait en partie la suppression des cotisations salariales. Même si on peut estimer qu'il s'agit d'une mesure en faveur du pouvoir d'achat, elle remet en cause la nature et la philosophie du régime d'assurance chômage. 

Aux risques liés au travail correspondent des droits basés sur les cotisations du travail. En revanche, aux risques universels -qui ne sont pas liés au montant des cotisations- correspondent des prestations universelles. Quand on est atteint d'un cancer, on ne regarde pas le montant des cotisations : tout le monde a droit à la même chose. On n'est pas du tout sur la même nature de risques, et c'est bien là la différence entre les prestations universelles et les prestations d'assurance chômage.

J'entends parfaitement la question de la compétitivité qui est posée par certains d'entre vous. Il était possible par exemple d'établir un swap entre cotisations, en rendant  complètement universelle l'Assurance maladie à travers un financement par la CSG, sans modifier la philosophie du régime de l'asssurance chômage. Ainsi, on aurait pu à la fois renforcer le pouvoir d'achat des salariés comme le souhaite le Président de la République, et conserver un financement par l'impôt pour les prestations universelles et un financement contributif pour les prestations liées au travail.

D'où vient le financement de l'opérateur Pôle emploi qui assure auprès des demandeurs d'emploi à la fois l'indemnisation et l'accompagnement dans une recherche d'emploi ? La loi de création de Pôle emploi, en 2008, précise que les partenaires sociaux doivent financer au minimum Pôle emploi par 10 % des cotisations qu'ils collectent dans le cadre du régime d'assurance chômage, soit 3,5 milliards d'euros. Le budget de fonctionnement de Pôle emploi s'élève à 5 milliards d'euros. Un tiers de cette somme provient de l'État, le reste de l'Unédic.

Ceci s'explique notamment par l'idée que la sécurisation des personnes qui perdent leur emploi n'est pas seulement assurée par une indemnisation, mais aussi par un accompagnement et des dépenses actives -d'où la justification du financement de Pôle emploi par l'Unédic. Ces dernières années, les partenaires sociaux ont discuté sur cette part des deux tiers qui paraît relativement excessive, pèse sur les finances du régime, et qui pourrait être assurée plus largement par l'État.

M. Jean-Michel Pottier. - Dans l'accord national interprofessionnel du 28 mars 2017, les partenaires sociaux proposaient une discussion avec l'État sur la base d'un financement partagé.

Mme Patricia Ferrand. - Je laisserai Vincent Destival s'exprimer sur le chiffrage du déficit.

Le Parlement, dans le cadre de la loi Rebsamen de 2015, a adopté une nouvelle organisation de la négociation des annexes VIII et X relatives aux intermittents du spectacle. Ces personnes ont des règles et des droits d'indemnisation très particuliers. La loi Rebsamen indique que les partenaires sociaux, négociant le régime dans son ensemble, doivent fixer un cadrage aux partenaires sociaux du secteur, afin qu'ils fixent eux-mêmes les règles de ces annexes.

Ce schéma va-t-il être remis en cause ? À ma connaissance, pas vraiment, sinon les intermittents se seraient déjà manifestés... Toutefois, l'encadrement financier et le fait de ne pas avoir de visibilité pluriannuelle sur le pilotage de l'assurance chômage ni de trajectoire financière sécurisée va les toucher de la même manière que les autres salariés. C'est aujourd'hui le problème de toutes les personnes affiliées au régime.

M. Vincent Destival. - Il y a deux manières de considérer le déficit du régime des intermittents. On peut étudier directement l'écart entre les contributions payées par les intermittents et les dépenses d'indemnisation liées à ces salariés. Dans ce cas, le déficit est un peu supérieur à un milliard d'euros. C'est sans doute une manière quelque peu biaisée de considérer le sujet. S'il n'existait pas de règles spécifiques pour les intermittents, ceux-ci seraient indemnisés sur la base des règles de droit commun, comme les intérimaires ou les titulaires de contrats de courte durée.

En 2013, dans le cadre d'une mission d'information à l'Assemblée nationale, on avait mis en évidence que le surcoût des règles spécifiques des intermittents était de l'ordre de 300 millions d'euros par an. 

Les trois quarts du déséquilibre actuel proviennent donc du fait qu'il s'agit de contrats de courte durée, un quart étant lié aux règles spécifiques parfois plus favorables que le droit commun.

M. Jean-Michel Pottier. - Vous nous posez beaucoup de questions sur ce que fait l'Unédic. Nombre de ces remarques renvoient à des dispositions législatives qui sont plus de votre ressort que du nôtre. Nous sommes ici en tant que gestionnaires de dispositions que nous n'avons ni inspirées ni souhaitées, mais que nous devons appliquer. Cela renvoie aux responsabilités de chacun dans cette affaire.

Mme Patricia Ferrand. - C'est particulièrement le cas des contrats courts s'agissant de la question relative à l'application de la loi. Ce n'est pas de notre responsabilité, tant s'en faut. À ce stade, nous pouvons éventuellement vous éclairer par des données statistiques ou par notre connaissance du terrain et des pratiques, mais en aucun nous n'avons de responsabilités quant à l'application de la loi.

M. René-Paul Savary. - Quand j'étais président de département, j'avais imaginé pouvoir donner des chèques emploi service aux bénéficiaires de RSA, d'ailleurs suivis par Pôle emploi, charge à eux de trouver un employeur. Cela leur permettait de remettre le pied à l'étrier. Je n'ai toutefois pas pu le faire, la mesure n'étant pas vraiment compatible avec le RSA.

De telles expérimentations sont-elles envisageables pour ce qui vous concerne ?

M. Jean-Michel Pottier. - Il existe un cas de figure pour ce qui concerne le régime assurantiel.

Ce que vous évoquez relève de la solidarité et non d'un régime assurantiel. L'Unédic ne s'occupe pour l'instant que du régime assurantiel, mais si on nous demande de prendre en charge les indépendants, cela nous fera basculer dans un autre système.

M. Vincent Destival. - On le fait aujourd'hui dans le cadre du contrat de sécurisation professionnelle, destiné aux personnes licenciées économiques. Ce sont des dispositifs qui fonctionnent sur des populations ciblées. Ce n'est pas ce qui crée de l'emploi en règle générale. Quand on généralise ce type de dispôsitif, on change l'ordre dans lequel les différents demandeurs d'emploi retrouvent du travail.

Je pense que la solution, si l'on veut que la croissance se consolide et se renforce, consiste à favoriser la réduction du chômage structurel et à accroître les chances de retour à l'emploi de personnes qui en sont éloignées, plutôt que de donner des armes supplémentaires à ceux qui trouvent d'ores et déjà assez facilement une activité.

Le contexte économique fait qu'on va devoir accompagner la croissance. Si on ne travaille pas à réduire le chômage structurel, on va buter sur notre capacité à entretenir la dynamique économique. Le contexte appelle aujourd'hui ce type de politique publique.

Mme Patricia Ferrand. - Je suis parfaitement d'accord avec ce qui vient d'être dit, notamment s'agissant du changement de nature du régime. On va vers un régime à financement mixte dont on ne connaîtra pas exactement la philosophie. Les organisations syndicales craignent à terme une assimilation entre allocations chômage et minima sociaux. 

Il existe aujourd'hui un système de cumul d'allocations et de revenu mensuel qui permet aux allocataires d'augmenter leurs revenus. Ce type d'incitation au retour à l'emploi est le même que celui qui figurait dans le RSA activité. Les contrats courts concernent en partie des populations plus proches de l'emploi.

Que ce soit sous forme de chèque emploi service ou de contrat aidé, il s'agit de savoir si le dispositif s'adresse à la personne ou à l'entreprise, et qui paye le travail. Je me demande si des expérimentations n'ont pas été menées il y a très longtemps dans le régime d'assurance chômage, où une partie des droits restants pouvaient être versés à l'entreprise qui embauchait le demandeur d'emploi. Il faut toutefois souligner les inégalités que ce genre de dispositifs peut entraîner. Doit-on accepter de céder à une entreprise une partie de ses droits à l'assurance chômage pour retrouver un emploi ? Cela soulève une épineuse question philosophique.

Je suis d'accord avec vous pour reconnaître qu'on n'a pas encore trouvé, quel que soit le dispositif considéré, le moyen de résoudre le chômage structurel et d'accompagner au mieux les demandeurs d'emploi. Il ne s'agit pas seulement d'une question d'indemnisation financière, j'en suis persuadée.

M. Alain Milon, président. - Merci.

La réunion est close à 12 h 10.

- Présidence de M. Alain Milon, président -

La réunion est ouverte à 18 heures.

Situation et perspectives des comptes sociaux - Audition de M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics

M. Alain Milon, président. - Nous accueillons cet après-midi M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.

Après la communication, le 15 mars dernier, des résultats du régime général de sécurité sociale et la publication par l'INSEE, le 26 mars, des premiers résultats des comptes nationaux pour 2017, j'ai souhaité que notre commission des affaires sociales fasse un point sur la situation et les perspectives des comptes sociaux.

Ces résultats ne sont en effet que très partiellement disponibles et ne permettent pas, en l'état, de comprendre, par exemple, pourquoi le solde de l'assurance maladie enregistre une dégradation par rapport à la prévision, alors que les résultats globaux s'améliorent et que les recettes sont meilleures que prévu grâce à une progression soutenue de la masse salariale.

Nous souhaitons également faire le lien entre les régimes obligatoires de base, qui forment le champ du projet de loi de financement de la sécurité sociale et les administrations de sécurité sociale (ASSO) dont la contribution à la dette publique augmente alors qu'elles sont en excédent pour la première fois depuis 2008.

Nous avons également souhaité vous entendre, alors que le programme de stabilité devrait être présenté la semaine prochaine, sur les conséquences de ces résultats sur la période à venir, mais aussi sur les intentions du Gouvernement pour ce qui concerne les textes financiers. Ce sera l'occasion pour notre commission de vous exposer ses propositions dans ce domaine.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics. - Je vous remercie de votre invitation pour évoquer les résultats des comptes sociaux et répondre à vos questions en cours d'année, alors que nous sommes en train de préparer l'avenir.

La situation des finances sociales s'est améliorée, comme l'ont montré les résultats du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) publiés mi-mars.

Le régime général reste certes déficitaire, mais connaît une amélioration patente, avec un déficit ramené à 5,1 milliards d'euros, soit le plus faible depuis quinze ans. Ce résultat est conforme aux prévisions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

La situation financière de la plupart des branches s'améliore sensiblement. À 1,1 milliard d'euros, le déficit cumulé de la branche retraite et du FSV se réduit de 1,6 milliard d'euros par rapport à 2016, sous l'effet du dynamisme des recettes assises sur les revenus du capital, dont bénéficie le FSV. Celui-ci connaît un recul de son déficit, inférieur à 3 milliards d'euros pour la première fois depuis cinq ans.

La branche famille est proche de l'équilibre, avec un solde de moins 200 millions d'euros, dans un contexte d'accélération importante de créations de places d'accueil de jeunes enfants en 2017.

La branche maladie stabilise son déficit à hauteur de 4,9 milliards d'euros, malgré la perte du produit de la TVA. En tenant compte de l'évolution des recettes, sa situation s'améliore de 1 milliard d'euros sur l'année.

Enfin, la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) enregistre un excédent de 1,1 milliard d'euros.

Les administrations de sécurité sociale, soit la sécurité sociale, les régimes complémentaires des salariés, AGIRC et ARRCO, l'Unédic, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie et la Caisse d'amortissement de la dette sociale sont en excédent de plus de 5 milliards d'euros, alors qu'elles étaient encore en déficit l'an dernier. Cette situation est plus favorable que ne le prévoyait la loi de programmation des finances publiques, construite sur des hypothèses prudentes en termes de contexte macro-économique.

Cette amélioration découle d'une reprise économique marquée. La masse salariale sur laquelle une large part des recettes sociales reste assise est en augmentation de 3,5 %. L'amélioration de la conjoncture a profité aux recettes de la fiscalité du capital affectées au FSV. De même, les recettes assises sur les revenus des travailleurs indépendants ont été plus dynamiques que prévu. À l'inverse, les cotisations dans le secteur agricole et au titre des agents publics sont inférieures aux prévisions.

Cette amélioration s'explique par la reprise économique, mais traduit également la maîtrise des dépenses. L'Objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) est tenu à 2,2 %, les prestations vieillesse n'accélèrent pas et l'accord Agirc-Arrco de 2015 porte ses fruits, de même que l'on note un ralentissement des dépenses d'indemnisation chômage.

Cette amélioration touche la majeure partie du champ des administrations de sécurité sociale. Ainsi, les régimes complémentaires vieillesse pris dans leur intégralité sont à l'équilibre, avec un léger excédent de 300 millions d'euros, alors qu'ils étaient en déficit l'année dernière. L'AGIRC, l'ARRCO et l'Association pour la gestion du fonds de financement (AGFF) connaissent, quant à eux, un déficit bien moins important qu'en 2016. Cette amélioration s'explique par le rebond des recettes mais elle reflète également la maîtrise des dépenses, notamment la sous-indexation d'un point de la revalorisation des pensions inscrite dans l'accord sur les retraites complémentaires de 2015. Enfin, l'Unédic réduit son déficit de 1 milliard d'euros par rapport à l'année précédente.

Ces bons résultats nous confortent dans la volonté de redressement des comptes publics. L'amélioration des comptes des administrations de sécurité sociale est un signal favorable, qui ne doit pas être mal interprété. La situation économique devrait continuer à porter ses fruits, mais les administrations de sécurité sociale n'ont pas de marges de manoeuvre. Nos engagements européens seront jugés sur notre capacité à poursuivre nos efforts en matière de maîtrise de la dépense. Chaque secteur des administrations publiques prend sa part dans cet effort. C'est dans ce contexte que le Gouvernement construit le programme de stabilité budgétaire 2018-2022, qui sera présenté dans quelques jours.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général. - Nous avons demandé à tous les ministres successifs de disposer d'une vision claire des comptes sociaux à la mi-avril. Nous avons le programme de stabilité financière mais nous ne disposons pas des données complètes chiffrées, qui doivent pourtant être disponibles.

Les risques maladie et famille sont connus, ils pèsent 250 milliards d'euros, ce qui impacte considérablement le budget de la France. De ce point de vue, une avancée du calendrier de publication des chiffres est souhaitable, mais est-elle possible ?

Comment la résorption de la dette qui n'est pas portée par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) est-elle intégrée dans le scénario de plafonnement de l'excédent des ASSO prévu par la loi de programmation des finances publiques ?

Les résultats de l'assurance maladie pour 2017 sont déficitaires de 4,9 milliards d'euros. Notre commission avait mis l'accent sur la mobilisation exceptionnelle des recettes en faveur de cette branche. Comment expliquer, dès lors, un tel déficit, alors que la loi de financement pour 2017 prévoyait 2,6 milliards d'euros et la loi de financement pour 2018 une prévision rectifiée de 4 milliards d'euros ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. - S'agissant des comptes publics, nous entendons votre demande. Vous savez que la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS) procède à cette analyse détaillée en juin. Nous devons préparer le débat du programme de stabilité budgétaire en y intégrant un réajustement des prévisions. Or ce sont les mêmes équipes qui travaillent sur ces sujets et il leur est difficile de mener deux tâches de front dans les mêmes délais. Il existe sans doute des pistes d'amélioration afin de nous permettre d'être plus précis devant le Parlement.

En ce qui concerne l'assurance maladie, elle a subi une opération comptable. En 2017, 7,03 % du produit de la TVA était affecté, contre 0,34 % en 2018, à quoi il faut ajouter 5,5 % affecté à l'ACCOS. Ce changement d'affectation a joué un rôle dès 2017 sur les comptes de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (Cnamts), entraînant une perte de 1 milliard d'euros.

Comme je l'ai dit, compte tenu de cette opération comptable, qui a conduit à dégrader son déficit, l'assurance maladie a connu une amélioration de ses conditions financières.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général. - Votre réponse n'est pas tout à fait satisfaisante : vous affirmez manquer de moyens humains pour nous présenter une vision claire et complète, alors que vous la préparez pour le programme de stabilité. Au vu du poids des comptes sociaux dans le programme de stabilité budgétaire, nous devrions disposer d'une information complète. Je ne comprends pas que l'on puisse dire que cela attendra !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. - Je n'ai pas la certitude que nous disposions de la capacité d'être aussi précis que vous le souhaitez, mais nous pouvons certainement faire mieux.

J'ajoute, au sujet de l'affectation de la TVA, qu'il s'agit d'une opération comptable ponctuelle. Elle a un effet sur le déficit mais elle ne se reproduira pas les années suivantes.

M. René-Paul Savary. - Ma question porte sur les retraites, alors que la réforme systémique annoncée est en cours d'élaboration. Avec 330 milliards d'euros, soit 14 % du PIB en dépense, celles-ci pèsent plus lourd en France que dans les autres pays européens. Les recettes correspondantes représentent 13,8 % du PIB, entraînant un déficit annuel de 4,4 milliards d'euros. Comment prenez-vous en compte ce déficit dans la réforme à venir ? Faites-vous une priorité de sa réduction ? Avez-vous des discussions à l'échelle européenne sur ces besoins de financement qui influent sur l'équilibre des comptes sociaux ? L'Europe a-t-elle émis un avis sur cette réforme ?

Mme Frédérique Puissat. - La dette de l'Unédic représente onze mois de cotisations. À l'aube de la réforme de l'assurance chômage, quelle vision le Gouvernement a-t-il de cette dette, de ses échéances et des modalités de son apurement ?

M. Yves Daudigny. - L'amélioration des comptes sociaux, en particulier de la sécurité sociale, est une bonne nouvelle mais il ne faudrait pas qu'elle s'accompagne d'une dégradation de notre système de santé. Nous nous félicitons de voir l'Ondam rester équilibré mais, en parallèle, la situation de l'hôpital est très dégradée et demande que l'on y consacre des moyens.

Cette trajectoire de rétablissement des comptes a été initiée, et réussie, par le gouvernement précédent.

L'amélioration du FSV était inattendue ; en revanche, le maintien du déficit de la branche maladie est une mauvaise nouvelle. L'amélioration est due à l'augmentation de la masse salariale et des recettes tirées des revenus du capital. La réforme de la fiscalité du capital en cours ne risque-t-elle pas de provoquer une diminution de cette partie des recettes ?

M. Daniel Chasseing. - Je me félicite également de cette amélioration et de la reprise économique qu'elle traduit. Il faut maintenant poursuivre les efforts pour la sécurité sociale et l'Unédic.

En 2019, il sera nécessaire de prévoir des crédits supplémentaires pour les hôpitaux et les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), qui souffrent d'un manque d'investissements et de personnel.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. - Monsieur Savary, vous aurez l'occasion de travailler sur les retraites, vous connaissez le calendrier, la réforme doit aboutir en 2019. L'objectif qui a été fixé est de mener une réforme juste du système de répartition, permettant à tous ceux qui cotisent de bénéficier du même rendement. Nous sommes animés d'une volonté de protection, d'égalité et de simplification des systèmes articulés aujourd'hui autour de presque quarante régimes. Il ne s'agit pas de les faire tous disparaître mais la convergence est une nécessité. Le Haut-Commissaire Delevoye mène les concertations, il est à la disposition des assemblées pour évoquer le sujet, mais le Premier ministre n'ayant pas rendu ses arbitrages, vous imaginez bien que je ne vais pas les préempter.

Le sujet est important, au vu du poids qu'il représente et de la dette, mais la question n'est pas communautaire car les discussions avec les autorités européennes portent sur le solde et non sur la nature des dépenses. Je peux donc vous assurer que notre réflexion est libre de toute interférence communautaire.

Madame Frédérique Puissat, s'agissant de la dette de l'Unédic, la réforme de l'assurance chômage est conduite avec un objectif comptable clair : stabiliser la dette et ne pas l'alourdir. À ce stade, il n'est pas encore question d'apurement car nous devons construire la réforme avant d'étudier cette question. Dans un premier temps, nous veillons à ne pas aggraver la situation.

Messieurs Daudigny et Chasseing, l'Ondam a été fixé à 2,3 %, c'est-à-dire à un niveau élevé au regard des années précédentes. La trajectoire budgétaire prévoit que ce niveau sera maintenu jusqu'en 2022. Il faut ajouter à cela les réformes engagées : nous avons ainsi affecté 250 millions d'euros aux hôpitaux en février pour leur permettre de répondre à leurs besoins. Parmi les cinq chantiers qui font l'objet de concertation figurent la question de la tarification et celle de l'offre de soins, avec l'objectif de lutter contre la saturation des urgences. Nous réformons, nous revoyons l'offre de soins et nous maintenons le niveau de l'Ondam afin de garantir que les moyens nécessaires seront disponibles.

S'agissant de la réforme de la fiscalité, monsieur Daudigny, le risque que vous évoquez n'existe pas puisqu'elle permet de maintenir le même niveau de recettes pour le FSV.

M. Alain Milon, président. - Je peine à comprendre comment on peut se satisfaire d'un retour à l'équilibre des comptes sociaux alors qu'il s'est fait au détriment de l'humain, des hôpitaux et des Ehpad. On peut, certes, se féliciter d'un retour de l'activité économique, mais l'Ondam est insuffisant, car la progression tendancielle des dépenses est aux environs de 4 %.

Comment peut-on se satisfaire de donner 250 millions d'euros aux hôpitaux alors que leur déficit atteignait 500 millions d'euros en 2016 et 1 milliard d'euros l'année suivante ?

Le message positif, c'est la réussite économique et l'émergence de nouvelles ressources. Il faudrait plutôt communiquer sur ce sujet et annoncer qu'un jour l'activité économique permettra de fixer l'Ondam à un niveau suffisant pour que le personnel médical puisse enfin respirer.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. - J'accueille toujours vos conseils avec plaisir, monsieur le président. Vos propos sont de bon sens, il faut encourager la reprise. Nous savons les efforts demandés et nous connaissons la situation des hôpitaux et des Ehpad, qui est née de l'accumulation des difficultés et de l'évolution des besoins.

Nous avons intérêt à veiller à l'évolution des dépenses et à souhaiter des recettes très supérieures ; le relèvement de l'Ondam à 4 % représenterait une dépense de 3,4 milliards d'euros par an, mais ce ne serait pas de l'argent mal employé.

Mme Laurence Rossignol. - Ces résultats n'ont pas été obtenus d'un coup de baguette magique mais sont le fruit d'un processus long. La situation des hôpitaux ne peut être mise exclusivement au débit du gouvernement actuel, mais relève aussi de la responsabilité du précédent, et il en va de même en ce qui concerne les bons chiffres de la branche famille dont le déficit atteignait 2,5 milliards d'euros en 2012, contre 200 millions d'euros aujourd'hui.

Vous évoquez l'augmentation des créations de places d'accueil de jeunes enfants : l'augmentation de 60 % constatée cette année sur les demandes de subventions a été engagée en 2017 - vous avez été maire, vous savez comment cela se passe. Ce chiffre est le résultat d'une politique volontariste et je souhaite que cet effort se poursuive dans la prochaine convention d'objectifs et de gestion (COG) de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf).

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. - En effet, on succède toujours à quelqu'un !

Mme Laurence Rossignol. - Et on a souvent un successeur !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. - Je suis d'accord avec vous, madame Rossignol, et s'agissant de la Cnaf, je ferai part de votre remarque à Mme la ministre des solidarités et de la santé car ce dossier n'est pas de mon ressort.

Mme Catherine Deroche. - N'oublions pas que l'amélioration de la branche famille s'est faite au détriment des classes moyennes.

Mme Laurence Rossignol. - Vous voulez dire des classes supérieures. L'effort a concerné les familles disposant de revenus mensuels supérieurs à 6 500 euros par mois.

La réunion est close à 18 h 40.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

Jeudi 5 avril 2018

- Coprésidence de M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales et de Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques -

La réunion est ouverte à 11 heures.

Procédures de retrait et de rappel des produits alimentaires présentant un risque sanitaire - Suite des conclusions à l'issue des auditions

Mme Sophie Primas, présidente. - Chers collègues, nous vous proposons aujourd'hui une nouvelle rédaction des propositions n° 1 à 3, afin de prendre en considération les remarques et les inquiétudes que vous avez exprimées lors de la trop rapide réunion du 28 mars dernier.

L'affaire dite Lactalis a montré que l'information sur l'existence des procédures de retrait et de rappel ainsi que les conditions de leur mise en oeuvre avaient donné lieu à des défaillances. C'est indéniable. Elle a également mis en lumière une situation de fait, chez le fabricant, qui est bien à l'origine de la contamination.

Prises dans leur ensemble, nos propositions ne ciblent naturellement pas exclusivement un acteur de la chaîne agroalimentaire. Elles procèdent d'un souci d'équilibre entre les différents acteurs : producteurs, distributeurs ainsi que, j'insiste, les autorités de contrôle.

Plusieurs d'entre vous l'ont souligné la semaine dernière : notre pays dispose probablement de l'un des dispositifs de surveillance sanitaire les plus performants en Europe, voire au monde. Des investisseurs étrangers viennent s'installer en France précisément pour bénéficier de cette expertise. C'est pour notre industrie un avantage compétitif majeur. Le protéger de toute contre-publicité, comme celle faite par l'affaire Lactalis, c'est renforcer ce facteur d'excellence.

Par conséquent, il est indispensable que des mesures soient prises dès le stade de la production et tout au long de cette chaîne, sachant que, bien évidemment, le risque zéro n'existe pas, hélas.

Ce qu'ont montré nos auditions, c'est que Lactalis avait connaissance de l'existence de certains éléments pathogènes potentiellement dangereux pour la santé dans l'environnement de production de son usine de Craon, dont il y a tout lieu de penser qu'ils sont à l'origine de la contamination. Notre sentiment est que, si l'information avait été partagée avec l'autorité administrative, une gestion différente de cette circonstance aurait été possible. Sans être médiatisée, cette information partagée aurait peut-être permis une évaluation commune des risques et probablement une meilleure attention de l'industriel sur la totalité des lots concernés.

C'est pourquoi nous avions formulé trois propositions, destinées à favoriser la circulation d'informations entre le producteur et l'autorité administrative, sans que les données en cause aient un caractère public et sans que la communication de ces informations à l'administration conduise inévitablement à la fermeture d'une unité de production. Ce faisant, nous entendions respecter le principe établi par la réglementation communautaire en matière de sécurité des produits alimentaires selon lequel le producteur est responsable de la sécurité des produits qu'il fabrique et, à ce titre, le premier à devoir déterminer les actions qui doivent être entreprises pour que cette sécurité soit complète. L'autorité administrative n'agit ainsi que de manière supplétive, efficacement, c'est-à-dire aussi promptement que possible.

Il ne s'agit en aucun cas de surtransposer le droit européen, et encore moins d'alourdir les contraintes qui pèsent sur nos entreprises agroalimentaires. Nous cherchons simplement des voies d'amélioration, au bénéfice non seulement des consommateurs mais aussi des industriels. Il en va en effet de leur crédibilité commerciale, que nos propositions visent justement à renforcer.

Dans cet esprit, nous avons précisé les trois premières propositions. Nous n'en sommes en effet qu'au stade des propositions : il ne s'agit pour l'heure que de décrire l'objet et le périmètre de la mesure, pas de proposer une rédaction à insérer immédiatement dans un texte législatif ou réglementaire...

Proposition n° 1 : « rendre obligatoire l'information de l'autorité administrative sur les autocontrôles positifs réalisés par le fabricant qui concernent des prélèvements dans l'environnement de production, lorsque ceux-ci font apparaître, après contre-analyse, une situation présentant un risque pour la santé humaine, ainsi que sur les éléments correctifs apportés. ».

Il nous semble indispensable de conserver le principe d'une information de l'autorité administrative, non seulement des autocontrôles positifs sur les produits, mais également des autocontrôles concernant l'environnement. Cette communication serait toutefois limitée aux hypothèses où elle est pertinente pour la santé, c'est-à-dire lorsque ces autocontrôles font apparaître une situation préjudiciable à la santé humaine. Surtout, cette obligation n'interviendrait qu'après contre-analyse, c'est-à-dire en cas de risque avéré -l'expérience montre qu'il ne l'est pas, heureusement, dans la très grande majorité des cas.

Dans le cadre d'un principe de responsabilité du producteur, les éléments correctifs apportés par ce dernier devraient également être mentionnés afin que l'autorité administrative ait connaissance de l'ensemble de la situation. Il s'agit là encore de mieux faire circuler l'information, son partage avec l'administration pouvant faciliter ou valider l'adoption des mesures les plus pertinentes pour faire cesser le trouble. À nouveau, la cessation de la production est une mesure corrective parmi d'autres, mais elle ne doit pas être écartée dans toute circonstance. Elle peut être justifiée au regard de la nature du risque, mais également pour des raisons d'image commerciale.

M. Laurent Duplomb s'interrogeait sur le périmètre retenu pour les autocontrôles d'environnement de production. Les contrôles visés sont ceux qui sont le plus susceptibles d'entraîner une contamination des produits en raison de leur position dans la chaîne de production. Il ne s'agit pas de transmettre des autocontrôles positifs constatés sur le parking de l'usine. Ce périmètre sera à apprécier au cas par cas. Il pourrait être défini par les autorités sanitaires, avec les industriels, lors de l'agrément de l'usine de production, qui analyse spécifiquement chaque étape de la chaîne de production.

Proposition n° 2 : « prévoir un contrôle par l'autorité administrative, selon une périodicité à déterminer, des informations figurant dans les registres que doivent tenir les fabricants en application du règlement (CE) n° 852/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relatif à l'hygiène des denrées alimentaires ». Cette proposition refondue vise la communication du registre que tout fabricant doit tenir à la disposition de l'autorité administrative, en application du droit européen. La périodicité devra être fixée après concertation avec les industriels et l'autorité administrative. Comme dans notre rédaction initiale, il s'agit de fluidifier la circulation de l'information. Aucune information nouvelle n'est donc exigée des entreprises. Nous voulons juste nous assurer qu'entre deux contrôles sur place, dont on a vu qu'ils étaient parfois très espacés dans le temps, l'autorité administrative dispose d'informations pertinentes.

Proposition n° 3 : « imposer aux laboratoires indépendants mandatés pour réaliser des analyses pour le compte des producteurs de signaler à l'autorité administrative les résultats non conformes à la réglementation applicable au produit, confirmés par une contre-analyse ». Cette nouvelle proposition n° 3 prévoit que les laboratoires indépendants chargés de pratiquer des autocontrôles signalent les contrôles positifs à l'autorité, mais seulement, comme dans la proposition n° 1, lorsqu'il a été procédé à une contre-analyse.

D'autres questions portaient sur le deuxième axe de nos propositions, relatif à la fiabilisation de l'information aux consommateurs en cas de procédure de retrait et de rappel des produits. M. Jean-Pierre Moga a proposé de ne faire figurer sur la liste unique recommandée dans la proposition n° 8 que les produits concernés par une procédure de retrait pour risque sanitaire. C'est bien l'objectif de cette proposition, qui ne vise que les produits concernés par des procédures de rappel, c'est-à-dire des produits dangereux pour la santé ou la sécurité des consommateurs -à l'exclusion par exemple des produits à l'étiquette ou à l'emballage non conforme à la réglementation. La liste unique ne concernera pas les produits concernés par les retraits.

M. Laurent Duplomb nous avait aussi interrogés sur la proposition n° 10, qui vise à mettre en place une procédure standardisée et graduée d'alerte dédiée aux rappels. Nous proposons un principe très clair : aux crises les plus graves doivent répondre les moyens de communication les plus efficaces. Le recours à la procédure de type « Alerte Enlèvement » serait strictement cantonné aux produits alimentaires contaminés, manifestement très dangereux pour les consommateurs et nécessitant d'agir urgemment. Ce ne serait pas la procédure normale d'alerte -comme ne l'est pas non plus « Alerte enlèvement » pour les disparitions d'enfants.

M. Alain Milon, président. - Nous saluons le consensus existant sur la nécessité d'améliorer l'efficacité de l'exécution matérielle des procédures de retrait et de rappel des produits, qui constitue le troisième axe de nos propositions.

Mme Florence Lassarade s'inquiétait à juste titre de la difficile traçabilité des échantillons de produits laissés aux cabinets médicaux. Notre proposition n° 7 renforce la traçabilité de tous les produits, y compris les échantillons. En outre, les sanctions applicables en cas de mise en mise sur le marché de produits concernés par une mesure de suspension s'appliquent également à la distribution d'échantillons à titre gratuit. Alourdir les sanctions, comme le préconise la proposition n° 17, est de nature à inciter les acteurs à assurer un meilleur suivi des échantillons.

Nous sommes d'accord avec M. Bernard Jomier, qui s'inquiétait de l'usage qui pourrait être fait des données de cartes bancaires des consommateurs. Lors des mesures de rappel de décembre 2017, les établissements bancaires avaient été sollicités pour identifier les acheteurs des produits concernés, en dehors de tout cadre juridique. Or c'est une procédure efficace à laquelle il ne faut pas hésiter à recourir en cas de crise sanitaire d'une extrême gravité. Notre proposition n° 16 vise à encadrer strictement cette pratique, en la réservant au cas de crise sanitaire grave et lorsqu'il y a bien urgence à identifier des consommateurs.

Pour répondre à la question de M. Dominique Watrin, les sanctions diffèrent selon le type des arrêtés de rappel des produits. Le non-respect de l'arrêté de rappel des produits pris par le ministre de l'économie est passible d'une amende prévue pour les contraventions de 5ème classe, soit 1 500 euros au maximum, 3 000 euros en cas de récidive. En cas de dommage causé au consommateur, la responsabilité civile, voire pénale des distributeurs, peut également être engagée devant les juridictions compétentes. Si l'arrêté de retrait et/ou rappel des produits est pris par le préfet, sa méconnaissance peut être punie d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 15 000 euros.

Pour un géant de la distribution toutefois, il est clair que ces sanctions ne sont pas assez dissuasives. La proposition n° 17 y remédie en punissant le manquement constaté par le distributeur d'une amende administrative dissuasive, proportionnelle à la valeur des produits mis sur le marché alors qu'ils font l'objet d'une procédure de retrait décidée par arrêté.

Mme Sophie Primas, présidente. - M. Martial Bourquin demandait de préciser que la responsabilité du directeur de magasin est engagée en cas de mise en vente de produits concernés par une procédure de retrait. L'engagement de la responsabilité du directeur de magasin dépend de la forme juridique d'exploitation de ce dernier, selon qu'il est en exploitation directe ou en franchise. Il est difficile de poser un principe de responsabilité personnelle générale en ce domaine, sachant que, le cas échéant, la direction générale du distributeur pourra se retourner contre son préposé en cas de faute détachable de ses fonctions.

Comme le signalait M. Laurent Duplomb, le distributeur a bien une obligation de résultats concernant l'efficacité de la procédure de retrait ou de rappel. Si des défaillances sont constatées, et cela a été le cas dans l'affaire Lactalis, les sanctions qui lui sont applicables doivent être réellement dissuasives. C'est tout l'objet de la proposition n° 17.

En revanche, il faut rappeler que le producteur doit légalement s'abstenir de mettre sur le marché des produits impropres à la consommation. Il doit donc assumer sa responsabilité puisqu'il est à l'origine du déclenchement de la procédure de retrait. Que les opérations de retrait soient mises à sa charge n'a en soi rien de choquant, sous réserve que les pénalités prévues ne soient pas abusives, ce qui constituerait alors une pratique commerciale prohibée.

M. Alain Milon, président. - Voici quelles sont nos propositions. J'insiste : l'obligation de résultats concerne le fabricant, les agences, les distributeurs, et personne d'autre.

M. Marc Daunis. - Voilà dix-sept propositions particulièrement pertinentes.

L'autorité administrative doit intervenir aussi promptement que possible, avez-vous dit. Je crains à cet égard que la formulation de la première proposition ne soit pas assez claire : « rendre obligatoire l'information de l'autorité administrative sur les autocontrôles [...] ainsi que sur les éléments correctifs apportés » peut conduire le fabricant à n'informer l'administration qu'après réalisation de l'analyse, de la contre-analyse et des mesures correctives. « Rendre obligatoire une information immédiate de l'autorité administrative » serait plus adéquat. Une fois l'information transmise, on peut faire confiance aux autorités administratives pour que les correctifs soient apportés !

Ne vaut-il pas mieux, en outre, préciser « présentant un risque potentiel pour la santé humaine » ? Le champ couvert serait ainsi un peu plus large.

M. Alain Milon, président. - Une réaction immédiate est obligatoire en cas de risque pour la santé humaine dans la chaîne de production. Mais en l'espèce, nous parlons de risque dans l'environnement de production. Demander alors une contre-analyse est plus prudent.

M. Marc Daunis. - Je ne suis pas contre une seconde analyse. Mais il conviendrait de cibler les risques les plus larges possibles.

Mme Sophie Primas, présidente. - « Risque potentiel » me semble être un pléonasme : un risque, par nature, est potentiel. De plus, nous reprenons là la terminologie européenne.

M. Marc Daunis. - Me voilà rassuré !

M. Bernard Jomier. - Le « risque potentiel », c'est un peu comme les « perspectives d'avenir », que l'on trouve à longueur de rapport !

La proposition n° 1 initiale a été heureusement modifiée. La distinction entre les différentes situations est plus claire. Mais la chaîne d'actions à conduire reste longue. De plus, que veut dire « après contre-analyse » ? Qui la réalise ? Une contre-analyse négative invalide-t-elle définitivement une première analyse positive ? La réponse est évidemment non. Si après une biopsie de prostate positive, vous obtenez une biopsie négative, je ne vous conseille pas, chers collègues, de vous réjouir !

Deuxième problème : « une situation présentant un risque pour la santé humaine ». Si cela n'a pas été signalé, qui en décide ? Le fabricant ? C'est le rôle des autorités sanitaires ! Heureusement, cette situation est rare, mais il y a là un problème.

Enfin, je rejoins Marc Daunis : attendre que les éléments correctifs aient été apportés allonge considérablement la procédure d'information. Dans l'affaire Lactalis, la bactérie n'était heureusement pas grave, mais avec une telle procédure, les enfants contaminés auraient été nombreux, car l'alerte sanitaire n'aurait pas fonctionné.

M. Martial Bourquin. - Revenons à l'essentiel. Des autocontrôles n'ont pas été contrôlés, et des problèmes sont survenus dans une entreprise. Que la chaîne ait été défaillante est préjudiciable pour l'entreprise, mais surtout pour la santé humaine. Ce n'était pas grave en l'espèce, mais cela pourrait l'être, et extrêmement. Ces propositions introduisent d'abord la nécessité de procéder à une contre-analyse qui confirme ou non l'existence d'un problème. Ensuite, des dispositions doivent être prises pour retirer le produit. En outre, la DGCCRF doit avoir les moyens de faire son travail : c'est l'objet de la proposition n° 5. L'obligation de signaler les autocontrôles est une autre amélioration importante.

Demain, compte tenu des accords de libre-échange en cours de négociation, les produits ne seront pas fabriqués selon les mêmes normes que les nôtres. La procédure devra être irréprochable !

S'agissant des sanctions, je reste totalement sur ma faim. Le maire qui laisse ouverte une piscine qui n'est pas aux normes est passible, lui, de sanctions beaucoup plus lourdes ! Il faut rendre les sanctions plus dissuasives.

M. Daniel Gremillet. - Il est important que nos commissions soient rassemblées et que l'on participe au même rythme à ces auditions. J'apprécie que l'on prenne du temps sur ces sujets, car nous devons bien mesurer les conséquences de ce que nous sommes en train de faire, qui va au-delà de la réglementation européenne et touche à la vie des entreprises.

La proposition n° 1, je le rappelle, concerne les autocontrôles. Je précise à l'attention de ceux qui ne savent pas comment les choses fonctionnent qu'un contrôle positif donne automatiquement lieu non pas à une, mais à des contre-analyses, et heureusement ! Au quotidien, dans une entreprise qui se respecte, il y a déjà plus d'autocontrôles que de contrôles. Cette proposition n° 1 est fondamentale, car nous sommes sur le point de rendre obligatoire la contre-analyse des prélèvements dans l'environnement. S'aligner sur les exigences relatives aux prélèvements sur les produits est une avancée majeure.

Les conditions du prélèvement et ses conditions de transport font que la marge d'erreur n'est jamais nulle. D'où l'intérêt d'une contre-analyse -pas forcément dans le même laboratoire.

La proposition n° 12 est importante. Nous devons obtenir les évolutions techniques permettant le blocage en caisse. C'est pour l'heure compliqué, mais c'est le meilleur moyen de procéder.

Enfin, exigeons la même chose des entreprises françaises, européennes, et extra-européennes, pour rester cohérents avec ce que nous avons récemment voté à l'unanimité au Sénat dans la résolution européenne sur les directives de négociation en vue d'un accord de libre-échange entre l'Union européenne et l'Australie, d'une part, et la Nouvelle-Zélande, d'autre part.

M. Laurent Duplomb. - Je me félicite de cette nouvelle rédaction, surtout des trois premières propositions, qui tient compte des mises en garde que j'avais formulées la semaine dernière.

Ayons cependant confiance en nos industries agroalimentaires. Si elles étaient toutes désireuses de menacer la santé publique, nous n'aurions pas réduit à presque zéro le nombre de décès par intoxication alimentaire, qui était d'environ 15 000 en 1950. Nous devons certes faire en sorte que le problème rencontré récemment ne se reproduise pas, mais surtout faire preuve de pragmatisme, en étant aussi efficaces que prudents. N'oublions pas, en outre, que nous sommes dans une économie ouverte : imposer des contraintes presque insurmontables à nos entreprises les pénaliserait par rapport à la concurrence étrangère.

Ces nouvelles propositions me conviennent, et je me réjouis que nous soyons parvenus à les faire évoluer en ce sens. Voilà qui illustre l'intérêt d'avoir des sénateurs qui ne soient pas tous coulés dans le même moule - ce qui n'est pas le cas de la haute administration ni de ceux qui veulent nous imposer des choses qu'ils ne connaissent pas...

M. Michel Raison. - Je confirme, puisque nous parlons de produits laitiers, que nous ne sommes pas tous moulés à la louche !

Qu'entend-on, dans la proposition n° 8, par « mieux communiquer » ? Dans ces affaires, la communication est fondamentale pour rétablir la confiance, mais mieux communiquer n'est jamais loin de trop communiquer...

Voilà quelques années que je suis parlementaire. Nous ne cessons de nous plaindre de la complexité de notre réglementation, mais nous entendons la renforcer à chaque dysfonctionnement ! Un Gouvernement - que je soutenais - nous a même conduits à légiférer après l'attaque d'un enfant par un chien, alors que les chiens n'ont jamais eu le droit de mordre les enfants... Dans le dossier qui nous préoccupe, les règles n'ont pas été respectées ! Commençons par trouver des solutions pour bien faire appliquer la loi, en renforçant les moyens de la DGCCRF par exemple, qui ferait mieux de se concentrer sur ces dossiers, et évitons de tomber dans le travers consistant à produire de nouvelles réglementations.

M. Fabien Gay. - Ces propositions me conviennent. Je regrette simplement que nous n'ayons pas auditionné les laboratoires de contrôle. En lisant la presse, on apprend que les acteurs chargés des autocontrôles dans cette usine en vivaient à 95 %. Cette dépendance à cette usine Lactalis a pu conduire, la pression du client devenant trop forte, à un relâchement de la vigilance. C'est un sujet sur lequel nous ferions bien de nous pencher.

Pour le reste, je rejoins mes collègues : revenons à l'essentiel. La chaîne marche bien lorsque le produit est concerné, moins lorsqu'il s'agit de son environnement. En l'espèce, il y a eu deux autocontrôles, un sur un balai, un autre sur le sol, et le produit a malgré tout été touché. Les propositions vont dans le bon sens.

Je me félicite aussi de la proposition n° 5, qui vise à redonner les moyens aux administrations de fonctionner. L'audition de la DGCCRF a été édifiante : ses moyens diminuent depuis dix ans... Forcément, à un moment, le système craque.

Nouveau sénateur, je m'interroge enfin sur la suite concrète qui sera donnée à nos réflexions. Nous serons heureux de continuer à participer à tous les travaux communs à nos deux commissions.

M. Marc Daunis. - Le pléonasme peut être une faute de français, mais aussi une figure de style... Je n'insisterai toutefois pas sur la définition du risque.

J'insiste en revanche sur l'information de l'autorité administrative : elle doit être immédiate. Je connais un peu les procédures de contrôle et d'autocontrôle, pour avoir quelques industries chimiques dans ma circonscription... L'intervention rapide est fondamentale ! Il ne s'agit pas de mettre ces informations sur la place publique, mais de les transmettre à l'autorité administrative, compétente pour juger des suites à donner.

Nos modes de production et de contrôle sont exemplaires dans le monde, cela a été rappelé. Toutes les entreprises ne fautent pas, mais il en suffit d'une pour jeter le soupçon sur les autres. D'où ma proposition, très simple : ajouter « immédiate », à titre de garantie. Je ne le proposerai naturellement pas s'il était question d'informations rendues publiques.

Mme Patricia Schillinger. - De nombreuses entreprises transfrontalières font leurs courses en France : ne faudrait-il pas préciser la proposition n° 9 relative à la diversification des canaux de communication pour en tenir compte ?

M. Michel Forissier. - Les crises alimentaires nous conduisent souvent à envisager de légiférer. On se rend toutefois compte après examen que la part des incidents, rapportée au volume de produits distribués, est très faible - quoique toujours trop grande ! Que l'on améliore les procédures pour éviter les dysfonctionnements, soit. Mais je ferai observer, songeant aux travaux que nous menons simultanément sur la formation professionnelle, que les dysfonctionnements sont souvent liés à une insuffisance de la formation continue en lien avec les techniques et les technologies. La mise à niveau du personnel peut se révéler essentielle pour faire respecter à la lettre les nouveaux protocoles.

Jouons plutôt le pari de la confiance. Les entreprises ont des obligations de résultat. Multiplier les contrôles exercés dans les moindres détails par les autorités administratives augmenterait le coût de fonctionnement de l'État. Mettons l'accent sur le préventif, plus que sur le curatif.

M. Daniel Gremillet. - Le texte que nous examinons concerne non seulement Lactalis, mais l'ensemble des produits alimentaires ! Il faudra donc le décliner. Or le secteur laitier, avec celui de la viande bovine, est l'un des plus armés en matière d'analyse...

Il ne s'agit pas, avec la proposition n° 1, d'aller plus loin en matière d'autocontrôle qu'en matière de contrôle, mais d'aligner les procédures. Le temps nécessaire pour informer l'administration ne sera pas plus long ! En l'état, le texte est équilibré : ne décourageons pas l'autocontrôle...

Nous ne sommes pas en train de juger telle entreprise, mais d'apporter des réponses aux consommateurs et à la société. Consolidons les autocontrôles, y compris sur l'environnement, faute de quoi nous régresserons.

M. Alain Milon, président. - Le docteur Jomier a raison : qu'un prélèvement négatif suive un prélèvement positif n'invalide pas ce dernier pour autant... Sauf que la contre-analyse se ferait sur le même échantillon que la première analyse !

Mme Sophie Primas, présidente. - Pour répondre à Marc Daunis sur la première proposition, je propose de remplacer « ainsi que les éléments correctifs apportés » par « ainsi que les éléments correctifs envisagés ou apportés ».

Il en est ainsi décidé.

Mme Sophie Primas, présidente. - Monsieur Bourquin, la responsabilité pénale peut déjà être engagée : cela semble assez précis.

Monsieur Raison, notre document contient très peu de dispositions de nature législative. Les autorités sanitaires ne communiquent jamais sur le nombre de contrôles réalisés, ni sur le nombre de contrôles négatifs. La proposition n° 6 vise à mieux communiquer notamment sur la qualité des contrôles sanitaires.

Monsieur Gremillet, la question des produits étrangers vendus en France pourrait être abordée non dans les propositions mais dans le rapport que nous publierons.

Monsieur Gay, je regrette également que nous n'ayons pas entendu les laboratoires de contrôle. Ne suspendons pas pour autant la publication de nos propositions : nous pourrons toujours les auditionner ultérieurement. S'agissant des transfrontaliers, madame Schillinger, un dispositif existe déjà auprès des clients du distributeur ou du fabricant, informés par d'autres canaux.

Peu de propositions étant de nature législative, je propose que nous les présentions aux différents ministères concernés ; notre action pourrait se traduire, le cas échéant, par des modifications de réglementation ou de circulaires.

M. Marc Daunis. - Lorsque nous avions travaillé sur le projet de loi de simplification du droit de l'urbanisme, nous avions distingué les propositions à caractère législatif et les propositions de nature réglementaire. Nous pourrions faire de même, communiquer sur le caractère positif des adaptations normatives que nous préconisons et démontrer ainsi la capacité des parlementaires à corriger pragmatiquement les dysfonctionnements lorsqu'ils surviennent.

Mme Sophie Primas, présidente. -Je vous remercie.

La réunion est close à 12 heures.