Mercredi 24 avril 2013

- Présidence de Mme Marie-Christine Blandin, présidente -

Bilan du groupe d'études sur les pratiques sportives - Communication

La commission entend une communication M. Jean-Jacques Lozach sur le bilan du groupe d'études sur les pratiques sportives.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Mes chers collègues, il y a mille et une façons de s'impliquer dans le travail parlementaire. Certes, nous élaborons la loi mais nous nous consacrons aussi au contrôle avec les missions communes d'information et les commissions d'enquête, et aux études avec les groupes de travail, tels que le groupe sur les oeuvres d'art spoliées animé par Corinne Bouchoux, qui a obtenu quelques résultats concrets, et les groupes d'études, qui ont la particularité de pouvoir accueillir en leur sein des sénateurs appartenant à d'autres commissions, intéressés par le sujet traité. Il en est ainsi du groupe d'études consacré aux pratiques sportives présidé par notre collègue Jean-Jacques Lozach, à qui je laisse la parole pour qu'il nous présente le bilan de ce groupe.

M. Jean-Jacques Lozach, président du groupe d'études sur les pratiques sportives. - Le groupe d'études sur les pratiques sportives a tenu sa réunion constitutive le 1er février 2012. Le groupe d'études comprenait initialement 30 membres, il en compte aujourd'hui 36. Afin de respecter la règle d'une vice-présidence par groupe politique et l'équilibre entre les différents groupes, il a été décidé que le Bureau serait constitué de huit vice-présidents et cinq secrétaires.

Je note tout d'abord que nous avons modifié son intitulé afin de pouvoir prendre en compte l'ensemble des pratiques sportives et non seulement les sports reconnus comme tels par le code du sport. En effet, la marche quotidienne ou le jogging de la fin de semaine constituent des activités physiques qui peuvent jouer un rôle social ou sanitaire certain et que nous considérons comme partie intégrante du champ de compétence du groupe.

Le groupe d'études a vocation à suivre à la fois l'actualité des pratiques sportives mais aussi des problématiques de fond, notamment celles qui peuvent apparaître comme relevant de plusieurs commissions (exemple : le sport comme enjeu de santé publique, ou bien encore les effets des paris en ligne sur l'éthique sportive). En effet le groupe d'études compte 36 sénateurs, issus de 6 commissions différentes ; seule la commission des lois n'étant pas représentée.

Cette transversalité lui permet ainsi de traiter les sujets de manière originale et de ne pas trop empiéter sur les travaux de la commission.

Néanmoins, c'est aussi à travers les outils qu'il utilise que le groupe se différencie. Il s'était proposé, lors de sa réunion constitutive, de mettre différents moyens à disposition de ses membres : des auditions, des tables rondes ou des déplacements.

Force est cependant de constater que les auditions organisées par les commissions ou les groupes de travail qu'elles mettent en place constituent déjà une base de travail très riche. La pratique consistant à inviter les membres des groupes d'études quand ils sont concernés par le sujet paraît à cet égard une pratique à perpétuer, voire à renforcer.

Nous avons donc fait le choix de privilégier des visites de terrain, qui permettent la transmission plus aisée de l'information et une compréhension différente des sujets abordés.

En 2012, nous en avons effectué trois.

La première était le 15 mai 2012 au laboratoire national de dépistage du dopage de Chatenay-Malabry avec l'idée d'en apprendre davantage sur les nouvelles méthodes d'analyse de substances détectables et les modalités de mise en place du passeport biologique. Cette visite nous a sensibilisés à la lutte antidopage, au point que le Sénat a décidé cette année de consacrer une commission d'enquête à cette commission, dont j'ai l'honneur d'être le rapporteur. Je crois que c'est l'un des rôles des groupes d'études que de jouer un rôle d'alerte sur des enjeux de politique publique et d'information des sénateurs issus de toutes les commissions. J'irai même jusqu'à dire que les groupes d'études peuvent jouer un rôle d'influence de la commission de la culture auprès des autres commissions, afin que nos sujets et nos préoccupations soient pris en compte.

Le deuxième déplacement a été organisé à l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (INSEP) le 19 juin 2012, en perspective des Jeux olympiques de Londres. La commission de la culture s'était rendue à Londres où nous avions pu constater le bon avancement des travaux. Le groupe d'études a souhaité savoir si le sport français était prêt pour cette échéance. Nous avons eu à cet égard un double éclairage : du point de vue des installations, la France est sans aucun doute apte à fournir une préparation performante à ses sportifs de haut niveau. S'agissant de l'organisation même du sport de haut niveau, quelques réflexions restent pendantes : quel rôle les Creps doivent-ils jouer ? La liste de nos sportifs de haut niveau est-elle trop importante, c'est-à-dire éparpille-t-on trop l'argent public ? Enfin quelles doivent être les relations avec les fédérations qui organisent déjà des filières de très haut niveau, comme la natation ? Bref, ce déplacement a ouvert un champ d'étude très important pour nous.

Troisième déplacement et non le moindre, le groupe d'études a été constater sur place les performances des athlètes français en se rendant à Londres pendant les Jeux olympiques, par petits groupes. La sensation que nous avons tous eu a été très positive : l'organisation était très bonne, l'ambiance excellente (exemple : le Club France) démontrant, s'il le fallait, le potentiel du sport pour mobiliser les énergies et créer un sentiment d'unité.

Nous en avons tous tiré des leçons qui pourraient servir dans le cadre d'une future candidature française. Pour affiner ces sentiments, une audition de Denis Masseglia, président du Comité national olympique sportif français (CNOSF), a été organisé à la rentrée de septembre. Il a de nouveau insisté sur les modalités d'amélioration de la filière française de haut niveau.

Voilà le bilan du groupe d'études pour 2012, avec trois déplacements et une audition. S'agissant de 2013, l'actualité sportive sénatoriale est très intense avec la commission d'enquête parlementaire sur le dopage, le groupe de travail sur l'éthique, animé par notre collègue M. Bailly, qui devrait rendre ses conclusions à la fin du mois de juin et la mission commune sur les équipements avec la commission des finances. Le groupe d'études s'est positionné vis-à-vis de cette nouvelle donne. Il a participé aux « Entretiens de l'INSEP » sur le bilan des Jeux olympiques de Londres, auditionné les dirigeants de l'Union des clubs professionnels de football (UCPF) venus présenter le baromètre du foot professionnel, ou bien encore Jean-Philippe Acensi, comme président de l'Agence pour l'éducation par le sport.

Nous devrions prochainement rencontrer des représentants du comité français du sport international, présidé par Bernard Lapasset qui est censé prendre la direction des relations internationales du sport français, conjointement avec la ministre Valérie Fourneyron, ainsi que le président de la Fédération française de tennis, qui nous parlera des projets d'extension du site de Roland-Garros.

J'ai été ravi de pouvoir présenter le bilan de ce groupe d'études auquel je suis particulièrement attaché. Je vous remercie.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Merci monsieur le président.

Nous avons actuellement quatre autres groupes d'études avec le groupe consacré à l'éducation populaire présidé par M. Jacques-Bernard Magnier, le groupe consacré aux médias et aux nouvelles technologies présidé par Mme Catherine Morin-Desailly, le groupe consacré aux arts plastiques présidé par M. Pierre Laurent et le groupe consacré au patrimoine présidé par M. Philippe Nachbar.

Mes chers collègues, avez-vous des questions ?

Mme Dominique Gillot. - Dans quelle mesure le monde sportif s'est-il organisé et mobilisé pour répondre à la demande nouvelle qui naîtra, notamment pour les activités sportives, avec la mise en place des projets éducatifs territoriaux ?

M. Jean-Jacques Lozach. - Ce point précis n'a pas été abordé dans le cadre de nos travaux, mais je puis cependant vous indiquer que plus généralement, s'agissant de l'éducation populaire, le mouvement sportif a su répondre présent dans les conventions d'objectifs et de moyens. Ainsi, sur les 150 000 emplois d'avenir programmés 15 000 seront pourvus par les réseaux sportifs.

Mme Dominique Gillot. - S'il bénéficie de la subvention d'État, d'une subvention régionale, comme en Île-de-France, et d'une subvention municipale, un club sportif peut en effet créer un emploi d'avenir sans trop de difficultés.

M. Jean-Jacques Lozach. - On peut aussi envisager des rapprochements d'associations et de clubs sportifs en groupements d'employeurs. Cependant, les besoins des associations semblent à peu près satisfaits et les nouveaux emplois créent une concurrence qui pourrait engendrer quelques blocages. L'emploi dans le monde sportif est un sujet à part entière.

M. Jacques-Bernard Magner. - Je souhaitais évoquer le problème des normes auxquelles sont confrontées les collectivités territoriales devant bâtir ou simplement gérer des équipements sportifs. Ces normes, souvent imposés par les fédérations sportives internationales, par le truchement des fédérations nationales, sont de plus en plus nombreuses et ne contribuent pas au choc de simplification prôné par le Gouvernement.

M. Jean-Jacques Lozach. - L'une des cinq commissions du Conseil national du sport, qui sera mis en place courant mai, se consacrera à la rationalisation du sport et notamment à l'évaluation des normes relatives aux équipements sportifs.

M. Claude Domeizel. - On observe parfois des insuffisances dans le niveau de formation et de compétence de certains moniteurs de sport. Or pour certains sports, tels que la gymnastique, ces carences pourraient s'avérer préjudiciables à la santé même des pratiquants.

M. Jean-Jacques Lozach. - Les formations existent et nous avons tout un arsenal de brevets d'État. Cependant, les associations et les clubs n'ont pas toujours les moyens d'employer les personnes ayant la formation requise.

Par ailleurs, on ne peut que déplorer la lutte d'influence entre le mouvement olympique et l'éducation nationale, qui a eu pour effet un désengagement des professeurs d'EPS à l'égard des clubs et associations.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - La question soulevée par M. Domeizel se pose de façon encore plus aiguë lorsqu'elle touche à la pratique sportive de certaines populations spécifiques telles que les personnes asthmatiques, les personnes handicapées ou même les personnes âgées. Alors que des spécialisations existent, ces personnes n'ont le plus souvent affaire, notamment dans les maisons d'accueil pour les personnes âgées dépendantes (MAPAD), qu'à des kinésithérapeutes.

Présidence conjointe de Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture et de M. Philippe Marini, président de la commission des finances, puis de M. François Trucy, secrétaire de la commission des finances, et enfin, de M. Jean Germain, secrétaire de la commission des finances -

Bilan consolidé des sources de financement des universités - Examen du rapport d'information

Enfin la commission examine le rapport de Mme Dominique Gillot et M. Philippe Adnot, co-rapporteurs, sur le bilan consolidé des sources de financement des universités.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui nos collègues de la commission des finances pour examiner le rapport de nos deux rapporteurs, Mme Dominique Gillot et M. Philippe Adnot.

M. Philippe Marini, président. - Signes d'une coopération fructueuse entre nos deux commissions, je voudrais citer deux autres exemples récents de travaux de contrôle que nous menons ou avons menés en commun : les travaux conduits par Catherine Morin-Desailly et Claude Belot sur les comptes de France Télévisions et ceux de Dominique Bailly et Jean-Marc Todeschini, en cours, sur le financement public de la construction des grands équipements sportifs. Sur le sujet essentiel des sources de financement des universités, nous serons particulièrement attentifs aux enseignements tirés du rapport de nos deux collègues, Philippe Adnot, rapporteur spécial de la commission des finances, et Dominique Gillot, rapporteure pour avis des crédits de l'enseignement supérieur de la commission de la culture.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Merci monsieur le président, j'ajouterais l'audition commune que vous avez organisée concernant le Centre national du cinéma et de l'image animée, à laquelle les sénateurs de notre commission ont assisté. Nous sommes toujours friands de l'expertise de la commission des finances et nous attendons avec impatience, en particulier, les résultats du contrôle que vous avez commandé à la Cour des comptes sur les aides à la presse.

Mme Dominique Gillot, co-rapporteure. - Avant de vous présenter les résultats de nos travaux, je rappelle que nous avons, avec mon collègue, beaucoup appris nous-mêmes au travers de ce contrôle qui nous a permis de préciser certaines intuitions ou de répondre à des interrogations que nous avions soulevées dans de précédents rapports.

Le financement des universités est un thème auquel nos deux commissions sont habituées, et au sujet duquel elles ont joué un rôle moteur. Elles lui ont en effet consacré deux rapports d'information :

- l'un, en juin 2008, issu d'un groupe de travail conjoint, proposait les grandes lignes de ce qui est devenu le fameux système de répartition des moyens à l'activité et à la performance (SYMPA), utilisé pour répartir les crédits et les emplois entre les universités ;

- l'autre, en juillet 2009, de nos collègues Philippe Adnot et Jean-Léonce Dupont, faisait un premier bilan et proposait quelques adaptations, pour la plupart mises en oeuvre.

Nous avons débuté notre contrôle il y a un an. Face à la masse d'informations recueillie et aux réponses souvent partielles, parfois déconcertantes, au questionnaire budgétaire que nous avions adressé à chaque université, nos travaux ont connu une période d'hésitation sur l'orientation à donner à notre rapport.

Le sujet demeure plus que jamais d'actualité avec, d'une part, le projet de loi sur l'enseignement supérieur et la recherche que nous examinerons très prochainement et, d'autre part, la réforme annoncée du système de financement des universités, « SYMPA », prévue pour cette année, avec une application en 2014.

Aujourd'hui se posent deux questions essentielles :

- la première est de savoir si SYMPA a réellement permis de réduire les inégalités entre universités. On va voir que non. Nous serons amenés à faire des propositions et à ouvrir des pistes de réflexion pour que ces inégalités soient effectivement réduites ;

- la seconde question est de savoir comment, en période de forte contrainte budgétaire, développer les ressources propres des universités.

Je vais d'abord rappeler quelques ordres de grandeur. Les ressources des universités, de plus de 10 milliards d'euros, proviennent en quasi-totalité du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche. Les ressources propres (comme la rémunération des prestations ou les droits de scolarité) n'en représentent qu'environ qu'1 milliard.

La question du financement des universités est donc avant tout celle de la répartition des moyens consentis par l'État aux universités.

Sur les 12 milliards d'euros de ressources versées aux universités en 2012 par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche :

- 8 milliards d'euros correspondent à la masse salariale qui a été transférée aux universités lors du passage à l'autonomie ;

- 2 milliards d'euros sont répartis par SYMPA.

J'attire votre attention sur le fait que dans les cas des emplois transférés, SYMPA ne répartit aucune masse salariale. Ce qu'il répartit, ce sont seulement les plafonds d'emplois. La masse salariale a été négociée lors du passage des universités à l'autonomie, et est depuis actualisée chaque année.

M. Philippe Adnot, co-rapporteur. - Nous abordons une étape pas forcément très « sympathique » car nous allons décrire un système complexe qui n'a pas réellement été mis en oeuvre. Le système SYMPA ne concerne que 2 milliards d'euros. Quand on parle des dotations calculées par SYMPA, il faut en réalité distinguer deux choses :

- la « dotation théorique », qui est ce que l'université devrait « normalement » obtenir ;

- et sa dotation effectivement attribuée, qui est aussi calculée par SYMPA, mais après la fixation de divers « curseurs », qui conduisent en pratique à faire en sorte que la dotation attribuée demeure souvent très éloignée de la dotation théorique.

SYMPA gère, d'un côté, un dispositif « de droit commun » qui représente seulement 1,5 milliard d'euros et, de l'autre, d'autres enveloppes additionnelles :

- une « compensation pour sous-dotation d'emplois », qui est l'indemnité que perçoivent les universités ayant un plafond d'emplois inférieur au plafond théorique calculé par SYMPA. L'indemnité est de 25 000 euros par emploi manquant (soit évidemment beaucoup moins que le coût d'un emploi) ;

- une enveloppe destinée à financer l'équivalence entre travaux dirigés et travaux pratiques ;

- le « plan licence », qui a pour objet de favoriser la réussite en licence ;

- l'excédent d'initialisation, qui est le coût de la « garantie de non baisse » par rapport à 2008 des dotations des universités sur-dotées.

Notre ambition, au début de ce contrôle, était d'obtenir une photographie la plus exacte possible des moyens financiers réellement mis à disposition des universités. On a lancé une grande enquête à laquelle tous les établissements n'ont pas répondu et dont les données ont été souvent trop partielles, imprécises, mal agrégées voire, pour certaines, inexactes.

Nous vous présentons une diapositive démontrant qu'en moyenne, les universités ont un nombre d'étudiants par enseignant très différent selon le type auquel elles appartiennent, le taux d'encadrement étant sensiblement plus élevé pour les formations scientifiques.

Dans le cas des crédits, les modalités de répartition retenues pour l'enveloppe de droit commun conduisent à privilégier légèrement l'enseignement et la performance par rapport à la recherche et à l'activité, mais je rappelle que nous discutons de la distribution d'une enveloppe de seulement 2 milliards d'euros sur les 12 milliards d'euros de ressources totales perçues par les universités. Précisons qu'il s'agit d'une dotation globalisée, que l'université est libre de répartir comme elle l'entend entre ses différentes composantes.

Dans un second temps, chacune de ces enveloppes est répartie entre les 76 universités proportionnellement à la part de l'université concernée dans l'indicateur correspondant. Par exemple, dans le cas de l'enveloppe « activité niveau licence », l'indicateur retenu est le nombre d'étudiants de licence présents aux examens, pondéré en fonction de la classe de formations et majoré d'un coefficient pour prendre en compte les boursiers. Dans le cas de la dotation pour 2009, l'université de Lyon I représentait 2,39 % du nombre d'étudiants en licence ainsi mesuré. Les crédits devant lui être alloués au titre de l'enveloppe concernée étaient donc de 2,39 % de 353,5 millions d'euros (montant de l'enveloppe au niveau national), soit 8,4 millions d'euros.

Dans le cas des plafonds d'emplois, le mécanisme est exactement le même, en son principe, que pour les crédits. Dans un premier temps on répartit les emplois entre différentes enveloppes au niveau national puis on les répartit entre universités en fonction d'indicateurs. Je rappelle que nous parlons du volet « emplois », mais que le financement de ces emplois est « hors enveloppe » car il ne relève pas de SYMPA.

J'en viens maintenant à un bilan de SYMPA. Je vous réponds tout de suite que le modèle n'a pas permis de réduire les inégalités entre universités. Pour la raison suivante : dès lors que l'on a annoncé, un peu comme pour les collectivités territoriales, la garantie du maintien du budget existant et qu'en même temps, l'enveloppe globale stagne, il n'existe aucun moyen supplémentaire disponible pour procéder à des rattrapages. Dans le cas des emplois, un redéploiement d'une ampleur très limitée est intervenu en 2009, mais il n'a porté que sur 150 emplois.

Toutes les personnes que nous avons rencontrées nous ont rappelé qu'il n'est pas pertinent de parler d'universités « sur-dotées », en reconnaissant qu'il existait certes des situations plus « confortables » que d'autres. Mais vous comprendrez bien qu'à partir du moment où il n'y a pas de reprise sur des excédents, il n'existe pas de moyens pour effectuer une redistribution. La portée redistributive du modèle SYMPA est d'autant plus limitée qu'elle concerne la répartition de seulement deux milliards d'euros.

On constate également que les universités sous-dotées en crédits et sous-dotées en emplois tendent à être les mêmes. En clair, quand ça va déjà mal au plan des crédits, ça ne va pas mieux en emplois... L'université la moins dotée est à 60 % de son plafond d'emplois théoriques, quand la mieux dotée est à 140 %.

Mme Dominique Gillot, co-rapporteure. - Je rappelle que certaines des universités qui apparaissent, selon le graphique que nous vous avons présenté, les mieux dotées en emplois, sont aussi celles qui ont intégré un institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) comme composante, cette intégration ayant eu un effet non négligeable sur la progression des emplois au sein des universités.

M. Philippe Adnot, co-rapporteur. - Effectivement, tous les IUFM ont été intégrés aux universités mais toutes les universités n'ont pas un IUFM.

Pour que vous ayez à l'esprit des ordres de grandeur, nous avons estimé qu'un rattrapage complet exigerait le redéploiement de 5 000 emplois et de plus de 300 millions d'euros (y compris la masse salariale des emplois redéployés).

En 2013, le Gouvernement a décidé de créer 1 000 emplois dans l'enseignement supérieur. Ces emplois ont été répartis, en s'appuyant sur SYMPA mais sans l'appliquer strictement, entre les seules universités sous-dotées. Pour rappel, en 2009, 150 emplois avaient été redéployés mais depuis plus aucun.

Je rappelle que, quand on redéploie un emploi, on réduit l'écart entre universités sur-dotées et sous-dotées de deux emplois, alors que, si on se contente d'augmenter d'un emploi ceux des universités sous-dotées (sans réduire à due concurrence ceux des universités sur-dotées), on ne réduit les inégalités que d'un emploi. Autrement dit, pour supprimer les inégalités simplement en créant des emplois concentrés sur les universités sous-dotées, ce n'est pas 5 000 emplois qu'il faut créer (comme en cas de redéploiements), mais 10 000.

Nous allons dans quelques instants vous présenter un certain nombre de pistes de réflexion qui pourront susciter chez vous quelques réactions. Je précise que, de notre côté, nous n'avons pas non plus dégagé de consensus sur chacune des propositions.

Mme Dominique Gillot, co-rapporteure. - Les 1 000 emplois annoncés pour l'année 2013 ne sont pas forcément tous des emplois nouveaux, vous pourrez parfois entendre dans vos territoires qu'une partie de ces emplois a pu être affectée à des postes longtemps restés non provisionnés et laissés vacants.

Nous nous sommes également penchés sur les autres sources de financement des universités, en relevant l'importance croissante des crédits extrabudgétaires, y compris ceux provenant d'opérateurs de l'État, qui sont venus abonder le plan Campus, les investissements d'avenir, mais aussi un certain nombre de contrats non pérennes...

Nous avons quelques divergences avec mon collègue Philippe Adnot sur les pistes à emprunter pour réduire les inégalités.

M. Philippe Adnot, co-rapporteur. - Les conditions ne sont pas aujourd'hui réunies pour procéder à un rattrapage.

La première solution consiste à élargir l'enveloppe de SYMPA, en y réintroduisant au moins 90 % de la masse salariale. En considérant qu'un emploi coûte en moyenne 60 000 euros, le redéploiement des 5 000 emplois nécessaires au rattrapage représente un coût de 300 millions d'euros, à condition qu'il y ait bien le transfert d'un certain nombre d'emplois des universités les mieux dotées vers les universités les moins bien loties. Si nous maintenons les moyens existants de chaque université, ce seront 600 millions d'euros qui seront nécessaires.

Une des choses essentielles que je propose est d'inscrire les principales caractéristiques du modèle SYMPA dans la loi, afin qu'il ne soit plus contourné.

Il serait également souhaitable de reverser les 200 millions d'euros du plan licence et du financement de l'équivalence entre travaux dirigés et travaux pratiques dans l'enveloppe de droit commun, de prévoir un redéploiement annuel minimum, de laisser au pouvoir réglementaire le soin de déterminer les indicateurs et, sous réserve de la règle de redéploiement minimum, la progression minimale par université, et, enfin, d'améliorer la transparence par le biais d'un rapport annuel au Parlement indiquant les crédits théoriques et effectifs de chaque université.

La possibilité d'un redéploiement est subordonnée au caractère équitable des critères mis en oeuvre par le système SYMPA, ce qui suppose, entre autres, de mieux prendre en compte la recherche clinique, les implantations sur plusieurs sites, d'augmenter le nombre de classes de formations prises en compte par la pondération ou encore de tirer les conséquences de la disparition des notations des unités de recherche par l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (AERES).

Mme Dominique Gillot, co-rapporteure. - Les propositions de Philippe Adnot présentent une certaine efficacité du point vue financier et comptable mais, compte tenu de l'extrême sensibilité du milieu, pourraient courir le risque d'être mal accueillies en conduisant certaines universités, considérées par SYMPA comme très bien dotées, à se sentir injustement stigmatisées par la seule comparaison avec les moins bien servies par le système. L'intégration de la masse salariale dans le système SYMPA doit constituer, à terme, le meilleur moyen pour les universités d'exercer pleinement leur autonomie. Néanmoins, à l'heure actuelle, trop peu d'universités sont suffisamment armées dans la maîtrise des fonctions support pour exercer pleinement la responsabilité de gestion de la masse salariale. C'est pourquoi certaines propositions me semblent prématurées étant donné l'état d'avancement des universités dans leur degré de maîtrise de l'autonomie en pilotage et en gestion.

Nous avons également exploré d'autres possibilités de développement des ressources des universités, en particulier en ce qui concerne leurs ressources propres.

Les universités n'ont pas encore la culture de la comptabilité analytique, qui est pourtant une obligation légale, amplement déclinée dans les décrets. Elles disposent bien du logiciel SIFAC, mais elles ne sont que très peu à pouvoir établir un bilan consolidé de leurs recettes et de leurs dépenses et donc à pouvoir objectiver le coût de leurs activités. Je me suis longuement étendue sur cet enjeu dans mon rapport d'information avec notre collègue Ambroise Dupont sur le contrôle de la mise en oeuvre de la loi du 10 août 2007, dite « loi LRU » : seulement quatre établissements ont déployé la comptabilité analytique sur l'ensemble de leurs activités et quatre sont en cours de formation-action pour un déploiement prévu en juin 2013.

L'interopérabilité entre les systèmes d'information doit constituer un objectif prioritaire afin de garantir une vision consolidée des moyens de chaque composante et l'obligation réglementaire de transparence des moyens des unités mixtes de recherche doit être enfin appliquée. Il est également indispensable de mettre en place un référentiel d'informations comptables et financières commun aux universités et aux organismes afin de favoriser la circulation de l'information.

Il convient, en outre, de rationaliser le recours aux financements sur projet. Il s'agit de disposer d'une meilleure visibilité sur les projets soutenus par l'Agence nationale de la recherche (ANR), les différents partenaires associés et l'état de leurs engagements respectifs. Nous insistons sur la nécessité d'encourager et d'accompagner les projets de recherche prometteurs non sélectionnés par l'ANR, en les redirigeant en particulier vers les programmes européens ou les appels d'offre des collectivités territoriales.

L'objectif consiste à faire du financement sur projet un levier de progrès et de stimulation et non une charge de gestion a priori, en renforçant l'assistance technique en ingénierie de projet, en allégeant la charge administrative associée aux financements sur projet, en rationalisant la pratique du cofinancement et en généralisant la présentation des projets en coûts complets dans les contrats de recherche.

Les pistes à explorer concernant la diversification des sources de financement portent, en particulier, sur le développement des prestations de formation continue qui doivent être tarifées au coût réel, les recettes de mécénat et la levée de fonds au travers des fondations, l'agrément des universités comme organismes collecteurs de la taxe d'apprentissage ou encore la prise de participations dans des sociétés.

Mon collègue Philippe Adnot propose d'agir sur les droits de scolarité. En France, les droits de scolarité sont quatre fois plus faibles que dans les autres États européens. Porter les droits de scolarité à la moyenne européenne (soit 600 euros par étudiant) permettrait d'augmenter les ressources des universités de 900 millions d'euros. Je note que d'autres études montrent, pour leur part, que la différenciation des droits de scolarité permettrait de poursuivre une politique de bourses plus attractive et équilibrée. En ce qui me concerne, je réfléchis, dans un autre cadre, à une modulation des droits d'inscription pour les étudiants étrangers en fonction des conventions conclues avec les pays d'origine en vue d'améliorer la qualité de l'accueil et des services proposés à ces étudiants.

Nous avons intérêt à entrer dans ce débat dans une logique d'analyse rigoureuse et équilibrée, et sans dogmatisme, au risque de refermer rapidement un sujet potentiellement « détonant ».

M. Philippe Adnot, co-rapporteur. - Ma proposition sur les droits d'inscription est destinée à faire réagir. Si on n'entend pas remettre en cause ce qu'ont obtenu jusqu'ici les universités, c'est-à-dire en l'absence de redéploiement des dotations des universités mieux dotées vers les universités moins bien dotées, et compte tenu de la conjoncture actuelle qui ne permet pas au Gouvernement de disposer de marge de manoeuvre budgétaire, combien de temps encore faudra-t-il attendre pour espérer améliorer la situation ?

L'augmentation des droits d'inscription permettrait de dégager des moyens en faveur des établissements les moins bien dotés, sans en prendre aux mieux dotés. Je rappelle qu'à l'heure actuelle, les droits de scolarité en licence s'établissent à 180 euros en France. Lequel d'entre nous n'a pas inscrit un de ses enfants à une association sportive pour un montant bien supérieur ?

La faiblesse des droits de scolarité peut conduire à une certaine déresponsabilisation chez quelques étudiants qui cherchent, dans l'inscription à une université, un statut social plutôt qu'autre chose. Il me semble qu'on s'investit d'autant plus dans un projet qu'on y attache de la valeur. Si nous comparons nos universités avec leurs homologues européennes, nous constatons que la seule différence notable porte effectivement sur les droits d'inscription. Je doute de l'argument selon lequel l'augmentation des droits d'inscription porterait atteinte à notre attractivité universitaire, car je rappelle que de nombreux étudiants étrangers sont prêts à s'engager dans des études extrêmement coûteuses parce qu'ils privilégient avant tout la qualité et la valeur des diplômes offerts par certains de nos concurrents.

Naturellement, la contrepartie à cette augmentation devrait être une politique généreuse de bourses et de prêts.

Mme Dominique Gillot, co-rapporteure. - Pour conclure, j'insisterai, comme mon collègue, sur la nécessité de disposer, plus que jamais, d'une vision consolidée de l'ensemble des ressources disponibles des établissements d'enseignement supérieur. S'il ne fait pas de doute que le rattrapage des moyens consacrés par étudiant par an doit se poursuivre, nous devons connaître précisément chaque source de financement disponible et son dynamisme afin de pouvoir effectuer les ajustements et les rattrapages qui s'imposent dans des conditions d'équité.

Le dynamisme des ressources propres doit certes être encouragé, mais il ne constituera jamais la panacée pour des universités qui doivent assumer des missions de service public plus que jamais prioritaires (réussite en licence, formation tout au long de la vie, culture scientifique...) et accompagner l'effort de redressement de la nation en favorisant l'accès du plus grand nombre à une formation de qualité. La première des priorités demeure le rattrapage des universités sous-dotées dont les effectifs ont augmenté sans que leurs moyens récurrents aient été augmentés à due concurrence.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Nous voici accablés de chiffres et de déceptions sur le système de péréquation et de non consensus sur les pistes à suivre.

M. Jean-Léonce Dupont. - Nous partons d'un système très inégalitaire. Sous le système SAN REMO, l'inégalité était entretenue par deux critères de financement qui étaient le nombre d'étudiants inscrits le jour de la rentrée et le nombre de mètres carrés par étudiant. Notre ambition, avec Philippe Adnot, modérée, a été de diminuer ces inégalités.

Nous avons le choix entre deux systèmes radicaux : s'aligner sur les établissements les moins favorisés, ce qui est injouable, ou s'aligner sur les plus favorisés, ce qui n'est pas tenable dans le contexte budgétaire actuel. Il existe aussi une solution médiane en s'orientant vers des critères plus objectifs que ceux existants. On voit tout de suite des réactions défensives de la part de ceux qui sont les mieux dotés. On aspire à une démarche qualitative. Mais en réalité, avons-nous réellement la capacité de redistribuer de façon plus volontariste un certain nombre de moyens ?

Une seconde question se pose sur la volonté réelle de notre administration centrale de donner à nos universités la capacité de gérer leur autonomie. Il semble que seules quatre ou cinq universités aient la capacité de développer la comptabilité analytique. Il faut absolument faire émerger une ingénierie territoriale. Nous avons l'obligation de réussir en la matière.

Il reste un point que vous n'avez pas évoqué : la dévolution patrimoniale. C'est un levier puissant d'autonomie et une ressource formidable pour nombre d'universités. Respectons le degré d'envie des uns et des autres.

Enfin, j'évoquerai les droits d'inscription. Je pense qu'il faut adopter une approche pratique dans le contexte financier qui est le nôtre pour rééquilibrer les sources de financement. Nous n'avons pas d'autres solutions. Par contre, il faut affiner l'analyse des situations familiales et donc le système des bourses. C'est la contrepartie nécessaire et indispensable. Cela reste le seul moyen pour tenter de rééquilibrer un système qui est par nature déséquilibré.

Mme Corinne Bouchoux. - Ma remarque concerne les droits d'inscription qui constituent, pour de nombreuses universités, un sujet particulièrement sensible avec une charge émotionnelle forte. Je vous alerte sur ce risque. C'est un sujet ultra-sensible et politiquement clivant.

Ma question porte sur la participation des contribuables au financement des universités, qui n'est pas sue, ni comprise. Attention aux bonnes idées qui génèrent parfois des coûts financiers importants.

M. Jacques Legendre. - Je m'interroge sur la question de la gratuité pour les étudiants étrangers en France. La question de l'attractivité peut être perçue comme un moyen d'influence à l'extérieur. Au nom de la démocratisation de l'enseignement supérieur, ne serions-nous pas fondés à faire payer à prix coûtant ceux que nous recevons chez nous ? Certains étudiants étrangers ont tout à fait la capacité de payer leurs études. Parallèlement, notre capacité à attribuer des bourses est bien insuffisante. Or, nous avons le devoir de donner à nos jeunes les moyens d'accéder aux études supérieures dans les meilleures conditions, et je suis favorable à la possibilité de permettre aux universités de facturer les études au juste prix.

M. Claude Domeizel. - J'ai retenu l'aspect des droits d'inscription : on parle de 900 millions d'euros supplémentaires. Je partage l'avis de certains collègues pour reconnaître qu'il s'agit là d'un sujet explosif. Il y a des précautions à prendre. Cette question que vous abordez dans le rapport ne doit pas être taboue mais doit être assortie d'autres propositions. Il faut envisager une réflexion sur les bourses et sur la péréquation entre les universités.

M. Michel Berson. - Trois éléments m'interpellent :

- dans la présentation par les rapporteurs des différents modes de financement, a peu été évoqué le rôle des collectivités territoriales, si ce n'est une somme de 300 millions d'euros qui me semble, du reste, faible quand on sait que nombre de régions, de départements, de communautés urbaines et d'agglomérations participent fortement au financement de certaines universités. Il serait utile de connaître, par académie et par université, les financements accordés par les collectivités qui, dans certains cas quand ils sont rapportés à une université, sont sans doute substantiels. Les collectivités territoriales, en presque dix ans, ont multiplié par deux leur effort de financement en faveur de la recherche ;

- il est tentant d'envisager d'augmenter les droits d'inscription afin d'en tirer des ressources supplémentaires de 900 millions d'euros, somme qui correspond à peu près au besoin de financement de l'enseignement supérieur et de la recherche, estimé à 1 milliard d'euros (deux fois 500 millions d'euros). Toutefois, je doute qu'il faille examiner le problème sous le seul angle des ressources supplémentaires. Il ne semble certes pas scandaleux d'augmenter des droits de scolarité considérés comme très bas pour les rapprocher de la moyenne européenne, mais cela suppose en contrepartie une forte augmentation des moyens budgétaires en faveur des bourses, voire la mise en place d'une allocation d'autonomie. Une fois le financement de ces garanties sociales assuré, il serait possible de réfléchir à une augmentation des droits d'entrée. Pour autant, je ne suis pas certain que cela permettrait aux universités de dégager des ressources additionnelles très importantes dès lors que l'État serait contraint, dans le même temps, à effectuer des redéploiements budgétaires ;

- en matière de recherche de nouvelles sources de financement, je plaide, pour ma part, depuis un an, pour l'utilisation d'une partie du crédit impôt recherche (CIR). D'un montant de 2,8 milliards d'euros en 2008, le CIR est passé à cinq milliards d'euros en 2011-2012 et devrait atteindre six milliards d'euros en 2013-2014. Je suis très favorable au CIR, j'ai eu l'occasion de répondre à un certain nombre des critiques infondées à son sujet. Mais l'augmentation significative de son enveloppe en l'espace de quatre à cinq ans devrait nous conduire à plafonner le CIR aux alentours de cinq milliards d'euros, afin de disposer de ressources de l'ordre d'un milliard d'euros, à la condition que celles-ci ne soient pas captées par le Trésor public mais soient affectées à l'enseignement supérieur.

M. Michel Le Scouarnec. - Le sujet des droits d'inscription est très sensible. Il ne faut pas perdre de vue la nécessité de poursuivre la démocratisation de l'université. On peut concevoir une réflexion sur cette question en même temps que sur celle des bourses, mais dans le cadre d'une indispensable concertation avec les organisations syndicales, étudiantes et les représentants des familles. Les idées avancées par M. Legendre concernant les étudiants étrangers peuvent également faire l'objet d'une réflexion approfondie.

Il n'en demeure pas moins que l'État ne pourra pas faire l'économie d'une augmentation des moyens en faveur des universités, prioritairement en faveur de celles qui sont les moins bien loties. On ne peut pas effectivement parler d'universités « sur-dotées », et il ne doit pas s'agir de les déshabiller.

Compte tenu de la situation de plus en plus précaire de nombre de familles, l'élaboration d'une politique efficace de bourses apparaît indispensable afin de garantir la démocratisation de l'accès à l'enseignement supérieur.

M. François Trucy, vice-président. - J'adresse aux rapporteurs mes très sincères félicitations pour un travail nourri qui s'inscrit dans la lignée d'autres rapports communs qui ont associé membres de la majorité et de l'opposition, issus de plusieurs commissions. Une petite question : qu'est-ce qui justifie le rééquilibrage entre la licence et le master ?

Par ailleurs, je partage l'irritation de Jean-Léonce Dupont sur le fait que seulement quatre universités ont jusqu'ici mis en place la comptabilité analytique, nous devons nous montrer fermes sur ce sujet.

Mme Dominique Gillot, co-rapporteure. - Le système tel qu'il existe aujourd'hui a-t-il une réelle capacité à redistribuer ? Nous voyons bien que les blocages sont nombreux. Il nous faut avancer prudemment, pour que nos propositions soient acceptées, sans négliger l'importance de la volonté politique qui doit les accompagner. Sur les droits d'inscription, l'analyse de Philippe Adnot s'appuie sur des études comparatives très prudentes et ne fait des projections qu'au conditionnel. Moi-même je reste très prudente sur les possibilités d'ouverture en ce qui concerne la modulation des droits d'inscription pour les étudiants étrangers en fonction de l'état des relations conventionnelles avec les pays partenaires. Force est de constater que dès que l'on aborde ce sujet, de nombreuses craintes s'expriment sur une protestation vive de la part des étudiants.

À partir du moment où l'on convient qu'une meilleure connaissance des coûts de fonctionnement et des recettes appelées à les couvrir est incontournable, il ne doit pas y avoir de sujet tabou, il faut être capable de tout examiner. À l'évidence, si les pistes de réflexion du rapport sont mal interprétées et que certaines phrases sont sorties de leur contexte comme un chiffon rouge sous le nez des étudiants, il y a fort à craindre que les esprits vont s'échauffer. Notre rôle de parlementaires est de réfléchir, en nous affranchissant des idées préconçues.

L'administration n'a pas freiné le développement des fonctions support en matière de pilotage budgétaire et financier, mais elle ne l'a pas pour autant soutenu ni accompagné. D'où le désarroi de certaines universités face à la complexité des responsabilités qui leur étaient confiées. Plusieurs ont dû acquérir seules ces compétences techniques, en l'absence d'outils communs opérationnels développés par l'Agence de mutualisation des universités et des établissements d'enseignement supérieur (AMUE).

Pour répondre à notre collègue Jean-Léonce Dupont, la dévolution du patrimoine peut effectivement constituer un levier puissant, notamment en termes d'économies dans la rationalisation des surfaces utilisées. Mais peu d'universités sont aujourd'hui capables de gérer du foncier. Il convient, en premier lieu, de renforcer en leur sein les fonctions support de gestion immobilière.

M. Philippe Adnot, co-rapporteur. - La dévolution du patrimoine est possible si elle ne concerne qu'un nombre limité d'universités. Si toutes le demandaient, je ne vois pas comment l'État pourrait rassembler toutes les dotations pour amortissement nécessaires. Or, je rappelle que cette dotation avait été calculée par rapport à ce que l'État consentait chaque année pour l'entretien des bâtiments des universités, ce qui était déjà considéré comme très insuffisant.

Aujourd'hui, les collectivités territoriales interviennent en grande partie dans l'immobilier universitaire, beaucoup plus que dans leur fonctionnement. Je préside une collectivité qui est sans doute parmi les seules à attribuer une dotation de fonctionnement non affectée à l'université, car en général les collectivités territoriales consentent à un soutien financier sur une opération bien précise : construire un laboratoire, prendre en charge un doctorat... À travers les contrats de plan, les collectivités territoriales ont beaucoup investi dans l'immobilier. À qui revient-il, dans ces conditions, de transférer aux universités les dotations pour amortissement au titre des bâtiments construits ?

Les moyens pour la licence ne sont pas les mêmes que ceux mis à disposition du master pour la raison suivante : on ne se situe pas sur le même type d'enseignement. En même temps, si les moyens sont moins importants pour le niveau qui nécessite le plus d'encadrement, il serait utile de réfléchir à un rééquilibrage entre les niveaux de formation.

J'ai noté que vous étiez assez nombreux à être favorables à une réflexion sur l'évolution des droits d'inscription pour les étudiants étrangers. À mon sens, peu de gens ont même conscience que les frais d'inscription à l'université en France sont aussi faibles. Les droits d'inscription au Royaume-Uni atteignent, je vous le rappelle, 10 000 euros.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Je relève l'unanimité exprimée par nos deux commissions sur la nécessité de généraliser la comptabilité analytique et de développer des outils de gestion communs. En revanche, aux rapporteurs de trouver les mots justes sur les sujets et les propositions qui n'ont pas fait l'objet d'un consensus.

Mes chers collègues, autorisez-vous la publication du rapport qui vient de vous être présenté ?

À l'unanimité, il est décidé d'autoriser la publication du rapport.