Mardi 22 novembre 2011

- Présidence de Mme Marie-Christine Blandin, présidente -

Loi de finances pour 2012 - Mission Recherche et enseignement supérieur - Examen des rapports pour avis

La commission examine les rapports pour avis de M. Jean-Pierre Plancade sur les crédits « Recherche » et de Mme Dominique Gillot sur les crédits « Enseignement supérieur » du projet de loi de finances pour 2012.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Dans le cadre de l'examen des articles de la première partie, vous m'avez confié le soin de soutenir plusieurs amendements.

Le premier institue une taxation sur la revente des chaînes de télévision, pour éviter les dérives spéculatives. Il a été adopté, sur avis favorable de la commission des finances.

Le deuxième porte sur la redevance télévision pour les résidences secondaires. J'ai vécu la solitude éprouvée par nos anciens collègues Louis de Broissia et Jack Ralite, qui ferraillaient chaque année sur ce sujet, en vain : l'amendement a été rejeté.

Le troisième tendait à réduire la TVA sur la presse en ligne, taxée actuellement à 19,6 %, contre 2,1 % pour la presse « papier ». Cet amendement a été adopté.

Ces trois amendements ont été présentés et défendus en séance par notre collègue David Assouline.

Enfin, j'ai soutenu un amendement de M. Plancade, tendant à proroger le statut de jeune entreprise innovante, particulièrement utile pour les petites entreprises de jeux vidéo ou d'effets spéciaux. Il a été adopté.

Je tenais à vous tenir au courant de ces votes de la nuit dernière, bien sûr sous réserve du vote final et de la commission mixte paritaire !

M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis des crédits de la recherche. - Je me réjouis de l'adoption de mon amendement, qui s'était l'an dernier heurté à un refus sévère de la commission des finances et je tiens à vous remercier de l'avoir présenté en séance publique.

Le volet « recherche» de la mission comporte ses ombres et ses lumières.

A périmètre constant, les crédits de paiement de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » augmenteront en 2012 de 0,96 % par rapport à cette année. Cette évolution recouvre une baisse de 0,79 % des crédits de la recherche (qui représentent environ les deux tiers des crédits) et une hausse de 2,17 % des crédits destinés à l'enseignement supérieur. Les autorisations d'engagement de la mission enregistrent une hausse de 0,4 %. Les crédits diminuent donc en euros constants.

Des économies de fonctionnement (à hauteur de 23 millions d'euros) sont demandées aux organismes de recherche, qui subissent aussi une reprise des crédits reçus au titre du plan de relance 2009-2010 (pour 18,2 millions d'euros).

La dotation de certains organismes baisse, par exemple de 0,5 % pour l'institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA) et de 0,9 % pour Universcience. Comme l'an dernier, je suis préoccupé par la nouvelle baisse des crédits alloués à l'institut français du pétrole (IFP)-Énergies nouvelles, dont la dotation diminue de 40 % en 10 ans. Je propose d'interroger le ministre sur ce point car il faut assurer un équilibre entre les subventions récurrentes aux organismes et les ressources supplémentaires qu'ils peuvent obtenir sur projet après des agences de moyens.

Je suis également préoccupé par la baisse de 1,6 % des crédits d'intervention de l'Agence nationale de la recherche (ANR). Le fait qu'elle soit le principal opérateur des appels à projet dans le cadre du programme des investissements d'avenir ne justifie pas que les moyens consacrés à ses propres appels à projets soient diminués.

Grâce aux agences de moyens, telle l'ANR, l'écosystème de la recherche a été puissamment stimulé. Les projets scientifiques se multiplient et si l'on veut continuer à financer l'excellence, il faudra conforter ces moyens dans le temps. Il faut que l'ANR dispose de crédits suffisants pour conserver un taux de sélection des projets de 25 % à 30 %, alors que l'on est tombé aujourd'hui en-dessous de 20 %. Je regrette aussi la nouvelle diminution des autorisations d'engagement de l'ANR, de 771,9 millions en 2011 (827,8 millions d'euros en 2010) à 759,8 millions en 2012, au risque de décourager des équipes d'excellence. Après une montée en charge assez lente, l'agence tourne à plein régime, mais souffre d'un effet « ciseaux » : elle doit examiner de plus en plus de projets, sans disposer de ressources supplémentaires.

Outre les subventions récurrentes, les organismes de recherche bénéficient de crédits complémentaires importants au titre du programme des investissements d'avenir (PIA), destinés aux investissements qui ne pourraient être réalisés sans une aide publique, à hauteur de 21,9 milliards d'euros.

15 à 20 milliards d'euros auront été engagés à ce titre fin 2011. 3 milliards d'euros devraient être décaissés en 2012, et entre 3 et 4 milliards par an entre 2013 et 2015. Le comité de surveillance a cependant mis en garde contre les décalages de calendrier. En tant que principal opérateur, l'ANR doit faire face à un surcroît de travail considérable, mais elle n'a pu recruter que 30 personnes pour y faire face, auxquelles se joindront prochainement 12 autres. Cela me paraît peu... Je m'inquiète de sa capacité à assumer pleinement ses missions, compte tenu de la grande complexité de ces projets multi-partenariaux, dans des délais compatibles avec les besoins de notre pays.

Le principe de sélection du PIA ne retient que le critère d'excellence et ne préjuge d'aucune thématique a priori. Ce système a permis de faire émerger des domaines novateurs. Mais ne risque-t-il pas de manquer les objectifs stratégiques prioritaires, voire de créer des dissonances avec les politiques nationales ? Je propose d'interroger le ministre, car il est nécessaire de coordonner au mieux le programme des investissements d'avenir et la stratégie nationale de recherche et d'innovation.

Je relève que notre commission des finances a évalué les moyens nouveaux réellement consacrés à l'enseignement supérieur et à la recherche de 2007 à 2012, à 5,6 milliards d'euros et non à 9 milliards comme indiqué récemment par le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Mais tout n'est pas sombre : après les ombres, j'évoque les lumières.

La hausse des moyens budgétaires peut paraître limitée, mais dans le contexte de crise actuelle, ce secteur apparaît préservé par rapport à d'autres. Les dotations de certains organismes s'accroissent sensiblement : celles du commissariat à l'énergie atomique (CEA) de 2,7 %, du centre national de la recherche scientifique (CNRS) de 0,5 %, de l'institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) de 7,5 %, du centre national d'études spatiales (CNES) de 1 %. Les crédits destinés aux opérations relevant des très grandes infrastructures de recherche augmentent de 19,6 millions d'euros.

Les emplois sont également préservés : depuis 2006, les établissements d'enseignement supérieur et de recherche sont exclus du non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux. Ils peuvent créer des emplois hors plafond d'emplois de la mission, à condition de les rémunérer sur leurs ressources propres. Cela explique que le plafond global d'emplois de la mission augmente de 448 équivalents temps plein (ETP).

Comme les années précédentes, le taux de mise en réserve des crédits des organismes est dérogatoire au taux de droit commun, puisqu'il est divisé par deux.

Un équilibre doit être trouvé entre subventions récurrentes aux organismes de recherche et financements sur projets. Ces derniers concernent cependant à hauteur de 30 % des projets dits « blancs », qui permettent de soutenir la recherche fondamentale, et une partie des sommes sont censées couvrir une partie des charges structurelles des établissements. Mais il serait souhaitable que le périmètre des dépenses prises en compte par l'ANR soit évalué en fonction des coûts complets assumés par les organismes de recherche. Nous en prenons le chemin, le préciput étant porté de 11 % à 20 % dès lors que les projets sont financés en coûts complets. C'est fondamental, car cela permet de limiter le risque d'une répartition inégale des moyens entre équipes d'un même laboratoire.

Il faut relativiser la part de la recherche sur projet dans notre pays : en 2010, elle était estimée à seulement 11 % du budget des organismes publics, contre 60 % aux États-Unis et de 25 % à 35 % pour le Royaume-Uni, l'Allemagne ou la Suède.

Au-delà du renforcement des moyens depuis 2006, les professionnels reconnaissent que la restructuration majeure du paysage institutionnel de la recherche était indispensable, même s'il est devenu très complexe. J'évoque dans mon rapport écrit les grandes améliorations du pilotage stratégique de la recherche que permettent les « Alliances » et les instituts thématiques du CNRS et de l'INSERM, qui permettent de clarifier le rôle des acteurs.

Le soutien de la recherche privée est essentiel car il s'agit d'un « maillon faible » dans notre pays. La réforme du crédit d'impôt recherche (CIR) en 2008 a permis sa montée en puissance. Le coût du dispositif pour 2012 est évalué à 2,3 milliards d'euros, en hausse de 1,1 % par rapport à 2011.

Un rapport de l'inspection générale des finances d'août 2011 a conféré à cette mesure le score maximal de 3. Elle pourrait entraîner d'ici à 15 ans une hausse du PIB de 0,3 point. Il estime nécessaire de conduire une étude économétrique en 2013, lorsque l'on disposera du recul nécessaire sur la période 2008-2010 ; d'ici là, il préconise la stabilité du dispositif.

Ce crédit d'impôt devra être davantage ciblé sur les PME et les entreprises de taille intermédiaire.

Il ne suffit pas de se satisfaire d'un pourcentage de bénéficiaires, quel que soit le montant du chèque, au regard de l'écart entre ce que perçoit une PME et une grande entreprise disposant de son propre service de recherche. L'amendement qui a été adopté, grâce à Mme Blandin, sur les jeunes entreprises innovantes, a supprimé l'article 175 de la loi de finances pour 2011 qui avait - contre l'avis de notre commission - fortement diminué le soutien public en leur faveur.

Je vous renvoie à mon rapport écrit sur le défi majeur du renforcement de la valorisation et de la diffusion de la culture scientifique et technique, chère à notre commission.

Le programme 186 « Recherche culturelle et culture scientifique » enregistre une baisse de 1,48 % des autorisations d'engagement et de 0,75 % des crédits de paiement. Si les crédits de recherche stagnent, ceux alloués à Universcience diminueront. Près de la moitié de cette baisse s'explique par le transfert d'un poste d'Universcience vers l'université Paris Est-Créteil, qui donne lieu à un transfert interne à la mission. L'unification interne d'Universcience étant achevée, des économies d'échelle sur le fonctionnement des deux établissements devraient être réalisées.

La prise de conscience de la nécessité de mieux coordonner et de mieux diffuser les savoirs s'est traduite en 2011 par des changements structurels importants, avec l'hybridation entre le Palais de la découverte et la Cité des sciences, favorisant les synergies entre la recherche d'une part et la valorisation et la diffusion d'autre part.

Universcience, quatrième établissement culturel le plus visité de France, chef de file de cette nouvelle gouvernance, a pour mission de coordonner le réseau national des acteurs de la culture scientifique. L'enjeu pour 2012 consiste à consolider cette structure fédérale et à la décliner, grâce à un réseau de plateformes territoriales, en lien étroit avec les collectivités. Ces plateformes constitueront à terme une quinzaine de pôles scientifiques d'excellence, construits à partir de centres de culture scientifique, technique et industrielle innovants, capables de fédérer progressivement les acteurs de leur territoire chers à notre coeur.

Universcience devra prendre en compte les inquiétudes et attentes de ces plateformes, en vue approfondir la réflexion sur leur financement, leurs missions et l'échelle des regroupements.

Le risque d'une régression scientifique existe et les actions en faveur de l'information des jeunes doivent être confortées. Ce travail de fond doit irriguer nos territoires et ce travail en réseau devrait y contribuer.

Notre pays n'a jamais autant investi dans sa recherche, en ayant le courage d'apporter des réformes de structures. Celles-ci sont dans l'ensemble saluées par les professionnels. Les critiques portent davantage sur certaines modalités des réformes, bien sûr perfectibles, que sur leurs principes mêmes.

Bien sûr, le budget 2012 s'inscrit dans un contexte de crise que nous ne pouvons nier. C'est faire preuve de responsabilité que d'en tenir compte. Compte tenu de cette conjoncture, ce budget m'apparaît honorablement acceptable. C'est pourquoi, je vous propose de donner un avis favorable aux crédits de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » pour 2012.

Mme Sylvie Goy-Chavent. - Nous sommes aujourd'hui à un moment stratégique, où des choix s'imposent pour envisager un nouveau modèle énergétique. Il est indispensable de proposer au gouvernement d'anticiper cette nouvelle révolution industrielle et d'entamer une réflexion, pour trouver des crédits destinés à la recherche sur les énergies renouvelables. Il serait dommage que des chercheurs de ce domaine de pointe soient tentés de rejoindre des bras plus accueillants que les nôtres, dans d'autres pays.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Je serai plus nuancée que notre rapporteur sur l'avis à porter sur ce projet de budget, en considérant la régression des autorisations d'engagement et des crédits de paiement. Vous soulignez les bienfaits du CIR, qui s'analyse pourtant comme une mobilisation de fonds publics en faveur de la recherche privée, au moment où nous éprouvons un déficit d'engagement et de relance de notre recherche publique.

Comptez-vous interroger le Gouvernement sur l'évolution des emplois précaires dans l'enseignement supérieur et la recherche ? C'est une question préoccupante. Le ministre a beau jeu d'évoquer la permanence des missions : elle est très difficile à prouver, et les chercheurs se voient confier de plus en plus de tâches ponctuelles.

M. Jean Boyer. - Ces crédits sont déterminants pour l'évolution de notre économie et de notre société. Pour rester maillot jaune, il faut être en avance sur les autres. Les pays en voie de développement, qui attiraient il y a quelques années encore notre sympathie, notre solidarité, sont devenus aujourd'hui nos plus redoutables concurrents. Le budget de l'innovation et de la recherche doit nous permettre de rester en tête !

La recherche, c'est avant tout un état d'esprit. Il y a quelques années, j'ai exercé des responsabilités à la tête d'une chambre d'agriculture. Dans le contexte actuel, il faut une locomotive. Il y a les crédits, et il y a l'imagination. Si l'on veut que la France garde un peu d'avance, il faut innover. Cet état d'esprit doit se quantifier. Mme Goy-Chavent a évoqué le photovoltaïque. Je suis un élu de la France d'en bas, de la Haute-Loire, l'un des départements les plus ensoleillés de France ; c'est notre richesse. Le photovoltaïque a levé chez nous une immense espérance, un engouement peut-être trop fort, mais le fait qu'on ait changé les règles en cours de route, alors que se développaient des expériences d'énergie solaire, a empêché l'achèvement des projets en interrompant ces expériences. J'ai reçu des dizaines de lettres sur le sujet : ce sont autant de drames personnels. Il faut permettre à une véritable filière de se développer autour de cette ressource illimitée : le soleil ! Cela commence par la recherche, qu'il faut pouvoir mettre en route, réaliser, quantifier ! (Applaudissements)

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Quelle fougue ! Il est vrai qu'il y a des dynamiques engagées qui ont été stoppées net, comme foudroyées. Votre intervention prouve que les sénateurs sont des hommes libres.

J'ai rencontré des Réunionnais qui avaient engagé une filière d'excellence dans ce domaine : leur engagement a débouché sur un dépôt de bilan. Nous avons aussi pu constater les dégâts qu'a entraînés l'arrêt des recherches, en Bretagne par exemple.

Mme Colette Mélot. - Je félicite M. Plancade pour son excellent rapport. J'apprécie que sa conclusion prenne en compte la crise que nous vivons et les gros efforts accomplis en faveur de la recherche.

Il importe de souligner l'impact du CIR, notamment sur l'emploi : en Seine-et-Marne, 204 entreprises ont déclaré des dépenses de recherche et développement au titre de ce dispositif, ce qui est significatif. Il faut continuer dans ce sens. Le groupe UMP votera en faveur de ce budget.

Mme Maryvonne Blondin. - Au contraire, je rappelle que la mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances avait émis de très fortes réserves sur l'efficacité du CIR et mis en évidence des effets d'aubaine et des pratiques d'optimisation, voire d'évitement fiscal. Il importe que ce dispositif soit revu.

A périmètre constant, le budget de la recherche diminue, par rapport à l'an dernier, de 0,3 %. Certes, il avait diminué jusqu'en 2007, puis un peu remonté, mais il baisse à nouveau.

Selon l'OCDE, le premier critère pour le lieu d'implantation d'un centre de recherche est la présence d'un personnel qualifié en recherche et développement. Or en France, le nombre de doctorants a baissé de 8 % jusqu'en 2005 et ensuite le nombre d'inscriptions en licence a baissé. Cette évolution est très préoccupante. En 2009, 450 emplois ont été supprimés. Dans quelques années, 50 % des chercheurs seront à la retraite. Il faut trouver les moyens de développer l'accès aux jeunes qui veulent s'investir dans la recherche et ne pas les laisser fuir, comme cela a été dit, vers d'autres pays plus attractifs. Il faut donc être particulièrement vigilant sur les crédits de cette mission.

M. Jacques Chiron. - En dix ans, la France est passée de la sixième à la dix-huitième place au monde pour l'innovation : nous en voyons aujourd'hui les résultats. Le CIR ? C'est avant tout une niche fiscale : tous les rapports convergent. Au lieu de bénéficier aux PME-PMI, il profite surtout aux grands groupes ; les mesures prises en 2008 ont amplifié cette évolution, qui doit être corrigée. L'exemple de PSA montre qu'il faut encadrer davantage ce dispositif.

M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis des crédits de la recherche. - Mon rapport mentionne les problèmes que vous avez évoqués, notamment la baisse des crédits de 0,3 % et sur le CIR. Nous sommes en harmonie sur ce sujet, que nous avons abordé ici à plusieurs reprises.

Le risque que fait peser la précarité est réel. Mais dans la vie, tout n'est pas blanc ou noir. Ainsi l'INSERM revendique le recours aux contrats à durée déterminée, pour lui permettre de recruter des chercheurs de très haut niveau qu'il ne pourrait attirer avec les traitements de la fonction publique. Il faut donc maintenir l'équilibre, ne pas empêcher l'embauche de personnel de très haut niveau et tout faire pour maintenir et créer des emplois. Je rappelle que 448 ETP ont été créés l'an dernier. Il faut donc défendre le concept, mais sans trancher à la Robespierre !

Le rapport entre recherche publique et recherche privée découle de la stratégie de Lisbonne. Nous sommes dans la moyenne européenne pour la recherche publique, mais nous étions en retard pour la recherche privée, d'où le CIR. M. le ministre m'a répondu en m'indiquant le pourcentage de PME et de grandes entreprises parmi les bénéficiaires, mais pas le montant du chèque reçu. Je reste vigilant, mais, dans le contexte actuel, ce budget préserve l'essentiel.

Malgré mes inquiétudes, qui figurent dans mon rapport écrit, ce budget prouve la volonté de faire un effort pour la recherche. Je suis l'un des rares ici à ne pas être universitaire ; quand la situation est trop compliquée, j'en reviens aux choses simples : il faut approuver ce qui va dans le bon sens. Dans l'ensemble du budget de l'État, c'est le seul que je voterai, fût-ce avec réserve, car nous ne pouvons dire non à des évolutions positives.

Mme Colette Mélot. - Très bien !

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Quel que soit le vote sur le budget, je demande que figure au rapport la préoccupation exprimée par M. Boyer et Mme Goy-Chavent : il ne faut pas enrayer les dynamiques engagées en faveur de la recherche-développement, ce qui serait nocif pour l'emploi dans un secteur exemplaire, comme l'est le photovoltaïque. Je souhaiterais aussi que nous sachions la réalité de ce qui versé au titre des programmes des investissements d'avenir (PIA) pour la recherche. M. Legendre a interpellé M. Wauquiez sur les initiatives d'excellence (Idex) sur le territoire lillois ; j'ai eu connaissance de la remarque désabusée d'un chercheur de Montpellier : pour lui, les quelques milliards annoncés se réduiront à quelques centaines de milliers d'euros sur le terrain, tout au plus ! Notre commission doit donner le « la » sur ces sujets.

Sur le contrôle et les conditions d'attribution des CIR, il faut distinguer entre la question de la pertinence de cette niche fiscale et la question de la fraude : certaines sociétés embauchent de vrais-faux thésards pour bénéficier d'une opportunité fiscale. Là aussi, nous devons être vigilants et contrôler l'usage de l'argent public.

Nous devons nous transformer en inspecteurs d'investigation. Lors d'un petit déjeuner avec les responsables de l'INSERM, nous avons appris, avec Mme Gillot, que le budget de l'organisme n'a augmenté que parce qu'il intégrait celui de l'Agence nationale de recherche sur le sida (ANRS) et prenait en charge le plan national sur le cancer ! Nos rapports sont là pour révéler la vérité.

M. André Gattolin. - Le dispositif des conventions de formation par la recherche (CIFRE) est un outil important pour enrayer la baisse du nombre de doctorants et encourager le développement des thèses. Ces conventions ont-elles progressé ?

Je tenais à souligner que la façon dont le ministère applique le LMD a des résultats particulièrement néfastes. Quand des personnes engagées dans la vie professionnelle veulent effectuer un travail de recherche, elles ont le plus grand mal à obtenir les dérogations nécessaires. J'en ai fait l'expérience. A 50 ans, les contraintes professionnelles ne sont pas les mêmes que celles des jeunes thésards. Si le ministère ne veut pas se priver des professionnels expérimentés, il ne faut pas que les règles soient appliquées de façon trop stricte et arbitraire.

M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis pour la recherche. - D'ici le 1er décembre, je serai en mesure de vous donner des chiffres précis.

M. Jacques Legendre. - Je me réjouis des propos mesurés du rapporteur. Il a raison : il est de sa mission même de se prononcer sur le budget sans a priori. Oui, un rapport doit creuser et aller au fond des choses.

J'ai interrogé le ministre sur les Idex et les critères. C'est important, à l'heure où les sommes ne sont pas encore mises en place et où les décisions viennent d'être prises. Il est naturel, pour toute université, pour toute région, de savoir clairement les critères qui seront appliqués. Dans une région, il est légitime de s'interroger pour savoir s'il vaut mieux cibler l'université de la ville centre ou rassembler les universités de l'ensemble de la région. Comme il y a un jury international, avec des critères scientifiques, il est légitime, à l'occasion de la discussion budgétaire, de demander au ministre de bien préciser les règles du jeu. Je souhaite qu'on le « cuisine » à nouveau sur ce sujet : le débat doit être l'occasion de préciser notamment les critères de gouvernance, qui restent encore un peu mystérieux.

Mme Françoise Laborde. - Je sais d'expérience que les contrats CIFRE sont très difficiles à mettre en place. Il faudrait assouplir les formulaires, sinon, il y a de quoi baisser les bras, ce qui a failli m'arriver. Le groupe RDSE partage la position de M. Plancade et votera les crédits.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Les universitaires de notre région s'inquiètent de ne pas connaître les critères retenus.

Mme Dominique Gillot, rapporteure pour avis des crédits de l'enseignement supérieur. - Certaines des auditions que j'ai faites, au-delà du champ de mes compétences, m'ont alertée sur l'utilisation par les entreprises du CIR pour alléger leur impôt et non pour stimuler la recherche.

Quant aux crédits de l'enseignement supérieur, érigé en priorité politique du quinquennat, il faut reconnaître au Gouvernement un certain talent : une habileté dans la contorsion, en s'appuyant sur une confusion systématique entre financements budgétaires et extra-budgétaires et sur un camouflage des redéploiements et des coupes budgétaires. Les crédits de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » s'établissent, dans le projet de loi de finances pour 2012, à 25,44 milliards d'euros en crédits de paiement, contre 25,19 milliards d'euros en 2011.

Cette présentation en légère progression ne doit pas faire illusion : les engagements du chef de l'État d'augmenter, chaque année pendant cinq ans, d'un milliard d'euros le budget de l'enseignement supérieur, et de 800 millions d'euros le budget de la recherche ne seront pas tenus. Le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche a lui-même reconnu, au mois d'octobre, que l'enseignement supérieur bénéficierait, en 2012, de seulement 540 millions d'euros supplémentaires (budgétaires et extrabudgétaires). Si l'on ne tient pas compte des intérêts de l'opération Campus, d'un montant de 167 millions d'euros, la croissance réelle des crédits budgétaires de l'enseignement supérieur doit être ramenée à 373 millions d'euros.

Cette augmentation de seulement 1 % en crédits de paiement correspond à une perte d'au moins 0,7 % en pouvoir d'achat.

Une augmentation de la dotation de fonctionnement des universités, de 46 millions d'euros en 2012, inférieure à l'inflation, ainsi qu'une compensation très insuffisante de leur glissement vieillesse-technicité (GVT) positif devraient déboucher sur un gel des recrutements voire une suppression de postes au sein des établissements publics d'enseignement supérieur dont la situation budgétaire est la plus critique.

C'est le cas des universités dites de « territoire », de petite ou moyenne envergure, qui sont historiquement sous-dotées et rencontrent, cette année, les plus grandes difficultés à clôturer leur budget.

La Conférence des présidents d'université (CPU) indique ainsi que huit universités sont confrontées à des difficultés financières qui les conduiront vraisemblablement à présenter un budget en déséquilibre pour la deuxième année consécutive. Contrairement à ce que prétend le ministère, cette situation ne peut être imputée uniquement à des problèmes de gestion interne au sein de ces établissements ; c'est bien un écrêtement des dotations de fonctionnement et une compensation insuffisante des charges transférées par l'État qui en sont la cause !

L'État a transféré aux universités une masse salariale inerte qui ne tient pas compte de paramètres relevant d'une politique nationale sur lesquels les responsables d'établissement n'ont pas prise  le recul de la date de départ à la retraite des personnels (4 mois de plus par an) ; l'augmentation de la masse salariale résultant des évolutions naturelles de carrière (GVT) ; les mesures de revalorisation de certaines catégories, telles que les maîtres de conférence ou les bibliothécaires ; l'augmentation de la charge de travail induite pour les enseignants-chercheurs par la mise en oeuvre du plan pour la réussite en licence, qui ne peut raisonnablement s'effectuer à effectifs constants.

Les 14,5 millions d'euros annoncés par le Gouvernement afin de compenser le GVT solde des universités me laissent particulièrement perplexe. Le GVT positif total des universités s'établit entre 19 et 20 millions d'euros. 5 millions d'euros d'augmentation de la masse salariale des universités à GVT positif restent donc à financer. Or, la CPU n'a pas pris de décision concernant un éventuel mécanisme de solidarité entre les universités qui ont un GVT négatif et celles qui ont un GVT positif. Compte tenu de la faiblesse globale des dotations de fonctionnement des universités, celles-là seront réticentes à céder une partie de leur financement à celles-ci. Les établissements les plus en difficulté devront se résoudre soit à geler ou supprimer des postes, soit à présenter un budget en déséquilibre et à se voir imposer la mise sous tutelle par le rectorat, avec la publicité stigmatisante qu'est prêt à en faire le ministre, comme il l'a démontré dans un communiqué la semaine dernière.

En effet, le 17 novembre, il a annoncé la mise sous tutelle de huit établissements ayant constaté deux déficits de fonctionnement consécutifs, accompagnée de la mise en place d'un « comité des pairs » censé les accompagner dans le rétablissement de leur situation, ce qui n'est qu'un habillage de la mise sous tutelle. Dans sa « grande sagesse », le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche entend ainsi prodiguer des leçons de gestion à des responsables d'université qu'il avait pourtant abandonnés sur le chemin de l'autonomie, en ignorant leurs cris d'alerte et leurs explications sur les rigidités structurelles qu'il leur était impossible de surmonter.

Comment ne pas s'indigner de l'humiliation subie par les huit établissements stigmatisés, désignés à la vindicte par un Gouvernement qui échoue dans la mise en oeuvre effective du principe d'autonomie des universités et qui rejette la responsabilité de ses errements et de ses approximations sur ses partenaires ?

Le malaise de la communauté étudiante est préoccupant. La bonne nouvelle du 10e mois de bourse, indispensable prise en compte de l'allongement de la durée de la scolarité, occulte une série de déconvenues sur lesquelles le ministère s'est bien gardé de communiquer. Ainsi, sur le programme 231 « Vie étudiante », les économies ont été réalisées sur les compléments de bourses et d'autres dispositifs d'aide : à la suppression du complément transport Île-de-France, s'ajoutent les économies portant sur le fonds national d'aide d'urgence (FNAU) ainsi que sur les aides à la mobilité internationale.

Ces mesures se traduisent par une baisse de la subvention de fonctionnement des opérateurs du programme, auxquels il est demandé de réduire leurs dépenses de fonctionnement. Ainsi, le Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (CNOUS) et les autres opérateurs du programme et associations voient leurs subventions baisser de 12,8 millions d'euros en 2011, puis de 6,3 millions d'euros encore en 2012.

A propos des étudiants étrangers diplômés dans notre pays, l'éditorial du Monde de jeudi dernier évoque une « faute de la France ». Les étudiants étrangers sont stigmatisés par la politique de réduction drastique de l'immigration légale poursuivie par le Gouvernement, en particulier depuis la publication d'une circulaire du 31 mai 2011 relative à la maîtrise de l'immigration professionnelle par le ministre de l'intérieur. J'ai appris aujourd`hui que cette circulaire a des effets dévastateurs dans de nombreux pays, notamment en Chine.

Nos viviers de compétences dans certains secteurs sont insuffisants et les talents acquis par les étudiants étrangers, pour lesquels notre pays a investi des sommes significatives, sont indispensables. Le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche reconnaissait lui-même que, dans un domaine aussi stratégique que celui des ingénieurs, la France forme 30 000 diplômés par an alors qu'elle en aurait besoin de 40 000.

Je soutiens donc la proposition de résolution portée par notre collègue Bariza Khiari qui invite le Gouvernement à respecter la lettre et l'esprit de la loi de 2006 permettant, sous certaines conditions, à des étudiants étrangers diplômés en France de travailler dans notre pays. Selon cette résolution, cette loi qui « permet aux étudiants étrangers titulaires d'un diplôme équivalent master et d'une promesse d'embauche de séjourner en France dans le cadre d'une première expérience professionnelle », est « dénaturée non seulement par la circulaire du 31 mai 2011 », mais « surtout par son application administrative », abusive.

La situation sanitaire des étudiants est profondément aggravée par la taxe sur les mutuelles étudiantes. Dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, notre assemblée a supprimé le doublement de la taxation des complémentaires santé voulu par le Gouvernement. J'ose espérer que le Gouvernement et la majorité présidentielle sauront revenir à la raison et valider l'exonération des mutuelles étudiantes de cette taxe.

Plus de 19 % des étudiants n'ont pas de complémentaire santé, contre 6 % de la population générale, et 34 % renoncent à des soins. Ajoutés aux statistiques publiées la semaine dernière par le Secours catholique, voilà qui devrait alerter les pouvoirs publics sur la paupérisation de nos étudiants et de notre jeunesse.

Pour l'ensemble de ces raisons, je vous proposerai de donner un avis défavorable à l'adoption de ces crédits.

M. Jacques Legendre. - Concernant les étudiants étrangers, la réponse n'est pas facile. Certains souhaitent travailler en France après leurs études comme complément de formation, ce que je comprends. Mais n'allons pas affirmer qu'il faut compenser un nombre insuffisant de jeunes diplômés français par le recours aux étudiants étrangers. Voyez le taux de chômage parmi ces jeunes Français ! Demandons-nous plutôt comment former plus de jeunes Français aux professions dont nous avons besoin.

Le visa étudiant est parfois utilisé pour accéder au marché du travail en France. D'autres pays ont le même problème : le Royaume-Uni, par exemple, a durci sa réglementation en constatant que nombre d'étudiants étrangers se maintenaient, leurs études achevées, sur le sol britannique.

Ce sujet, qui ne se prête pas à des analyses manichéennes, mériterait un travail de fond au sein de notre Haute Assemblée. Comment favoriser l'accueil des jeunes étrangers ? Comment autoriser, en complément de la formation, une certaine durée de séjour dans les entreprises, sans autoriser un accès permanent au marché du travail, au détriment des jeunes Français ? Faisons que les étrangers repartent dans leur pays d'origine munis d'une formation... et d'un intérêt pour notre pays.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Mme Khiari présente une proposition de résolution sur cette question : ce sera une occasion d'en débattre.

Mme Maryvonne Blondin. - Notre rapporteure a bien noté l'oubli du GVT dans les dotations de l'État en 2009. De nombreuses universités ont été mises à mal, certaines sont en grande difficulté depuis deux ans ! La rallonge de l'État se monte à 539 000 euros, il en faudrait 900 000.

Le plan licence n'a pas réellement joué son rôle. Le taux d'encadrement dans l'enseignement supérieur en France est très faible, en comparaison des autres pays ! Des crédits fléchés ont eu tendance à se perdre dans la nouvelle liberté d'allocation des moyens.

Le plan Campus, qui concerne la vie universitaire, subit des retards de réalisation et de financement. Les effets positifs tardent à se faire sentir. Quant à la santé, la troisième enquête sur la santé des étudiants, en mai 2011, a montré une dégradation des conditions de vie des intéressés, a retracé leurs difficultés : subissant de plein fouet le renchérissement du coût de la santé, ils renoncent à des consultations ou des soins médicaux. Mme Dominique Gillot et moi-même avons interpellé M. Wauquiez à ce sujet, il ne nous a pas répondu. Mme Pécresse non plus, en séance publique. Nos collègues se sont émus, en effet, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), de voir les crédits du service de santé diminuer, alors que ses missions étaient étendues : examens de prévention les trois premières années d'étude, visites médicales, accompagnement des étudiants handicapés, veille sanitaire, ou encore relais des plans régionaux en santé publique, que les ARS déploient dans les départements. Notre groupe ne pourra être favorable à ce budget.

M. Jean Boyer. - Le constat de Mme Gillot est objectif et réaliste, hélas. Je ne suis l'avocat de personne et au sein du groupe de l'Union centriste règne la diversité, gage d'indépendance. Mais je le dis en toute modestie, dans la vie, il y a le vouloir et le pouvoir.

Il y a le vote de coeur, le vote de raison, le vote de résignation. Mon vote sur les crédits de l'enseignement supérieur sera de résignation, car l'enseignement supérieur est un investissement fondamental pour l'avenir, surtout dans une société malade comme la nôtre. Il comble aussi les failles de la famille. Les crédits de la mission devraient être prioritaires.

Mme Dominique Gillot, rapporteure pour avis des crédits de l'enseignement supérieur. - Évitons de donner un tour polémique à la question des étudiants étrangers, cela causerait préjudice aux intéressés comme au rayonnement de la France. Mais la controverse est née de la circulaire Guéant qui durcit les conditions posées par la loi. Ce n'est pas le rôle d'un texte d'application ! Les nouvelles dispositions rendent la vie difficile à entre 4100 et 500 étudiants. Il faudrait autoriser les jeunes diplômés à acquérir une première expérience professionnelle dés lors qu'ils disposent d'une promesse d'embauche. Il ne s'agit pas d'enfants de riches familles, comme on a essayé de nous le faire croire. Tel jeune Pakistanais poursuit ses études en France parce que sa famille s'est endettée pour le faire partir : s'il retourne au pays sans avoir obtenu en France une première expérience professionnelle, ses parents seront ruinés. Examinons aussi, sans préjugés, les conséquences de ces nouvelles règles pour l'image de la France, terre d'accueil. Aujourd'hui, l'Australie accueille plus d'étudiants étrangers que notre pays, ainsi relégué au quatrième rang. Il y a eu une erreur d'appréciation de la part du rédacteur de la circulaire, mais les ministres s'entêtent à ne pas l'admettre...

Les 14,5 millions d'euros proposés par le gouvernement pour la compensation du GVT ne sont pas un cadeau, ils ne correspondent pas à des sommes supplémentaires, seulement à un redéploiement de crédits. A partir de quelle ligne budgétaire, nous l'ignorons toujours. Avec quels critères de redistribution ? Qui prendra les décisions ? Il aurait fallu 20 millions d'euros, le compte n'y est pas.

Nous en savons un peu plus depuis le communiqué de presse du ministère la semaine dernière, et les échanges avec le président de la CPU et les syndicats. Le GVT négatif de certaines universités donnera lieu à un gel décidé autoritairement, avant que la commission des pairs impose une redistribution à la CPU. Les petits excédents engrangés doivent être restitués et exploités...

La mise en oeuvre du plan licence n'est pas à la hauteur des promesses. Les organisations d'étudiants réclament un audit du programme, considérant que trop de crédits ont été affectés à d'autres postes. Il était prévu de consacrer 750 millions d'euros en cinq ans au plan, pour porter 50 % d'une classe d'âge au niveau de la licence. Or, en 2009, nous en étions à 36,4 % et en 2010 à 44,3 %. L'objectif est encore lointain !

Le plan Campus a pris du retard, car il est financé exclusivement par les intérêts du grand emprunt ; des retards ont été pris et la définition des périmètres d'attribution est très confuse. Nous sommes donc inquiets. Quant à la santé, je n'y reviens pas, les statistiques sont éloquentes.

Un mot seulement pour dénoncer la volonté de certains parlementaires de placer les allocations logement étudiant sous condition de ressources de la famille, ce qui est contraire au principe d'autonomie des étudiants. Je n'ai pas parlé du logement, il y aurait tant à dire : nous sommes là encore loin du compte et les objectifs du plan « Anciaux » ne seront réalisés qu'en 2016.

L'intervention de M. Boyer était touchante, mais les étudiants sont l'avenir de la France et le ministre devrait mettre ses actes en conformité avec ses discours. Un budget « sanctuarisé » pour l'enseignement supérieur ? Pas du tout, il est en forte régression, si l'on tient compte des missions supplémentaires demandées aux universités -  y compris dans des métiers qui ne sont pas les siens - et de l'évolution démographique, marquée par une hausse du nombre d'étudiants.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Nous allons à présent devoir nous prononcer globalement sur la mission, alors que le rapporteur a donné un avis favorable aux crédits de la recherche, et la rapporteure un avis défavorable sur les crédits de l'enseignement supérieur. Que chacun prenne ses responsabilités !

La commission émet un avis défavorable sur les crédits de la mission « enseignement supérieur et recherche ».

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - On nous informe que le budget du ministère de l'écologie serait examiné en séance publique non pas le vendredi 25 au matin, mais en fin d'après-midi, compte tenu de l'indisponibilité des ministres. Le débat sur la culture et les médias serait en conséquence avancé de la fin de l'après-midi à 14 h 30.

Mme Cécile Cukierman - Comme parlementaire, je trouve ces changements de dernière minute détestables. Il faut trouver un nouveau fonctionnement pour nos institutions républicaines.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Je ferai part de votre observation.

M. Jean-François Humbert. - Je suis parlementaire depuis 1998, j'ai connu la gauche au pouvoir. Et je vous assure que de tels incidents ont toujours existé ; ils n'ont du reste pas grande importance.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Mme Cukierman critiquait le gouvernement en tant que parlementaire ; il ne s'agissait pas d'une prise de position politique opposant la gauche et la droite...

Mercredi 23 novembre 2011

- Présidence de Mme Marie-Christine Blandin, présidente -

Loi de finances pour 2012 - Communications diverses

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Tout d'abord une rapide information sur les recettes prévues dans la loi de finances. Nous avons eu en commission un débat sur le CNC et sur l'amendement visant à écrêter ses ressources sans en changer l'assiette. Quatre taxes alimentent le CNC. Ces taxes étant très productives, le Gouvernement souhaite en écrêter l'excédent pour le réinjecter dans le budget de l'État.

En réaction, il y avait, d'une part, un amendement porté par la commission pour contester cet écrêtage pour un certain nombre d'organismes culturels ; et d'autre part, un sous-amendement de M. Leleux visant à contester l'écrêtement sur ses trois taxes « mutualistes » en gardant le plafond sur la quatrième taxe.

Nous avons échoué sur l'amendement de la commission ; nous avons donc soutenu celui de M. Leleux. Le sous-amendement a bien été voté, mais pas l'amendement qui le portait. Nous sommes donc de retour à la situation initiale telle que transmise par l'Assemblée nationale, et il est probable que d'autres évolutions se feront jour. Nous verrons ce qui se passera en commission mixte paritaire.

M. Jacques Legendre. - Ce n'est pas une opposition mais une demande de vérification. Dans le texte de simplification du droit adopté à l'Assemblée nationale, il est envisagé également de supprimer l'obligation de s'exprimer en français dans l'aéronautique. Je voudrais que l'on vérifie si cela est vrai ; et le cas échéant, que l'on s'y oppose car il s'agirait d'une atteinte à la langue française.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Nous y travaillons également, afin de défendre la francophonie.

M. Louis Duvernois. - Il s'agit de l'article 72 ter.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - J'appelle Mme Cartron pour l'évaluation des crédits de l'enseignement scolaire.

Avant de vous laisser la parole, je souhaite apporter une précision. J'ai suscité beaucoup d'émotion hier soir en vous transmettant, presque en direct, les évolutions éventuelles du calendrier des débats budgétaires. J'ai appris ce matin qu'au vu des difficultés et des protestations, finalement nous ne changions rien au calendrier budgétaire initialement proposé. Vendredi, nous examinerons donc l'écologie le matin puis la culture et les médias l'après-midi et le soir.

Loi de finances pour 2012 - Mission Enseignement scolaire - Examen des rapports pour avis

La commission examine les rapports pour avis de Mmes Françoise Cartron sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire », Françoise Férat sur les crédits du programme « Enseignement technique agricole » et Brigitte Gonthier-Maurin sur les crédits de l'enseignement professionnel du projet de loi de finances pour 2012.

Mme Françoise Cartron, rapporteure pour avis sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire » - Dans le projet de loi de finances pour 2012, les cinq programmes relevant de l'éducation nationale sont dotés d'un peu plus de 61 milliards d'euros, soit une progression globale de 0,86 % par rapport à l'an dernier. L'augmentation en euros courants et à structure courante, sur l'ensemble de la législature, n'est que de 6 % en cinq ans. Il s'agit en réalité d'une baisse de crédits puisque l'inflation n'est pas compensée.

En outre, l'augmentation en trompe-l'oeil des crédits résulte essentiellement du glissement mécanique des dépenses de personnel. Ce sont ainsi très exactement, 548 millions d'euros supplémentaires par rapport au budget 2011 qui sont consacrés à l'augmentation de la participation au CAS pensions. Il ne s'agit donc pas de moyens supplémentaires affectés au service public de l'éducation, dont bénéficieraient les élèves et leurs apprentissages.

Il convient également de souligner la baisse des crédits hors titre 2 répondant à des missions pédagogiques : - 18,14 % en un an dans le premier degré. Cet assèchement des moyens matériels est très inquiétant parce qu'il amplifie les effets de la restriction des ressources humaines et pèse directement sur la vie des classes. Il ne peut que freiner la modernisation de la pédagogie, le développement des innovations et la personnalisation des parcours, dont le ministre se fait pourtant l'avocat paradoxal.

Dans la masse des crédits de personnel, il faut souligner l'importance prise par les heures supplémentaires. Sur l'année 2010-2011, plus de 1,3 milliard d'euros ont été consacrés à leur financement. C'est 10 % de plus qu'en 2008-2009 et cela équivaut aux sommes nécessaires pour couvrir le remplacement des enseignants dans le second degré ou pour financer l'ensemble de l'enseignement technique agricole.

Ces crédits auraient pu être mieux employés, en revenant sur des suppressions de postes de titulaires sur zone de remplacement (TZR), en renforçant le taux d'encadrement dans l'éducation prioritaire ou encore en consolidant l'accueil à l'école maternelle. Je suis donc convaincue, que même dans un contexte budgétaire très difficile, les moyens sont là pour mener une autre politique avec des priorités éducatives plutôt que gestionnaires et financières.

Sur l'ensemble des crédits d'heures supplémentaires, 320 millions d'euros devraient être consacrés aux seules exonérations de la loi TEPA. A titre de comparaison, sont inscrits moins de 130 millions d'euros pour financer 30 200 emplois de vie scolaire (EVS), soit une baisse de 5,5 millions d'euros et une perte de près de 8 000 contrats par rapport à 2011.

Or, les EVS s'adressent surtout à des personnes éloignées de l'emploi pour préparer leur réinsertion. Dans un contexte économique dégradé, marqué par un chômage élevé, restreindre le contingent d'EVS ne peut que détériorer encore la situation générale de l'emploi. Par ailleurs, parmi les EVS, ceux qui servent d'assistants aux directeurs d'école pour les décharger de tâches administratives sont les plus touchés par les non-renouvellements. Le fonctionnement des écoles primaires, dans lesquelles on ne cesse d'appeler à plus de pilotage et à un élargissement des missions des directeurs, en sera nécessairement dégradé.

Les choix financiers du Gouvernement se retournent directement à la fois contre la politique de l'emploi et contre l'accompagnement des élèves. La construction du budget privilégie l'optimisation de la gestion et confond la performance financière avec la performance éducative.

Le schéma d'emplois de la mission Enseignement scolaire pour 2012 résulte d'un arbitrage entre les heures supplémentaires et les postes. L'ampleur du recours aux heures supplémentaires, au fur et à mesure de la poursuite des suppressions des postes, est le signe clair d'une tension grandissante entre les besoins et les moyens, entre les missions demandées aux personnels et les ressources humaines qui y sont consacrées.

En cinq ans, si le PLF 2012 est voté en l'état, 70 600 postes auront été supprimés dans l'éducation nationale, dont 68 000 enseignants. Le premier degré public aura connu exactement 27 637 suppressions. L'apurement des finances publiques ne peut pourtant se substituer à une véritable politique éducative, qui aurait la même considération pour l'école que pour l'université.

En collaboration avec l'inspection générale des finances, le ministère a identifié une série de « leviers d'efficience ». Aux recteurs ensuite de choisir les modalités de suppressions effectives de postes pour remplir le quota qui leur a été notifié. Je m'interroge sur l'articulation entre le rôle des recteurs et de l'administration centrale. En effet, le ministère de l'éducation nationale a tenu à préciser que la répartition des suppressions de postes « relève d'une démarche locale, rendant ainsi difficile une identification précise, pour chaque levier et pour chaque académie de l'impact de telle ou telle mesure prise. »

Il paraît étonnant que l'administration centrale ne soit pas informée de l'utilisation de tel ou tel levier dans telle ou telle proportion dans chaque académie. Il est encore plus étonnant qu'elle ne semble pas se soucier de l'être ! Comment sans ces informations peut-on améliorer la gestion pour l'année prochaine ? Comment modifier en conséquence les quotas affectés à chaque académie ? Comment mesurer l'effet sur les résultats scolaires des élèves dans chaque académie ? A quoi sert alors de prétendre comme le ministère l'a fait que le dialogue avec les recteurs a été « fructueux » ?

Il y a là un triple problème à la fois :

- pour la transparence et l'efficacité de la gestion ;

- pour la garantie de l'équité sur l'ensemble du territoire national alors que les inégalités sociales et territoriales se renforcent ;

-  et pour l'évaluation de l'impact pédagogique des mesures décidées.

Il faut noter qu'à aucun moment dans la construction du budget ou dans le dialogue de gestion avec les recteurs les élus locaux ne sont consultés. Tous leurs représentants se sont plaints de ne pas être traités comme des partenaires à part entière par le ministère.

Pour la réalisation du schéma d'emplois présenté dans le projet de loi de finances pour 2012, il est à prévoir que les recteurs poursuivront l'augmentation du nombre d'élèves par classe, pousseront aux regroupements d'écoles et diminueront encore le stock des postes « hors classes », qui sont pourtant essentiels au bon fonctionnement des écoles primaires.

Aucune de ces orientations ne peut être interprétée en soi comme favorisant les apprentissages des élèves, alors même que les évaluations nationales et internationales demeurent défavorables. La proportion d'élèves très en difficulté en fin de primaire et en fin de collège augmente encore et le poids des inégalités sociales tend à s'alourdir.

Devant l'absence d'ambition éducative, d'une part, l'incohérence et l'opacité de la gestion, d'autre part, je vous propose de rendre un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

Mme Sylvie Goy-Chavent. - J'ai écouté avec beaucoup d'attention le rapport de notre collègue et je comprends tout à fait ses préoccupations. En revanche je voudrais revenir sur le point des heures supplémentaires. Vous parlez d'une augmentation de 10 % mais il faut mettre le doigt sur un souci de fond : ces heures supplémentaires sont malheureusement souvent le moyen pour les enseignants d'arrondir un salaire qui n'est pas à la hauteur de leurs qualifications. Beaucoup d'enseignants sont demandeurs de ces heures supplémentaires. Le souci fondamental est la question de leur statut : leurs qualifications sont de plus en plus élevées, les concours sont difficiles, il y a parfois une pénurie d'enseignants parce que le métier lui-même est difficile. Certes il y a moins d'élèves mais les élèves ont changé tout comme la société a changé, et pas toujours dans le bons sens. Il faut donc poser la question de la revalorisation de l'enseignant dans un contexte de plus en plus difficile.

M. Claude Domeizel. - Cela a été dit, il faut revoir le statut des enseignants et ce ne sont pas les heures supplémentaires qui vont régler ce problème. Je voudrais également demander au rapporteur si la diminution de crédits aura des conséquences sur la diminution des remplaçants. J'ai posé la question à monsieur le ministre, qui m'a parlé des remplacements supérieurs à 15 jours. Mais en-dessous de 15 jours il y a effectivement des difficultés, et c'est l'un des aspects qui seront les plus sensibles à l'avenir. Je suis par ailleurs tout à fait d'accord avec ce rapport.

Mme Françoise Laborde. - Je suis d'accord de manière générale avec ce rapport, et je peux d'ores et déjà vous assurer que le RDSE votera contre les crédits. En revanche, je veux soulever la question des remplacements, par exemple dans les collèges. On recourt aujourd'hui à Pôle Emploi, au lieu d'utiliser des enseignants de départements voisins qui ont demandé leur mutation et qui ne l'ont pas eue. Ils sont en disponibilité obligée et voient passer des annonces de Pôle Emploi sur lesquelles ils ne sont pas prioritaires. Certains ont tout de même des masters obtenus avant de passer les concours. J'ai écrit à monsieur le ministre à ce sujet, mais ma question est restée sans réponse. Je la reposerai dans l'hémicycle.

Mme Dominique Gillot. - Le ministre n'a pas répondu à nos diverses questions, mais il a apporté des éléments de réponse lors de ses interventions extérieures ; notamment hier, suite à la présentation d'une étude modélisant l'évolution de notre école. Cette analyse d'un cabinet américain préconise évidemment l'évaluation, mais aussi l'amélioration des pratiques pédagogiques par un travail en équipe des enseignants, et l'affirmation du rôle du chef d'établissement. Le directeur d'école a lui aussi un problème de statut qui n'est toujours pas réglé, et qui pose problème selon la taille de l'établissement. Je voudrais donc savoir si vous avez trouvé dans le budget des points qui montreraient que le ministre engage les professionnels sur ces pistes, qui sont consommatrices d'heures d'enseignement et nécessitent une réorganisation professionnelle.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Je vous informe que la commission va lancer une mission d'information sur le métier d'enseignant à laquelle vous serez invités à candidater.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Je ne reviens pas sur les interrogations portées auprès du ministre et relayées par madame le rapporteur. Je partage le contenu du rapport. J'ai deux questions : quels sont les effets de la mastérisation ? Qu'en est-il des crédits dédiés à la formation des enseignants ?

M. Jacques-Bernard Magner. - Vous avez souligné que le débat est riche : c'est naturel, car l'école est le fondement de nos institutions. Tout ce qui est proposé pour 2012 malheureusement va dans un sens négatif. Les nouvelles dispositions vont inciter nos concitoyens à ne pas mettre leurs enfants à l'école maternelle ; elles vont aussi donner des moyens très faibles pour les remplacements ; entraîner des hausses progressives d'effectifs de classes, etc. Face à cela, et aux exigences d'évaluation des élèves comme des maîtres - alors que l'on est beaucoup moins pointilleux sur leur formation - nous sommes tout à fait démunis. Nous avons de la chance que l'enseignement scolaire tienne encore le coup. 80 000 postes supprimés en cinq années successives, c'est tout à fait dommageable. Je comprends très bien que notre rapporteur propose de voter contre ce projet de budget 2012.

M. Michel Le Scouarnec. - Je voudrais attirer l'attention sur les assistants d'éducation, les Emplois Vie Scolaire (EVS). Ils bénéficient d'un petit SMIC, pour un « mi-temps étalé » sur les douze mois de l'année. Leurs conditions de vie sont précaires. Ils ne sont pas assez nombreux par rapport au travail qu'ils effectuent, à la fois pour assister les directeurs et pour accompagner les enfants ayant de graves difficultés de comportement. Ce travail est reconnu comme utile et nécessaire. Que peut-on faire pour attirer l'attention du Gouvernement sur cette catégorie de personnels ?

Mme Maryvonne Blondin. - Je souhaiterais revenir sur un point : la gestion de la réduction des effectifs par les recteurs. Ils doivent trouver des gisements d'emplois et essayer de proposer des suppressions de postes, au détriment de choses très importantes. Je pense par exemple à l'apprentissage des langues vivantes dans le premier degré. Lorsque le ministre dit qu'il faut apprendre une langue étrangère le plus tôt possible, et qu'en parallèle on supprime les emplois qui y correspondent, il y a du souci à se faire. Il y a un hiatus entre ce qui est dit et ce qui est réellement fait.

Par ailleurs, la mission des enseignants a évolué et mériterait que l'on s'y attache. Ils ne devraient pas avoir recours à des heures supplémentaires pour avoir un revenu adéquat. Enfin, il y avait eu une polémique l'année dernière sur le décompte de 20 000 emplois supplémentaires. Y a-t-il eu plus de précisions sur ce point ?

M. Jacques Legendre. - J'ai entendu la remarque de notre collègue sur les professeurs d'école sans emploi qui ne peuvent rejoindre les départements voisins où l'on a besoin de remplaçants. Cela correspond aux règles de Pôle Emploi, dont l'action se fait dans le cadre du département ; mais cela mérite d'être revu, et un assouplissement me paraîtrait une mesure de bon sens.

Deuxièmement, je m'étonne que la diminution des effectifs soit considérée comme extrêmement lourde à vivre, alors qu'elle correspond à niveau égal à une augmentation des effectifs sur les années précédentes ; et que dans le même temps, le nombre des élèves a diminué. On peut en débattre, mais ce sont des faits avérés.

Enfin, je souhaite parler de la rémunération. Le Gouvernement a engagé des actions afin de revaloriser les rémunérations des enseignants ; mais cela nécessite d'augmenter également la longueur de leur formation. On se heurte à la rigidité de la grille de la fonction publique. Devrons-nous arriver à une surqualification des enseignants afin de pouvoir les augmenter ? Il faudra accepter de revoir la grille de la fonction publique, qui est réputée intouchable.

Mme Colette Mélot. - Notre société évolue très vite, mais de nombreuses réformes dans le domaine de l'enseignement ont échoué et rien n'a changé en profondeur. Je suis d'accord avec ce que vous avez dit concernant les inégalités : les inégalités sociales ont pour conséquence des inégalités scolaires, cela est vrai. Mais l'OCDE pointe aussi notre difficulté à faire passer les élèves du niveau bon à très bon. Ces deux choses sont différentes. Mais pour les résoudre, il faut plus d'autonomie des établissements, et une adaptation du milieu scolaire au milieu social. Les aides individualisées que propose le ministre actuellement vont dans le bon sens. Je crois qu'il faut aller plus loin et en finir avec l'égalitarisme, ainsi qu'avec tout ce que prônent certains syndicats qui ne veulent pas modifier les statuts. Il faut décidément aller vers davantage d'autonomie des établissements.

Mme Françoise Cartron, rapporteure pour avis sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire » - Je vais répondre de manière synthétique aux différentes questions.

Vous avez d'abord parlé du statut des enseignants. Plutôt que de prendre ce problème à bras-le-corps, le ministre a choisi d'agir sur de nouveaux leviers : la précarité, les heures supplémentaires, les remplacements à Pôle Emploi. Certains enseignants sont demandeurs d'heures supplémentaires, d'autres sont forcés de les accepter pour que le lycée fonctionne. Je ne pense pas qu'ils aient été consultés sur le choix de la défiscalisation de ces heures. Sur ces problématiques, le Gouvernement travaille au coup-par-coup avec le seul objectif de la précarisation. Plutôt que d'appeler les enseignants qui arrivent d'un autre département et qui auraient le statut de titulaires, on préfère les laisser sans emploi pour aller chercher des personnes moins qualifiées. C'est la gestion de tout le personnel de l'éducation nationale qui pose problème. Quant aux EVS, ce sont des emplois très précaires. De plus, ils ne font l'objet d'aucun suivi : ce sont des contrats de quelques mois, renouvelés avec des personnes différentes. On est très loin de la recherche de qualification et d'efficience ! Ce que je dénonce, c'est que plutôt que d'avoir une véritable ambition éducative - quelles qualifications et quel statut pour accompagner les élèves en difficulté ? - on répond à ces questions par la précarité.

Le deuxième point que vous avez soulevé est celui de la formation. Il y a deux chiffres : 295 millions d'euros pour le premier degré, et 117 millions d'euros pour le second degré. C'est cinq fois moins que le budget des heures supplémentaires : cela montre bien le choix du Gouvernement. M. Legendre évoquait la diminution du nombre des élèves, mais aujourd'hui il y a bel et bien une remontée. Si chaque année nous supprimons des postes pendant que le nombre d'élèves diminue, nous nous retrouverons face à des difficultés sérieuses lorsque ce nombre augmentera. Aujourd'hui le taux d'encadrement est fortement reconsidéré : nous sommes passés de 27 enfants à 30 ou 32 par classe. Lors du congrès des maires, il a été rappelé que tout se passait dans la classe. Il ne s'agit pas de brandir des armes magiques telles que l'autonomie financière des établissements. C'est d'autonomie pédagogique qui prime comme l'OCDE l'a montré, et avant tout la mission d'animateur pédagogique que doit avoir le directeur. Nous n'avons pas besoin d'un gestionnaire à tout prix, mais de quelqu'un qui impulse de nouvelles pratiques.

Troisièmement, madame Blondin, ces 20 000 emplois provenaient essentiellement d'un bug informatique du logiciel de ressources humaines Chorus. Cela montre encore une fois que le ministre ne peut pas savoir exactement combien de postes il gère, où, et pour quelles missions.

Ensuite, une remarque sur la liberté laissée aux recteurs quant à l'ajustement qui leur est demandé. Nous votons aujourd'hui un budget avec des suppressions de postes, et les recteurs recevront leur enveloppe en avril seulement. Il aurait mieux valu un vrai dialogue en partant du terrain, pour faire remonter les nécessités réelles, et non l'inverse !

Enfin, vous avez parlé de l'apprentissage des langues dans le premier degré. Aujourd'hui il est assuré à 95 % par les enseignants de la classe. Il n'y a pratiquement plus d'intervenants extérieurs, sauf dans le privé.

Mme Françoise Férat, rapporteur pour avis sur les crédits du programme « Enseignement technique agricole ». - Les crédits consacrés à l'enseignement technique agricole représentent 1,3 milliard d'euros, soit une hausse de 1,2 % en crédits de paiement et de 1,7 % en autorisations d'engagement. L'enseignement agricole n'est donc pas moins bien traité cette année que l'éducation nationale. Il paie toutefois son écot à la RGPP et participe pleinement aux mesures de maîtrise de la dépense publique, notamment via l'optimisation de la gestion et la réduction de 10 % des crédits de fonctionnement à l'horizon 2013.

L'augmentation des crédits hors titre 2 résulte de l'évolution des subventions aux établissements de l'enseignement agricole privé. Les dotations du privé ont en effet été relevées afin de prendre en compte les obligations juridiques découlant de l'application du code rural. Je me félicite de la volonté affichée par le ministre de l'agriculture de respecter les protocoles d'accord de 2009, signés pour régler des problèmes récurrents de reports de charge et de contentieux.

J'aimerais rappeler à cette occasion que je suis attachée au développement équilibré de toutes les composantes de l'enseignement agricole, qu'il s'agisse du public, du privé temps plein ou du privé rythme approprié. Ils ont chacun leurs spécificités et répondent de façon diversifiée et adaptée aux besoins des élèves, des familles et des territoires.

L'analyse des crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2012 me conduit à adopter un optimisme prudent pour l'ouverture en février prochain de la négociation du prochain plan triennal. Je souhaite que tout soit fait d'ici là pour garantir la qualité du dialogue social au sein de l'enseignement agricole et éviter le blocage du Conseil national.

En termes d'emplois, le PLF 2012 prévoit 280 suppressions de postes, touchant uniquement des enseignants. Après ces nouvelles suppressions, l'enseignement agricole sera parvenu à un ratio de 45,5 % de non-remplacement des départs en retraite sur trois ans. C'est donc un peu moins que la norme du « un sur deux ». Nous sommes à la limite de l'exercice. Le périmètre de l'enseignement agricole n'est pas capable de supporter plus de suppressions de postes.

A première vue, les suppressions paraissent difficilement tenables mais elles coïncident en fait avec la fin de la rénovation de la voie professionnelle. En particulier, il faut tenir compte de la résorption du double flux d'élèves, né du maintien transitoire de voies parallèles, l'une directe, l'autre via le BEPA. En outre, la rationalisation de la carte des formations menée en collaboration avec l'éducation nationale réduira l'impact des suppressions, qui devrait au final être plus mesuré que ce que l'on pouvait craindre.

D'ailleurs, je tiens à souligner le bilan positif des ouvertures et des fermetures de classes. Le bilan net correspond à la rentrée 2011 à l'ouverture de plus de 135 « équivalents classes ». Je me félicite de ce déploiement de l'offre de formation, qui répond bien à la mission d'aménagement et de vitalisation du territoire de l'enseignement agricole. Je salue tout particulièrement le dynamisme de l'Outre-mer, qui voit globalement l'ouverture nette de plus de neuf nouvelles classes, qui s'ajoutent aux sept ouvertes l'an passé.

Enfin, j'ai le sentiment que désormais les synergies avec le ministère de l'éducation nationale sont systématiquement recherchées et mobilisées afin d'optimiser l'utilisation des moyens. C'est vrai au niveau central pour les éléments fondamentaux des politiques éducatives, les réformes en cours, les référentiels des formations et la conception des épreuves. Mais le niveau régional est également très actif, si j'en juge par la mise en commun de locaux et par l'optimisation de la carte des formations. Les échanges de services d'enseignants entre établissements de l'éducation nationale et de l'agriculture se développent également.

Je salue cette consolidation des coopérations entre l'éducation nationale et l'enseignement agricole, qui s'opère dans le respect des spécificités de chacun. Je veux y voir les prémices de l'âge de la coresponsabilité des deux ministères que j'appelle de mes voeux depuis plusieurs années.

En conséquence, je vous propose de rendre un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Je ne partage pas l'optimisme de la rapporteure. J'alerte sur la situation de choc dans laquelle se trouve l'enseignement agricole depuis plusieurs années. La réduction de l'offre de formation et la dégradation des conditions de travail sont catastrophiques dans les établissements publics. Le ministère met en extinction les classes de quatrième et de troisième dans le public. La situation est tellement difficile qu'elle a abouti au boycott du Conseil national de l'enseignement agricole (CNEA) par les organisations représentatives, ce qui ne s'était jamais vu. L'opacité de la gestion et l'illisibilité des documents budgétaires rendent impossible le suivi de l'exécution du budget et des suppressions de postes. C'est pourquoi je déposerai un amendement sur la mission « Enseignement scolaire » tendant à améliorer l'information du Parlement.

Mme Françoise Cartron. - Est-il vrai que les établissements publics ne représentent que 30 % des effectifs de l'enseignement agricole ? Faut-il y voir une volonté de restreindre la part du public au profit du privé ?

Mme Sylvie Goy-Chavent. - Je salue le travail de Françoise Férat dont je partage pleinement les observations. Le bilan positif des ouvertures de classes doit être souligné ainsi que le travail remarquable de l'enseignement agricole tant public que privé. Le groupe de l'Union centriste républicaine soutiendra ce budget.

M. Jacques-Bernard Magner . - Nous assistons à une véritable mise à mal de l'enseignement agricole public. Je m'en inquiète. L'agriculture industrielle ne nous mène nulle part, il est impératif que les nouveaux agriculteurs soient formés pour qu'ils ne soient pas seulement des chefs d'entreprise mais qu'ils visent la qualité des produits avant tout.

M. Jacques Legendre. - Je veux rappeler notre attachement à l'enseignement agricole public et privé qui permet, notamment, à des jeunes en difficulté de réussir et de trouver un emploi. Quand on parle de son coût, il faut toujours le comparer aux sommes qu'il aurait fallu trouver pour lutter contre le décrochage des jeunes si l'enseignement agricole n'avait pas existé. Il y a deux ans, notre commission n'a pas hésité à émettre un avis négatif sur l'adoption des crédits. Nous avons su, plusieurs années de suite, combattre pour obtenir un financement adéquat de l'enseignement agricole. La présentation du rapporteur était précise et juste. Le budget est équilibré cette année et nous n'aurons pas à prélever des sommes sur le budget de l'éducation nationale.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - L'application de la LOLF nous a en effet conduits à des situations inédites. Mécaniquement, nos amendements qui tendaient à rattraper les carences du ministère de l'agriculture pesaient sur le budget de l'éducation nationale. Quel que soit notre avis sur le budget de cette année, je pense pouvoir dire que l'engagement en faveur de l'enseignement agricole est partagé par tous les membres de notre commission.

Mme Françoise Férat, rapporteur pour avis sur les crédits du programme « Enseignement technique agricole ». - Ma position est claire, je reste prudente et je serai vigilante lors de la négociation et l'application du prochain plan triennal. Si le budget de cette année demeure intéressant, c'est bien parce que nous avons, par le passé, pointé tout ce qui n'allait pas. Comme rapporteur, j'ai vécu d'année en année les conséquences des gels de crédits et des reports de charges ; je salue la volonté du ministre d'obtenir la levée de la réserve de précaution. Quant au boycott du CNEA, il faut souligner que le privé du temps plein est moteur, c'est bien le signe qu'il n'est pas aussi bien traité qu'on voudrait le faire croire. Les maisons familiales et rurales ne sont pas épargnées, non plus, puisque trois mille élèves demeurent non financés par les subventions ministérielles. Je rappelle à mes collègues la situation un peu particulière de l'enseignement agricole dont les effectifs se répartissent en trois tiers à peu près équivalents pour le public, le privé du temps plein et le privé du rythme approprié. Il faut avant tout insister sur l'excellence des formations agricoles, sur la réussite aux examens, la qualité de l'insertion professionnelle des élèves et sur sa capacité de remédiation exceptionnelle.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin, rapporteur pour avis des crédits de l'enseignement professionnel. - La voie professionnelle a subi depuis 2008 une refonte extrêmement brutale et profonde qui n'a quasiment rien épargné de la carte des formations, de la construction des parcours et des modalités pédagogiques d'enseignement. Je n'étais pas opposée par principe à la réduction à trois ans du parcours menant au bac professionnel pour les meilleurs élèves. En revanche, j'ai toujours plaidé pour le maintien en parallèle de l'ancienne voie via le BEP, parce que je m'inquiétais comme les acteurs de terrain du sort des élèves les plus fragiles et des risques d'accroissement des sorties sans qualification. Mes craintes se sont malheureusement confirmées année après année.

La réforme est d'autant plus difficile à mener que les moyens consacrés aux lycées professionnels diminuent. C'est notamment dû à un affaiblissement alarmant des contributions des entreprises via le barème de la taxe d'apprentissage. La collecte et la répartition du produit de la taxe devraient également être revues. Deux points notamment m'ont beaucoup surprise :

1°- au sein du second degré, le public reçoit à peine plus que le privé alors que ce dernier scolarise cinq fois moins d'élèves ;

2°- au sein du second degré public, les lycées généraux et technologiques reçoivent environ 5 % du produit contre moins de 3 % pour les lycées professionnels.

La construction du barème de la taxe et l'affectation des fonds par les organismes collecteurs désavantagent donc très nettement les élèves de l'enseignement professionnel public.

Pour dresser un premier bilan de la réforme, je me suis penchée sur le suivi des élèves de seconde professionnelle. Le ministère de l'éducation nationale a confirmé nationalement un taux de passage d'environ 78 % en Première. En revanche, des taux de redoublements élevés ont été enregistrés, jusqu'à 6 % dans les académies de Lille et de Versailles, soit plus que dans les anciens BEP. Plus gravement, le nombre des sorties du système scolaire a augmenté et atteint presque 15 %. Si cette tendance se confirmait, la réforme se solderait par un accroissement sérieux des inégalités sociales et scolaires, qui signerait son échec et la nécessité d'en revoir profondément l'architecture.

La certification intermédiaire et le contrôle en cours de formation cristallisent une grande partie des écueils de la réforme. La progression pédagogique est perturbée, la charge de planification et d'organisation est démesurée, la fiabilité des évaluations est très incertaine, l'articulation avec l'accompagnement personnalisé et les périodes de formations en entreprise est déficiente.

Les formations de niveau V sont graduellement déprofessionnalisées et vidées de leur substance, ce dont les organisations patronales s'inquiètent d'ailleurs. Parallèlement, la possibilité de poursuite d'études en BTS a été beaucoup trop mise en avant, sans qu'aucun dispositif concret d'accompagnement des bacheliers professionnels ne soit mis en place. Tant du point de vue de la capacité d'insertion sur le marché du travail que des poursuites d'études, la réforme risque de susciter beaucoup de frustration dans les familles et les élèves qui ont cru à la revalorisation de la voie professionnelle.

Ce sont bien sûr les milieux populaires et les moins favorisés qui en paieront le prix. Je rappelle en effet que la moitié des élèves en voie professionnelle sont enfants d'ouvriers, de chômeurs ou d'inactifs, alors qu'ils ne représentent qu'un tiers de l'effectif global du second degré. En un an, les écarts se sont encore accrus avec les enfants d'enseignants, de cadres ou de professions libérales. Tout se passe comme si les catégories sociales au plus fort capital socioculturel fuyaient encore davantage l'enseignement professionnel que par le passé. Ceci donne l'impression d'une réforme non seulement incapable de renverser la logique de tri social qui gouverne notre système d'orientation mais qui s'en accommode et le consoliderait presque.

Enfin, la mastérisation a ouvert une crise majeure de recrutement d'enseignants en lycée professionnel. Les parcours appropriés de master dans les universités ont été mis en place très hâtivement et restent largement invisibles pour les candidats potentiels, ce qui a conduit à un tarissement sans précédent du vivier de candidats. Se prépare ainsi l'affaiblissement des formations dispensées dans les lycées par manque de titulaires bien formés et recours massif à l'emploi précaire. Les difficultés sont accrues par les obstacles mis à la reconversion de salariés. Le Medef et les branches professionnelles s'en alarment et craignent pour le niveau de qualification futur des jeunes.

J'aimerais dire un mot pour conclure sur le service public territorialisé d'orientation issu de la loi de 2009. Le chantier a pris un retard considérable mais je demeure réservée sur ce projet pour les mêmes raisons de principe qui me font repousser toute régionalisation de l'éducation nationale. Un possible transfert aux conseils régionaux de la compétence sur les lycées professionnels, y compris les personnels enseignants, a déjà été évoqué. J'y suis résolument hostile. Les ressources financières des régions sont trop minces et leur expertise pédagogique trop faible. En outre, tout ce qui est de nature à renforcer les inégalités sociales et territoriales entre les élèves doit être combattu. La mise en oeuvre du service public territorialisé de l'orientation doit donc être étroitement surveillée pour qu'elle ne puisse servir d'appui à la régionalisation complète des lycées.

En raison de la déstabilisation actuelle de l'enseignement professionnel, je vous propose de rendre un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission Enseignement scolaire.

M. Jacques Legendre. - Je regrette que la multiplicité des rapports et des délais contraints nous empêchent de débattre tout le temps nécessaire de l'enseignement professionnel, qui est une composante essentielle du système scolaire. Il faudrait nous inquiéter en effet si nous ne pouvions plus disposer en France des capacités professionnelles nécessaires au développement économique de notre pays. La réforme du bac professionnel en trois ans répond à un constat simple. Dans les faits, le BEP a échoué, à la différence du CAP qui a su trouver sa place sur le marché du travail, avec des variations selon les branches professionnelles, bien entendu. C'est pour cela que le BEP a été remplacé par le nouveau cursus menant au bac professionnel qui, j'y insiste, doit absolument demeurer un diplôme permettant l'insertion professionnelle des jeunes. L'augmentation du nombre de bacheliers vient d'abord des réussites au bac professionnel, c'est donc une nécessité d'y faire très attention et de maintenir la qualité de ce diplôme.

M. Jacques-Bernard Magner. - C'est à se demander si la réforme du bac professionnel n'avait pas seulement pour objectif d'accélérer les restrictions budgétaires. 450 ETP sont encore supprimés. Les crédits pédagogiques sont amputés de 5 %. Depuis cinq ans, dix-sept lycées ont été fermés. Tout cela s'opère évidemment au détriment des élèves.

Mme Sylvie Goy-Chavent. - Je pense moi aussi que sur des sujets aussi importants, nous avons trop peu de temps pour débattre. Les taux de redoublement et de sortie sans qualification pointés par le rapporteur sont inquiétants. Je crois qu'en amont, il nous faut réfléchir à la question de l'orientation. Comme enseignante de lycée professionnel, combien de jeunes n'ai-je pas rencontré qui ne savaient pourquoi ils étaient inscrits dans telle ou telle filière. Ceci appelle une redéfinition du collège unique et du rapport entre l'école et l'entreprise.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Je partage votre sentiment sur la violence du calendrier. Elle est malheureusement due au renouvellement de notre assemblée et au maintien à date fixe du débat budgétaire. Il est incontestable que l'ordre du jour est insupportablement lourd.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin, rapporteur pour avis des crédits de l'enseignement professionnel. - Comme M. Legendre, je pense que nous ne sommes pas encore au bout de notre réflexion. La question de l'orientation est bien sûr capitale mais le collège unique, si tant est qu'il le soit encore, ne doit pas être remis en cause. Les tendances lourdes repérées sur les sorties du système scolaire confirment malheureusement mes inquiétudes des années passées. Les difficultés sont encore renforcées par l'incapacité de l'éducation nationale à suivre ces cohortes d'élèves sortis des établissements. Un des enjeux cruciaux de la réforme réside dans l'équilibre entre le CAP et le bac professionnel. Le CAP lui-même ne doit surtout pas devenir une voie de relégation sous peine d'affaiblir encore sa capacité d'insertion professionnelle. Le BEP avait l'avantage d'ouvrir un temps de remédiation et de restauration de la confiance en soi des adolescents. Ma conviction est qu'il faudrait maintenir une voie parallèle d'accès au bac professionnel en quatre ans qui débuterait par l'obtention d'un CAP en deux ans.

M. Jacques Legendre. - J'indique que le groupe UMP votera les crédits de la mission « Enseignement scolaire ». Nous souhaitons une hausse de la rémunération des enseignants mais il faut en passer par les suppressions de postes, étant donné l'enveloppe limitée dont nous disposons.

La commission a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

M. David Assouline. - Ce que je vais vous proposer n'est pas habituel. J'ai été nommé rapporteur pour avis sur les médias et la presse. J'avais indiqué dans mon rapport que 20 millions d'euros risquaient d'être ponctionnés sur les crédits de l'audiovisuel public dans le projet de loi de finances rectificative. A ma grande surprise, en deuxième délibération dans la nuit du 16 novembre, l'Assemblée nationale a décidé de supprimer définitivement ces 20 millions d'euros. Elle prend ainsi 15 millions de France Télévisions, 2 millions chez Radio France, 1 million d'Arte, 1 million de l'INA et 1 million de l'Audiovisuel extérieur de la France.

C'est inadmissible. Nous avons adopté un amendement pour faire en sorte que le surplus de recettes publicitaires ne soit pas repris à ces opérateurs. Le COM qui a adopté, et qui prévoyait 20 millions d'euros supplémentaires, est maintenant fragilisé. Je vous propose un amendement visant à rétablir le budget initial que vous, dans les rangs de l'UMP, aviez voté la semaine dernière. Cet amendement va donc complètement dans votre sens. Le Gouvernement, qui s'est opposé à notre amendement sur la régie publicitaire, pourrait venir en séance vendredi et dire : « finalement nous ne prendrons pas le surplus de recettes publicitaires, mais nous prendrons directement 15 millions à France Télévisions ». Les deux mesures cumulées (régie publicitaire et retrait direct) mettraient France Télévisions dans une situation très difficile. L'intersyndicale de Radio France, qui est extrêmement raisonnable, est « sens dessus-dessous ». Le chantier de la Maison de la Radio a tellement de retard qu'ils ne s'en sortent plus, et qu'il n'est plus humainement possible pour eux de faire leur travail de journalistes. Le retrait de 2 millions d'euros est la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Dans l'urgence, puisque nous sommes condamnés à travailler ainsi, je propose de profiter de cette petite fenêtre pour résister et voter cet amendement. Il est très simple : il reprend le budget initial.

M. Jean-François Humbert. - En termes de régularité, pouvez-vous me confirmer que la procédure est valide ?

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Je vous le confirme, c'est tout à fait conforme au règlement. Nous n'avons d'ailleurs pas de moyens de faire autrement, puisque la modification de l'Assemblée nationale est intervenue après notre passage en commission et que le délai pour déposer un amendement est fixé à la veille de l'examen de la mission. S'il fallait rendre un avis dans une réunion spécifique, j'aurais dû vous convoquer demain matin. Il m'a semblé plus raisonnable d'examiner cette proposition d'amendement au cours de la présente réunion.

M. Jean-François Humbert. - Bien évidemment, notre groupe ne participera pas au vote. Nous risquerions de revenir demain matin pour un nouvel amendement déposé par M. Assouline qui aura encore oublié quelque chose.

Mme Colette Mélot. - Nous n'avons pas été informés, nous ne souhaitons donc pas prendre part au vote sans concertation préalable.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Chère madame Mélot, je tiens à rappeler que la commission avait exactement la même pratique lorsque M. Thiollière nous proposait des amendements impromptus liés au calendrier de l'Assemblée nationale. C'est aussi désagréable pour moi que pour vous, mais il n'y a aucun moyen de faire autrement.

Mme Françoise Férat. - Je suis la seule représentante du groupe de l'Union centriste et républicaine, je ne positionnerai donc pas.

M. David Assouline. - Juste une mise au point, car je ne laisse jamais rien passer. Mon rapport a été élaboré et mes conclusions de rejet présentées à la commission avant le vote définitif de l'Assemblée nationale. Or une seconde délibération a avancé ce qui était prévu en loi de finances rectificative. Nous sommes obligés d'émettre un avis sur le texte définitif. C'est plutôt à l'honneur de la présidente de nous demander d'émettre collectivement cet avis aujourd'hui.

La commission vote l'amendement, les groupes UMP et UCR ne participant pas au vote.

Simplification du droit et allègement des démarches administratives - Demande de saisine et nomination d'un rapporteur pour avis

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - La proposition Warsmann II de simplification du droit concerne beaucoup de politiques publiques, dont deux sujets relevant de notre compétence : les agences de presse et les architectes. Je vous propose donc de nous saisir pour avis de ce texte et de désigner un rapporteur.

La commission décide de se saisir pour avis de la proposition de loi n° 33 (2011-2012), adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives et désigne M. Claude Domeizel, rapporteur pour avis sur cette proposition de loi.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Nous continuons donc nos travaux : j'appelle M. Jean-Jacques Lozach.

Loi de finances pour 2012 - Mission Sport, jeunesse et vie associative - Examen des rapports pour avis

La commission examine les rapports pour avis de MM. Jean-Jacques Lozach sur les crédits du programme « Sport » et Pierre Martin sur les crédits du programme « Jeunesse et vie associative » de la mission « Enseignement scolaire » du projet de loi de finances pour 2012.

M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis des crédits du programme « Sport » - Madame la présidente, mes chers collègues, pour la discussion sur ce budget 2012, je ne résiste pas à la tentation de vous présenter un petit bilan de la politique sportive menée depuis cinq ans.

Le Président de la République avait pris un certain nombre d'engagements avant son élection. Les deux principaux étaient de porter le budget consacré au sport à 3 % du budget de l'État et de rattacher la politique sportive à un ministère rassemblant les problématiques de santé et de sport.

Or le budget du programme sport représente aujourd'hui 248 millions d'euros, soit moins de 0,1 % du budget de l'État et même en prenant en compte l'ensemble des moyens affectés à la politique du sport, soit 861,3 millions d'euros, ce montant représente moins de 0,3 % du budget de l'État.

Par ailleurs le ministère de la santé et des sports a fait long feu, en disparaissant au mois de novembre 2010, avec la constitution d'un ministère des sports à part entière, dont les personnels sont étonnamment gérés par le secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales.

Aux fluctuations du périmètre de compétences des ministres en charge du sport s'est ajoutée l'instabilité des responsables de cette politique. Cinq ministres en cinq ans avec des périmètres ministériels encore plus fluctuants.

Aucune promesse n'a en fait été tenue. Loin de tenir le cap, le Gouvernement s'est contenté d'une navigation à vue et a fini par s'échouer à la fois sur les rivages de la rigueur budgétaire et sur l'inconstance de sa politique.

La seule réforme d'envergure engagée par le Gouvernement a finalement été la libéralisation des paris sportifs en ligne, qui a été décidée et mise en oeuvre par le ministère du budget ! Les seules avancées législatives en matière sportive ont par ailleurs été d'initiative parlementaire. Le premier bilan sur la loi relative aux paris sportifs en ligne est très mitigé, notamment concernant l'assèchement des paris illicites.

S'agissant de l'analyse des crédits 2012, je constate qu'ils sont en baisse de 4,8 %, la hausse apparente des crédits étant liée au transfert de la masse salariale des centres régionaux d'éducation physique et sportive (CREPS) sur le programme « Sport ».

Le sport de masse est indirectement la première victime de la raréfaction des crédits.

Certes, la dotation budgétaire est complétée par le rattachement d'un fonds de concours alimenté par le Centre national de développement du sport (CNDS), ce qui permet de maintenir au même niveau qu'en 2011 les subventions de l'État aux fédérations.

Mais, c'est le CNDS lui-même qui subit le plus les effets de la rigueur budgétaire, avec des recettes en augmentation très limitée mais des dépenses importantes afin de financer les stades de l'Euro 2016.

Le coût anticipé pour l'État était en 2011 de 150 millions d'euros par an pendant cinq ans. Afin de permettre un financement par le CNDS, le Sénat avait décidé de créer une ressource complémentaire affectée assise sur les mises engagées auprès de la Française des Jeux. Il s'agissait de récolter 24 millions d'euros annuellement, soit 120 millions d'euros au total, 30 millions d'euros étant puisés dans le fonds de roulement du CNDS. Or, on apprend dans le bleu budgétaire que les coûts anticipés sont en fait de 168 millions d'euros, à la charge du CNDS, qui je vous le rappelle, est supposé subventionner le sport amateur au niveau local. Comme si ça ne suffisait pas, le Gouvernement propose à l'Assemblée nationale de plafonner le montant affecté au CNDS de la taxe sur les paris sportifs.

Les députés se sont un peu rebellés : le rapporteur de la commission de la culture, M. Bernard Depierre, membre de la majorité à l'Assemblée nationale, est parvenu à faire adopter en commission, puis en séance publique l'augmentation du taux du prélèvement exceptionnel sur les mises de la Française des Jeux et le relèvement du plafonnement de 24 à 28,5 millions d'euros afin de permettre au CNDS de faire face à l'augmentation de la surcharge annoncée de 18 millions d'euros.

Malheureusement, le Gouvernement en seconde délibération est parvenu à ce que l'Assemblée revienne sur cette disposition. Je vous proposerai donc d'adopter un amendement similaire tendant à permettre au CNDS de financer ses missions. Je fais deux remarques à ce sujet :

- cet amendement est différent de celui que nous avons adopté à l'article 16 ter car il ne s'agit pas d'un simple déplafonnement ;

- un même amendement a été adopté par la commission des finances sur la proposition du rapporteur spécial Jean-Marc Todeschini.

Dans un souci d'actualisation de notre droit et de renforcement des moyens du CNDS, je vous proposerai, par ailleurs, d'adopter un amendement d'élargissement de l'assiette de la taxe « Buffet ».

S'agissant du sport de haut niveau j'aurai trois commentaires :

- le financement de la garantie contractuelle due par l'État au consortium du Stade de France en l'absence de club résident est de plus en plus lourd : 12 millions d'euros en 2012. Une réflexion devrait certainement porter sur les moyens de baisser cette dotation ;

- le nombre d'emplois en fonction dans les CREPS est en forte diminution (- 53 ETP, soit presque 5 %) et je m'interroge sur leur capacité à mener à bien leur mission ;

- enfin, comme je l'ai déjà dit les primes versées aux médaillés olympiques n'ont pas été provisionnées. C'est contraire à la tradition et au principe de sincérité budgétaire ; c'est une mini-bombe à retardement pour le ministre qui devra trouver les financements à la fin de l'année 2012.

Les crédits que le ministère consacre en propre à la lutte contre le dopage sont encore en baisse pour 2012. Je pense que ce constat renforce la position de la commission qui souhaite élargir les pouvoirs de l'Agence française de lutte contre le dopage et consolider son financement.

Enfin, le programme « animation sport » voit ses crédits baisser de 22 % alors qu'il s'agit de l'un des rares dispositifs gérés par le ministère des sports consacré aux jeunes, notamment issus des zones urbaines sensibles.

Pour l'ensemble de ces raisons, je vous proposerai de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits relatifs au sport dans la mission « sport, jeunesse et vie associative ».

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Nous pouvons maintenant examiner les amendements dont vous venez de nous parler.

M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis des crédits du programme « Sport ». - Le premier amendement que je vous propose concerne la possibilité d'accorder 18 millions d'euros au CNDS, mais en procédant à une augmentation du taux et du plafond du prélèvement sur les mises de la Française des Jeux, dit prélèvement « Trucy » du nom de notre collègue. Le taux pourrait ainsi passer de 0,3 à 0,36 % pour la période 2011-2015 afin de financer la construction des stades de l'Euro 2016. Il s'agit de neutraliser les 18 millions d'euros qui viennent d'être demandés au CNDS.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Je mets aux voix cette proposition d'amendement. Il est adopté.

M. Jean-François Humbert. - Je voudrais indiquer que le groupe UMP ne participe pas au vote sur ces deux propositions d'amendement.

M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis des crédits du programme « Sport » - Le deuxième amendement vise à réparer une injustice qui pénalise les organisateurs d'événements sportifs. En effet, la taxe dite « Buffet » de 5 % sur la commercialisation des droits sportifs aux télévisions françaises ne s'applique aujourd'hui qu'aux organisateurs français de manifestations sportives, ce qui est discriminatoire à leur égard. Il s'agit de faire en sorte que quelque soit la nationalité de l'organisateur d'une manifestation sportive, ce prélèvement s'opère.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Je mets aux voix cette proposition d'amendement. Il est adopté.

M. Pierre Martin, rapporteur pour avis des crédits du programme « Jeunesse et vie associative ». - Lorsqu'on parle de l'UEFA, de la Fédération des sports automobiles, je pense qu'il aurait fallu interroger ceux qui revendent leurs droits. Seront-ils favorables à les revendre en France s'ils sont désormais taxés ?

M. Jacques-Bernard Magner. - Le rapporteur a cité cinq ministres en cinq ans. Je dirai même neuf si on considère les ministres de tutelle et les secrétaires d'État. Neuf ministres et secrétaires d'État se sont penchés sur les crédits du sport sur les cinq dernières années qui représentent 0,15 % du budget de l'État. Il s'est surtout agi de privilégier le sport d'élite et le sport spectacle en niant toute pratique individuelle et tout sport amateur avec l'aspect positif de ce dernier pour la santé des jeunes en particulier.

Ces ministres ont fait fi des actions des associations, des auxiliaires du service civique, des expérimentations de la jeunesse au détriment des missions de service public et de la contribution à la cohésion sociale. On a vu disparaître, avec la révision générale des politiques publiques (RGPP), au niveau du réseau sport, jeunesse et vie associative les directions régionales et départementales de la jeunesse et des sports qui constituent un échelon de proximité. C'est donc toute la proximité du sport amateur qui disparaît. Le volet jeunesse et vie associative a aussi perdu beaucoup de ses moyens. Sa montée en charge budgétaire n'est due qu'à celle du service civique.

Il existe un désengagement massif du Gouvernement concernant le mouvement associatif. Tous les programmes qui soutenaient les nombreuses actions de la jeunesse et de l'éducation populaire en direction des populations souffrent aujourd'hui de la stagnation budgétaire après des réductions drastiques. Aujourd'hui, l'État ne soutient plus le mouvement associatif qui pourtant assure une mission de service public et contribue dans nos territoires à la cohésion sociale.

Les associations de jeunesse et d'éducation populaire qui avaient développé des partenariats privilégiés avec plusieurs ministères et avec les collectivités territoriales se sentent trahies. Elles risquent de payer un très lourd tribut suite à l'effet de ciseau dévastateur pour le budget de ce secteur.

On constate, à l'heure actuelle, une disparition de la notion d'éducation populaire dans la politique du Gouvernement. La direction de la jeunesse et de la vie associative survit mais est rattachée à un ministère de la jeunesse et des solidarités actives. Elle n'a plus du tout les mêmes objectifs qu'auparavant. Elle n'existe plus qu'à travers deux actions qui résument la politique du Gouvernement en direction de la jeunesse et du monde associatif, le service civique et le fonds d'expérimentation pour la jeunesse. Ces deux actions siphonnent à elles-seules le peu de crédits qu'il restait dans ce secteur.

La réduction des dépenses et la mise en oeuvre du service civique consommatrice de crédits a conduit le ministère à supprimer beaucoup de dispositifs. Face à cette situation, je voterai contre ces propositions budgétaires pour 2012.

M. Pierre Martin, rapporteur pour avis des crédits du programme « Jeunesse et vie associative ». - Les crédits du CNDS sont relatifs en particulier au championnat d'Europe. Qui est contre ? Dans certains secteurs, on a un partenariat public-privé, on a parfois l'implication des collectivités territoriales. On ne peut pas généraliser et dire que le CNDS a une enveloppe de 150 millions d'euros à mettre et pas plus.

La convention sur le Stade de France ne date pas d'aujourd'hui. Nous nous devons de la respecter. Lorsque cette convention arrivera à son terme, une nouvelle discussion pourra s'engager. L'absence de club résident est un vrai problème. Par ailleurs, alors que s'y organisait les matchs du tournoi des cinq nations, la Fédération française de rugby évoque la possibilité de construire son stade. Le PSG va également disputer une grande partie de ses matchs au Stade de France pendant la restauration du Parc des Princes. Il faut voir où on en est, car il est parfois difficile de s'y retrouver. En outre la Fédération française de rugby ne loue pas toujours tout le Stade de France durant les matchs. Sans l'ensemble de ces éléments, nous devrions avoir du mal à nous prononcer.

La taxe Buffet est une affaire de moyens. L'imposer à tous les organisateurs revient à faire payer un supplément aux télévisions françaises pour retransmettre les événements sportifs en France. Je dis donc prudence, d'autant que nous avons eu peu de temps pour nous pencher sur ces sujets.

M. Michel Le Scouarnec. - J'ai reçu des représentants du SNEP. Ils m'ont indiqué que 35 millions de Français pratiquent un sport dont 16 millions de licenciés en France. C'est considérable. Au niveau des lycéens, l'enseignement est limité à deux heures, ils souhaiteraient pouvoir passer à trois heures, à défaut d'un idéal de quatre heures.

Le ministre des sports, M. David Douillet, nous a précisé que le sport pesait dans notre pays 36 milliards d'euros. L'État avec le CNDS et l'enseignement n'y consacre que 3 milliards d'euros. 16 milliards d'euros sont assurés par les familles et les licenciés, le reste étant pris en charge par les collectivités territoriales.

On souffre d'une absence de moralisation dans le sport. Peut-on faire quelque chose pour moraliser les transferts ? Une taxe permettrait d'apporter de l'argent au sport amateur et d'irriguer l'ensemble du territoire. Il faut travailler sur cette piste de l'équité et de la moralisation en faveur du sport amateur.

M. David Assouline. - Je rappelle qu'hier en séance publique, un amendement tendant à ne pas soumettre au rabot le CNDS a été rejeté par vos amis politiques dans l'hémicycle. C'est pareil pour le cinéma, le livre, la chanson française... Je voulais juste le signaler.

M. Philippe Madrelle. - Pour la construction de ces grands stades, l'État se défausse systématiquement sur les collectivités territoriales. C'est invivable en termes de transfert de charges. Cela ne concerne que le sport spectacle. C'est une insulte à ceux qui ont des difficultés financières. Je signalerai que le club d'Arsenal a reconstruit son stade sans faire appel aux contribuables.

M. Jean-François Humbert. - Ce sont les Émirats arabes unis qui sont derrière le club d'Arsenal. Comme le PSG, ces clubs sont vendus à des étrangers.

M. Philippe Madrelle. - On est dans le sport spectacle.

M. Pierre Martin, rapporteur pour avis sur les crédits du programme « Jeunesse et vie associative » - Avant tout, je regrette notre façon de travailler, je remarque l'absence de nombreux collègues comme chaque année à cette même période, le Congrès des maires se réunissant cette semaine à la Porte de Versailles. De plus, aujourd'hui, il y a l'élection du président de l'Association des maires de France (AMF).

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - Je note vos propos que nous prendrons en considération dans l'avenir. Mais il était difficile de faire autrement cette année, compte tenu du renouvellement sénatorial.

M. Pierre Martin, rapporteur pour avis sur les crédits du programme « Jeunesse et vie associative ». - Je tiens à vous préciser en premier lieu que les crédits jeunesse et vie associative de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » relève du ministère de l'éducation nationale.

Contrairement aux analyses de mon collègue Jean-Jacques Lozach, je souhaiterais donner un satisfecit à l'action de ce Gouvernement en matière de politique de la jeunesse.

L'un des grands axes annoncés était la création d'un service civique volontaire ambitieux et nous y sommes parvenus. Là où les précédents gouvernements avaient « patiné » lors des précédentes législatures, notamment avec l'échec du service civil volontaire, la réforme du service civique, qui s'est voulue consensuelle a été menée à bien et ne pâtit des efforts que l'État doit mener en matière de réduction du déficit.

Le programme 163 regroupe 230 millions d'euros de crédits de paiement en PLF 2012 soit une hausse de 7,2 % par rapport à 2011. Je rappelle que cette augmentation confirme celles de 2011, à hauteur de 10 % et celle de 2010, de plus de 60 %.

En matière de développement de la vie associative, le Gouvernement mène une politique de continuité avec un soutien au conseil du développement de la vie associative et un maintien des subventions FONJEP aux centres de ressources et d'information des bénévoles, comme l'a annoncé le ministre en commission la semaine dernière. L'action n°1 est ainsi financée à hauteur de 12,2 millions d'euros soit davantage qu'en 2010.

Les autres politiques de la jeunesse ont ensuite été, soit préservées, soit encouragées.

Le service civique est en ordre de marche : 25 000 volontaires devraient pouvoir s'engager dans le dispositif en 2012 avec un soutien de l'État à hauteur de 134 millions d'euros, contre moins de 100 millions d'euros en 2011. L'objectif des 10 % d'une classe d'âge n'est pas atteint mais nous sommes sur la bonne voie.

Le fonds d'expérimentation jeunesse dispose lui d'une dotation de 5,7 millions d'euros en 2012 et d'un budget de 40 millions d'euros grâce aux crédits versés dans le cadre du plan de relance et ceux des contributeurs privés. Les premiers résultats sont intéressants.

Les opérateurs de l'État sont quant à eux préservés avec des subventions stables :

- pour les offices franco-allemands et franco-québécois pour la jeunesse, à hauteur de 12,5 millions d'euros en tout ;

- pour l'institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire dont le format a été revu en 2010 et qui s'est recentré sur ses missions de centre de ressources pour les acteurs de la jeunesse et de l'éducation populaire à hauteur de 3,3 millions d'euros ;

- et pour le centre d'information et de documentation jeunesse et les centres régionaux, à hauteur de 8,6 millions d'euros.

Le programme « Envie d'agir » dont les crédits avaient été supprimés en 2011, est doté de 3 millions d'euros dans le PLF 2012. Élément de souplesse intéressant : cette dotation pourra également servir pour des projets présentés à l'initiative de jeunes dans le cadre d'autres dispositifs partenariaux.

S'agissant des politiques partenariales locales, la diminution des crédits est stoppée et elles sont dotées de 12,9 millions d'euros dans le PLF 2012 ce qui devrait permettre aux services déconcentrés de remplir leurs missions.

Enfin, le volet animation du « programme animation sport » est supprimé. Les crédits afférents étaient extrêmement limités et ne constituaient pas une masse critique suffisante permettant de donner du souffle au dispositif. Je considère que la réaffectation des crédits au service civique est particulièrement pertinente. En effet, ce service civique constitue un outil très formateur pour les jeunes volontaires et les résultats en matière de diversité sociale sont plutôt positifs selon les indicateurs de la mission. Je considère sur ce sujet qu'un nouvel indicateur sur les origines géographiques des engagés serait très intéressant.

Pour l'ensemble de ces raisons, je vous proposerai de donner un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs à la jeunesse et à la vie associative dans la mission « sport, jeunesse et vie associative ».

M. Michel Le Scouarnec. - Concernant l'éducation populaire, j'ai reçu les syndicats qui sont en pleine détresse devant la diminution des postes. J'ai le regret de vous dire que c'est un métier en voie de disparition.

Mme Claudine Lepage. - Vous avez dit, M. le rapporteur, que les objectifs en termes d'effectifs prévus pour le service civique n'étaient pas atteints. Nous manquons de visibilité. Je m'interroge sur les moyens utilisés pour la promotion du service civique. Par ailleurs, l'objectif de mixité sociale n'est pas atteint non plus. Que prévoyez-vous pour atteindre cet objectif ?

Mme Françoise Laborde. - Je m'abstiendrai sur les crédits de cette mission.

Je suis favorable au service civique, le RDSE ayant été porteur de la proposition de loi. Mais je ne souhaite pas voir utiliser l'argent du service civique au détriment d'autre chose. Est-ce dans cette mission que l'on retrouve la problématique sur les colonies de vacances ?

M. Pierre Martin, rapporteur pour avis sur les crédits du programme « Jeunesse et vie associative ». - Selon mes informations, les moyens ont été maintenus auprès des associations pour leur fonctionnement.

Sur le service civique, la campagne médiatique n'a pas été assez forte et les moyens sans doute insuffisants. Mais cela a évolué. Si l'objectif de mixité sociale est une priorité, nous constatons qu'environ 85 % des jeunes participants à cette formation sont diplômés. Or, nous souhaiterions ne pas léser les moins formés.

M. Jean-Jacques Lozach. - Le Gouvernement a-t-il confirmé son objectif d'atteindre 10 % d'une tranche d'âge, car cela représente quelque 75 000 contrats signés ?

M. Pierre Martin, rapporteur pour avis sur les crédits du programme « Jeunesse et vie associative ». - C'est vrai que dans la durée, il peut se produire des événements, les objectifs peuvent être revus, et plus souvent à la baisse. Mais le service civique va dans le bon sens.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. - A propos de l'interpellation de Mme Laborde sur la conformité des horaires concernant les animateurs de colonies de vacances suite aux remontrances de l'Union européenne, confirmée par le Conseil d'État, le ministère pensait introduire des éléments nouveaux dans le cadre de la proposition de loi de M. Warsmann relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives. Mais devant l'urgence, les organisateurs de voyage devant éditer leurs catalogues de vacances en janvier, ces dispositions pourraient être inclues dans la proposition de loi de M. Kert déposée sur le bureau de l'Assemblée nationale visant à renforcer les conditions de sécurité des mineurs accueillis dans le cadre d'un séjour à l'étranger.

La commission donne un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».