COMMISSIONS MIXTES PARITAIRES

Mardi 3 mai 2011

- Présidence de M. Christian Kert, député, président -

Commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative au prix du livre numérique

La commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative au prix du livre numérique s'est réunie le mardi 3 mai 2011 à l'Assemblée nationale.

Elle a tout d'abord procédé à la désignation de son bureau, qui a été ainsi constitué :

- M. Christian Kert, député, président ;

- M. Jacques Legendre, sénateur, vice-président.

La commission a ensuite désigné :

- M. Hervé Gaymard, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale ;

- Mme Colette Mélot, sénateur, rapporteur pour le Sénat.

La commission a ensuite procédé à l'examen des dispositions restant en discussion.

M. Christian Kert, député, président. - Cette commission mixte paritaire est la première à être réunie à l'Assemblée nationale depuis la création de la commission des affaires culturelles et de l'éducation. Je souhaite la bienvenue au président Legendre ainsi qu'à nos collègues sénateurs et je rappelle que quatre articles restent en discussion : l'article 2, l'article 3, l'article 5 bis et l'article 7.

M. Hervé Gaymard, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Dans nos deux assemblées, les débats ont été très riches et nous pouvons nous féliciter d'examiner le premier texte au monde à légiférer sur ce nouveau monde en mutation qu'est le livre numérique.

Quels que soient nos groupes ou nos assemblées, nous menons le même combat en faveur de la diversité culturelle et de la rémunération de la création. Nous souhaitons tous éviter que le numérique ne devienne une jungle qui tue la création.

S'agissant des articles 2, 5 bis et 7, nous avons amélioré conjointement la rédaction de la proposition de loi et, à l'issue des débats à l'Assemblée nationale en deuxième lecture, ces dispositions paraissent équilibrées.

En ce qui concerne l'article 3, nous poursuivons le même objectif, c'est-à-dire la fixation du prix du fichier par l'éditeur, avec toutefois une divergence d'appréciation sur l'extraterritorialité de ces dispositions. Pour autant, je suis prêt à me rallier à la rédaction souhaitée par le Sénat.

Mme Colette Mélot, rapporteur pour le Sénat. - Je suis convaincue que nous pourrons trouver un accord susceptible à la fois de conforter la validité juridique du texte et de satisfaire l'ensemble des objectifs exprimés par les uns et les autres au cours des deux lectures au Sénat et à l'Assemblée nationale.

Il me semble qu'à l'article 2, nous pourrions accepter la rédaction adoptée par les députés, une disposition pour le commerce transfrontière concernant les éditeurs ne s'imposant pas, en définitive. Nous proposons ainsi de tenir compte des avis circonstanciés de la Commission européenne et de répondre aux impératifs de nécessité et de proportionnalité des mesures retenues afin d'atteindre nos objectifs.

En revanche, nous estimons qu'une disposition de cette nature est indispensable à l'article 3 qui, je le rappelle, impose au libraire de respecter le prix de vente fixé par l'éditeur. Nos collègues députés avaient souhaité n'obliger - par la loi - au respect du prix unique que les détaillants établis en France, tout en complétant l'article par une disposition tendant à encadrer les contrats passés entre éditeurs et détaillants établis hors de France. Une telle disposition pouvait paraître séduisante mais elle s'avère de facto sans effet juridique réel, voire même contreproductive et de nature à fragiliser la sécurité juridique de l'ensemble de la proposition de loi, au regard du droit communautaire et du droit de la concurrence.

En outre, l'examen des règles du droit civil, du droit international privé et du droit communautaire montre que la disposition adoptée par l'Assemblée nationale ne permettrait pas d'atteindre nos objectifs. Pour avoir quelque effet, une telle disposition supposerait tout d'abord que la loi applicable aux parties au contrat soit la loi française. Or, les parties déterminant la loi applicable, et compte tenu des rapports de force en présence, il y a peu de chances que ce soit le cas. En effet, il n'est pas évident qu'un éditeur établi en France puisse imposer à une plate-forme internationale une clause d'application du droit national ; d'ailleurs tel n'est pas le cas aujourd'hui. En cas de silence du contrat sur ce point, les règles du droit international s'appliquent. Or, en application du règlement européen « Rome I » du 17 juin 2008 et de l'article 17 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, qui transpose la directive dite « commerce électronique », la loi applicable au contrat sera celle du détaillant établi hors de France.

Le fait de cumuler nos deux rédactions ne serait pas plus efficace et introduirait même une confusion, laissant supposer que la rédaction proposée par le Sénat était insuffisante.

Celle-ci se suffit pourtant à elle-même. En outre, le caractère de « loi de police » dont on peut qualifier la présente proposition de loi, en application du règlement européen dit « Rome I », devrait permettre son application à tous.

En effet, cette qualification - qui certes ressort des compétences du juge au regard des travaux préparatoires du Parlement - nous semble clairement résulter des engagements internationaux de la France, et de l'Union européenne, au titre de la Convention de l'Unesco de 2005 sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles. Notre proposition de loi apparaît à ce titre impérative pour la sauvegarde de cette diversité culturelle, qui représente un intérêt public majeur.

Par conséquent, nous proposons d'opter pour la rédaction adoptée à l'unanimité par le Sénat, à l'initiative de notre collègue Jean-Pierre Leleux, la pleine efficacité du dispositif supposant son application à l'ensemble des libraires exerçant leur activité sur le territoire national.

Nous pourrions en revanche nous rallier à la rédaction, semble-t-il consensuelle, à laquelle sont parvenus nos collègues députés à l'article 5 bis, en vue de garantir aux auteurs une rémunération juste et équitable, en cas d'exploitation numérique de leur oeuvre. Il me semble que le souhait ainsi exprimé par notre collègue David Assouline, et partagé par l'ensemble des sénateurs, se trouve ainsi satisfait.

Enfin, s'agissant du rapport annuel que le Gouvernement devra présenter au Parlement, les précisions apportées par l'Assemblée nationale à l'article 7 nous paraissent très utiles : elles font référence au développement de l'offre légale, à la rémunération des auteurs et elles spécifient dans la loi son objectif premier de diversité culturelle.

M. Marcel Rogemont, député. - S'agissant de l'opportunité de cette proposition de loi, elle est incontestable. Le Parlement doit être au rendez-vous du numérique.

Le travail parlementaire a été fructueux et démontre l'utilité des « navettes », qui permettent de rapprocher les points de vue des deux assemblées. L'article 5 bis illustre bien cette volonté de travail en commun.

Nous nous montrerons cependant attentifs à la mise en oeuvre d'une des conclusions du rapport de M. Bruno Patino sur le livre numérique concernant les contrats de cession des droits d'exploitation, les contrats « papier » et les contrats « numériques » devant être disjoints pour traiter efficacement cette question.

Sur l'extraterritorialité des dispositions de notre texte, je souscris à l'analyse développée par Mme Colette Mélot. La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale nous semble en effet largement insuffisante.

M. David Assouline, sénateur. - Chaque fois que nous avons dû légiférer sur les conséquences de la révolution numérique, nous n'avons pas su créer le consensus.

Au Sénat, sur le présent texte, nous avons essayé de nous écouter mutuellement afin d'aboutir sur ce texte à une position commune.

La rédaction proposée par le Sénat pour l'article 2 était importante, mais il nous faut rédiger ensemble et nos deux assemblées doivent être capables de s'accorder. Il ne me semble pas dès lors déraisonnable d'abandonner notre rédaction au profit de celle de l'Assemblée nationale.

En ce qui concerne l'article 5 bis, je souscris à l'analyse de notre rapporteur. Mais il me semble que subsiste soit un désaccord, soit un malentendu.

La rédaction proposée par l'Assemblée nationale me convient, à ceci près qu'elle ne figure plus dans le code de la propriété intellectuelle, ce qui lui fait perdre sa valeur.

Les auteurs doivent pouvoir s'appuyer sur la loi pour créer un rapport de force. On ne peut avoir souligné l'importance des droits d'auteur dans le débat sur la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet (HADOPI) et envoyer ici un signal inverse. Ce signal est d'autant plus attendu par les auteurs que les économies générées, dans d'autre pays, par le recours à l'édition numérique sont considérables.

Je propose donc une rédaction qui complète l'article 5 bis dans le texte de l'Assemblée nationale pour le codifier à l'article L. 132-5 du code de la propriété intellectuelle.

M. Hervé Gaymard, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Sur l'article 3, nous poursuivons tous le même objectif ; je me rallie à la proposition du Sénat, car de la même manière « qu'il faut savoir terminer une grève », il faut savoir terminer une loi.

J'admets que la rédaction que nous avions adoptée n'était pas exempte de quelques fragilités juridiques. Cependant, la rédaction du Sénat comporte aussi une fragilité intrinsèque. Certes, nous faisons un acte politique, mais il ne faudrait pas penser que ce texte est parfait.

« Il n'est rien de plus menteur que l'unanimité » dit-on... Nous allons ainsi aboutir ainsi à un consensus sur l'article 3, mais cela ne nous interdit pas d'être réalistes. Pas de triomphalisme donc ! La loi devra certainement être remise sur le métier.

S'agissant de l'article 5 bis, la proposition de rédaction de M. David Assouline me convient. Je souligne toutefois que nos deux assemblées devront mener une réflexion approfondie sur l'application du droit de la propriété intellectuelle à l'univers du numérique. Cette réforme ne peut se faire à la sauvette et il conviendra de s'interroger sur l'opportunité d'une loi spécifique ou de la transposition du droit issu de la loi de 1957 à l'univers numérique.

Mme Colette Mélot, rapporteur pour le Sénat. - Loin de tout triomphalisme, nous poursuivons un même objectif en la matière. D'autre part, comme M. David Assouline, il me semble souhaitable que la disposition de l'article 5 bis, telle que rédigée par l'Assemblée nationale, reste introduite dans le code de la propriété intellectuelle, comme le prévoyait le Sénat. Il est en effet important que tous les acteurs de la filière puissent bénéficier de ce nouveau marché ; il appartiendra au comité de suivi de la loi d'ajuster ce dispositif.

M. Patrick Bloche, député. - La démarche consensuelle qui est la nôtre est heureuse, car si le texte de la proposition de loi est adopté à l'unanimité, il n'en aura que plus de force. Le vote unanime du Parlement français n'aura certes pas tout résolu, mais il constitue un point d'appui non négligeable : gagnée ou perdue, une bataille doit d'abord être engagée. En plus du Parlement, le Gouvernement doit prendre toute sa place dans cette bataille communautaire.

S'agissant de l'article 5 bis, ses dispositions n'en sont pas secondaires : s'il est bien que soient pris en compte les intérêts des éditeurs et des distributeurs et que ne soient pas pénalisées les plateformes de vente installées en France, il convient de ne pas oublier les auteurs, sans lesquels il n'est pas d'oeuvre. Aussi l'insertion des mesures touchant leur rémunération dans le code de la propriété intellectuelle n'est pas qu'une formalité. L'échec, acté la veille du Salon du livre, d'un accord entre les partenaires sur les préconisations du rapport de M. Bruno Patino sur le livre numérique conduit le législateur à créer le cadre législatif définissant les rapports entre les plus faibles, les auteurs dans la majorité des cas, et les plus forts, les éditeurs. Notre groupe aurait souhaité aller plus loin, nous nous contenterons pour le moment d'un texte qui est une première étape.

M. Jean-Pierre Leleux, sénateur. - Il semble que l'on s'achemine vers un texte de convergence. Un vote unanime du Parlement français donnera de la force à notre position dans le dialogue qui va s'engager avec la Commission européenne. Les deux avis rendus par la Commission sur cette question montrent d'ailleurs qu'elle est interpellée par la problématique du prix unique du livre. Une lecture attentive des pages conclusives de ces avis me semble plutôt montrer une invitation à plaider notre cause et à fournir des arguments à l'appui de notre défense de la diversité culturelle par le biais de ce texte, ainsi que nous avons pu le faire dans le cadre de l'adoption de la convention de l'UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles. Nous devons être les artisans de ce combat auprès de la Commission. Je suis également favorable à l'insertion des dispositions de l'article 5 bis dans le code de la propriété intellectuelle.

M. Jack Ralite, sénateur. - Mon intervention ira dans le même sens que celles qui ont précédé. La préparation de la proposition de loi par le Sénat, tout comme l'adhésion du rapporteur de l'Assemblée nationale à notre travail, montrent clairement notre volonté de contrer la remise en cause constante, au plan européen, du droit d'auteur. Ainsi, presque tous les textes actuellement discutés sont accompagnés d'avis qui militent contre le droit d'auteur.

Dans les discussions autour de la convention de l'UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, d'aucuns nous ont fait remarquer qu'il fallait changer et s'adapter. Or, si de nouveaux outils appellent parfois une pensée nouvelle, elle est ici destructrice. Force est de constater également que le droit moral, qui est une des spécificités françaises, a cessé d'être nommé et d'être mis en application, y compris chez les auteurs eux-mêmes.

Le texte, tel qu'il est, traduit la volonté de porter un coup d'arrêt à ces remises en cause. Je me réjouis que le rapporteur de l'Assemblée nationale ait souligné que nous sommes les premiers au monde à légiférer dans ce domaine. Cette ouverture devrait ainsi rallier l'évolution et l'héritage. La jungle numérique est à notre porte. Mais la méthode retenue pour y faire face, même fragile, est la bonne. En outre, la Commission européenne, si j'en juge par ses avis, semble autant concernée par la question du prix unique du livre que par celle de l'extraterritorialité. Notre travail d'aujourd'hui est un pas, petit mais réel, en défense de la création.

Mme Catherine Dumas, sénatrice. - Le texte de la proposition de loi, initiée par M. Jacques Legendre et moi-même, a progressé ; je voudrais à cet égard remercier les députés et le rapporteur de l'Assemblée nationale pour les échanges fructueux qui nous permettent aujourd'hui d'aboutir à un texte qui conforte notre culture mais aussi le rôle du Parlement.

Mme Catherine Morin-Desailly, sénatrice. - Je souscris au texte final, tel qu'il se dessine, qui est équilibré et qui témoigne de la convergence du travail de nos deux assemblées. C'est un signe fort destiné aux milieux de la création. Cependant, comme le soulignait le rapporteur de l'Assemblée nationale, les évolutions techniques sont telles aujourd'hui que, quel que soit le texte, comme on le constate depuis la loi du 1er août 2006 relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, la législation dans ce domaine est un chantier continu. La question de l'applicabilité des mesures prises se pose à chaque instant dans le domaine si complexe de l'Internet. Le combat de conviction à mener au niveau de la Commission européenne devrait faire valoir qu'un bien culturel, matériel ou dématérialisé, a peu à voir avec un simple service encadré par les directives correspondantes.

Mme Monique Boulestin, députée. - Il est nécessaire de légiférer sur cette problématique d'actualité, certes, mais dont les enjeux culturels et financiers sont très importants. Il est pour cela important que nous le fassions ensemble afin de peser sur les décisions de la Commission européenne. Notre travail n'est en effet que l'amorce de ce qui devra être fait plus tard. C'est ainsi que la rédaction qui vient d'être proposée pour l'article 5 bis me paraît être la meilleure pour garantir aux auteurs que leurs droits seront préservés dans la révolution numérique que nous vivons, reprenant ainsi les conclusions du rapport de M. Bruno Patino sur le livre numérique.

M. Hervé Gaymard, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Nous sommes obnubilés par la Commission européenne, mais le sujet n'est pas qu'européen, il est mondial. Comment traiter une plateforme de téléchargement légal d'un distributeur numérique située à Zurich, Genève ou Alma Ata ? Il faut à cet égard se féliciter de l'initiative française du « G 8 numérique ». Nous avons certes un travail important à faire au niveau européen auprès de la Commission dont la culture intrinsèque est très éloignée de nos préoccupations communes, puisqu'elle repose sur le principe « la concurrence ou la mort ».

Pour consolider ce texte et ses applications en Europe, il s'agit juridiquement d'intégrer l'objectif de diversité culturelle, déjà reconnu dans un certain nombre de textes européens, dans la directive sur les services dans le marché intérieur (« directive services ») et la directive relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (« directive sur le commerce électronique »). La procédure de co-décision, qui associe pleinement le Parlement européen, devra être pleinement prise en compte.

M. Marcel Rogemont, député. - Force est de constater que dans notre société le producteur cède de plus en plus la place au distributeur. Aussi, chaque fois que nous le pouvons, nous tentons d'aider les producteurs. Nous avions pour ce faire envisagé des amendements s'inscrivant dans la logique du rapport de M. Bruno Patino, mais nous souhaitons parvenir à l'élaboration d'un texte unanime, tel qu'il se dessine.

Mme Colette Mélot, rapporteur pour le Sénat. - Au-delà de notre position consensuelle, nous sommes au début d'un combat politique à mener, notamment en direction de la Commission européenne mais aussi d'un combat de société. Il s'agit de savoir quelle société nous devons construire pour demain, dans l'intérêt général du citoyen mais aussi de l'aménagement du territoire et notamment de la place qu'y tiennent les libraires.

M. Jacques Legendre, sénateur, vice-président. - J'ai abordé cette réunion de la commission mixte paritaire avec confiance. Nous tendions tous vers le même objectif, avec la perspective très claire d'une menace réelle. La discussion entre nous ne portait donc que sur les moyens les plus efficaces pour y faire face, dans le cadre européen. Le texte ne pouvait avoir de valeur politique forte que si l'Assemblée nationale et le Sénat, majorité et opposition, étaient d'accord. C'est le cas et je m'en réjouis. Cette condition de l'efficacité de notre combat commun est donc réalisée.

La commission mixte paritaire est ensuite passée à l'examen des articles restant en discussion.

La commission mixte paritaire adopte à l'unanimité l'article 2 dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

La commission mixte paritaire adopte à l'unanimité l'article 3 dans la rédaction du Sénat.

L'article 5 bis est adopté à l'unanimité dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire qui, sur proposition de M. David Assouline, sénateur, insère à l'article L. 132-5 du code de la propriété intellectuelle le texte de l'Assemblée nationale.

La commission mixte paritaire adopte à l'unanimité l'article 7 dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

En conséquence, la commission mixte paritaire adopte ensuite à l'unanimité, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative au prix du livre numérique.

Mercredi 4 mai 2011

- Présidence de M. Jean-Luc Warsmann, député, président -

Commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité

La commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité s'est réunie à l'Assemblée nationale le mercredi 4 mai 2011.

Le Bureau de la commission a été ainsi constitué :

- M. Jean-Luc Warsmann, député, président ;

- M. Jean-Jacques Hyest, sénateur, vice-président.

Puis ont été désignés :

- M. Claude Goasguen, député,

- M. François-Noël Buffet, sénateur,

respectivement rapporteurs pour l'Assemblée nationale et le Sénat.

La commission est alors passée à l'examen des articles restant en discussion.

TITRE PREMIER
Dispositions relatives à la nationalité et à l'intégration

Chapitre unique

Article 2 (art. 21-24 du code civil) : Inclusion de l'adhésion aux droits et devoirs du citoyen français et élévation de la connaissance linguistique exigée pour l'assimilation :

Sur proposition de MM. Claude Goasguen, rapporteur pour l'Assemblée nationale, et François-Noël Buffet, rapporteur pour le Sénat, la commission a adopté l'article 2 dans le texte du Sénat, sous réserve d'une clarification rédactionnelle.

Article 2 bis (art. 21-2 du code civil) : Définition du degré de connaissance de la langue française requis des conjoints de Français pour l'acquisition de la nationalité :

La commission a adopté l'article 2 bis dans le texte du Sénat.

TITRE II
Dispositions relatives à l'entrée et au séjour des étrangers

Chapitre Ier
Dispositions relatives à la zone d'attente

Article 6 (art. L. 221-1 et L. 221-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Délimitation de la zone d'attente en cas d'arrivée massive de migrants :

La commission a adopté l'article 6 dans le texte du Sénat.

Article 7 (art. L. 221-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Procédure de notification des droits en zone d'attente en cas d'arrivée massive de migrants :

La commission a adopté l'article 7 dans le texte du Sénat.

Article 10 (art. L. 222-8 [nouveau] du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Instauration de la règle « pas de nullité sans grief » en matière de prolongation du maintien en zone d'attente par le JLD :

La commission a adopté l'article 10 dans le texte du Sénat.

Article 12 (art. L. 222-6-1 [nouveau] du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : « Purge des nullités » en appel des jugements de prolongation du maintien en zone d'attente :

M. Claude Goasguen, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a proposé de retenir la rédaction de l'Assemblée nationale.

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour le Sénat, a estimé préférable de maintenir le principe dit de l'effet dévolutif de l'appel, concernant le régime des irrégularités pouvant être soulevées pour la première fois en cause d'appel, et donc suggéré à la commission de maintenir la suppression du texte par le Sénat.

M. Jean-Jacques Hyest, vice-président, a également proposé de maintenir la suppression de cet article afin de conserver les règles générales applicables à la procédure d'appel. Il a estimé qu'il existe en effet un risque d'inconstitutionnalité de la mesure prévue par l'Assemblée nationale.

M. Claude Goasguen, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a déclaré se rallier à la proposition de suppression de l'article.

La commission a alors maintenu la suppression de l'article 12 par le Sénat.

Chapitre III
Dispositions relatives aux titres de séjour

Article 17 ter (art. L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Conditions de délivrance de la carte de séjour temporaire en raison de l'état de santé :

M. Richard Yung, sénateur, a rappelé son opposition à cet article. Sans doute le rapporteur du Sénat a-t-il fait adopter une modification de la rédaction retenue à l'Assemblée nationale ; cependant, pour l'essentiel, cette disposition, qui subsiste, aura un effet négatif pour les personnes concernées par la modification des conditions de délivrance de la carte de séjour temporaire en raison de leur état de santé. Il est inexact de prétendre que cette modification répond à un objectif financier : les statistiques du ministère de l'intérieur révèlent que le nombre de personnes concernées a diminué de 20 %. En outre, la rédaction proposée est complexe et sera malaisée à mettre en oeuvre : comment l'autorité administrative pourra-t-elle apprécier l'existence ou non d'une « circonstance humanitaire exceptionnelle » ?

Mme Éliane Assassi, sénatrice, a rappelé combien cet article suscite de mécontentements ; il engendre une véritable mobilisation non seulement des associations, mais également du monde médical, qu'on ne peut pourtant pas taxer de gauchisme ! La question n'est pas de savoir si un traitement contre le virus de l'immunodéficience humaine (VIH), par exemple, existe dans un pays donné, mais de savoir si telle personne peut ou non y avoir effectivement accès : or cet accès est, précisément, extrêmement difficile pour une très grande majorité de malades. Aussi, quelle que soit la rédaction retenue in fine, on ne peut que désapprouver cette mesure.

Mme Sandrine Mazetier, députée, a souligné que cet article ne figurait pas dans la version initiale du projet de loi. Il fait polémique, y compris auprès des médecins, et risque de fait d'envoyer à la mort des malades qui sont, contrairement à ce qui est parfois soutenu, déjà présents en France : il s'agit en effet de la question de la poursuite du séjour de personnes atteintes de pathologies graves. Il y a là un réel scandale, quelle que puisse être la rédaction retenue. C'est pourquoi il convient de supprimer cet article.

M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, a observé de même que, dès lors que l'on considère qu'une personne ne peut être soignée en France si ces soins sont pratiqués dans le pays d'origine de l'intéressé, on ne règle pas la question de l'accès aux soins : ceux-ci peuvent en effet être disponibles pour certains privilégiés seulement, qui ont les moyens de se les procurer, ainsi que le montre l'exemple de la prise en charge du SIDA.

Par ailleurs, on ne peut en effet que s'interroger sur la manière dont les préfets pourront, en pratique, apprécier l'existence d'une « circonstance humanitaire exceptionnelle », pour admettre l'accès à ces soins en France des personnes concernées. De multiples associations se sont élevées contre cette mesure, que le Sénat avait, dans un premier temps, écartée. C'est pourquoi il apparaît indispensable, aujourd'hui, de supprimer cet article.

Mme Alima Boumediene-Thiery, sénatrice, a jugé que cet article porte atteinte au droit humanitaire. De plus, on voit bien qu'il obéit à une logique d'affichage. Or celle-ci est contestée, comme cela a été dit, à la fois par le monde associatif et le milieu médical, ce qui jette un discrédit sur l'action du législateur. Il y a en cette matière un devoir de clarté.

M. Julien Dray, député, a insisté sur le fait que ce débat n'est pas nouveau, puisque la loi Debré de 1996 l'avait déjà abordé ; mais, à peine quelques mois après l'adoption de la loi, il avait fallu accueillir des malades d'origine tunisienne atteints du VIH... Cette forme de continuité conduit à reproduire les mêmes bêtises !

Il serait utile de savoir combien de personnes sont concernées par cette disposition. De nombreux fantasmes existent, autour de l'image de l'invasion des hôpitaux...

M. Claude Goasguen, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a fait observer que c'est l'évolution de la jurisprudence, par deux arrêts du 7 avril 2010, qui a conduit le Parlement à préciser le droit : la loi n'est aujourd'hui pas claire, ce qui cause une instabilité propice à toutes formes d'interprétations par les tribunaux. Le texte retenu par le Sénat présente le double avantage de la clarté et d'une ouverture.

Il faut par ailleurs préciser que les circonstances de l'espèce seront appréciées non par le préfet, mais par le directeur général de l'autorité régionale de santé (ARS) compétente.

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour le Sénat, a indiqué qu'en 2009, quelque 6 000 titres de séjour correspondaient à la situation prise en compte par cet article.

La commission a adopté l'article 17 ter dans le texte du Sénat.

Article 21 ter (art. L. 623-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sanction pénale des mariages « gris » :

La commission a adopté l'article 21 ter dans le texte du Sénat.

TITRE III
Dispositions relatives aux procédures et au contentieux de l'éloignement

Chapitre Ier
Les décisions d'éloignement et leur mise en oeuvre

Article 23 (art. L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Unification de la procédure administrative d'éloignement des étrangers en situation irrégulière -- Création d'une interdiction de retour sur le territoire français :

La commission a adopté l'article 23 dans le texte du Sénat.

Article 26 (art. L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Coordination en matière de protection contre les reconduites à la frontière :

La commission a adopté l'article 26 dans le texte du Sénat, modifié par l'adoption d'une proposition de rédaction des deux rapporteurs, pour coordination avec la rédaction retenue à l'article 17 ter.

Article 30 (art. L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Placement en rétention par l'autorité administrative pour une durée de cinq jours :

M. Claude Goasguen, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a proposé de retenir la rédaction de l'Assemblée nationale : les syndicats de magistrats administratifs ont évoqué la désorganisation considérable des tribunaux qu'engendrerait la rédaction retenue au Sénat. En outre, le vice-président du Conseil d'État ne serait pas opposé à cette solution. Enfin, même si cette dernière ne préserve pas de toute incertitude de nature constitutionnelle, la difficulté subsisterait avec le délai de quatre jours prévu par le Sénat.

M. Jean-Jacques Hyest, vice-président, a rappelé avoir proposé d'abaisser le délai de rétention administrative préalable à l'intervention du juge judiciaire de cinq à quatre jours pour des raisons constitutionnelles et a déclaré, quel que soit ce délai, approuver le principe d'une meilleure articulation des contentieux. De fait, le vice-président du Conseil d'État a invoqué des difficultés d'application importantes si le délai était porté à cinq jours. Un risque constitutionnel subsiste. Toutefois, à défaut d'unité juridictionnelle qui présenterait l'avantage de la cohérence -dans ce cas, il conviendrait que le contentieux soit confié au juge judiciaire- l'essentiel est de faire converger les efforts en vue d'une meilleure procédure, au profit de la prise de décision sur le fond : c'est pourquoi l'on peut se rallier à la rédaction de l'Assemblée nationale.

M. Richard Yung, sénateur, a considéré qu'il importe de prendre en compte les deux dimensions du débat : la question de fond et celle de l'intervention respective des juges administratif et judiciaire dans le calendrier de la rétention. Une fois n'est pas coutume, on peut partager la préoccupation du président de la commission des Lois du Sénat, celle d'une unité juridictionnelle, même si la mesure ne manquerait pas de soulever des difficultés d'application pratiques.

Il reste préférable de maintenir le système actuel, et le délai de deux jours, seul à même de préserver une intervention efficace du juge judiciaire en faveur de la protection des libertés individuelles.

Le doute quant à la constitutionnalité du délai proposé est réel, au vu de la jurisprudence passée du Conseil constitutionnel : c'est pourquoi celui-ci en sera saisi.

Mme Sandrine Mazetier, députée, a fait observer que le rapporteur pour l'Assemblée nationale invoque la jurisprudence pour motiver le bien-fondé de cet article 30, à l'heure où, sur la récente loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure dite « LOPPSI 2 », par l'une des plus importantes censures de la Vème  République, le Conseil constitutionnel a rappelé les principes fondamentaux qui devraient prévaloir. En outre, un arrêt récent de la Cour de justice de l'Union européenne a souligné que la privation de liberté n'est pas un acte anodin. Bref, mêmes motifs, même punition : que la rédaction retenue soit celle de l'Assemblée nationale ou celle du Sénat, elle s'expose à une censure du juge constitutionnel, compte tenu de sa jurisprudence existante sur des sujets voisins.

M. François Zocchetto, sénateur, a estimé qu'il était nécessaire de mettre fin à la confusion régnant aujourd'hui sur le terrain en raison d'une procédure complexe, devenue une véritable « fabrique de sans papiers ». Il convient de remettre de l'ordre dans le contentieux en organisant mieux la succession de l'intervention des juges administratif et judiciaire, tout en tenant compte de leurs contraintes respectives. Dans ces conditions, un délai global de cinq jours, semble-t-il nécessaire pour que le juge administratif exerce un réel contrôle, peut être accepté, dans l'attente de l'appréciation qu'en fera le Conseil constitutionnel.

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour le Sénat, a noté qu'un délai de cinq jours a le mérite de permettre au juge administratif de disposer de soixante-douze heures pour rendre sa décision, ce qui doit lui permettre de faire face à l'afflux de contentieux supplémentaires induit par la réforme sans que la qualité des décisions rendues n'en pâtisse.

La commission a adopté l'article 30 dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 33 (art. L. 552-4-1 [nouveau], L. 561-1, L. 561-2, L. 561-3 [nouveau], L. 562-1, L. 562-2 et L. 562-3, art. L. 571-1, L. 571-2 et L. 571-3 [nouveaux] du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Régime de l'assignation à résidence :

La commission a adopté l'article 33 dans la rédaction du Sénat.

Chapitre II
Dispositions relatives au contentieux de l'éloignement

Section 1
Dispositions relatives au contentieux administratif

Article 34 (art. L. 512-1 à L. 512-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Procédure devant le juge administratif pour le contentieux de l'obligation de quitter le territoire :

La commission a adopté l'article 34 dans la rédaction de l'Assemblée nationale, sous réserve du maintien, à l'initiative des deux rapporteurs, de la rédaction du Sénat de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile.

Section 2
Dispositions relatives au contentieux judiciaire

Article 37 (art. L. 552-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Saisine du juge des libertés et de la détention en vue de prolonger la rétention :

La commission a adopté l'article 37 dans la rédaction de l'Assemblée nationale, par coordination avec le vote intervenu à l'article 30.

Article 38 (art. L. 552-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Coordination en matière de notification et d'exercice des droits en rétention :

La commission a adopté l'article 38 dans la rédaction du Sénat.

Article 39 : (art. L. 552-13 [nouveau] du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Instauration de la règle « pas de nullité sans grief » en matière de prolongation de la rétention par le JLD :

La commission a adopté l'article 39 dans la rédaction du Sénat, par coordination avec le vote intervenu à l'article 10.

Article 40 (art. L. 552-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Coordination en matière de délai de saisine du juge judiciaire :

La commission a adopté l'article 40 dans la rédaction de l'Assemblée nationale, par coordination avec le vote intervenu à l'article 30.

Article 41 : (art. L. 552-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Passage à 45 jours de la durée maximale de rétention -- Modification du régime de la deuxième prolongation de la rétention :

La commission a adopté l'article 41 dans la rédaction de l'Assemblée nationale, par coordination avec le vote intervenu à l'article 30.

Article 43 (art. L. 552-9-1 [nouveau] du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Purge des nullités en appel des jugements de prolongation de la rétention :

La commission a maintenu la suppression, par le Sénat, de l'article 43 par coordination avec la suppression de l'article 12.

Article 45 (art. L. 555-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Coordination :

La commission a adopté l'article 45 dans la rédaction de l'Assemblée nationale, par coordination avec le vote intervenu à l'article 30.

Article 49 (art. L. 213-1 et L. 533-1 [nouveau] du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Refus d'accès au territoire français -- Reconduite à la frontière pour menace à l'ordre public ou travail illégal :

M. Claude Goasguen, rapporteur pour l'Assemblée nationale, tout en se ralliant à la rédaction du Sénat, a estimé que le terme « notamment » pourrait être maintenu s'agissant d'une matière non judiciaire mais administrative.

Après que M. François-Noël Buffet, rapporteur pour le Sénat, s'est prononcé contre cette suggestion au motif que le texte du Sénat répond déjà à la prévention du rapporteur pour l'Assemblée nationale, la commission a adopté l'article 49 dans la rédaction du Sénat.

Article 54 (art. L. 521-3, L. 523-3, L. 523-4, L. 523-5, L. 531-3, L. 541-2, L. 541-3 et L. 624-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Coordination en matière d'assignation à résidence :

La commission a adopté l'article 54 dans la rédaction du Sénat, sous réserve d'une modification de la rédaction du III de l'article, par coordination avec le vote intervenu à l'article 17 ter.

TITRE IV
Dispositions relatives à la protection des droits sociaux et pécuniaires des étrangers sans titre et à la répression de leurs employeurs

Chapitre II
Dispositions relatives à l'emploi d'étrangers sans titre de travail

La commission a adopté l'intitulé du chapitre II dans la rédaction du Sénat.

Article 57 B (art. L. 8251-1 et L. 8256-2 du code du travail) : Exonération des employeurs de bonne foi des sanctions frappant l'emploi d'étrangers sans titre :

La commission a examiné une proposition de rédaction des deux rapporteurs visant à compléter la rédaction de cet article retenue par le Sénat.

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour le Sénat, a expliqué que cette proposition de rédaction tendait, d'une part, à préciser expressément que ne saurait être poursuivi un employeur n'ayant pas eu connaissance de la situation irrégulière de son salarié étranger, et, d'autre part, à déplacer ce dispositif d'exonération de responsabilité des employeurs d'étrangers sans titre dans les sanctions pénales prévues par le code du travail, où elles trouvent davantage leur place.

Mme Sandrine Mazetier, députée, a estimé qu'une telle proposition de rédaction entrait en contradiction frontale avec le dispositif adopté par le Sénat, qui, tant en première qu'en seconde lecture, s'était attaché à reprendre la lettre et l'esprit de la directive « sanctions ». Cette proposition de rédaction correspond en fait à une reprise du texte adopté par l'Assemblée nationale ouvrant des exceptions aux sanctions pour cause de défaut d'intentionnalité.

M. Richard Yung, sénateur, a estimé qu'en votant une telle proposition de rédaction qui autorise des exceptions à la mise en oeuvre des sanctions à l'encontre des employeurs d'étrangers sans titre, la commission mixte paritaire rouvrirait une boîte de Pandore que le Sénat avait pris soin de fermer.

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour le Sénat, a estimé que la rédaction proposée ne constituait en rien un retour en arrière par rapport au texte adopté par le Sénat, mais se contentait de réaffirmer la nécessité d'un élément intentionnel pour que des poursuites pénales soient engagées.

M. Claude Goasguen, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a estimé que la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale avait pu porter à confusion mais qu'il n'avait jamais été dans l'intention des députés de remettre en cause l'application de la directive « sanctions ». Des décisions de justice ont mis en évidence l'existence de difficultés sérieuses lorsque des employeurs sont sanctionnés alors même qu'ils n'avaient aucunement connaissance de la fraude. L'employeur, qui ne saurait se muer en enquêteur de police, doit bénéficier d'une présomption de bonne foi. Le groupe SRC de l'Assemblée nationale pourrait ne pas être insensible à cet argument, lui qui avait soutenu en première lecture des amendements protégeant l'activité économique en évitant la fermeture d'établissements recourant à de la main d'oeuvre en situation irrégulière...

Répondant à cette dernière remarque, Mme Sandrine Mazetier, députée, a suggéré que la commission mixte paritaire reprenne la rédaction adoptée par la commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale en première lecture, consistant dans la nomination d'un administrateur provisoire, dans l'attente des suites données à la mise en cause de l'employeur.

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour le Sénat, a rappelé que l'objet de l'article portait sur la responsabilité des employeurs et non sur la question d'une éventuelle fermeture de l'établissement.

M. Julien Dray, député, a estimé qu'il s'agissait davantage avec cet article de consacrer l'irresponsabilité des employeurs qui, compte tenu de la rédaction proposée, pourraient ne jamais faire l'objet de poursuites.

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour le Sénat, a rappelé que les sanctions pénales prévues par le code du travail demeurent inchangées avec cet article, les employeurs reconnus coupables de l'infraction encourant une peine de cinq ans d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende, seule étant ajoutée la précision selon laquelle un employeur n'ayant pas connaissance de la fraude ne peut être poursuivi.

Mme Sandrine Mazetier, députée, a rappelé que dans son rapport établi en deuxième lecture, le rapporteur du Sénat précisait qu'en première lecture « le Sénat a supprimé cette condition exonératrice de responsabilité : en effet, la violation de l'interdiction - édictée par l'article L. 8251-1 du code du travail -d'employer, directement ou indirectement un étranger sans titre de travail, constitue une infraction intentionnelle » et qu'« en conséquence, la disposition nouvelle votée par les députés s'avère surabondante. »

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour le Sénat, a estimé que la rédaction proposée par les deux rapporteurs tenait compte des positions prises par les deux assemblées.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec, député, a estimé que le code du travail contenait de nombreuses infractions pénales ne présupposant pas d'éléments intentionnels ; le constat de l'infraction suffit, sans qu'il soit besoin d'établir la preuve d'une intention fautive.

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour le Sénat, a rappelé qu'en matière de délits, l'élément intentionnel devait être établi.

La commission a alors adopté l'article 57 B dans le texte du Sénat, complété par la proposition de rédaction des rapporteurs.

Chapitre III
Dispositions relatives au contrôle du travail illégal

Article 64 (art. L. 1454-1,  L. 8271-1-2,  L. 8271-6-1 et  L. 8271-6-2 [nouveaux],  L. 8271-1 à  L. 8271-7,  L. 8271-8-1 et  L. 8271-11 du code du travail, art. L. 114-16-3,  L. 133-9-3 et  L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale, art. L. 413-2 et  L. 414-2 du code du cinéma et de l'image animée) : Pouvoirs et accès aux informations pertinentes des agents des corps de contrôle en charge des vérifications en matière d'emploi d'étrangers sans titre :

La commission a adopté l'article 64 dans le texte du Sénat.

Article 66 (art. L. 8272-2 et L. 8272-3 [nouveaux] du code du travail) : Fermeture administrative temporaire des établissements employant des travailleurs illégaux - Garanties légales offertes aux salariés dans ce cadre :

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour le Sénat, a proposé de retenir la rédaction du Sénat supprimant l'exonération de la mesure de fermeture administrative provisoire au profit des employeurs de bonne foi. En effet, les décisions de fermeture provisoire d'établissements sont laissées à l'appréciation du préfet et doivent être motivées au cas par cas, par les critères fixés à l'article 66 tenant à la gravité et à la répétition des faits réprimés, ce qui offre suffisamment de garanties dans la procédure.

M. Jean-Jacques Hyest, vice-président, a approuvé le principe de cette suppression.

A l'appui du maintien du texte de l'Assemblée nationale, M. Claude Goasguen, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a indiqué que, dans le mesure où la fermeture administrative provisoire constitue un handicap lourd pour l'activité des entreprises, il convenait d'éviter toute interprétation extensive du champ d'application d'une telle mesure coercitive et de la limiter par conséquent aux seules situations où elle s'avère strictement nécessaire en vue notamment de protéger les salariés.

La commission a adopté l'article 66 dans le texte du Sénat.

Article 67 (art. L. 8272-4 [nouveau] du code du travail) : Exclusion administrative provisoire des marchés publics des employeurs de travailleurs illégaux :

La commission a adopté l'article 67 dans le texte du Sénat.

TITRE V
Dispositions diverses

Chapitre unique

Article 74 bis (art. L. 731-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Encadrement des conditions de sollicitation de l'aide juridictionnelle devant la CNDA :

La commission a adopté l'article 74 bis dans le texte du Sénat.

Article 75 ter (art. L. 733-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Utilisation de moyens audiovisuels pour les audiences de la CNDA :

Mme Sandrine Mazetier, députée, a proposé de retenir la rédaction du Sénat sous réserve de la suppression du mot « métropolitaine » afin de ne pas priver les demandeurs d'asile situés dans les départements et les collectivités d'outre-mer du droit de s'opposer au recours aux moyens de télécommunication audiovisuelle pour les audiences à distance de la Cour nationale du droit d'asile les concernant.

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour le Sénat, s'est opposé à cette modification pour deux raisons. En premier lieu, les départements et les collectivités d'outre-mer ne font pas partie de l'espace Schengen, ce qui exige que toute modification de la législation applicable soit envisagée avec prudence. En second lieu, les audiences à distance par visioconférence devant la Cour nationale du droit d'asile doivent être étendues aux départements et collectivités d'outre-mer pour des raisons matérielles. Dans la mesure où la proposition de rédaction suggérée conduirait à ce qu'un requérant, où qu'il se trouve, refusant d'être entendu par un moyen de communication audiovisuelle, soit convoqué, à sa demande, dans les locaux de la cour situés à Montreuil, les demandeurs d'asile séjournant outre-mer et refusant une audience à distance par visioconférence devraient donc venir en France métropolitaine, après autorisation du préfet à quitter le territoire, pour être entendus par la cour, sans que les pouvoirs publics aient des garanties sur le départ effectif des requérants à l'issue de la procédure.

M. Richard Yung, sénateur, a objecté que les départements et les collectivités d'outre-mer ne souhaitaient pas se voir appliquer une législation spécifique, ce que permet la suppression du mot « métropolitaine » proposée par M. Sandrine Mazetier.

M. Claude Goasguen, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a partagé le constat de la nécessité d'étendre à l'outre-mer les audiences à distance par visioconférence devant la Cour nationale du droit d'asile.

A l'issue de ce débat, la commission a adopté l'article 75 ter dans le texte du Sénat.

Article 75 quater (art. L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales) : Prérogatives du maire pour faire respecter les symboles républicains lors des célébrations de mariage en mairie :

La commission a maintenu la suppression de l'article 75 quater par le Sénat.

Article 83 : Coordination (rappelé pour coordination) :

La commission a adopté l'article 83 dans le texte du Sénat, modifié par une proposition rédactionnelle des rapporteurs supprimant, par coordination avec la suppression de l'article 43, la référence à l'article L. 552-9-1 du code de justice administrative.

La commission mixte paritaire a ensuite adopté, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité.