Mardi 20 octobre 2009

- Présidence de M. Jean Arthuis, président -

Contrôle budgétaire - Enquête de la Cour des comptes - Crédits de la présidence française de l'Union européenne - Audition pour suite à donner

La commission a tout d'abord procédé à l'audition pour suite à donner à l'enquête de la Cour des comptes sur les crédits de la présidence française de l'Union européenne.

A titre liminaire, M. Jean Arthuis, président, a rappelé que cette audition, ouverte aux membres de la commission des affaires européenne et à la presse, représente la trente-cinquième réunion sur les suites à donner à une enquête de la Cour des comptes demandée par la commission des finances « sur la gestion des services ou organismes qu'elle contrôle » au titre de l'article 58-2° de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

Transmis par la Cour des comptes à la commission des finances le 9 octobre 2009, le rapport d'enquête a pour objet l'examen des crédits de la présidence française de l'Union européenne (PFUE), inscrits au programme 306 de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » dans les lois de finances pour 2008 et 2009, dont le rapporteur spécial est aujourd'hui M. Yves Krattinger.

Puis M. Jean Arthuis, président, a salué la présence de MM. Alain Pichon, président de la quatrième chambre de la Cour des comptes, Jean-François Bernicot, Roch-Olivier Maistre, conseillers-maîtres, Philippe Geoffroy, conseiller-référendaire, Mme Anne Mielnik-Meddah, rapporteur, M. Serge Lasvignes, secrétaire général du Gouvernement, MM. Patrick Mille, directeur administratif et financier au secrétariat général du Gouvernement, Claude Blanchemaison, secrétaire général de la présidence française de l'Union européenne 2008, Pierre Sellal, secrétaire général du ministère des affaires étrangères et européennes (MAEE) représentant M. Bernard Kouchner, ministre, Philippe Autié, directeur administratif et financier du MAEE, Nicolas de La Granville, chef adjoint du protocole, Philippe Setton, sous-directeur des affaires communautaires internes du MAEE, Mmes Christine Buhl, secrétaire générale-adjointe au secrétariat général des affaires européennes (SGAE), Mmes Juliette Clavière, chef du secteur Parlement du SGAE, Martine Dugrenier, responsable gestion des ressources humaines, budget et logistique du SGAE, ainsi que de M. Arnaud Phélep, sous-directeur de la septième sous-direction de la direction du budget du ministère du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État et Mme Anne-Hélène Bouillon, adjointe au chef du bureau. Cette audition fait l'objet d'un enregistrement audiovisuel.

Puis M. Jean Arthuis, président, a salué le travail exhaustif d'examen des modalités de pilotage, de gestion et d'évaluation de l'utilisation des crédits de la PFUE effectué par la Cour des comptes. Il a observé que la demande d'enquête de la commission des finances a permis à cette dernière de poursuivre sa réflexion sur les modalités d'organisation et les coûts de la PFUE, initiée dans le cadre du référé du 3 septembre 2004 au ministère des affaires étrangères. La Cour des comptes avait alors conclu que « les pouvoirs publics ne disposent pas d'un moyen commode de connaître le coût total des manifestations organisées dans le cadre de la présidence française de l'Union ».

Mettant l'accent sur les progrès relatifs à la conception de l'architecture budgétaire ainsi qu'à la mise en oeuvre d'une gestion déconcentrée des crédits, M. Jean Arthuis, président, a cependant évoqué les observations de la Cour des comptes tendant constater des points de sous optimalité de la dépense.

En préambule, M. Alain Pichon, président de la quatrième chambre de la Cour des comptes, a tenu à souligner que les travaux de la Cour se sont déroulés dans les meilleures conditions, grâce à la collaboration des services du secrétariat général pour la PFUE (SGPFUE), des services du Premier ministre ainsi que de ceux du ministère des affaires étrangères et européennes.

Puis il a mis en avant le caractère factuel du rapport, dépourvu de jugement sur les effets et les résultats de la PFUE. Il a ajouté que la Cour des comptes avait procédé au même exercice dans le cadre de la PFUE de l'année 2000. Ce contrôle avait abouti à un référé sévère en 2004 révélant les dysfonctionnements et les désordres budgétaires du dispositif alors mis en place. Il s'est félicité que l'organisation réalisée dans le cadre de la PFUE de 2008 ait tenu compte des critiques de 2004. Il a précisé qu'aucune autre institution supérieure de contrôle dans un Etat membre de l'Union n'a produit de rapport public sur la consommation des crédits de la présidence de l'Union européenne. Ce contrôle effectué à la demande de la commission des finances du Sénat participe, en conséquence, à l'information du citoyen, principe désormais constitutionnel.

Puis il a développé les principales conclusions de l'enquête de la Cour des comptes. S'agissant tout d'abord de l'organisation administrative et budgétaire, il a observé la réalisation de réels progrès, notamment en matière de coordination interministérielle et de suivi de la mise en place des crédits.

La nomination d'un secrétaire général de la PFUE, la conformité de l'architecture budgétaire à la LOLF ainsi que la gestion déconcentrée des crédits constituent une amélioration en termes de mise en oeuvre du dispositif et de suivi des dépenses par rapport au cadre fixé lors de la présidence de 2000.

Les crédits ont été inscrits au programme 306 « PFUE » de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » dans le cadre des lois de finances pour 2008 et 2009. Ils ont été répartis au sein de trois actions, celles liées aux activités obligatoires et traditionnelles de l'exercice de la présidence de l'Union européenne à hauteur de 60 millions d'euros, celles relatives aux initiatives propres à la présidence française pour un montant de 73 millions d'euros ainsi que celles rattachées aux activités interministérielles pour 15 millions d'euros. Trois budgets opérationnels ont été définis, s'attachant respectivement aux services du Premier ministre, au ministère des affaires étrangères et européennes, ainsi qu'à seize autres ministères.

A l'exception de quelques incertitudes juridiques sur le plan administratif et budgétaire, la Cour relève de façon positive que l'ensemble des dispositifs ont été mis en oeuvre avec une économie de moyens en termes d'emplois. Elle constate que les objectifs sur le plan matériel ont été atteints. La PFUE n'a conduit qu'à un nombre limité de créations d'emplois grâce au recours à des bénévoles ainsi qu'à des équipes réduites d'une remarquable efficacité. Le SGPFUE et le service du protocole ont été mobilisés « jour et nuit ».

M. Alain Pichon a ensuite souligné une sous-consommation des crédits de la PFUE à hauteur de 16 % des autorisations d'engagement. En effet, les crédits en loi de finances pour 2008 étaient fixés à 188,6 millions d'euros. Puis les autorisations d'engagement ont été ramenées à 178,9 millions d'euros, en raison de gels et de blocages. La dépense effective au 30 septembre 2009 s'élève à 151,5 millions d'euros. L'évaluation finale devrait établir une consommation des crédits inférieure à 150 millions d'euros. Sans porter de jugement, M. Alain Pichon observe que la différence de crédits procède à la fois d'une surévaluation initiale des crédits et d'un souci de réduction de la dépense. Il relève qu'au moment de l'inscription des crédits dans le projet de loi de finances, la PFUE affichait une grande ambition que le contexte économique permettait de porter.

De surcroît, il a indiqué que le montant de la consommation des crédits à hauteur de 150 millions d'euros ne représente pas la totalité des dépenses réalisées dans le cadre de cette présidence. Certaines d'entre elles ont été prises en charge par le budget de différents ministères. A défaut d'un recensement exhaustif, M. Alain Pichon évalue ce montant entre 5 et 10 millions d'euros. Il convient de tenir compte également de la dotation budgétaire versée par l'Union européenne à hauteur de 9 millions d'euros. Les collectivités territoriales ont aussi contribué à la réalisation de certaines des manifestations de la présidence. Le rapport de la Cour évalue les dépenses de mécénat à hauteur de 10 millions d'euros et la dépense fiscale qui s'y rattache à 6 millions d'euros. Il mentionne également les dépenses directes et indirectes induites par les dépenses de sécurité. Au total, les conclusions de l'enquête évaluent l'ensemble de ces dépenses « externalisées » entre 20 et 25 millions d'euros, établissant le montant réel des dépenses effectives de la PFUE à environ 175 millions d'euros.

Ensuite, M. Alain Pichon a constaté que les dépenses de la PFUE ont été plus élevées que les précédentes qui ont respectivement atteint en 1995 et 2000, 14 et 57 millions d'euros. Il a précisé que toute comparaison est néanmoins complexe, en raison des différences de périmètre, d'architecture budgétaire, d'environnement international et d'objectif de ces différentes présidences. Il a cependant tenu à préciser que la PFUE de 2008 a organisé près de 550 manifestations, de natures diverses, dont 9 sommets, 25 réunions ministérielles, 182 manifestations diverses ministérielles et 328 séminaires. Ainsi plus de trois événements par jour ont été organisés au titre de la PFUE dans une centaine de villes et cinquante six départements. Ces dépenses ne sont comparables qu'à celles de la présidence allemande, estimées à 180 millions d'euros. Tout parallèle avec les coûts des présidences précédentes, telles que celles de l'Autriche, de la Finlande, du Portugal ou de la Slovénie, évalués à environ 70 à 80 millions d'euros chacune, est délicat.

M. Alain Pichon a estimé qu'il existe deux types de présidence, d'une part celle exercée par les grands pays fondateurs tels que la France, l'Allemagne ou l'Italie, dont le coût s'élève en moyenne à plus de 150 millions d'euros, d'autre part celle des pays de taille plus modeste dont le financement moyen s'élève approximativement à 80 millions d'euros. Il s'est alors demandé si cet écart de 1 à 2 est de nature à donner une image positive du coût de fonctionnement des institutions européennes.

Il a poursuivi son propos en remarquant que l'exercice d'une présidence engendre deux types de dépenses. D'une part, celles qui ont un caractère structurel et sont rattachables aux réunions des conseils et réunions des ministres et, d'autre part, celles relevant des ambitions de chaque pays. S'agissant de la PFUE de 2008, l'enquête de la Cour a révélé une prépondérance des dépenses liées à l'initiative française par rapport aux dépenses engagées au titre du fonctionnement structurel de la présidence de l'Union européenne. Ces dernières sont de l'ordre de 62 millions d'euros contre 76 millions d'euros pour les premières. M. Alain Pichon a précisé que le rapport entre dépenses structurelles et initiatives nationales s'est inversé, en cours d'exécution de la programmation de la PFUE, au profit des secondes.

Puis, il a évoqué l'absence de contrainte et le manque de maîtrise dans la programmation de la PFUE, en mentionnant une planification des événements parfois « tardive, précipitée, et défaillante ». La nécessité de l'urgence a, dans certains cas, conduit à la mise en oeuvre de procédures dérogatoires. Elle n'a pas permis d'obtenir les meilleurs coûts. M. Alain Pichon a constaté que « l'obligation de faire l'a emporté sur les principes économiques ».

Le grand nombre d'événements a pu créer, à certains égards, une impression de mauvaise coordination, de redondance et de manque de lisibilité tant pour la presse que pour le citoyen. L'enquête de la Cour des comptes n'a permis d'établir ni leur nécessité ni leur l'impact.

Revenant sur le recours aux procédures dérogatoires, M. Alain Pichon a illustré son propos par les contrats et les marchés publics du SGPFUE, en recensant douze marchés conclus hors procédure réglementaire, vingt-deux marchés négociés sans mise en concurrence, un marché passé en procédure « adaptée-négociée » et neuf marchés seulement avec mise en concurrence. Il a également mentionné le fait que le sommet de Paris pour l'Union de la Méditerranée a été organisé dans l'extrême urgence ainsi que dans des conditions d'une rare complexité. Cependant, son coût établi à environ 16,6 millions d'euros n'a pas donné lieu à un retour sur investissement, puisque le Grand Palais a été aménagé de manière provisoire. Tout en convenant de l'obligation de résultat qui pesait sur cette manifestation et sans remettre en cause le rattachement de celle-ci aux crédits de la PFUE, il a relevé que le paiement de ces dépenses a donné lieu à un ordre de réquisition du comptable public, en raison du défaut de mise en concurrence. Il a ajouté que la pertinence de cette dépense s'inscrit dans la problématique de l'investissement dans une structure immobilière d'accueil permanente.

M. Alain Pichon a, ensuite, tenu à aborder la question de l'évaluation de la performance du programme de la PFUE, tout en admettant la complexité d'un tel exercice qui ne doit pas déboucher sur un contrôle de l'opportunité. Il a cependant fait valoir que décideurs et organisateurs ont fait preuve de « peu d'exigence pour analyser l'impact de leurs initiatives ». Il a qualifié l'objectif tendant à mesurer la satisfaction matérielle des participants « d'aimable sinon de simpliste ». Tout en reconnaissant que la France n'a pas adopté une position différente de ses prédécesseurs en termes d'évaluation, il a cependant déploré l'absence « d'esprit lolfien » dans cette tentative de mesure de la performance. Il a constaté que les assemblées parlementaires sont peu renseignées sur l'efficience des présidences de l'Union européenne. Il a évoqué la possibilité de mesurer la capacité à faire progresser les dossiers européens ou de parvenir à des réunions conclusives en ayant recours à un indicateur relatif au nombre d'accords ou de protocoles signés.

Enfin, M. Alain Pichon a souhaité poser deux questions. La première concerne la légitimité de la prise en charge des dépenses liées au fonctionnement des conseils et des réunions européens par les budgets nationaux. Il a suggéré que les activités obligatoires et statutaires de la présidence de l'Union européenne relèvent du budget européen afin de réduire les écarts de coût d'exercice de la présidence entre grands et petits pays. La seconde question porte sur l'évolution du coût de la gouvernance internationale. Il a observé que l'augmentation du nombre de réunions internationales, des acteurs, des dépenses de sécurité et de communication, ne peut pas justifier la dérive constatée.

M. Jean Arthuis, président, a vivement remercié M. Alain Pichon ainsi que les rapporteurs de la Cour des comptes pour leur excellent travail. Il a salué leurs suggestions. Puis il a déploré l'absence de retour sur investissement pour un grand nombre de manifestations, notamment celle du sommet de Paris pour l'Union de la Méditerranée, organisée au Grand Palais, en dépit de son coût élevé. Il s'est ensuite interrogé non seulement sur la pertinence de l'organisation de l'ensemble des 550 événements recensés, mais également sur les modalités de programmation de certains d'entre eux ainsi que sur le coût total effectif de la PFUE.

Soulignant l'excellente qualité du travail réalisé par la Cour des comptes, M. Yves Krattinger, rapporteur spécial, a rappelé que cette enquête a été demandée par ses prédécesseurs MM. François Marc et Michel Moreigne.

Dans un premier temps, il s'est félicité du constat de la Cour des comptes sur la mise en oeuvre d'une nouvelle architecture budgétaire. La création d'un programme spécialement consacré à l'utilisation de ces crédits ainsi que la gestion déconcentrée en budgets et en unités opérationnels témoignent de cet effort de rationalisation. De surcroît, le secrétariat général de la présidence de l'Union européenne (SGPFUE) dirigé par l'ambassadeur Claude Blanchemaison a assuré la coordination des différentes interventions avec peu de moyens pour un montant global de 1,5 million d'euros. Les différentes unités opérationnelles, dont celle du protocole, ont dû faire face, selon les termes mêmes de la Cour des comptes, « à une surcharge de travail hors du commun ».

Dans un second temps, M. Yves Krattinger, rapporteur spécial, s'est inquiété du recours aux procédures dérogatoires au nom de l'urgence afin de mettre en oeuvre une programmation si dense qu'il a émis des réserves sur sa pertinence, sa lisibilité et son efficacité.

Il a rappelé que le constat de la Cour des comptes d'une sous-consommation des crédits à hauteur de vingt-huit millions d'euros sur l'enveloppe globale est suivi d'une réserve quant à la méthode d'évaluation des besoins de la PFUE, qualifiée de « confortable », « inspirée de la base d'indications générales relativement incertaines du coût de la présidence allemande » et reposant sur une anticipation de situations imprévues. M. Yves Krattinger, rapporteur spécial a jugé que cette estimation initiale crée un effet d'optique qui fausse l'appréciation que l'on peut porter sur l'existence d'économies de gestion.

De surcroît, il a estimé nécessaire de souligner l'externalisation de plus de vingt millions d'euros pris en charge par le mécénat, les collectivités territoriales et les subventions de l'Union européenne afin d'apprécier le coût global effectif réel de cette présidence.

Convenant du contexte spécifique lié aux crises financière et géorgienne qui a conduit à la programmation d'événements imprévus au moment de l'estimation de ces crédits, M. Yves Krattinger, rapporteur spécial a jugé que l'urgence ne peut justifier en soi une organisation sans contrainte. La souplesse n'exclut pas la rigueur. Évoquant l'ensemble des procédures dérogatoires détaillées dans le rapport de la Cour des comptes, mises en oeuvre pour faire face à cette urgence, il noté que le choix tardif de la ville d'Avignon pour accueillir la réunion informelle des ministres des affaires étrangères ou bien encore la programmation imprévue du sommet de Paris pour l'Union de la Méditerranée illustrent une précipitation certaine dans l'organisation. Il en a conclu que la mise en concurrence n'a pas pu jouer totalement, ce qui a nuit à une gestion optimale des crédits.

Puis M. Yves Krattinger, rapporteur spécial s'est demandé, à l'instar de la Cour des comptes, s'il faut « dépenser beaucoup pour réussir une présidence ». Si le coût de la présidence allemande est d'approximativement 180 millions d'euros, celui des présidences précédentes est de l'ordre de 70 millions d'euros.

S'agissant de la présidence française, force est de constater que tous les événements n'ont pas revêtu la même importance. Il a évoqué le bien-fondé d'une programmation moins dense afin d'assurer un plus grand impact à chaque événement. Il a émis des craintes quant aux dérives de coûts induites par la volonté de l'Etat organisateur de rentrer en compétition avec l'Etat l'ayant précédé à la présidence de l'Union européenne. M. Yves Krattinger, rapporteur spécial, a estimé que la présence sur la scène internationale ne semble pas nécessairement liée à un niveau de dépenses plus important. Il a fait valoir que les alliances politiques, comme les crises, se nouent et se dénouent souvent dans la discrétion. Le « bruit médiatique » ne constitue pas une garantie du succès politique.

M. Hubert Haenel, président de la commission des Affaires européennes, a insisté sur le succès de la PFUE. Ayant été témoin de la présidence française précédente, il s'est félicité de l'architecture budgétaire mise en place en 2008 qui a tenu compte des critiques émises par la Cour des comptes dans son rapport de 2004. La programmation « foisonnante » nécessaire, selon lui, a contribué au « retour de la France dans l'Europe et de l'Europe en France », après le référendum négatif de mai 2005 sur le Traité constitutionnel européen et le succès de la présidence allemande. La PFUE de 2008 a fait la preuve d'un travail interministériel remarquable avec une mobilisation exemplaire des personnes en poste. Il a précisé sur ce point que les présidences luxembourgeoise et slovène avaient, au contraire, dû recruter des centaines de personnes.

S'agissant de l'examen des différents coûts, il a indiqué que les dépenses d'interprétariat sont considérables. Il convient d'y ajouter les charges assumées par le Parlement français. Les deux assemblées ont ainsi dépensé 484 437,45 euros en 2008 dans le cadre de la PFUE.

Revenant sur les conditions de l'aménagement du Grand Palais pour le sommet de Paris de l'Union pour la Méditerranée, M. Jean Arthuis, président, a souhaité savoir s'il eût été possible de mieux anticiper et programmer certains événements afin d'éviter une organisation dans l'urgence qui a contraint à recourir à des procédures dérogatoires.

En réponse, M. Pierre Sellal, secrétaire général du ministère des affaires étrangères et européennes, a fait valoir que le caractère tardif de la programmation a eu deux causes non maîtrisables : les négociations intenses relatives à la détermination de l'objectif de ce sommet ainsi que les conditions de sa réalisation. En effet, avant toute programmation, il était nécessaire de déterminer si l'Union pour la Méditerranée s'inscrit dans une refondation de la politique méditerranéenne de l'Union européenne ou si elle constitue une nouvelle forme de coopération, en dehors du cadre européen. La première option ayant été choisie, M. Pierre Sellal a précisé que le projet pouvait en conséquence bénéficier des crédits dévolus à l'organisation de la PFUE, à condition qu'un tel sommet puisse être effectivement organisé. La validation de ce projet n'est intervenue que lorsque toutes les assurances du succès de ce sommet ont été acquises, notamment celle de pouvoir réunir les quarante trois chefs d'Etat et de Gouvernement. S'agissant du déficit de retour sur investissement de cette manifestation, il a reconnu que cela « a été vécu comme une anomalie ». Il a déploré l'absence de véritable centre de conférence international en France. Le centre Kléber ne pouvait, selon lui, accueillir les quarante trois chefs d'Etat et de Gouvernement ainsi que les 1 900 journalistes.

M. Yves Krattinger, rapporteur spécial, a néanmoins émis des doutes quant à la gestion de l'urgence dans le cadre de la programmation de la PFUE. Il a appelé de ses voeux une modification du système de suivi qui valide la dépense, jugeant que les procédures traditionnelles existantes sont peu adaptées à la nature de l'exercice de la présidence de l'Union européenne.

Puis M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé sur la nature des 550 manifestations dont le nombre reflète une certaine exubérance de la programmation. En réponse, M. Serge Lasvignes, secrétaire général du Gouvernement, a insisté sur l'ambition de la PFUE non seulement d'assurer le fonctionnement institutionnel européen dans un contexte de crise mais également de favoriser le rayonnement de la France en Europe et réciproquement. Reconnaissant la difficulté d'évaluer l'efficience du dispositif de la PFUE, il s'est félicité que la Cour des comptes ait pu mener son enquête dans les meilleures conditions. Il a tenu, à titre personnel, à évoquer le succès de la manifestation organisée dans l'enceinte du Sénat dans le cadre de la Journée européenne de l'informatique juridique. Le coût de cette manifestation, pris en charge par le programme 306, n'a été que de 10 000 euros, grâce à la contribution des entreprises privées.

Affirmant le caractère régulier des procédures dérogatoires de mise en oeuvre de la programmation, M. Serge Lasvignes a relevé que les procédures normales de la commande publique ne sont pas adaptées au caractère parfois imprévu et urgent des manifestations diplomatiques. Il a précisé que ces procédures ont été exécutées dans un souci de rigueur et de parcimonie. Il a rappelé que le SGPFUE a fonctionné avec une équipe restreinte. La gestion déléguée a permis la réalisation d'économies.

Revenant sur la qualification de programmation « foisonnante », M. Claude Blanchemaison, secrétaire général de la présidence française de l'Union européenne 2008, a indiqué que, aux termes du décret du 15 juin 2007 instituant le SGPFUE, la programmation devait être exhaustive. En conséquence, il a inscrit l'ensemble des 550 manifestations de la PFUE de 2008 dont 489 ont été prises en charge par le programme « PFUE ». Il a reconnu, d'une part, que ces manifestations ont été d'ampleur et de nature différentes et, d'autre part, que la labellisation « PFUE » des demandes de projet à caractère européen a été accordée de manière à ne pas « décourager les initiatives ». De surcroît, M. Claude Blanchemaison a ajouté que la PFUE a traité certains sujets, conformément au souhait des présidences slovène et suédoise.

En réponse au coût global jugé trop élevé de la PFUE il s'est déclaré particulièrement satisfait que, en dépit d'une programmation établie avant la crise, l'ensemble du calendrier ait pu être financé, malgré la prise en charge de manifestations diplomatiques imprévues. Ces dernières ont bénéficié de redéploiements de crédits. Il s'est félicité de la tenue des comités de gestion mensuels qui a permis de nourrir le dialogue interministériel.

M. Yves Krattinger, rapporteur spécial, a déploré que le logiciel de « système informatisé de gestion des accréditations » (SIGA), utilisé lors du sommet de Paris et dont le coût d'élaboration s'élève à 2,6 millions d'euros, ne soit pas utilisé à nouveau par les ministères.

Tout en convenant du succès de la PFUE, M. Denis Badré, a souhaité, à l'instar de la Cour des comptes, que soit reconsidérée la question du périmètre de la prise en charge des dépenses de la présidence de l'Union européenne par les budgets nationaux. Il a également déploré l'absence de centre de conférence international et a appelé de ses voeux une mutualisation des moyens des organismes internationaux.

En réponse aux critiques émises sur la pertinence d'une programmation jugée trop dense, M. Pierre Sellal a fait valoir l'efficience de la présidence française sur l'ensemble des sujets européens majeurs, contrairement à d'autres présidences. S'agissant de l'évaluation de ce programme, la PFUE a permis la prise de décision dans un certain nombre de domaines essentiels. Enfin, convenant de l'augmentation du coût de la gouvernance internationale, il a précisé que certaines dépenses sont susceptibles d'être évitées ou réduites afin d'éviter la redondance de certaines manifestations, et de limiter les coûts liés à l'itinérance des sommets. L'unité de lieu peut constituer une source d'économie. Il a illustré son propos par la PFUE de 2000 qui avait décidé d'organiser les conseils européens à Bruxelles.

Répondant aux observations sur l'estimation « confortable » des crédits de la PFUE, M. Arnaud Phélep, sous-directeur de la septième sous-direction de la direction du budget, a déclaré qu'une telle évaluation est complexe parce que la présidence de l'Union européenne constitue un « ovni budgétaire ». Il a précisé que la PFUE a obéi à deux principes structurants : d'une part, celui d'une gestion économe et rigoureuse à la demande du Président de la République et du Premier ministre et, d'autre part, celui d'une qualité reconnue unanimement par tous les participants. La PFUE n'a coûté qu'environ 2 euros par habitant. Il a jugé qu'en définitive la meilleure évaluation de la présidence réside dans la demande d'enquête par un organisme de contrôle.

S'agissant du financement communautaire des actions structurelles inhérentes à la présidence de l'Union européenne, M. Arnaud Phélep a tenu à souligner que la France participe au budget de l'Union européenne à hauteur de 16,5 %. Il en a conclu que cette proposition doit faire l'objet d'une analyse « coût/avantage » entre une prise en charge totale environ tous les douze ans de la présidence par le budget national et la participation annuelle au budget européen.

A l'issue de ce débat, la commission a autorisé, à l'unanimité, la publication de l'enquête de la Cour des comptes ainsi que du compte rendu de la présente audition sous la forme d'un rapport d'information.

Audition de M. Guillaume Pepy, président de la SNCF

Puis la commission a procédé à l'audition de M. Guillaume Pepy, président de la SNCF.

M. Jean Arthuis, président, a indiqué que cette audition, non ouverte à la presse et qui se tient par hasard un jour de grève, a pour objet de faire le point sur la situation de la SNCF et en particulier sur le plan « Destination 2012 » ainsi que sur la nouvelle stratégie pour le fret ferroviaire, définie par l'« engagement national pour le fret ferroviaire », présenté par le Gouvernement le 16 septembre dernier.

Evoquant l'application des dispositions législatives sur le service public garanti à l'occasion de la grève de ce mardi 20 octobre, M. Guillaume Pepy, président de la SNCF, a tout d'abord souligné que ce régime a bien fonctionné dans ses trois composantes :

- un préavis remis 48 heures à l'avance, qui permet d'organiser le trafic et d'assurer une bonne information des voyageurs. Il a indiqué qu'il n'y a pas eu d'annulation de trains prévus et que l'information a été sensiblement renforcée, notamment par la distribution depuis la veille de 300 000 feuillets dans les gares ;

- la réaffectation de personnels non grévistes sur les lignes et trains les plus sollicités, qui permet de concentrer le trafic sur la mission de service public et les liaisons relevant de la vie quotidienne. Les RER en Ile-de-France ont ainsi davantage fonctionné que les trains à grande vitesse (TGV) ;

- l'obligation pour la direction et les syndicats de négocier plus intensément avant la grève, ce qui fut le cas pendant les 13 jours qui l'ont précédée. Il a ainsi précisé que l'Union nationale des syndicats autonomes (UNSA), deuxième syndicat de l'entreprise, n'a pas participé à la grève, et que le taux de suivi s'établit à 23,75 %.

Concernant le transport ferroviaire de marchandises, il a considéré que l'on assiste aujourd'hui à un « tournant historique », comparable à celui que la France a, dans le passé, pris en faveur du transport de voyageurs, en investissant notamment dans les trains express régionaux (TER), un réseau à grande vitesse envié et les tramways. Le transport de marchandises n'avait cependant pas bénéficié d'un tel effort. Il a indiqué que l'enveloppe de 7 milliards d'euros figurant dans l'engagement national pour le fret ferroviaire est destinée à Réseau ferré de France (RFF), en vue de bâtir un réseau ferroviaire orienté vers le fret et qui permette notamment des contournements d'agglomérations, telle que Lyon, à l'instar de ce qui a été fait pour le transport de voyageurs. Ce changement remarquable concernera tout autant la SNCF que ses concurrents, tels qu'Eurotunnel ou la Deutsche Bahn.

M. Guillaume Pepy a estimé que la SNCF n'en doit pas moins se montrer à la hauteur de l'enjeu en utilisant des produits d'avenir, dans un contexte de massification des flux et de concentration de l'industrie européenne, et non plus seulement des produits tels que le wagon isolé, qui a longtemps été le fondement de la politique française de transport ferroviaire de marchandises pour répondre à une clientèle diffuse. Il importe donc de réaliser des autoroutes ferroviaires et de recourir au combiné portuaire à grande échelle, aux plates-formes multimodales et à la logistique urbaine pour accomplir une révolution du même ordre que le passage du train Corail au TGV. Cela sera certes difficile mais l'enjeu le mérite.

Il a ensuite abordé la situation de la SNCF en 2009. Celle-ci est touchée par la crise comme ses clients, en particulier l'industrie automobile, dont la baisse de trafic est de l'ordre de 40 %. Le trafic urbain local, notamment les TER, subit également les conséquences de la situation économique actuelle avec une croissance limitée de 1 % à 2 %. Sur les longues distances, la situation est moins détériorée, puisque la SNCF continue de gagner des parts de marché au détriment de l'aérien, mais la croissance nulle du trafic doit être rapportée à la progression inévitable des coûts fixes. Il a précisé que la SNCF connaîtra donc une perte conjoncturelle en 2009, après avoir dégagé un résultat net positif d'environ un milliard d'euros en 2006 et 2007, puis de 600 millions d'euros en 2008. La perte de l'exercice sera toutefois limitée par la capacité d'adaptation du groupe, dont il a chiffré le montant depuis le début de 2009 à environ 900 millions d'euros.

M. Guillaume Pepy a ensuite exposé les principaux défis structurels de l'entreprise. Le premier d'entre eux est l'ouverture à la concurrence de l'intégralité des activités de la SNCF, qui n'est pas une fatalité mais une réalité dans laquelle la SNCF est capable de « tenir son rang », par exemple sur le TGV qui bénéficie de vingt-cinq ans d'expérience et peut encore connaître des marges d'amélioration.

Le deuxième défi est le fret, activité dans laquelle trois milliards d'euros ont été investis depuis dix ans et qui, en l'absence de nouvelle stratégie, coûterait encore deux milliards d'euros dans les trois ou quatre prochaines années. La croissance du fret par de nouveaux produits est donc une question vitale pour la SNCF comme pour le pays.

Le troisième enjeu structurel réside dans les trains Corail d'aménagement du territoire, tels que les liaisons Paris-Briançon, Lyon-Bordeaux ou Caen-Rennes, qui sont aujourd'hui déficitaires, faute de disposer d'une ressource pérenne liée à un contrat de service public. La stratégie actuelle consiste à maintenir les liaisons qui justifient un contrat de service public, à l'image des contrats existants pour la Poste et les tarifs sociaux. MM. Dominique Bussereau et Michel Mercier travaillent actuellement sur ce contrat de service public afin de lui trouver un financement. Il s'agit, selon lui, d'un enjeu important car la pérennité de ces trains ne peut être assurée par le seul relèvement des tarifs ou des gains de productivité.

Le quatrième enjeu est l'avenir de la grande vitesse. La France est devenue, comme l'Espagne, un champion européen et mondial en construisant un réseau « à marche forcée ». Il a fait part de ses inquiétudes sur les moyens de financement, compte tenu de l'impossibilité pour les régions et l'Etat de consentir un effort supplémentaire comme de l'absence de « solution miracle » par le relèvement des péages payés par la SNCF à Réseau ferré de France. Il a estimé, en effet, que l'augmentation de ces derniers représente une ponction de plus en plus lourde pour les TGV, dont le résultat pourrait être nul avant le milieu de la prochaine décennie si la tendance actuelle se maintient, le résultat du TGV ne pouvant plus financer les activités déficitaires. Il est donc nécessaire, selon lui, d'ouvrir dès à présent un débat sur cette question, notamment avec l'Etat actionnaire.

Revenant sur l'ouverture à la concurrence, M. Guillaume Pepy a fait référence au rapport de Mme Fabienne Keller sur les gares et a indiqué que la gestion de ces dernières est à présent autonome pour offrir le même service quel que soit le transporteur. De même, la gestion des circulations et les postes d'aiguillage ont été regroupés dans une direction de la circulation ferroviaire et les aiguilleurs doivent garantir un traitement équitable de la concurrence. Il a également rappelé qu'un groupe de travail présidé par M. Francis Grignon examine la question de l'expérimentation de l'ouverture des TER à la concurrence.

Il a enfin évoqué la « perspective extraordinaire » que représente le Grand Paris, qui ne repose pas seulement sur la double boucle du métro souterrain sur pneus, mais encore sur la remise à niveau des RER et leur extension vers l'est et l'ouest de Paris, la mise en place de trams-trains sur la grande ceinture, la réfection des gares en Ile-de-France ou le rôle de la grande vitesse. Il a ainsi constaté que l'Ile-de-France est paradoxalement mal desservie par les gares de TGV, les gares étant principalement situées dans Paris, ce qui contraint les voyageurs de banlieue à entrer dans la capitale pour accéder au réseau à grande vitesse.

Pour conclure son propos liminaire, il a souligné le privilège d'être le président d'une entreprise dont les Français et les élus attendent davantage.

En réponse à M. Jean Arthuis, M. Guillaume Pepy a précisé que les efforts d'adaptation du groupe, d'un montant de 900 millions d'euros, ont permis d'atténuer les effets du manque à gagner de près de 1,4 milliard d'euros causé par la crise économique. Ainsi alors que les charges fixes de l'activité de fret sont plus élevées que celles des concurrents directs, notamment la Deutsche Bahn, la SNCF a procédé à une renégociation de ses contrats avec les fournisseurs et à un réexamen des spécifications techniques de ses cahiers des charges pour réduire l'ensemble de ses coûts. A titre d'exemple, trois millions d'euros d'économie ont été obtenus sur la facturation de la redevance versée au groupement « Carte bleue » pour la gestion des paiements par cartes bancaires. Il a ajouté que les espoirs de réduction des prélèvements obligatoires liés à la réforme de la taxe professionnelle se sont dissipés du fait de son remplacement, à l'euro près, par la nouvelle contribution économique territoriale et une nouvelle taxe sur le matériel roulant dans le cadre de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux.

M. Alain Lambert, co-rapporteur spécial des crédits de la mission « Ecologie, développement et aménagement durables », a souhaité obtenir des éclaircissements sur les quatre points suivants :

- considérant « l'hémorragie » financière de la branche marchandises de la SNCF, l'activité de fret est-elle encore soutenable, d'abord dans le cadre d'un modèle « d'économie administrée » puis, à terme, dans celui d'une ouverture complète à la concurrence ?

- la construction d'autoroutes ferroviaires est-elle une réponse efficace aux besoins futurs de transport et, entre l'attribution de concessions ou la mise en place de péages, quels en seraient les modes de financements pertinents ?

- après la crise et les pertes conjoncturelles enregistrées en 2009, la SNCF dispose-t-elle de périmètres d'activités lui permettant de renouer avec les bénéfices ?

- quel est le niveau d'acceptation de la conduite du changement par les partenaires sociaux ?

M. Guillaume Pepy a tout d'abord souligné que si les avis peuvent diverger avec les partenaires sociaux, l'application de la concurrence comme règle commune, constitue une réalité intangible pour l'entreprise. Il s'est attaché à mettre en évidence les opportunités de développement du marché ferroviaire. Dans ce contexte, l'essor des modes de transports écologiques et du train pour l'aménagement du territoire constitue un facteur de croissance du chemin de fer dans lequel tous les acteurs auront une place. A ce titre, il s'agit d'un changement profond des comportements de mobilités qui doit être accompagné d'une « révolution tranquille » de l'organisation de la SNCF : la loi sur le service garanti s'applique dans de bonnes conditions et représente un point d'équilibre respectueux des droits des grévistes comme des clients.

S'agissant de la capacité de la SNCF à renouer avec les bénéfices, M. Guillaume Pepy a indiqué que le retour au niveau des bénéfices de l'année 2008 n'est plus envisageable notamment au regard des pertes structurelles occasionnées par la diminution des volumes de marchandises transportés par le fret (600 à 650 millions d'euros), les trains d'aménagement du territoire (200 millions d'euros) et la convention de gestion de l'infrastructure avec RFF (200 millions d'euros). Or, les bénéfices enregistrés par l'activité TGV sont en baisse constante et ne peuvent plus compenser, même pour partie, le passif structurel. A cet égard, il a fait valoir que la SNCF est une entreprise compétitive et saine sur le plan financier à condition que ses missions de service public soient financées à leur juste niveau. Il a appelé de ses voeux une prise de conscience sur le fait qu'eu égard à l'importance des investissements nécessaires pour le développement de la grande vitesse, les sources de financement ne peuvent provenir exclusivement du système ferroviaire lui-même.

Pour que le choix du transport de marchandises par le rail soit fondé économiquement, il apparaît nécessaire de mettre en place un mode de financement « intermodal » dans lequel le transport routier serait mis à contribution quels qu'en soient les moyens : eurovignette, taxe à l'essieu ou péage. Le contexte fiscal doit non seulement permettre au rail de supporter la concurrence de la route, mais aussi de faire supporter au transport routier son vrai coût, y compris écologique. Ainsi, alors que le fret ferroviaire subit un péage jusqu'au dernier kilomètre, des portions d'autoroutes sont gratuites pour les poids lourds.

Après s'être félicité du lancement du plan de modernisation des gares, Mme Fabienne Keller, co-rapporteur spécial des crédits de la mission « Ecologie, développement et aménagement durables », s'est exprimée en faveur d'une taxe « poids lourds » afin non seulement de réduire le transit des camions dans les villes - 18 000 poids lourds traversent quotidiennement le centre de Strasbourg - mais aussi de maintenir le niveau d'activité du fret ferroviaire qui perd chaque année un quart de son volume. Elle s'est également inquiétée de la lisibilité de la politique tarifaire de la SNCF et des effets néfastes d'une classification de la clientèle uniquement à raison de sa rentabilité, pénalisant les étudiants en fin de semaine et restreignant les plages de réduction tarifaire.

M. Guillaume Pepy a souligné que la décision de construire un réseau ferré axé prioritairement sur le fret représente un engagement stratégique pour la France non seulement en raison de son coût - sept milliards d'euros - mais aussi du choix qu'il constitue en faveur d'un transport de marchandises de masse et écologique. La SNCF investira de son côté un milliard d'euros. Il ne s'agit pas d'un sixième plan de sauvetage du fret, mais de proposer, en complémentarité avec le transport routier, une nouvelle offre de service pour reporter sur le rail le fret de longue distance. A cet égard, il a signalé que la libéralisation du « cabotage » routier au niveau européen est un problème majeur du fait de son avantage concurrentiel indiscutable en termes de prix. Une réforme de la règlementation européenne doit être envisagée afin d'accompagner la modernisation des structures ferroviaires. Il a cité, en exemple, la réforme des ports du Havre, de Dunkerque et de la Rochelle et indiqué que la SNCF s'installerait dans les ports pour pouvoir transférer les conteneurs directement des bateaux sur les trains.

Revenant sur la politique tarifaire de la SNCF, M. Guillaume Pepy a reconnu que la lisibilité du dispositif actuel butte sur la complexité de la recherche d'un taux optimal d'occupation dans les trains en proposant des prix adaptés à chaque profil d'utilisateur. Or de ce taux, qui avoisine les 75 % dans le TGV contre 50 % dans l'ICE allemand, dépend la rentabilité de l'offre commerciale de la SNCF. Il a néanmoins partagé l'objectif de simplification de la gamme tarifaire.

M. Pierre Bernard-Reymond s'est interrogé sur les ambitions de la SNCF à l'exportation sur les marchés européens, dans le transport de voyageurs comme de marchandises. Il a ensuite longuement évoqué le problème des trains d'aménagement du territoire, en se fondant sur le temps de parcours de la ligne Marseille-Briançon, supérieur à celui de la liaison Marseille-Paris. Il en résulte, selon lui, une fracture territoriale entre les régions disposant d'autoroutes ou d'une liaison TGV et celles qui en sont dépourvues. Il a estimé que d'ici vingt à trente ans, la région Provence-Alpes-Côte d'Azur sera bordée par les liaisons TGV Paris-Lyon-Turin et Paris-Nice, mais que l'intérieur de la région sera toujours enclavé avec des trains ne roulant qu'entre 60 et 80 km/h en moyenne sur la ligne Marseille-Briançon, sans pour autant que l'autoroute entre Gap et Grenoble soit achevée. Il a estimé que les travaux qui sont réalisés sur cette ligne n'ont d'autre utilité que d'en assurer la pérennité et de retrouver la vitesse commerciale d'il y a dix ans, qui a du être réduite pour des raisons de sécurité. Revendiquant un autre avenir que le seul tourisme alpin pour sa région, il a rappelé son souhait ancien et jusqu'à présent infructueux qu'une étude structurelle soit menée sur la faisabilité d'une vitesse de 160 km/h sur la ligne Marseille-Briançon. Il a estimé que l'enveloppe de 200 millions d'euros pour les trains d'aménagement du territoire, pour satisfaisante qu'elle soit, n'est pas à la hauteur de ce problème qui concerne également d'autres régions.

Mme Marie-France Beaufils a insisté sur la nécessité d'un engagement en faveur du fret, notamment au regard des préoccupations écologiques, tout en se demandant si cet élan ne sera pas entravé par la volonté de rééquilibrer les branches d'activité de la SNCF. Elle a admis que la massification du fret permettra de répondre aux besoins sur les longues distances, mais pas sur de plus courtes distances qui représentent aussi une partie de l'important trafic local de camions. Elle s'est, dès lors, interrogée sur la concrétisation des partenariats annoncés avec les routiers. Elle s'est déclarée inquiète sur la consistance de l'engagement national pour le fret ferroviaire, qui risque de se limiter à un simple « effet d'annonce », et s'est demandée si l'enveloppe de 7 milliards d'euros englobe des engagements au titre de contrats de plan Etat-régions antérieurement conclus et ne consiste pas en une augmentation des péages. Elle a cependant reconnu que le financement du transport combiné ne peut être équilibré qu'en mettant à contribution l'ensemble de la collectivité nationale.

M. Edmond Hervé s'est déclaré convaincu que la SNCF dispose d'importantes réserves foncières susceptibles d'être valorisées. Il a plaidé en faveur d'une certaine stabilité des directeurs régionaux, qui permet de mener à bien la nécessaire intermodalité. Il a rappelé la nécessité d'une amélioration de la liaison Rennes-Nantes et s'est fait l'écho d'observations d'élus et chefs d'entreprise, selon lesquels les tarifs de fret ne seraient pas adaptés aux petites et moyennes entreprises (PME).

M. Jean-Pierre Fourcade s'est demandé si la rentabilité socio-économique et le développement des lignes à grande vitesse n'atteignent pas leurs limites, au détriment des trains d'aménagement du territoire, et s'est interrogé sur les raisons, notamment financières, qui ont conduit la SNCF à quasiment supprimer son offre de trains auto-couchettes.

M. Jean Arthuis, président, a fait part de son scepticisme sur la soutenabilité d'un nouveau plan de relance du fret. Si la politique tarifaire fut pendant un temps relativement compétitive, au prix de déficits abyssaux, les exigences de la comptabilité analytique ont conduit la SNCF à relever considérablement ses tarifs et à optimiser le volume de chargement. Il peut en résulter des délais de sept à dix jours pour l'acheminement des marchandises. Dès lors, il s'est demandé si le fret peut être rentable par rapport au transport routier, et si le seul moyen d'y parvenir ne réside pas dans une « super-concentration » des sites industriels.

M. Bernard Vera a souhaité avoir confirmation de certains chiffres et informations donnés par les organisations syndicales, selon lesquelles le développement des autoroutes ferroviaires, au détriment du wagon isolé, se traduirait par la perte de 6 000 emplois et une augmentation du trafic routier de 1,2 million de camions, qui serait incompatible avec les objectifs du Grenelle de l'environnement.

En réponse à M. Pierre Bernard-Reymond, M. Guillaume Pepy a réaffirmé qu'il n'est pas envisageable de supprimer les trains d'aménagement du territoire, citant l'exemple de la ligne Marseille-Briançon dont la modernisation relève de la compétence de réseau ferré de France (RFF), car le désenclavement et le développement économique de régions entières en dépendent. La question de leur financement demeure un sujet fondamental qui ne peut être résolu qu'en mettant à contribution de nouvelles ressources (la taxe professionnelle ou la taxe carbone par exemple) dans un contexte de restriction budgétaire pour l'Etat, les régions et la SNCF. C'est pourquoi, il a appelé à ce que des contrats de service public soient conclus pour assurer la pérennité des trains d'aménagement du territoire.

Revenant sur les questions posées par MM Jean Arthuis et Alain Lambert sur la soutenabilité du modèle économique du fret ferroviaire, M. Guillaume Pepy a expliqué que le maintien de la totalité du service de wagons isolés n'est plus rentable et se révèle inadapté aux besoins de transport des PME. En ce qui les concerne, l'utilisation de poids lourds aux normes Euro 4 présente une flexibilité et un coût imbattables. Il a précisé que l'acheminement du fret vers des sites de regroupement et sur des autoroutes ferroviaires n'amènera pas davantage de camions sur les routes. Au contraire, le projet de transport de masse et écologique par le rail doit réduire le nombre de poids lourds en circulation dès la première année de mise en oeuvre du plan fret et engendrer une baisse d'un million de trajets routiers d'ici 2015 et l'augmentation de 17 % à 25 % de la part du transport non routier d'ici 2020.

En réponse à Mme Marie-France Beaufils et à M. Bernard Vera, M. Guillaume Pepy a assuré que la réforme du fret ne donnera lieu à aucun licenciement car l'augmentation du trafic TER, comme l'activité TGV et le renforcement de la présence humaine dans les gares permettront de proposer de nouvelles missions, « sereines socialement », aux cheminots qui seront amenés à quitter le transport de marchandises.

En réponse à M. Edmond Hervé, il a précisé que la politique de valorisation du patrimoine foncier de la SNCF sera notamment dirigée en faveur du logement social.

En réponse à M. Jean-Pierre Fourcade, M. Guillaume Pepy a reconnu qu'une réflexion doit être menée sur les limites du « tout TGV ». En effet, cette politique est porteuse de fractures territoriales pour les zones non desservies par la grande vitesse. La rénovation du réseau classique ne doit pas être oubliée.

S'agissant de l'internationalisation de la SNCF, il a souligné que les projets menés au Maroc, en Arabie Saoudite et au Brésil sont le fruit d'un partenariat avec Alstom pour la promotion à l'exportation de la « maison France » et de ses produits. A cet égard, la constitution d'un « champion français » d'envergure internationale dans le domaine ferroviaire relève d'un objectif stratégique car les nouvelles parts de marché devront être conquises sur le réseau européen notamment en ce qui concerne le fret. Ainsi Kéolis, filiale de la SNCF, exploite des trains régionaux en Allemagne.

Enfin, tout en regrettant la fin de l'exploitation des wagons-lits, en raison de leur inadaptation aux normes actuelles de sécurité, M. Guillaume Pepy a indiqué que le service des trains auto-couchettes sera maintenu en dépit de la difficulté à gérer le caractère très saisonnier de la demande.

Mercredi 21 octobre 2009

- Présidence de M. Yann Gaillard, vice-président de la commission des finances -

Loi de finances pour 2010 - Mission Sécurité civile - Examen du rapport spécial

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Claude Haut, rapporteur spécial, sur la mission « Sécurité civile ».

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a tout d'abord rappelé que la mission « Sécurité civile » est constituée des programmes « Intervention des services opérationnels » et « Coordination des moyens de secours ». Il a indiqué que, en 2010, elle sera dotée de 420,4 millions d'euros de crédits en autorisations d'engagement et de 427,3 millions d'euros en crédits de paiement hors fonds de concours et attribution de produit, soit une hausse modérée de 1,8 % par rapport à l'exercice 2009. Le programme « Intervention des services opérationnels » s'appuiera sur 265,4 millions d'euros, tandis que le programme « Coordination des moyens de secours » bénéficiera de 161,8 millions d'euros.

Il a souligné que ce budget vise à respecter la feuille de route fixée à la sécurité civile par deux documents majeurs : le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, et les conclusions de la révision générale des politiques publiques (RGPP).

Il a précisé que les orientations arrêtées par le Livre blanc sont au nombre de quatre. Il s'agit, tout d'abord, de renforcer les capacités de lutte face aux menaces de type nucléaire, radiologique, biologique, chimique et explosif (NRBCE), avec, par exemple, l'acquisition de « véhicules laboratoires » grâce à un budget pluriannuel de 16,1 millions d'euros.

Il a précisé que le Livre blanc identifie également, parmi les priorités pour la sécurité civile, la rénovation du système d'alerte et d'information des populations, ainsi que la mise en oeuvre d'un dispositif d'alerte pour faire face au risque de tsunami dans la zone de l'Atlantique du Nord-Est et en Méditerranée. A cet égard, il a noté que le récent rapport sur « L'évaluation et la prévention du risque de tsunami sur les côtes françaises en métropole et outre-mer » de M M. Jean-Claude Etienne et Roland Courteau, sénateurs, a permis la création d'un centre national d'alerte. Il a indiqué que la direction de la sécurité civile a obtenu une enveloppe de 7 millions d'euros, sur cinq ans, pour prendre en charge la moitié du coût de l'investissement et la moitié du coût de fonctionnement, le ministère chargé de l'écologie assurant le reste du financement.

Enfin, il a rappelé que le Livre blanc recommande le renforcement de l'échelon zonal en matière de gestion interministérielle des crises.

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a ensuite observé que, dans le cadre de la RGPP, la direction de la sécurité civile s'est vu assigner l'objectif d'optimiser ses moyens aériens, en rationalisant notamment la maintenance des avions par la passation de nouveaux marchés.

Il a ajouté que la RGPP fixe pour but de mutualiser les fonctions support des flottes d'hélicoptères et que cet objectif passe par la recherche, conjointement avec la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN), du maintien, voire de l'amélioration, du taux global de disponibilité des flottes d'hélicoptères.

Il a enfin rappelé que l'optimisation de l'implantation des bases héliportuaires constitue la troisième et dernière piste de travail arrêtée par la RGPP. Il s'agit de rechercher, avec la DGGN et la direction générale de la police nationale (DGPN), la meilleure adaptation des implantations des bases en rapport avec la spécialisation des flottes par mission : secours pour la direction de la sécurité civile, sécurité publique, routière et police judiciaire pour la DGGN et la DGPN.

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a insisté sur l'articulation de la mission « Sécurité civile » avec les collectivités territoriales. Il a observé, en effet, que le budget prévisionnel des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) pour 2009 représente plus de dix fois celui de la mission, avec 5,4 milliards d'euros de crédits, soulignant que les collectivités, et notamment les départements, financent plus de 95 % des dépenses de fonctionnement des SDIS.

Il a noté que, dans le même temps, le fonds d'aide à l'investissement (FAI) des SDIS diminue de 4,7 % en 2010, pour passer à 22,3 millions d'euros, et que, si cette baisse est inférieure à celle constatée les années précédentes, les crédits du FAI ont néanmoins été divisés par trois depuis 2006. Regrettant vivement cette diminution continue des crédits du FAI, il a alors déclaré que les arguments développés par l'Etat, selon lesquels les crédits du fonds ne sont pas intégralement consommés, ne sont pas recevables et ne peuvent pas servir à justifier de nouvelles diminutions de crédits, les SDIS étant demandeurs de davantage d'aide aux investissements.

Il a donc estimé impératif que la révision des dispositions réglementaires régissant le FAI vise principalement à permettre une amélioration de l'attribution des crédits de ce fonds. En particulier, le report des crédits qui n'ont pas pu être engagés pendant l'année serait souhaitable.

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a ensuite indiqué que, comme en 2009, une partie du FAI contribuera à la mise en place du dispositif d'interopérabilité Antares, qui vise à la création d'un réseau de communication partagée entre les différents services concourant aux missions de sécurité (SDIS, services de police, SAMU), précisant que ce montant sera de 13 millions d'euros en 2010 (contre 7,5 millions d'euros en 2009).

Il a souligné, à cet égard, que le programme Antares est entré dans sa phase de généralisation à l'ensemble du territoire et que l'année 2010 sera notamment marquée par la migration du réseau radio analogique utilisé actuellement par la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris.

Il a relevé que, selon M. Alain Perret, directeur de la sécurité civile, une fois le dispositif Antares définitivement généralisé, le coût de fonctionnement d'Antares et d'Acropol sera supérieur à 50 millions d'euros par an. Il a donc jugé nécessaire que la commission des finances soit vigilante sur ce point dans les années à venir.

Enfin, M. Claude Haut, rapporteur spécial, a évoqué la poursuite de la restructuration de l'école nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers (ENSOSP).

Il a noté que l'installation à Aix les Milles est en cours et sera définitive avant la fin de l'année 2009, conformément au calendrier initialement arrêté. Le montant de l'opération de délocalisation devrait s'établir à 96,7 millions d'euros. L'activité générale de l'établissement sera aussi intense en 2010 qu'en 2009, et le fonctionnement du plateau technique deviendra optimal, avec 9 800 journées stagiaires en 2010 (contre 7 100 en 2009).

Il a souligné que l'ENSOSP a fait l'objet d'un contrôle budgétaire de sa part en 2008 et qu'un suivi de contrôle est en cours qui se conclura début 2010, après la livraison du pôle pédagogique.

En conclusion, M. Claude Haut, rapporteur spécial, a proposé à la commission d'adopter, sans modification, les crédits proposés pour la mission et chacun de ses deux programmes.

Un débat s'est ensuite instauré.

Mme Catherine Troendle, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois, a confirmé que le déploiement du dispositif Antares est en voie d'achèvement. Elle a toutefois souligné que, en pratique, une part de cet investissement des SDIS est susceptible de rester à la charge des communes. Dans ce dernier cas, certaines communes peuvent faire le choix de ne pas apporter leur contribution financière à l'installation d'Antares au sein du SDIS, avec pour conséquence le risque que le service départemental n'opte pas pour ce système de communication. Le maillage du territoire par Antares ne serait alors pas uniforme.

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a rappelé que les SDIS disposent de crédits d'investissement, en provenance notamment du FAI, pour assurer le passage à Antares. Dès lors, les SDIS n'ont pas à demander un financement des communes.

A l'appui de son observation, Mme Catherine Troendle a cité l'exemple du département du Haut-Rhin, où les communes sont sollicitées par les départements. D'une manière plus générale, elle a déploré que certains dispositifs conçus au niveau national dans un but d'intérêt général connaissent des difficultés ou des lenteurs d'application au niveau local.

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a indiqué qu'il interrogera la direction de la sécurité civile sur la question soulevée par Mme Catherine Troendle afin de pouvoir lui apporter tous les éclaircissements nécessaires.

La commission a alors décidé de proposer au Sénat l'adoption sans modification des crédits de la mission « Sécurité civile » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2010.

Loi de finances pour 2010 - Mission Provisions - Examen du rapport spécial

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport spécial de M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, sur la mission « Provisions ».

M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, a tout d'abord précisé que les deux dotations-programmes composant la mission « Provisions » regroupent des crédits destinés à couvrir des dépenses indéterminées au moment du vote de la loi de finances. Ils sont répartis en tant que de besoin, en cours d'exercice, entre les autres missions, par voie réglementaire.

Il a signalé que la dotation du programme 551 « Provision relative aux rémunérations publiques » a vocation à permettre le financement des mesures générales en matière de rémunération, dont la répartition, par programme, ne peut être déterminée avec précision au moment du vote des crédits.

Puis il a rappelé que la dotation du programme 552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles » a pour objet de prévoir les crédits nécessaires à des dépenses accidentelles, imprévisibles et surtout urgentes. Il s'agit, notamment, des dépenses liées à des catastrophes naturelles, en France ou à l'étranger, ou à des événements extérieurs nécessitant le rapatriement de ressortissants français. La répartition de toutes ces charges, compte tenu de leur nature même, ne peut être déterminée avec précision au moment du vote des crédits.

Il a ensuite insisté sur le caractère « spécifique » de la mission « Provisions », qui se trouve dénuée d'objectif de performance et d'indicateur.

S'agissant du montant des crédits, M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial a constaté que le montant des crédits demandés pour 2010 (120 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement) fait à nouveau de la mission « Provisions » la moins dotée du budget général.

Il a souligné que, conformément au rapport annexé à la loi de programmation des finances publiques pour 2009-2012, la réserve de « budgétisation » intégrée à la dotation pour « dépenses accidentelles et imprévisibles » afin d'abonder exceptionnellement les plafonds des missions pour les exercices 2010 et 2011 a été répartie entre missions à hauteur de 479 millions d'euros, pour couvrir des dépenses non programmées lors de la construction du budget triennal et, notamment, les besoins de financement apparus avec la crise financière.

S'agissant de la répartition des crédits par programme, il a observé que la demande de crédits sur la dotation du programme 552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles », d'un montant de 120 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, est en augmentation par rapport à 2009. Il a précisé que ce montant correspond, en fait, au reliquat subsistant une fois que la réserve de budgétisation susmentionnée a été répartie.

En ce qui concerne la dotation du programme 551 « Provision relative aux rémunérations publiques », il a indiqué qu'elle ne fait l'objet d'aucune demande de crédit, ce qui traduit une bonne répartition des dépenses de personnel entre ministères lors de l'élaboration du projet de budget pour 2010.

En conclusion, M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, a proposé l'adoption des crédits de la mission « Provisions ».

La commission a alors décidé, à l'unanimité, de proposer au Sénat l'adoption sans modification des crédits de la mission « Provisions » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2010.

Loi de finances pour 2010 - Mission Outre-Mer - Examen du rapport spécial

Puis la commission a procédé à l'examen du rapport de M M. Marc Massion et Éric Doligé, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Outre-Mer ».

M. Marc Massion, corapporteur spécial, a indiqué que le projet de budget intervient cinq mois après la promulgation de la loi pour le développement économique des outre-mer (LODEOM). Le « coût » global de la LODEOM peut être évalué à 300 millions d'euros. Toutefois, son impact financier sur le budget de la mission « Outre-mer » est assez limité. En effet, un très grand nombre de ses mesures d'application ne sont pas encore parues. Plusieurs dispositions sont donc encore inapplicables.

M. Marc Massion, corapporteur spécial, a par ailleurs précisé que plus des deux tiers de ces 300 millions d'euros correspondent à des dépenses fiscales et non à des crédits budgétaires. De manière générale, les dépenses fiscales tiennent une place importante dans la politique en faveur de l'outre-mer. La mission « Outre-mer » regroupe 2,09 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 1,99 milliard d'euros en crédits de paiement (CP) dans le projet de budget pour 2010. Les dépenses fiscales, quant à elles, sont évaluées pour l'année 2010 à 3,46 milliards d'euros. Elles augmentent de 6,6 % par rapport à 2009 sous l'effet des dispositifs votés dans la LODEOM. Cette hausse est toutefois moins forte que celle de 2009, qui s'élevait à 17,4 %.

Enfin, la très grande majorité des crédits budgétaires en faveur de l'outre-mer ne se trouve pas dans la mission « Outre-mer ». Le document de politique transversale « Outre-mer », qui retrace l'ensemble de l'effort financier de l'Etat en direction de l'outre-mer, fait apparaître, pour 2010, 13,56 milliards d'euros en AE et 13,37 milliards d'euros en CP. La mission représente donc moins de 15 % des crédits de la politique transversale. Par ailleurs, le document de politique transversale n'est toujours pas exhaustif puisque deux programmes manquent encore pour appréhender l'effort global de l'Etat en faveur de l'outre-mer.

M. Marc Massion, corapporteur spécial, a ensuite évoqué un deuxième élément de contexte, outre la LODEOM : l'examen de ce budget intervient trois semaines après la synthèse des Etats généraux de l'outre-mer, annoncés en février 2009, qui ont donné lieu à une large consultation dans chacun des territoires concernés. Un comité interministériel de l'outre-mer, présidé par le Président de la République, doit se réunir le 6 novembre prochain pour concrétiser ce processus par des mesures législatives et réglementaires.

Ce sera l'occasion de mettre en oeuvre les propositions de la mission commune d'information sur les départements d'outre-mer (DOM) du Sénat dont M. Eric Doligé était rapporteur. L'une des propositions formulées est spécifiquement en lien avec le cadrage global de la mission « Outre-mer » : la nécessité de faire du secrétariat d'Etat à l'outre-mer une structure interministérielle, éventuellement rattachée au Premier ministre, et non un secrétariat d'Etat sous la tutelle du ministère de l'intérieur.

En effet, comme déjà indiqué, les crédits de la mission « Outre-mer » sont très limités au regard des crédits de l'ensemble de la politique en faveur de l'outre-mer et, par ailleurs, la tutelle du ministère de l'intérieur n'est pas adaptée à la diversité des statuts de l'outre-mer. Enfin, la collaboration entre le secrétariat d'Etat et les autres ministères est rendue très difficile par un manque de considération trop répandu de ces ministères pour les problématiques ultramarines.

Dans ce contexte, le projet de budget 2010 de la mission « Outre-mer » apparaît comme un budget de transition entre les deux échéances de la LODEOM et des Etats généraux.

M. Eric Doligé, corapporteur spécial, a relevé que les crédits de la mission « Outre-mer » connaissent, pour la seconde année consécutive, une augmentation sensible. Cette hausse est, dans le projet de loi de finances, de 6,4 % en AE et de 6,3 % en CP et porte principalement sur le premier des deux programmes de la mission.

Le programme « Emploi outre-mer » voit en effet ses crédits augmenter de près de 10 %. Cette augmentation correspond principalement à un meilleur remboursement aux organismes de sécurité sociale des exonérations de cotisations sociales spécifiques de certains territoires d'outre-mer. Ces compensations représentent 1,1 milliard d'euros dans le projet de loi de finances pour 2010, soit plus de la moitié des crédits de l'ensemble de la mission.

M. Eric Doligé, corapporteur spécial, s'est réjoui de cette hausse, tout en regrettant qu'elle ne soit pas suffisante pour compenser à l'euro près les pertes subies par les organismes de sécurité sociale. La dette accumulée auprès d'eux s'élèvera à plus de 600 millions d'euros à la fin de l'année.

La deuxième mesure qui bénéficie, au sein du programme, d'une hausse de ses crédits est le service militaire adapté (SMA). M. François Trucy avait montré l'efficacité de ce dispositif dans un récent rapport de la commission des finances. Conscient de cette efficacité, le Président de la République a annoncé le doublement des effectifs de jeunes qui en bénéficient : ils passeront progressivement d'environ 3.000 aujourd'hui à 6.000.

Toutefois, d'après les informations recueillies auprès du secrétariat d'Etat, l'augmentation des crédits et des effectifs du SMA ne sera pas proportionnelle à ce doublement. Il est donc à craindre que la qualité de la formation n'en pâtisse. Ce serait regrettable, puisque 80 % des jeunes qui sortent aujourd'hui du SMA trouvent ensuite un emploi ou une formation qualifiante.

M. Eric Doligé, corapporteur spécial, a ensuite évoqué le second programme de la mission : « Conditions de vie outre-mer ». Il comporte notamment les crédits de la ligne budgétaire unique (LBU) consacrée au logement en outre-mer. Ces crédits connaissent tout particulièrement une année de transition. En effet, la LODEOM a prévu le recentrage sur le logement social du dispositif de défiscalisation du logement en outre-mer. La défiscalisation pourra en outre s'articuler avec une utilisation des crédits de la LBU. Ce nouveau mécanisme n'entrera en application que très progressivement et devra faire l'objet d'un travail concerté avec les bailleurs sociaux pour être efficace.

M. Eric Doligé, corapporteur spécial, a relevé que les crédits de la LBU ne diminuent pas et a espéré que, sur ce point, les craintes de ses collègues ultramarins, exprimées lors du débat sur la LODEOM, seront apaisées. Il s'est réjoui, au regard des besoins des populations locales, de la hausse de 6 % des crédits consacrés à la résorption de l'habitat insalubre. En revanche, il s'est interrogé sur le report à 2011 de la mise en place effective du groupement d'intérêt public censé régler les problèmes d'indivision dans les DOM.

Les mesures en faveur de la continuité territoriale connaissent également une année de transition. Le fonds de continuité territoriale, voté dans la LODEOM, doit être mis en place pour regrouper et rationaliser les différents types d'aides existantes. Ces aides seront désormais soumises à une condition de ressources, ce dont il convient de se réjouir.

Enfin, M. Eric Doligé, corapporteur spécial, a souhaité aborder deux sujets qui ne figurent pas strictement au sein de la mission « Outre-mer » mais qui revêtent une importance particulière.

D'une part, le dispositif des indemnités temporaires de retraites (ITR) en outre-mer a été réformé, à l'initiative de la commission des finances, dans le collectif budgétaire de décembre 2009. Les économies budgétaires espérées mettront toutefois du temps à se concrétiser puisque la fin des entrées dans le dispositif n'est prévue que pour 2028.

D'autre part, les majorations de traitement des fonctionnaires d'Etat et de la fonction publique territoriale coûtent plus de 1,3 milliard d'euros à l'Etat. Aucun chiffrage concernant leur coût pour les collectivités territoriales n'est disponible. Or, ces majorations ne sont pas adaptées aux écarts de prix entre l'outre-mer et la métropole. Par ailleurs, elles ont d'importants effets pervers sur le niveau des prix et sur la situation financière des collectivités territoriales. M. Eric Doligé, corapporteur spécial, a rappelé qu'il veillera à mettre en oeuvre les préconisations de la mission commune d'information, sur la base de l'étude comparative des prix qui sera rendue par l'Insee en 2010.

Sous le bénéfice de ces observations, M. Eric Doligé, corapporteur spécial, a préconisé l'adoption sans modification des crédits de la mission « Outre-mer » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2010.

M. Marc Massion, corapporteur spécial, s'est dissocié, à titre personnel, de cette préconisation, au regard du décalage entre les attentes des Ultramarins et le projet de budget présenté par le Gouvernement.

M. François Trucy a rappelé que son rapport d'information sur le SMA traite également du dispositif « Défense deuxième chance », applicable en métropole, et qui s'avère tout aussi efficace. Il a demandé des précisions sur les modalités de la mise en extinction de l'ITR, votée à l'initiative de la commission des finances.

M. Eric Doligé, corapporteur spécial, a rappelé que celle-ci avait déposé plusieurs amendements visant à une disparition rapide de l'ITR mais que ces amendements n'avaient pas été adoptés. Le Gouvernement a fait adopter son propre projet de réforme, plus progressif, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 mais cette disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel. C'est ce projet qui a finalement été repris par la commission des finances dans le collectif budgétaire de décembre 2008. Par ailleurs, le gel du montant des ITR signifie qu'il cesse d'être indexé sur l'évolution des retraites auxquelles il s'applique.

M. Jean Arthuis, président, a souligné que le coût du dispositif continue à augmenter car il bénéficie encore à de nouveaux entrants.

Mme Michèle André a souligné l'absence de doublement des moyens du SMA, qui risque d'entraîner une dégradation de la qualité de la formation dispensée et de son efficacité. De manière générale, le projet de budget pour l'année 2010 est en décalage avec le débat qui a eu lieu au Sénat sur les conclusions de la mission commune d'information sur la situation des DOM le mardi 20 octobre 2009. Par ailleurs, elle a exprimé son inquiétude au sujet des finances locales de Mayotte, qui semblent aujourd'hui dans une situation catastrophique, et a souhaité connaître l'état d'avancement de la mise en place d'un état civil.

Concernant le SMA, M. Eric Doligé, corapporteur spécial, a indiqué que le Gouvernement explique par deux facteurs le non doublement des crédits. D'une part, il devient difficile de trouver plus de 3000 volontaires par an ; par conséquent, les nouveaux bénéficiaires auraient un autre profil et bénéficieraient d'une formation différente de celle actuellement dispensée. D'autre part, le doublement des effectifs n'aura pas lieu en 2010 mais sur une plus longue durée.

Le budget de la mission augmente de 6,4 % en 2010, ce dont il faut se réjouir. Toutefois, toutes les réponses ne doivent pas venir de l'Etat. La mission d'information du Sénat a identifié plusieurs pistes pour trouver de nouvelles recettes, notamment au profit des collectivités territoriales, qui permettraient de leur rendre des capacités d'action.

Enfin, concernant Mayotte, la situation dégradée des finances locales correspond à ce que la mission a pu constater dans l'ensemble des DOM. La constitution d'un état civil semble avancer correctement puisque deux juges et vingt personnes qualifiées sont aujourd'hui affectés à cette tâche. Ils traitent 1.200 dossiers par an pour un stock actuel de 7000 dossiers, qui devrait donc être traité en six ans.

M. François Trucy a précisé que le SMA a surtout besoin de crédits d'investissement, en particulier pour faire face à l'augmentation du nombre de volontaires.

M. Jean Arthuis, président, a redouté que la situation économique très dégradée de l'outre-mer préfigure celle de la métropole dans quelques années.

M. Eric Doligé, corapporteur spécial, s'est déclaré moins pessimiste. L'outre-mer a des marges de progression considérables. La surface agricole utile, par exemple, peut être augmentée de 50 % si les problèmes fonciers sont résolus. L'intégralité des ressources de pêche n'est pas encore exploitée.

M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé sur la nature des problèmes administratifs et politiques rencontrés par l'outre-mer et s'est demandé si les aides versées par l'Etat ne constituent pas, en réalité, un obstacle au développement endogène.

M. Eric Doligé, corapporteur spécial, a évoqué les principaux problèmes de l'outre-mer. Les majorations de rémunérations pèsent sur le niveau des prix et sur les finances des collectivités locales tout en bridant l'initiative privée, 40 % des emplois étant des emplois publics. Beaucoup de collectivités territoriales ne paient pas leurs charges sociales, ce qui fait de l'URSSAF la première banque de ces collectivités. Il a regretté que ces problèmes ne soient pas traités et a souhaité que les mentalités évoluent. L'immigration clandestine constitue par ailleurs un défi. A titre d'exemple, un jeune Brésilien de 12 ans se présentant pour être scolarisé en Guyane est accueilli et placé dans une classe avec des élèves de son âge même s'il ne parle pas un mot de français.

M. Marc Massion, corapporteur spécial, a rappelé que certaines propositions de M. Georges Patient, formulées dès 1997, sont restées lettres mortes jusqu'à la mission commune d'information du Sénat. Or, la situation sociale dans les DOM est à nouveau « explosive », ce qui nécessite que les problèmes ultramarins soient traités rapidement.

M. Eric Doligé, corapporteur spécial, a recommandé que les propositions de la mission commune d'information soient mises en oeuvre dans le cadre de l'examen du texte qui résultera du Comité interministériel du 6 novembre. Les problèmes de la Guyane sont majeurs et très spécifiques. C'est un territoire aussi vaste que le Portugal, dont 90 % de la terre appartient à l'Etat, qui subit une forte immigration clandestine et reste pourtant soumis aux réglementations européennes applicables en métropole.

M. Yann Gaillard a évoqué plusieurs problèmes majeurs en matière d'organisation administrative et politique, qu'il a pu constater par le passé en tant qu'inspecteur général des finances. Ainsi, les maires n'avaient aucun contact avec les receveurs municipaux. Par ailleurs, à la suite d'un cyclone, les aides apportées par l'Etat n'étaient pas allées à leurs bénéficiaires parce que les lettres d'envoi, estampillées au nom du Trésor public, avaient été détruites.

M. Eric Doligé a indiqué que l'absence trop fréquente d'adresses entraîne des difficultés dans l'acheminement du courrier. Par ailleurs, il est apparu, dans le cadre des auditions de la mission sénatoriale, que le problème des cotisations sociales non payées par les communes était inconnu des exécutifs départementaux concernés, ce qui montre le manque de communication et de coopération entre les différents exécutifs locaux.

En conclusion, M. Jean Arthuis, président, a jugé le système d'administration actuel de l'outre-mer « totalement décalé ».

La commission a alors décidé de proposer au Sénat l'adoption sans modification des crédits de la mission « Outre-mer » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2010.

Office national des forêts - Audition pour suite à donner à l'enquête de la Cour des comptes

La commission a ensuite procédé à l'audition, ouverte aux membres de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire ainsi qu'à la presse, pour suite à donner à l'enquête de la Cour des comptes sur l'Office national des forêts (ONF).

M. Jean Arthuis, président, a précisé que cette enquête de la Cour des comptes sur l'Office national des forêts (ONF) fait suite à une demande de la commission des finances en date du 27 octobre 2008, en application de l'article 58-2° de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF). Il a souligné que cette initiative résulte d'une proposition de M. Joël Bourdin, rapporteur spécial de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales ».

Il a salué la présence de MM. Christian Descheemaeker, président de la septième chambre de la Cour des comptes, Jean Hernandez et Jean-Marie Le Méné, conseillers-maîtres, et Mme Sandrine Rocard, rapporteur, qui ont réalisé l'enquête ; des dirigeants de l'ONF, Mme Annie Lhéritier, présidente du Conseil d'administration, et M. Pierre-Olivier Drège, directeur général ; et, enfin, des représentants du ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, MM. Pascal Viné, directeur de cabinet du ministre, et Fabrice Benkimoun, conseiller budgétaire, ainsi que Mme Sabine Brun-Rageul, conseillère technique en charge de l'aménagement du territoire et de la forêt.

M. Jean Arthuis, président, a souhaité que les échanges permettent notamment d'éclairer les points suivants :

- la prise en charge par les communes du régime forestier ;

- la gestion interne de l'office et, en particulier, de sa masse salariale ;

- les projets de déménagements de l'ONF et de l'Inventaire forestier national (IFN) ;

- la politique commerciale de l'ONF ;

- le rôle de la tutelle à l'égard de cet établissement public.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales », est revenu sur les motifs de la demande de la commission des finances auprès de la Cour des comptes. Il a tout d'abord indiqué qu'il convenait de procéder à un bilan à mi-parcours de la mise en oeuvre du contrat d'objectifs Etat-ONF, qui couvre la période 2007-2011. Il a ensuite mentionné la question des conséquences pour l'ONF des orientations du Grenelle de l'environnement et des Assises de la forêt. Enfin, il a observé qu'il s'agissait d'examiner les suites données aux décisions issues de la révision générale des politiques publiques (RGPP). Le conseil de la modernisation des politiques publiques du 11 juin 2008 a, en effet, décidé que l'office devra dégager des gains de productivité en vue de permettre le versement d'un dividende à l'Etat, en fonction de l'évolution des cours du bois. Il a également demandé l'intégration de l'Inventaire forestier national (IFN) à l'ONF.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial, a souhaité savoir dans quelle mesure les différentes décisions issues de la RGPP et du Grenelle de l'environnement ont été mises en oeuvre. En particulier, il s'est demandé si le processus de réorganisation interne de l'ONF traduit la mise en oeuvre d'une démarche de performance, orientée vers la recherche de résultats et de gains de productivité. Par ailleurs, il a fait part de son inquiétude sur la situation financière de l'office. Il s'est interrogé sur la contribution des différentes missions assurées par l'ONF à cette situation. Il a ainsi distingué quatre types de missions, à savoir :

- l'exploitation des forêts domaniales ;

- l'intervention dans les forêts des collectivités territoriales au titre du « régime forestier », qui impose aux communes de recourir à l'ONF pour gérer leurs forêts ;

- les missions d'intérêt général, confiées principalement par les ministères chargés de l'agriculture et de l'environnement ainsi que par les collectivités territoriales ;

- enfin, les prestations concurrentielles, destinées soit aux collectivités bénéficiant du régime forestier, activités dites « patrimoniales », soit aux autres clients de l'ONF, activités dites de « services ».

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial, s'est, en outre, félicité de la qualité du travail réalisé par les magistrats de la Cour des comptes.

M. Christian Descheemaeker, président de la septième Chambre de la Cour des comptes, a indiqué que le rôle principal de l'ONF est d'assurer la gestion des forêts publiques, qui représentent un quart de l'ensemble de la forêt française. Il a relevé que l'office intervient sur un marché caractérisé par sa volatilité, dans la mesure où le bois est une matière première. Il a précisé que les Assises de la forêt ont fixé des objectifs de hausse de la production, tant pour les forêts publiques que pour les forêts privées. Alors que, en 2008, l'ONF a mobilisé 17 millions de mètres cubes de bois, un seuil de 20 millions de mètres cubes doit ainsi être atteint d'ici à 2020.

Les exigences parfois contradictoires de développement de l'exploitation et de protection de l'environnement nécessitent d'être conciliées par l'ONF, qui est placé à cette fin sous la double tutelle du ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche et du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer.

Cet établissement public est un opérateur important pour l'Etat. Il emploie environ 10 000 personnes et son chiffre d'affaires s'est élevé à 584 millions d'euros en 2008. S'agissant des différentes missions de l'ONF, M. Christian Descheemaeker a relevé que l'exploitation des forêts domaniales, qui représente environ la moitié du chiffre d'affaires de l'office, est la seule activité bénéficiaire. Les trois autres sont déficitaires : la gestion des forêts des collectivités territoriales, les missions d'intérêt général, mais également les prestations concurrentielles qui, conduisant à des ventes à perte, posent la question du respect du droit de la concurrence.

Il a indiqué que l'obligation faite aux communes de recourir à l'ONF pour gérer leurs forêts repose sur un mode de financement assez complexe. D'une part, des « frais de garderie » sont versés par les collectivités territoriales, en fonction d'un taux forfaitaire de 12 % sur les ventes de bois. D'autre part, l'Etat est censé subventionner la différence entre ces frais de garderie et les charges réelles supportées par l'ONF, sous la forme d'un « versement compensateur » destiné à combler cet écart. En pratique, les contrats d'objectifs Etat-ONF fixent des plafonds annuels à cette subvention. Ces plafonds ne sont pas atteints dans la mesure où la différence entre les engagements de l'Etat au titre du versement compensateur et les sommes effectivement versées s'élève à un peu moins de 10 millions d'euros par an sur une période d'observation de dix ans. Les collectivités territoriales qui ne vendent pas de bois n'ont donc pas de frais à leur charge, alors que l'ONF entretient leurs forêts. Cette organisation décourage la valorisation commerciale du bois puisqu'une politique active d'exploitation par une commune engendre des coûts plus importants pour celle-ci.

M. Jean Arthuis, président, s'est étonné du caractère déséquilibré d'un tel système.

M. Christian Descheemaeker est convenu de l'intérêt d'une réforme du régime forestier dont bénéficient les collectivités territoriales. Il a notamment estimé pertinent de prendre en compte les surfaces ou les prestations assurées par l'ONF, voire la capacité contributive des communes.

S'agissant de la gestion de l'ONF, il a salué les démarches de réorganisation interne et de réduction des effectifs. Ceux-ci sont ainsi passés de 12 000 à 10 000 en moins de dix ans, soit une baisse de 17 %. Cette démarche n'a toutefois pas empêché l'augmentation de la masse salariale de 15 % sur la même période. L'attachement à l'autonomie et la forte syndicalisation ne facilitent pas un suivi de l'activité locale par la direction de l'office.

Les contrats d'objectifs Etat-ONF jouent un rôle important dans la gestion de l'ONF mais ils sont souvent rendus obsolètes par la survenue d'événements imprévisibles, comme les aléas climatiques et économiques. D'autres charges, dont l'anticipation est pourtant plus aisée, ne figurent pas dans le contrat actuellement en vigueur, qui couvre la période 2007-2011. Or, ces éléments sont de nature à remettre en cause l'équilibre du contrat. Il s'agit de :

- la majoration des cotisations pour les retraites ;

- la reprise du bâti domanial par l'ONF dans le cadre d'un bail emphytéotique ;

- l'assujettissement à la taxe foncière sur les forêts domaniales ;

- le transfert de la direction de l'ONF à Compiègne ;

- l'intégration de l'IFN à l'office, alors que l'IFN procède de son côté à un déménagement de son siège.

M. Christian Descheemaeker s'est, en outre, interrogé sur les perspectives du monopole d'exploitation de l'ONF sur les forêts publiques, en particulier celles des collectivités territoriales. Si la Commission européenne a reconnu en 2000 que l'activité domaniale de l'office constitue un service d'intérêt économique général, les activités concurrentielles de l'ONF, qui se traduisent par des ventes à perte, pourraient être contestées en raison d'une atteinte au droit de la concurrence.

Mme Annie Lhéritier, présidente du conseil d'administration de l'ONF, a rappelé qu'elle n'est entrée en fonction qu'en mars 2007. Elle n'a pas participé à la rédaction du contrat d'objectifs Etat-ONF 2007-2011, ni n'a été auditionnée par la Cour des comptes dans le cadre de l'enquête demandée par la commission des finances. Elle a pu distinguer deux périodes contrastées au cours de ses deux années et demi de mandat : une phase d'amélioration de la situation de l'office jusqu'au milieu de l'année 2008, puis une détérioration attestée tant sur le plan des résultats que par l'expression de l'inquiétude des agents de l'office et des communes forestières. Elle a estimé que les décisions issues de la RGPP sont lourdes de conséquences, à l'image de la prise en charge par l'ONF des cotisations de retraites, du déménagement du siège ou du transfert à titre onéreux du bâti domanial de l'Etat à l'office. Elle a, en outre, regretté le caractère pléthorique et peu opérationnel du conseil d'administration.

M. Pierre-Olivier Drège, directeur général de l'ONF, a indiqué que le coeur de métier de l'ONF consiste à gérer, de manière homogène et durable, les forêts publiques. Il a mis l'accent sur l'existence d'un régime forestier unique qui permet une approche globale de celles-ci, qu'elles appartiennent à l'Etat ou aux collectivités territoriales. Il a estimé qu'une telle organisation facilite la réalisation des objectifs définis par le Président de la République dans son discours d'Urmatt du 19 mai 2009, qu'il s'agisse de la meilleure valorisation de la ressource forestière ou de la protection de l'environnement. Il a relevé la montée en charge des prestations concurrentielles dans les missions de l'ONF. Pour ce qui concerne les missions d'intérêt général, il a souligné la part croissante des activités de prévention des incendies.

Il a ensuite distingué les deux contrats d'objectifs liant l'Etat à l'ONF qui se sont succédé au cours de la période d'observation de la Cour des comptes. Ils ne se sont en effet pas inscrits dans les mêmes contextes. Le premier, portant sur la période 2001-2006, était ainsi un contrat de redressement, alors que le second, qui couvre la période 2007-2011, correspond à un contrat de développement. Ce dernier poursuit des objectifs ambitieux, issus à la fois des orientations du Grenelle de l'environnement, des Assises de la forêt et de la RGPP. Le suivi du contrat 2007-2011 est facilité par l'existence de trente-quatre indicateurs de performance, dont l'ONF rend compte régulièrement.

Le redressement de l'établissement initié au début des années 2000 a conduit à une réorganisation profonde, qui s'est traduite par la suppression de deux échelons hiérarchiques et de 2 000 postes sur les 12 000 que comptait l'office en 1999. De même, la gestion par objectifs et la rémunération selon des critères de résultats ont été mises en oeuvre dans les différents services de l'ONF.

M. Jean Arthuis, président, s'est étonné que la réduction de 17 % des effectifs sur dix ans engendre une augmentation du même ordre de la masse salariale. Il a souhaité connaître les raisons d'une telle hausse.

M. Pierre-Olivier Drège a relevé plusieurs facteurs explicatifs : l'augmentation de la valeur du point d'indice pour les fonctionnaires, différentes mesures catégorielles en compensation des processus de réorganisation interne et la hausse des cotisations de retraite.

M. Jean Arthuis, président, et M. Philippe Marini, rapporteur général, ont demandé des précisions sur la part respective de l'augmentation des charges pour pensions et de la hausse de la rémunération des agents dans la progression de la masse salariale.

M. Pierre-Olivier Drège a indiqué tenir à la disposition de la commission des finances le détail de ces données. Il a observé que les charges pour pensions sont passées de 47 millions d'euros en 2005 à 74 millions d'euros en 2008 et devraient encore augmenter au cours des prochaines années.

M. Christian Descheemaeker a remarqué que la hausse des dépenses de personnel a commencé avant l'augmentation des charges liées aux retraites. L'impact des mesures statutaires favorables au personnel serait donc sensible.

M. Philippe Marini, rapporteur général, s'est interrogé sur l'indexation des pensions versées aux anciens agents de l'ONF.

M. Pierre-Olivier Drège a précisé que le taux d'augmentation est uniforme pour toute la fonction publique mais que l'ONF bénéficie d'une compensation de ce coût par l'Etat. Intégrale jusqu'en 2008, celle-ci est désormais dégressive alors que le taux de cotisation patronale s'accroît rapidement : stabilisé autour de 33 % des traitements versés, il devrait atteindre plus de 70 % dès 2011. Cette dynamique est de nature à remettre en question l'équilibre financier de l'office.

M. Pascal Viné, directeur de cabinet du ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, a précisé qu'il s'exprime au nom des deux tutelles ministérielles de l'office : le ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche et celui de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer. Il a souligné les efforts considérables fournis par la direction de l'ONF en matière de gestion, y compris sur le plan de la masse salariale. Dans le contexte de charges croissantes pour l'ONF, en particulier s'agissant des pensions, il apparaît nécessaire d'apporter des soutiens ponctuels à cet établissement public. Une aide exceptionnelle de 17 millions d'euros a ainsi été versée en 2009. Par ailleurs, l'ampleur de la baisse des ventes de bois pourrait prochainement conduire à de nouvelles subventions de l'Etat.

M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé sur les effets conjugués, sur le résultat 2009, de la baisse des ventes et de la réduction des compensations au titre des pensions.

M. Pierre-Olivier Drège a souligné la spécificité de l'exercice 2009 : sur les 700 millions d'euros de chiffre d'affaires, la perte est estimée à environ 100 millions d'euros. Il a estimé que le contrat d'objectifs Etat-ONF 2007-2011 reste toutefois d'actualité et a rappelé que les comptes de l'office étaient équilibrés en 2008. La situation actuelle révèle les limites de la RGPP : les profits éventuels de l'établissement apparaissent préemptés par l'Etat, en particulier à travers l'internalisation du coût des pensions.

M. Jean Arthuis, président, a souhaité connaître la situation nette et la valeur du patrimoine de l'ONF.

M. Pierre-Olivier Drège a indiqué que le résultat net s'établit à 120 millions d'euros. Il a insisté sur l'inscription, depuis 2006, de son patrimoine au bilan de l'office. Il a, à cet égard, souligné que les forêts domaniales représentent une valeur d'environ 10 milliards d'euros.

M. Jean Arthuis, président, a souhaité interroger le ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche sur les relations financières entre l'ONF et les communes. Le régime forestier applicable à celles-ci pose la question du respect du droit de la concurrence et conduit à un mode de rémunération peu satisfaisant pour l'office.

M. Pascal Viné a reconnu la complexité de ce régime ainsi que l'injustice du calcul des frais de garderie. Ceux-ci ne prennent, en effet, pas en compte le service rendu aux communes par l'ONF, ce que la Cour des comptes a souligné. Le versement compensateur de l'Etat à l'ONF s'élève à 144 millions d'euros par an, conformément au contrat d'objectifs Etat-ONF, dont la fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR) est elle aussi signataire. Ce contrat traduit l'engagement du ministère auprès de l'ONF et témoigne d'une volonté d'associer les communes forestières à la définition des grands équilibres.

M. Jean Arthuis, président, a demandé au ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, si la réforme de ce régime est envisagée.

M. Pascal Viné a estimé possible de procéder à des économies sur les services rendus aux communes forestières, mais il a précisé que la réforme du dispositif n'est pas, à ce stade, en discussion.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial, s'est inquiété de l'absence de respect par le ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche de ses engagements à l'égard de l'ONF. S'agissant par exemple des missions d'intérêt général, il s'est interrogé sur les motifs de non-paiement par l'Etat de certaines de ses dettes.

M. Pascal Viné est convenu de l'existence de pratiques de gel de certaines lignes budgétaires, mais il a souligné les améliorations apportées par le Gouvernement en la matière depuis 2008, ce qui témoigne d'une adaptation pragmatique à la situation financière de l'ONF. La subvention exceptionnelle versée en 2009 illustre ainsi la présence active du ministère au côté de l'office en cas de difficultés.

M. Roland du Luart a salué les efforts de gestion fournis par la direction de l'ONF depuis plusieurs années. Il a estimé que les contrats d'objectifs couvrent une durée trop courte et nécessiteraient d'être étendus sur un délai de vingt ans, afin de correspondre à la durée moyenne de développement de la ressource forestière et de permettre à l'office de mieux faire face aux aléas climatiques et économiques. Par ailleurs, il a appelé l'attention sur les risques induits par des exigences excessives en matière de rentabilité de l'ONF. Une plus grande mobilisation de la ressource forestière pourrait, en effet, conduire à déséquilibrer davantage le marché et à fragiliser l'office en réduisant la valeur de vente des bois. M. Roland du Luart s'est ensuite inquiété de l'augmentation des charges pesant sur l'ONF. Il a observé que l'office n'est pas responsable de cet accroissement. S'agissant des nouvelles contraintes imposées au nom du développement durable, il a ainsi souligné qu'elles engendrent des coûts considérables pour l'ONF, sans que les bénéfices pour l'environnement soient avérés. De même, la majoration des cotisations de retraite pèse de plus en plus sur sa situation financière parce que l'Etat a fait le choix de la faire prendre en charge par le budget de l'office.

Mme Fabienne Keller a partagé l'opinion de M. Roland du Luart pour ce qui concerne la durée de référence retenue pour programmer et évaluer la gestion de l'ONF. Elle a souhaité que l'ONF fournisse un tableau décrivant les relations entre la baisse des effectifs et l'augmentation de la masse salariale. Elle a appelé l'attention sur l'inadaptation du contrat d'objectifs 2007-2011 et plaidé pour un pilotage plus constant et plus fin par l'Etat de l'activité de cet opérateur.

M. Pascal Viné a estimé nécessaire de concilier l'approche de long terme avec une prise en compte des enjeux de court terme. Il a illustré son propos en évoquant la participation de l'ONF, exigée par sa tutelle, au fonds stratégique bois, à hauteur de 5 millions d'euros dès 2009, en dépit de la situation financière délicate de l'office. L'action structurelle de l'ONF doit pouvoir s'articuler avec une dynamique économique de court terme.

En réponse à M. Roland du Luart, M. Pierre-Olivier Drège a indiqué que le pilotage de l'ONF doit faire l'objet d'une approche de long terme. Les bénéfices dégagés en 2007 ont ainsi été utilisés pour investir dans la gestion durable des forêts. De même, il a plaidé pour la constitution de provisions par l'ONF, permettant de faire face aux aléas. Pour satisfaire cet objectif, l'Etat doit renoncer à capter l'ensemble des profits futurs de l'office.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a mis l'accent sur la nécessité pour l'office d'adopter une stratégie d'entreprise. Il a regretté que l'enquête de la Cour des comptes ne rende pas compte de l'adéquation du bilan de l'ONF à ses objectifs. Il a estimé que l'approche par l'ONF de sa gestion patrimoniale semble confuse. Dans la mesure où le bâti domanial transféré par l'Etat est destiné à être vendu, il doit ainsi être évalué selon sa valeur vénale sur le marché. Par ailleurs, de manière à accroître la valeur ajoutée de l'office, il a jugé utile de développer son patrimoine technique sur le long terme, en procédant à des efforts de recherche. En outre, il s'est interrogé sur la pertinence du régime forestier, qui empêche les communes de recourir à d'autres prestataires que l'ONF.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial, a souhaité obtenir des précisions sur le transfert à l'ONF de propriétés bâties appartenant à l'Etat, dans le cadre d'un bail emphytéotique prévoyant un versement initial de 50 millions d'euros et un loyer annuel de 6 à 8 millions d'euros. Le choix de faire porter cette nouvelle charge à l'ONF apparaît contestable. Il a ensuite déploré que l'ONF ne s'appuie pas sur une politique commerciale structurée, ce qui constitue un « défaut de pilotage majeur » selon la Cour des comptes. Il s'est ainsi demandé si l'office dispose d'instruments de connaissance du marché et d'outils de contrôle de gestion. Il est ensuite revenu sur le projet de fusion avec l'IFN, en faisant valoir qu'une telle opération pourrait porter atteinte au droit de la concurrence, dans la mesure où l'IFN dispose d'informations sur les concurrents privés de l'ONF. Enfin, il s'est interrogé sur la cohérence des deux opérations parallèles de déménagement de l'ONF à Compiègne, d'une part, et de l'IFN à Orléans, d'autre part.

M. Yann Gaillard a précisé que son ancien mandat de président de la FNCOFOR l'a conduit à signer le contrat d'objectifs Etat-ONF en tant que témoin et pas en qualité de cocontractant. Il a estimé que la crise conjoncturelle traversée par l'ONF réduit l'intérêt d'une enquête sur sa situation. De manière générale, il a indiqué que la mission d'entretien des forêts domaniales dévolue à l'ONF ne peut conduire à gérer celui-ci comme une entreprise.

M. Philippe Leroy a rappelé que le Sénat a pris position contre l'intégration de l'IFN à l'ONF, en votant le 25 mars 2009 la suppression de l'article 36 de la proposition de loi de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures. Il a observé le caractère dual des activités de l'ONF : des tâches administratives liées à la gestion d'un patrimoine public, d'une part, et une politique commerciale fondée sur l'exploitation de la ressource forestière, d'autre part. Il a souhaité que l'office développe ses missions de prestataire de services dans la mesure où il bénéficie d'une expertise technique précieuse.

M. Jean Arthuis, président, a appelé la tutelle à jouer pleinement son rôle et à définir une frontière entre les activités de l'office qui relèvent d'une logique concurrentielle et celles qui ressortissent de l'entretien du patrimoine public. S'agissant de ces dernières, l'Etat doit garantir à l'ONF une juste rémunération.

M. Pierre-Olivier Drège a distingué deux types d'activités commerciales conduites par l'ONF : l'assistance aux petites communes, très déficitaire, d'une part, les travaux dans le secteur concurrentiel proprement dit, d'autre part. Ces derniers, appuyés sur un réseau d'agences de travaux qui forment des centres de profit autonomes, permettent de dégager des bénéfices. Ils démontrent la capacité de l'ONF à conduire des activités rentables.

M. Jean Arthuis, président, a souhaité que la situation financière de l'office s'améliore rapidement, en rappelant l'impératif de réduction des dépenses publiques.

M. Pierre-Olivier Drège a estimé que le modèle économique de l'ONF est viable si l'Etat ne préempte pas, par avance, ses profits. Il a observé que l'office doit disposer des moyens lui permettant de faire face aux nombreux objectifs qui lui sont assignés. Il a ainsi donné l'exemple des provisions que l'office doit pouvoir constituer. De même, il a indiqué qu'il demande au Gouvernement de faire bénéficier l'ONF d'une fraction du futur grand emprunt de manière à pouvoir accroître ses fonds propres. S'agissant du bail emphytéotique sur le bâti domanial, il a expliqué qu'il est cohérent de ne pas dissocier les différents types de propriétés existants au sein des forêts publiques, même si le coût de l'opération pour l'ONF est élevé. En ce qui concerne le déménagement du siège de l'office, il a précisé qu'il s'agit d'une décision du Premier ministre, consécutive à la réorganisation de la carte militaire.

M. Pascal Viné a relevé qu'un avis de l'Autorité de la concurrence, rendu le 29 septembre 2009, désapprouve le rapprochement entre l'ONF et l'IFN. Les suites à donner à cet avis sont en cours d'étude au niveau interministériel. S'agissant du régime forestier appliqué aux collectivités territoriales, il a observé à son tour que l'avis de la Commission européenne rendu en 2000 n'a relevé aucune contrariété au droit de la concurrence ou au régime communautaire des aides d'Etat. En ce qui concerne le bâti domanial transféré à l'ONF, il a indiqué que la cession de certains biens est possible. L'ONF profite d'un intéressement aux ventes.

M. Pierre-Olivier Drège a évalué le coût global de cette opération, composée d'un versement initial de 50 millions d'euros puis d'un loyer annuel de 6 à 8 millions d'euros, à près de 250 millions d'euros pour l'ONF.

M. Jean Arthuis, président, s'est opposé à la prise en charge par l'ONF d'une part de la dette de l'Etat sous la forme de biens transférés par bail emphytéotique. Il a observé que la dette publique doit faire l'objet d'une gestion centralisée en raison des conditions plus attractives dont bénéficie la dette de l'Etat. Par conséquent, il a invité le Gouvernement à revoir les modalités du transfert, en procédant, par exemple, à un apport en capital, par l'Etat, de ces mêmes biens.

M. Pascal Viné est revenu sur le rôle majeur joué par la tutelle à travers la définition des contrats d'objectifs. Il est convenu que le pilotage d'un établissement public tel que l'ONF peut être complexe.

Mme Annie Lhéritier a souligné les améliorations substantielles apportées dans la gestion de l'ONF. Celui-ci représente un outil performant dont l'action en faveur du développement de la filière bois sera déterminante, surtout si l'Etat renonce à exercer sur lui une pression trop importante, notamment d'un point de vue financier.

M. Jean Arthuis, président, a précisé que la démarche de la commission des finances consiste à appuyer les efforts fournis par la direction de l'ONF en direction de l'amélioration de la gestion de cet établissement public.

A l'issue de ce débat, la commission a autorisé, à l'unanimité, la publication de l'enquête de la Cour des comptes ainsi que du compte rendu de la présente audition sous la forme d'un rapport d'information.

Crise financière et régulation des marchés - Examen du rapport du groupe de travail

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'examen du rapport du groupe de travail sur la crise financière et la régulation des marchés.

M. Philippe Marini, rapporteur, a rappelé le contexte de ce groupe de travail, dont les réflexions se sont appuyées sur de nombreuses auditions, que ce soit en commission plénière, dans le cadre du groupe de travail, ou par le rapporteur général. Un certain nombre de déplacements à l'étranger a également été effectué : une mission du bureau de la commission aux Etats-Unis d'Amérique, deux missions du rapporteur général à Londres et en Suisse, et deux visites du groupe de travail à la Banque centrale européenne, à Francfort, et à la Commission européenne à Bruxelles.

Sans revenir sur les causes de la crise qui ont été exposées à de nombreuses reprises, il a indiqué que le groupe de travail a été guidé par deux principes directeurs : éviter que les mêmes causes ne produisent les mêmes effets en résistant à la tentation d'un retour aux pratiques antérieures, et trouver le bon équilibre entre des aspirations parfois contradictoires à la sécurité ou à la liberté et à l'innovation. Il a exposé les trois champs couverts par les propositions du groupe de travail qui sont la transparence et la régulation des produits et marchés, la limitation de la procyclicité et du risque systémique, et la restauration de la responsabilité et du prix du risque.

M. Philippe Marini, rapporteur, a ensuite présenté les 57 propositions du groupe de travail. En premier lieu, celles relatives à la transparence et à la régulation des produits et marchés ont trait à six domaines.

Concernant la proposition de directive européenne sur les gestionnaires de fonds alternatifs, le groupe de travail propose de :

- réserver le « passeport » aux seuls gestionnaires établis dans l'Union européenne ;

- préciser les critères d'indépendance du valorisateur des actifs des fonds ;

- prévoir une obligation, et non une simple faculté, pour l'autorité d'agrément d'imposer des exigences plus strictes au gestionnaire en cas de commercialisation auprès d'investisseurs de détail non qualifiés ;

- élargir le champ de la directive aux fonds de fonds pour tirer les leçons de « l'affaire Madoff ».

Sur l'encadrement des agences de notation, ses propositions sont les suivantes :

- préciser le rôle de la future Autorité européenne des marchés financiers et son articulation avec les autorités nationales ;

- pour l'application du régime transitoire d'agrément des agences, doter l'Autorité des marchés financiers (AMF) d'un véritable pouvoir de surveillance des agences ;

- préciser la prévention et la gestion des conflits d'intérêt au sein des agences, et mieux formaliser leur contrôle interne de la qualité des notations ;

- créer les conditions d'une véritable concurrence entre agences de notation et favoriser l'émergence d'agences européennes.

En matière d'infrastructures post-marché et de transparence des produits dérivés de gré à gré :

- standardiser les contrats de dérivés de gré à gré autant que cela est possible, selon des modalités communes aux Etats-Unis et en Europe ;

- généraliser la procédure de confirmation électronique des ordres ;

- étendre le tryptique « standardisation-compensation-information » aux dérivés de gré à gré autres que les contrats d'échange sur défaut (« credit default swaps » - CDS) ;

- promouvoir la création d'une chambre de compensation dans la zone euro, soit par création d'une structure ex nihilo, soit par regroupement d'acteurs existants ;

- mettre en place, sous l'égide du Conseil de stabilité financière (CSF) et de l'Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV), des règles mondiales de gouvernance des chambres de compensation ;

- constituer une base de données européenne sur les dérivés standardisés, en tant qu'alternative à la Trade Information Warehouse américaine. A défaut, assurer le respect du principe d'accès libre et non-discriminatoire à l'information ;

- garantir que le champ de la directive « Abus de marché » couvre tous les produits dérivés négociés sur un marché réglementé ou organisé, en particulier les CDS ;

- mettre en place une législation européenne sur les infrastructures post-marché - qui en tant que biens collectifs doivent faire l'objet d'un libre-accès -, qui permette d'harmoniser les régimes du règlement-livraison et des dépositaires ;

- approfondir la réflexion européenne et internationale concernant les produits dérivés sur l'énergie et les matières premières, en particulier sur les quotas de CO2 et sur les produits dénommés « futures » contractés dans une optique spéculative par des agents n'ayant pas d'intérêt sur le sous-jacent et qui privilégient un dénouement en numéraire.

Les propositions relatives aux pratiques de marché sont les suivantes :

- interdire la cotation à plus de deux décimales, les ordres dits « flash » et les dérivés sur dérivés ;

- prévoir un temps minimal de présence (plusieurs secondes) d'un ordre dans le carnet d'ordres central d'un marché, afin qu'il ne soit pas perçu par les seuls programmes automatiques de négociation ;

- consolider la base légale des mesures de suspension des ventes à découvert et établir une doctrine pérenne et coordonnée entre les principaux régulateurs de marché, applicable en période normale et en période de troubles exceptionnels ;

- doter l'AMF, en cas de menace imminente pour la stabilité et l'intégrité des marchés, du pouvoir de suspendre ou interdire pour une durée illimitée toute pratique de marché litigieuse ;

- soumettre les prêts et emprunts de titres à une obligation précise d'information du marché ;

- étendre le périmètre des déclarations de franchissement de seuil à tous les produits dérivés conférant une exposition économique sur un émetteur, en particulier ceux dénommés « contracts for difference ».

S'agissant de la protection des investisseurs et des épargnants :

- dans une démarche de régulation par objectif, étendre la mission de l'AMF en tant que « gardienne » de la déontologie de la distribution de l'ensemble des produits d'épargne, assurance-vie et livrets rémunérés inclus ;

- centrer les modalités d'exercice du contrôle de la commercialisation sur la fiabilité des procédures et l'honnêteté de l'information livrée au consommateur (selon des principes d'intelligibilité, d'adaptation et de pertinence) plutôt que sur le respect d'un formalisme élevé ;

- étendre, au-delà des seuls organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM), le « document d'information clef à l'investisseur » ;

- compte tenu de la complexité des statuts existants et de certains abus dans les pratiques commerciales, examiner l'opportunité économique et juridique de la création d'un statut de « courtier en produits financiers », par fusion des statuts de démarcheur et de conseiller en investissements financiers, voire de courtier en assurances.

Le groupe de travail a également formulé des recommandations sur quatre propositions de règlements communautaires et une proposition de décision relatives à la création d'un Comité européen du risque systémique (CERS) et de trois agences européennes de supervision sectorielle (l'Autorité bancaire européenne, l'Autorité européenne des marchés financiers et l'Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles), qui ont été présentées par la Commission européenne le 23 septembre 2009.

Les propositions du groupe de travail sont les suivantes :

- limiter à deux au lieu de cinq le nombre de gouverneurs de la Banque centrale européenne au comité directeur du CERS ;

- prévoir une adoption à la majorité simple (et non pas qualifiée) de la publication des alertes et recommandations non individuelles émises par le conseil général du CERS ;

- prévoir que les autorités sectorielles puissent s'autosaisir pour prendre des mesures d'urgence, sans que la Commission ait le monopole d'appréciation de cette urgence ;

- préciser la portée de la clause de sauvegarde budgétaire, qui devrait être limitée aux situations appelant une recapitalisation ou la mobilisation de garanties publiques ;

- veiller à ce que les projets de normes techniques établis par les autorités ne soient pas le réceptacle des ambiguïtés, incertitudes et différends politiques non résolus au premier niveau du « processus Lamfalussy ».

En deuxième lieu, M. Philippe Marini, rapporteur, a exposé les propositions relatives à la limitation de la procyclicité et du risque systémique, qui couvrent deux aspects.

Concernant les normes comptables internationales, il est proposé de :

- « maintenir la pression » politique sur l'International Accounting Standards Board (IASB) pour une réforme plus pragmatique de la juste valeur. Le cas échéant, il ne faudrait pas exclure d' « européaniser » la norme International Accounting Standard (IAS) 39 ;

- améliorer la gouvernance de l'IASB, en particulier par un renforcement du « comité directeur » créé début 2009.

Les propositions relatives à la mesure et à la prise en compte du risque systémique sont les suivantes :

- enrichir l'appréciation du risque systémique et le deuxième pilier de « Bâle II » par un ratio de levier, en tenant compte des différences comptables entre l'Europe et les Etats-Unis. Une harmonisation complète du mode de calcul doit précéder toute éventuelle intégration de ce ratio dans le premier pilier ;

- harmoniser et systématiser la démarche des « tests de résistance », selon une méthodologie établie par le CSF et le Comité de Bâle et une périodicité régulière (par exemple tous les six mois). Les résultats de ces tests devraient également être publiés, au moins pays par pays ;

- matérialiser le coût de l'assurance systémique par une « prime d'assurance » du risque systémique, dont le taux serait progressif et qui se substituerait à la taxe sur les salaires ;

- mieux prendre en compte le risque systémique dans le droit de la concurrence et l'examen des opérations de rapprochement entre établissements financiers ;

- envisager la mise en place, à moyen-long terme, d'une garantie des dépôts centralisée à l'échelle de la zone euro.

M. Bernard Angels a considéré que la prime ou taxe d'assurance systémique représenterait une avancée mais s'est déclaré surpris qu'elle puisse se substituer à la taxe sur les salaires. M. Philippe Marini, rapporteur, a précisé que cette taxe serait versée au budget de l'Etat, ce dernier devenant en quelque sorte l'assureur de ses propres risques. M. Albéric de Montgolfier a ajouté que le produit fiscal étant supposé identique, la seule vraie différence avec la taxe sur les salaires réside dans une modulation en fonction des risques encourus par les banques.

En troisième et dernier lieu, M. Philippe Marini, rapporteur, a présenté les propositions relatives à la restauration de la responsabilité et du coût du risque, qui traitent quatre domaines.

Pour ce qui concerne les rémunérations variables des opérateurs de marché :

- prévoir un régime harmonisé de publication, dans le rapport annuel, des rémunérations les plus élevées (50 ou 100, selon un curseur à fixer) dans les établissements financiers cotés ;

- interdire les bonus annuels qui seraient garantis quels que soient les résultats ;

- interdire les retraites supplémentaires dites « retraites-chapeaux », en tant qu'elles ne constituent pas une rémunération de la performance ;

- interdire toute distribution de bonus qui ne serait pas adossée à une performance mesurée par des critères précis ;

- indexer les rémunérations variables non seulement sur la performance individuelle de l'opérateur, mais encore sur les résultats de l'entité opérationnelle et de l'entreprise (ou du groupe), à raison de trois tiers par exemple ;

- étaler sur au moins trois ans une fraction au moins égale aux deux tiers de la rémunération variable, avec une clause de retenue ou restitution en cas de résultats négatifs ultérieurs, applicable rétroactivement à l'ensemble de la rémunération variable perçue ;

- prévoir un paiement majoritairement en titres (de préférence aux options de souscriptions d'actions dites « stock-options ») plutôt qu'en numéraire, et placer sous séquestre la rémunération étalée ;

- accorder un droit de regard et de veto de l'Etat sur les rémunérations des dirigeants des banques dès lors qu'il en assume le risque systémique ;

- interdire tout mandat public avec les établissements financiers (nationaux ou sous contrôle étranger) qui ne se conforment pas aux nouvelles dispositions et en publier la liste ;

- étendre le principe de la rétribution de la performance aux fonctions de contrôle et de « back office », afin de revaloriser ces services trop dénigrés.

Concernant la responsabilité des dirigeants face aux risques financiers :

- prévoir que le président du conseil d'administration ou du conseil de surveillance justifie, dans le rapport annuel, la méthodologie de quantification du risque, et certifie, conjointement avec le directeur financier, l'exposition et le niveau d'endettement de l'institution par classe d'actifs ;

- inciter les établissements financiers à émettre des actions de préférence dont les droits de vote et le dividende augmenteraient avec la durée de détention.

En matière de responsabilité des banques à l'égard de leurs clients, il est proposé de :

- étendre à tous les produits financiers (les assurances et crédits en particulier) les principes de déontologie et d'organisation commerciales introduits par la directive sur les marchés d'instruments financiers ;

- promouvoir en Europe continentale un modèle de convention de crédit moins complexe et plus équilibré ;

- relever substantiellement, par exemple de 5 % à 20 %, le taux de « rétention » au bilan des actifs titrisés.

Enfin deux propositions ont pour objet de diminuer le coût et la complexité des faillites d'établissements financiers :

- prévoir des « testaments » pour les institutions systémiques, permettant de répartir les responsabilités et pertes entre filiales, actionnaires et créanciers, de limiter le recours aux fonds publics et d'inciter les établissements à simplifier leurs structures ;

- doter les superviseurs bancaires de pouvoirs supplémentaires ou de quasi-tutelle en cas d'urgence, permettant, par exemple, la création d'une « banque-relais », la révocation de mandataires ou l'interruption de contrats.

M. Philippe Marini, rapporteur, a conclu en rappelant que le projet de rapport d'information du groupe de travail vaut également prise de position sur les cinq initiatives législatives de la Commission européenne qui constituent le « paquet supervision financière » et dont la commission des finances s'est saisie, sur le fondement de l'article 73 quinquies du Règlement du Sénat, au cours de sa séance du 7 octobre 2009.

M. Jean Arthuis, président, a rappelé que, tout en s'inspirant des recommandations du groupe de travail Assemblée nationale - Sénat sur la crise financière internationale, le projet de rapport du groupe de travail marque la spécificité de la réflexion du Sénat.

Mme Nicole Bricq a souligné l'intérêt d'examiner conjointement le projet de rapport d'information du groupe de travail et la proposition de résolution européenne déposée par le groupe socialiste sur la proposition de directive du 13 juillet 2009 relative aux exigences de fonds propres pour le portefeuille de négociation et pour les retitrisations, et la surveillance prudentielle des politiques de rémunérations. Cet examen intervient opportunément après le sommet du G20 à Pittsburgh et avant les décisions concernant les futurs règlements et directives européennes ou le projet de loi sur la régulation financière annoncé par Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

Elle s'est félicitée de la volonté commune de « politiser » le débat sur la crise financière et a pris acte des corrections portées dans le projet de rapport à la demande de l'opposition. Néanmoins, plusieurs points de divergence subsistent entre ce projet et la position du groupe socialiste retracée dans la proposition de résolution européenne. Avant de présenter ces différences, elle s'est interrogée sur l'opportunité d'étendre le principe de la rétribution de la performance aux fonctions de contrôle, les personnes concernées pouvant alors avoir intérêt à laisser se mettre en place une gestion du risque en contradiction avec les intérêts de la société afin d'accroître leur rémunération.

Mme Nicole Bricq a ensuite expliqué les principales divergences entre la proposition du groupe socialiste et le rapport du groupe de travail :

- la proposition adopte un champ de réflexion plus large concernant les rémunérations, les recommandations ne s'appliquant pas, comme dans le projet de rapport du groupe de travail, aux seuls opérateurs de marché mais aussi aux dirigeants et mandataires sociaux des sociétés cotées, dans la suite du débat déjà engagé en 2008 à l'occasion de l'examen de la proposition de loi visant à réformer le statut des dirigeants de sociétés et à encadrer leurs rémunérations ;

- elle retient un taux de rétention sur le bilan des actifs titrisés plus élevé, soit 25 % contre 20 % dans le projet de rapport du groupe de travail qui constitue un compromis ;

- elle n'est pas favorable à la suppression de la taxe sur les salaires dans le cadre de la création proposée d'une taxe d'assurance systémique ;

- elle prône un droit de regard de l'Etat sur les options de souscriptions d'actions au-delà de la sphère des banques bénéficiaires de la garantie de l'Etat, et cela afin de garantir la mise en place de bonnes pratiques à long terme ;

- elle souhaite la création d'un superviseur européen unique.

M. Jean Arthuis, président, a estimé que, en dépit de ces remarques, il existe une certaine convergence d'analyse entre les membres du groupe de travail, quelle que soit leur sensibilité.

En réponse à M. Philippe Dallier qui s'interrogeait sur la possibilité de mettre en place une méthodologie commune à l'ensemble des établissements concernant la quantification du risque, M. Philippe Marini, rapporteur, et M. Jean Arthuis, président, ont répondu que les normes de « Bâle II » organisent d'ores et déjà cette harmonisation et que la proposition du groupe de travail vise avant tout à compléter, dans le cadre du rapport annuel, l'information des actionnaires sur les risques financiers.

Mme Nicole Bricq a regretté que le projet de rapport ne reprenne pas à son compte la proposition du groupe de travail Assemblée nationale-Sénat concernant l'instauration d'un vote contraignant de l'assemblée générale des actionnaires sur les rémunérations, aussi bien dans le cadre de l'approbation des résolutions individuelles que du rapport de rémunération de l'exercice écoulé. Elle a précisé que le groupe socialiste propose de soumettre la rémunération des présidents de conseil d'administration et des directeurs généraux à l'avis conforme du comité d'entreprise, au vote de l'assemblée générale et à celui du conseil d'administration.

M. François Marc s'est demandé s'il est suffisant de créer une chambre de compensation européenne pour assurer la transparence de l'ensemble des flux d'informations. La transparence des transactions réalisées sur des marchés organisés ou hors de ces marchés doit en effet être également garantie. M. Jean Arthuis, président, et M. Philippe Marini, rapporteur, ont approuvé l'idée de compléter la proposition du groupe de travail sur ce point.

M. Jean-Pierre Fourcade a mis l'accent sur la nécessité de casser l'oligopole des agences de notation, préoccupation qui est reprise par une des propositions du projet de rapport. Il a également souhaité clarifier la rédaction de la proposition relative au taux de rétention en supprimant la précision selon laquelle ce taux s'appliquerait dans le cadre de « montages déconsolidants ». Cette demande a été acceptée.

Puis la commission a adopté les conclusions du groupe de travail et autorisé leur publication sous la forme d'un rapport d'information. En réponse aux interrogations de M. Bernard Vera et de M. François Marc, M. Jean Arthuis, président, a indiqué que les éventuelles contributions des groupes politiques seront insérées dans le rapport.

Proposition de résolution européenne - Exigences de fonds propres pour le portefeuille de négociation et pour les retitrisations, et surveillance prudentielle des politiques de rémunérations - Examen du rapport

Puis la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Philippe Marini, rapporteur, sur la proposition de résolution européenne n° 629 (2008-2009) portant sur la proposition de directive du 13 juillet 2009 relative aux exigences de fonds propres pour le portefeuille de négociation et pour les retitrisations, et la surveillance prudentielle des politiques de rémunérations (E 4632), présentée par M. Simon Sutour, Mme Nicole Bricq et les membres du groupe socialiste.

M. Philippe Marini, rapporteur, a effectué, à titre liminaire, un rappel de procédure. La présente proposition de résolution constitue, en effet, la première opportunité de mettre en oeuvre les nouvelles dispositions du Règlement du Sénat relatives aux propositions de résolution européenne déposées par les sénateurs. Ces propositions de résolution sont désormais renvoyées en règle générale, dans un premier temps, à la commission des affaires européennes. Celle-ci se prononce dans un délai d'un mois et conclut soit au rejet, soit à l'adoption du texte, éventuellement amendé. La proposition de résolution européenne est ensuite examinée par la commission au fond qui se prononce sur la base du texte adopté par la commission des affaires européennes ou, à défaut, du texte initial de la proposition de résolution.

M. Philippe Marini, rapporteur, a indiqué que, en l'espèce, la commission des affaires européennes s'est réunie le 14 octobre dernier et qu'elle n'a pas amendé le texte. En fait, conformément à l'accord passé entre les groupes politiques sur l'examen des textes inscrits à l'ordre du jour réservé des groupes politiques d'opposition et des groupes politiques minoritaires, il a été décidé de ne pas modifier le texte de la proposition mise en distribution. Si la commission des finances adopte la même démarche, comme il le préconise, le débat en séance publique, prévu pour le 29 octobre 2009, portera donc sur le texte initial déposé par les membres du groupe socialiste.

M. Philippe Marini, rapporteur, a ensuite évoqué quelques éléments de contexte. La Commission européenne a lancé, en avril 2009, un programme ambitieux de réforme des services financiers. La proposition de résolution examinée par la commission des finances se réfère à une proposition de directive qui se rattache, dans cette optique, à un ensemble de mesures visant à compléter et à renforcer l'édifice européen de régulation financière. Cette proposition de directive vient modifier deux directives, dites « directives fonds propres », et a un caractère essentiellement technique.

Il a ensuite présenté les deux objectifs de la proposition de directive. En premier lieu, celle-ci vise à intégrer au droit communautaire les dernières préconisations de la réglementation « Bâle II » en termes de fonds propres des banques. En second lieu, elle contient des dispositions relatives aux rémunérations des dirigeants d'établissements financiers. Il a précisé que ces dispositions ne sont que de nature prudentielle et ne concernent que les établissements financiers.

M. Philippe Marini, rapporteur, a alors constaté que si le texte déposé par le groupe socialiste contient des éléments de convergence avec les réflexions menées par le groupe de travail de la commission des finances sur la crise financière et la régulation des marchés, il en diverge toutefois sensiblement, notamment sur les préconisations relatives aux rémunérations des dirigeants. Par ailleurs, la proposition de résolution du groupe socialiste adopte un champ de réflexion de portée plus large que la directive à laquelle elle se rattache et qui n'intervient que dans le domaine strictement prudentiel.

Il a ensuite exposé les mesures de la proposition de directive relatives à la réglementation prudentielle des fonds propres des banques. Rappelant la réglementation dite « Bâle II », il a souligné que, lors de la crise, celle-ci était apparue insuffisante. En effet, cette réglementation est procyclique puisque, en période d'euphorie financière, les banques ajustent leur niveau de fonds propres de sorte qu'elles ne détiennent que le minimum de fonds imposé par la réglementation. En revanche, lorsque la conjoncture se retourne, les contreparties font massivement défaut et les banques ont alors besoin d'augmenter leurs fonds propres au moment même où le capital est le plus coûteux, ce qui contribue à les précipiter dans un état « d'asphyxie financière ».

M. Philippe Marini, rapporteur, a également souligné que la réglementation « Bâle II » a été dans l'incapacité de prendre en compte les produits les plus complexes et les plus risqués.

Il a rappelé que, en vue de corriger ces deux faiblesses, les instances internationales ont élaboré de nouvelles règles que la proposition de directive vise à intégrer au droit communautaire. Il a alors présenté les trois principales orientations de la directive. Tout d'abord, celle-ci impose, par le biais des autorités nationales de régulation, de nouvelles exigences en matière de fonds propres pour les opérations de retitrisation. Ensuite, elle encadre le recours aux modèles internes des banques ce qui aura pour effet d'augmenter les fonds propres pour le portefeuille de négociation. Enfin, elle impose de nouvelles exigences de publicité sur les risques de titrisation.

M. Philippe Marini, rapporteur, a également présenté les dispositions de la directive relatives au renforcement du contrôle sur les politiques de rémunération des établissements financiers. Il a insisté sur l'approche strictement prudentielle de la Commission européenne sur ce point. Il a relevé que les politiques de rémunération ont contribué, pour une part, à la crise financière dans la mesure où elles ont encouragé une prise de risques excessive et favorisé une politique de court terme au détriment des performances de long terme de l'entreprise.

Puis il a évoqué les conclusions du groupe de haut niveau, mis en place par la Commission européenne et présidé par M. Jacques de Larosière. Ce groupe a préconisé que les autorités de régulation nationales puissent imposer une augmentation des fonds propres aux établissements dont les politiques de rémunération seraient jugées inadéquates. M. Philippe Marini, rapporteur, a noté que la Commission européenne souhaite, par la présente directive, traduire en termes législatifs cette proposition. Il a ajouté que les autres préconisations du « rapport Larosière » n'ont pas fait l'objet d'une traduction législative. En revanche, la Commission européenne a publié, le 30 avril 2009, deux recommandations relatives aux rémunérations des dirigeants des sociétés cotées, notamment dans le secteur financier.

Il a ensuite brièvement commenté la proposition de résolution du groupe socialiste. Il a rappelé que cinq thèmes sont abordés : les exigences en matière de fonds propres ; la gouvernance des sociétés cotées ; la rémunération des dirigeants des sociétés cotées ; l'encadrement des rémunérations variables des opérateurs financiers de marché ; la supervision européenne et la mise en place de sanctions. Il a jugé que, pour chaque thème, la proposition de résolution suggère des préconisations de pertinence inégale.

M. Philippe Marini, rapporteur, a ainsi estimé qu'une partie de la proposition de résolution est acceptable en l'état ou sous réserve de modifications mineures. La proposition de résolution reprend, en effet, plusieurs mesures préconisées par le groupe de travail commun Assemblée nationale - Sénat sur la crise financière internationale ou par le groupe de la commission des finances sur la crise financière et la régulation des marchés. Il a toutefois tempéré son analyse en indiquant que plusieurs propositions du groupe socialiste n'ont qu'un lien ténu avec le texte de la directive ou bien avec le droit communautaire. Par ailleurs, certaines d'entre elles sont satisfaites ou le seront bientôt. Enfin, il a ajouté que les propositions relatives à la supervision européenne sont légitimes mais qu'elles apparaissent irréalisables à court terme compte tenu des propositions qui ont été faites par la Commission européenne.

M. Philippe Marini, rapporteur, a, en revanche, considéré que l'ensemble des propositions relatives à la rémunération des dirigeants des sociétés cotées ne sont pas conformes aux travaux menés jusqu'à présent par la commission des finances.

Il a, pour ce motif, émis un avis défavorable à l'adoption de la proposition de résolution du groupe socialiste. Toutefois, afin qu'un débat puisse avoir lieu en séance publique, il a préconisé que la commission des finances n'adopte aucun texte. En l'absence de compromis avec le groupe socialiste en vue d'élaborer un document qui prenne en compte les remarques qu'il a exprimées, il a indiqué qu'il proposerait au Sénat, au nom de la commission des finances, le rejet de la proposition de résolution lors de la séance publique.

En conclusion, M. Philippe Marini, rapporteur, a jugé que le vote d'un texte consensuel ne peut intervenir qu'à l'issue d'un travail en amont associant, au niveau même du dépôt de la proposition de résolution, les différentes partie prenantes qui en assument dès l'origine la co-paternité.

M. Albéric de Montgolfier s'est étonné que des mesures fiscales, relevant d'un champ strictement national, figurent dans la proposition de résolution.

M. Philippe Marini, rapporteur, a estimé qu'une proposition de résolution européenne ne doit se situer que sur le plan strict du droit communautaire. La fiscalité nationale n'y a donc pas sa place.

Mme Nicole Bricq a souligné que cette proposition de résolution doit être l'occasion d'un débat approfondi en séance publique, y compris avec le Gouvernement. Elle a jugé que, depuis trop longtemps, les rémunérations constituent un facteur de risque et qu'il convient, dès lors, de mieux les encadrer. Elle a ajouté que le groupe socialiste souhaite à la fois proposer des perspectives de moyen terme, notamment sur le chantier de la supervision européenne, et influencer la position de la France à l'occasion des négociations à venir sur les propositions de la Commission européenne relatives à la régulation financière.

La commission a approuvé la position du rapporteur et n'a pas établi de texte. En conséquence, en application de l'article 42-6, deuxième alinéa, du Règlement du Sénat, la discussion en séance portera sur le texte initial de la proposition de résolution.

Audition de M. François Drouin, président-directeur général d'OSEO

Enfin, la commission a procédé à l'audition de M. François Drouin, président-directeur général d'OSEO.

M. Jean Arthuis, président, a tout d'abord remercié M. François Drouin d'avoir accepté l'invitation de la commission des finances afin de faire le point sur les activités d'OSEO dans cette période de crise. OSEO est un établissement public issu de la fusion des anciennes Agence nationale pour la valorisation de la recherche (ANVAR) et banque de développement des petites et moyennes entreprises (BDPME). Ses activités se divisent en trois grandes branches : le soutien à l'innovation dans les petites et moyennes entreprises (PME) ou les entreprises de taille intermédiaire (ETI), au travers de sa filiale OSEO Innovation, le financement des PME, au travers de prêts « classiques », et, enfin, l'octroi de garanties en faveur des PME et des ETI afin de faciliter l'obtention de prêts auprès d'autres banques.

Il a relevé que, dès le début de la crise, l'Etat s'est beaucoup appuyé sur OSEO pour tenter de limiter son impact sur les PME. Ainsi, entre les mesures annoncées par M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, dès octobre 2008 et celles votées dans le cadre de la loi n° 2009-122 du 4 février 2009 de finances rectificative pour 2009, la capacité d'intervention de cet établissement public a été augmentée de plus de 8 milliards d'euros. De plus, le Président de la République a confié à OSEO, il y a deux semaines, la charge de mobiliser « un milliard d'euros de prêts participatifs », qui seraient des quasi-fonds propres, afin de renforcer la solidité financière des PME. Un an après le début de la crise et alors que se sont enchaînées toutes ces annonces, il est nécessaire de faire le point sur l'utilisation par OSEO de ses nouvelles capacités d'intervention et sur sa capacité à assumer ses nouvelles missions.

M. François Drouin, président-directeur général d'OSEO, a tout d'abord observé que, dès le plan en faveur des PME annoncé par le Président de la République le 2 octobre 2008, OSEO s'est vu confier la mission d'intervenir, essentiellement au travers de garanties, d'une part pour aider les investissements de ces entreprises, à hauteur de quatre milliards d'euros, et d'autre part, pour soutenir la trésorerie des PME. Ce dernier métier n'entrait pas, jusqu'alors, dans le champ des compétences d'OSEO. Toutefois, dans sa présentation du plan de relance de l'économie française, à Douai, le 4 décembre 2008, le chef de l'Etat a chargé OSEO de garantir la trésorerie des entreprises à hauteur de cinq milliards d'euros supplémentaires. De plus, le domaine d'intervention de cet établissement public a été élargi à cette occasion :

- en termes de montant, puisqu'il peut prendre des risques unitaires de 15 millions d'euros, contre 1,5 million d'euros auparavant ;

- en termes de sociétés éligibles, OSEO étant désormais habilité à soutenir les ETI et non plus les seules PME ;

- en termes de quotité de risque, OSEO pouvant assumer jusqu'à 90 % du risque d'une opération, contre 70 % auparavant.

En outre, OSEO a mis en place un produit de soutien spécifique destiné aux sous-traitants automobiles, pour lesquels il est habilité à prendre jusqu'à un milliard d'euros de risque. Jusqu'à présent, il n'a cependant pas été nécessaire d'utiliser cette ligne.

M. François Drouin a ensuite déclaré qu'OSEO a consommé plus de 60 % de l'ensemble de ces moyens nouveaux. Cela lui a permis de soutenir 20 000 entreprises, en plus de ses activités normales qui se sont poursuivies.

A cet égard, il a loué la réactivité de ses équipes, dont il a estimé qu'elles mêlent sens du service public et culture de l'efficacité. De plus, OSEO s'appuie sur un réseau de partenaires, notamment bancaires, à qui certaines activités ont été déléguées. Dès lors, il a été possible de remplir l'ensemble des missions du groupe sans augmenter ses effectifs. Toutefois, un nombre limité de recrutements sera nécessaire afin d'assurer la mission d'apport en quasi-fonds propres à risques que le Président de la République vient de confier à OSEO.

En revanche, M. François Drouin a regretté que, près de deux ans après l'annonce par le Président de la République du transfert à OSEO de la gestion du Fonds unique interministériel (FUI) d'appui aux pôles de compétitivité, il ne dispose toujours pas des fonds correspondants, alors même qu'il est prêt depuis plus d'un an à assumer cette charge. Il a cependant émis l'espoir que cette contradiction se résolve désormais rapidement.

M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé sur l'origine de ce retard, y voyant un symbole des pesanteurs administratives.

Puis M. Philippe Marini, rapporteur général, après avoir souligné la proximité d'OSEO avec les banques et les PME, a souhaité savoir si, selon l'intervenant, les banques jouent leur rôle de financières de « l'économie réelle » de manière satisfaisante dans la crise actuelle. Il s'est demandé comment évolue la demande de crédit ou de garantie des PME. Enfin, il a souhaité connaître le résultat prévisionnel d'OSEO en 2009 et sa vision stratégique de l'après-crise.

M. François Drouin a jugé difficile de porter une appréciation définitive sur les attitudes respectives des banques et des PME pendant la crise. Néanmoins, hormis quelques comportements isolés qui ont pu être mis en exergue, les banques « jouent le jeu » et continuent de prêter normalement, ne serait-ce que parce qu'elles sont conscientes que c'est leur intérêt. Les refus de prêts, qui portent souvent sur des dossiers à faible enjeu financier du point de vue des banques, sont généralement motivés par la conviction que le client ne sera pas en mesure d'effectuer le remboursement et que, dès lors, lui consentir un prêt ne l'aiderait pas. En revanche, de nombreuses entreprises retardent leurs projets, ce qui se traduit par une baisse de la demande de prêts. Cette tendance s'observe encore plus sur les prêts à court terme du fait de la baisse de l'activité économique et de la réduction des délais de paiement.

Puis, répondant à une interrogation de M. Jean Arthuis, président, il a souligné la brutalité de la diminution des encours garantis par les assureurs-crédit au début de la crise. Toutefois, la situation s'est améliorée depuis, notamment après la mise en place des dispositifs de compléments d'assurance-crédit publics dénommés CAP et CAP +.

M. François Drouin a ensuite déclaré qu'après un pic en juillet 2009, la demande de soutien des entreprises à l'égard d'OSEO s'est assagie, y voyant un signe encourageant pour la conjoncture économique. Cependant, tandis qu'une amélioration semble se dessiner pour les entreprises tournées vers les consommateurs, le climat reste morose pour le commerce interentreprises.

Il a enfin indiqué que le taux de sinistres d'OSEO n'est « pas abominable », le niveau de risque demeurant, pour l'heure, conforme aux estimations qu'avait établies le groupe au début de la crise, à savoir un doublement par rapport à 2008. En conséquence, le résultat prévisionnel d'OSEO, de l'ordre de + 15 millions d'euros, est en ligne avec ses prévisions.

M. Christian Gaudin a rappelé l'existence d'une procédure de rescrit fiscal instaurée afin de sécuriser les entreprises, en particulier les PME, qui souhaitent bénéficier du crédit d'impôt recherche (CIR). Or la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (LME) permet aux entreprises de saisir OSEO dans le cadre de cette procédure et non plus la seule administration fiscale. Il a souhaité savoir si ces dispositions, qui devaient entrer en vigueur au plus tard le 1er janvier 2010, sont d'ores et déjà applicables et, si tel est le cas, quel premier bilan en tire déjà OSEO. De plus, comment l'établissement public prévient-il les conflits d'intérêts potentiels qui peuvent résulter de sa position de financier et de « juge fiscal » ? Enfin, comment OSEO peut-il garantir l'unicité de la jurisprudence entre lui-même et l'administration fiscale en matière d'éligibilité au CIR ?

M. François Drouin a exprimé sa perplexité face à la mission confiée à OSEO en matière de rescrit sur le CIR. Alors que l'intention du législateur semblait être de charger OSEO d'apporter une réponse sur l'assiette du crédit d'impôt, il ressort de ses discussions avec l'administration fiscale qu'il ne lui reviendrait que de qualifier les dépenses que lui soumettront les entreprises, sans les relier à un montant. Dès lors, il n'est pas certain que de nombreux contribuables s'emparent de cette nouvelle possibilité de saisine, qui ne leur apporterait qu'une faible protection dans l'hypothèse d'un contrôle fiscal. De plus, les sociétés intéressées ne pourront interroger OSEO qu'avant le démarrage de leur projet, ce qui paraît assez réducteur.

Néanmoins, le groupe s'est préparé à assumer cette nouvelle charge en mettant en place une cellule dédiée, totalement « étanche » par rapport aux autres équipes, afin de prévenir tout conflit d'intérêts. L'homogénéité de la doctrine doit être assurée par les nombreux échanges en la matière entre OSEO et l'administration fiscale.

M. Philippe Adnot s'est demandé, d'une part, si les risques pris par OSEO sont inscrits au bilan de l'Etat et, d'autre part, si OSEO Innovation sera candidate au futur « grand emprunt », en particulier pour financer la preuve du concept.

M. Joël Bourdin a souhaité savoir quel est le bilan des interventions d'OSEO en faveur des sous-traitants automobiles ainsi que la vision de l'intervenant sur la conjoncture pour ce secteur particulier.

M. Edmond Hervé s'est interrogé sur les souhaits ou les craintes de M. François Drouin en matière de fiscalité. D'autre part, le groupe OSEO agit-il de manière concrète pour susciter l'innovation au sein des entreprises ? Enfin, quelles sont ses relations avec les technopôles ?

M. Jean Arthuis, président, s'est demandé si OSEO dispose d'assurances quant aux lieux où s'effectuent les projets qu'il soutient. N'y aurait-il pas, par exemple, de migration d'activités de recherche et développement vers l'Europe de l'Est, notamment par le biais de la sous-traitance ?

En réponse à ces interrogations, M. François Drouin a déclaré :

- que les risques pris par OSEO dans le cadre du plan de relance figurent à son propre bilan, le soutien de l'Etat se manifestant par l'apport d'une dotation à des fonds dédiés, construits pour supporter une classe de risques. En cas de défaillance d'un fonds, il existe un mécanisme de solidarité entre fonds et, si nécessaire, il pourrait être fait appel aux fonds propres d'OSEO. L'intervention de l'Etat ne serait qu'un ultime recours. M. Jean Arthuis, président, a estimé que ces risques devraient, dès lors, figurer au bilan de l'Etat, et a demandé à M. François Drouin de communiquer à la commission les observations de la mission de la Cour des comptes qui étudie actuellement ce sujet ;

- qu'OSEO a exprimé des souhaits devant la commission de l'emprunt national, jugeant, de manière générale, ne plus avoir assez de moyens en matière de soutien à l'innovation. Le financement de la preuve du concept fait partie des domaines méritant d'être appuyés au même titre, par exemple, que l'accès au marché ;

- que les équipementiers automobiles ont très durement ressenti la crise, qui est survenue après plusieurs années de fortes pressions sur les prix et de sévères restructurations ayant fini par mettre à mal les capacités d'analyse de ces entreprises. Heureusement, la prise de conscience des donneurs d'ordres ainsi que certaines mesures conjoncturelles comme la « prime à la casse » ont donné une bouffée d'oxygène à ces sociétés qui n'ont d'ailleurs pas fait appel au fonds dédié d'OSEO ;

- qu'en matière fiscale, il se réjouit de l'étalement sur quinze ans de la plus-value en cas de cession-bail immobilière, figurant à l'article 3 de la loi n° 2009-431 du 20 avril 2009 de finances rectificative pour 2009. A ce sujet, M. Jean Arthuis, président, a souligné que la cession-bail est coûteuse juridiquement pour les entreprises et qu'il aurait été plus simple de donner aux entreprises la faculté de réévaluer leurs immeubles ;

- que, pour bénéficier du CIR, les activités de recherche et développement doivent être effectuées en France et que, s'agissant des clients d'OSEO, il s'agit généralement de PME qui ne délocalisent pas de telles activités. Il n'a donc pas connaissance de cas de migration vers l'Europe de l'Est, qui concernent peut-être certains grands groupes.

Jeudi 22 octobre 2009

- Présidence de M. Jean Arthuis, président -

Loi de finances pour 2010 - Mission Sport, jeunesse et vie associative - Examen du rapport spécial et de l'article 60 rattaché

La commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport de M. Michel Sergent, rapporteur spécial, sur la mission « Sport, jeunesse et vie associative » et de l'article 60 rattaché.

M. Jean Arthuis, président, a souligné que l'adoption, par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, d'un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 tendant à supprimer dès à présent le droit à l'image collective (DIC) des sportifs professionnels, permet de revenir sur un débat dont M. Michel Sergent avait été l'un des principaux acteurs lors du débat sur la loi de finances pour 2009.

M. Michel Sergent, rapporteur spécial, a rappelé qu'il a critiqué le DIC et qu'il a été à l'initiative du « bornage » de ce dispositif dans le temps, au 30 juin 2012. Cependant, une suppression brutale pourrait soulever des difficultés, dans la mesure où les conventions collectives de plusieurs disciplines, comme le rugby et le basket-ball, s'appuient sur l'existence du DIC.

Au sujet de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », M. Michel Sergent, rapporteur spécial, a tout d'abord regretté de n'avoir reçu, dans les délais prescrits par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) du 1er août 2001, qu'environ un tiers des réponses à son questionnaire budgétaire. Les années précédentes, toutes les réponses avaient été envoyées dans les délais.

S'agissant du budget lui-même, il a noté une progression par rapport à 2009, de 1,1 % en autorisations d'engagement (AE) sur l'ensemble de la mission et de 7,1 % en crédits de paiement (CP), tout en soulignant que cette hausse globale est le résultat de mouvements contradictoires. Ainsi, à périmètre constant, les CP du programme « Sport » diminuent de 7,6 % tandis que les CP du programme « Jeunesse et vie associative » augmentent de 60,5 %. En revanche, les crédits du programme « Conduite et pilotage de la politique du sport, de la jeunesse et de la vie associative » demeurent stables (+ 0,1 %).

M. Michel Sergent, rapporteur spécial, a ensuite détaillé ses principales observations relatives au programme « Sport ».

La « division du travail » apparaît de plus en plus marquée entre des crédits budgétaires essentiellement destinés au sport de haut niveau et un établissement public, le Centre national de développement du sport (CNDS), qui prend à sa charge les actions en faveur du « sport pour tous ». Ainsi, plus de 80 % des 227,2 millions d'euros de CP du programme sont inscrits dans l'action n° 2 « Développement du sport de haut niveau ».

Par ailleurs, le coût du droit à l'image collective (DIC), c'est-à-dire de l'exonération partielle (30 %) de charges sociales dont bénéficient les sportifs professionnels, semble enfin maîtrisé : la ligne correspondante dans le budget 2010 s'élève à 26 millions d'euros, soit la même somme qu'en 2009 et moins qu'en 2008 (32 millions d'euros). Cette évolution provient probablement de l'entrée en vigueur, au 1er juillet 2010, de la réforme du DIC votée dans la loi de finances pour 2009. Toutefois, il conviendra d'interroger le Gouvernement en séance publique pour savoir si ce montant permettra à l'Etat de rembourser ses dettes à l'égard de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) au titre du DIC. En toute hypothèse, le DIC ne saurait être pérennisé et c'est d'ailleurs à l'initiative de la commission des finances qu'il doit être supprimé le 30 juin 2012.

Puis M. Michel Sergent, rapporteur spécial, s'est demandé si le plan de financement 2010 du CNDS est tout à fait assuré, celui-ci devant abonder un fonds de concours de l'Etat en faveur du sport pour tous à hauteur de 16 millions d'euros. Certes, ses ressources prévisionnelles affichent également une augmentation de 16 millions d'euros. Néanmoins, cette somme intègre un montant de 30 millions d'euros censé représenter le prélèvement, en année pleine, sur les jeux de hasard en ligne, alors que le projet de loi relatif à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne ne devrait entrer en vigueur que vers la mi-2010.

Il a relevé, par ailleurs, que le coût des travaux de rénovation de l'Institut national du sport et de l'éducation physique (INSEP) semble de nouveau « déraper », ce qui ne lui avait pas été révélé lors de son récent contrôle budgétaire, et que pour la partie sportive, à la charge de l'Etat, 5,5 millions d'euros d'AE et 15,8 millions d'euros de CP sont ainsi demandés.

Il a enfin noté que les tarifs pratiqués par l'INSEP augmentent fortement (plus de 40 % de hausse entre 2006 et 2009), ce que certaines « petites » fédérations sportives auront sans doute du mal à supporter. Or, il n'est dans l'intérêt de personne de construire un bel outil si celui-ci ne doit pas servir à accueillir les champions d'aujourd'hui et de demain. En outre, les disciplines concernées apportent de nombreuses médailles olympiques à la France.

M. Michel Sergent, rapporteur spécial, a ensuite évoqué le programme « Jeunesse et vie associative ». La très forte augmentation des crédits de ce programme est due aux deux dispositifs lancés par le haut-commissaire à la jeunesse. Tout d'abord, le Fonds d'expérimentation jeunesse (FEJ), qui doit soutenir puis évaluer des expérimentations en faveur des jeunes, est doté de 45 millions d'euros en 2010. Ensuite, le service civique, qui devrait, à terme, concerner 10 % d'une classe d'âge selon le Gouvernement, est doté de 40 millions d'euros. En revanche, le financement des actions « classiques » du programme n'augmentent pas, voire diminuent. Il est ainsi regrettable que la dotation au Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (FONJEP), qui permet d'assurer la promotion des actions en faveur de l'éducation populaire en soutenant l'emploi d'animateurs dans le secteur associatif, baisse de 400 000 euros. De même, les crédits destinés aux projets éducatifs locaux, qui prennent la forme de contrats avec les collectivités territoriales et constituent une aide précieuse pour le tissu associatif sur l'ensemble des territoires, diminuent de 600 000 euros.

M. Michel Sergent, rapporteur spécial, a estimé qu'il conviendra d'éclaircir, lors de la séance publique, l'avenir des expérimentations du FEJ une fois qu'elles auront été évaluées ainsi que celui du fonds lui-même.

Concernant le service civique, il a fait part de ses doutes quant à l'objectif affiché d'atteindre un chiffre de 10 000 volontaires dès 2010, hypothèse sur laquelle repose ce budget, alors même que les volontaires des différents services civils ne sont actuellement qu'environ 3 000.

M. Michel Sergent, rapporteur spécial, a ensuite évoqué la restructuration en cours de l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (INJEP). Le recentrage de ses missions sur la recherche en matière de jeunesse se traduit par une forte réduction d'emplois (93 emplois sous plafond en 2008, 58 ETPT en 2010, avec un objectif affiché de 38 ETPT). A ce propos, il faudra obtenir, en séance publique, des explications sur le reclassement des personnels devant quitter l'INJEP et sur la perte de compétences pouvant en résulter.

Concernant le programme « Conduite et pilotage de la politique du sport, de la jeunesse et de la vie associative », il a indiqué que le plafond d'effectifs pour 2010 s'élève à 6 401 ETPT (- 413 ETPT par rapport à 2009), le nombre de « vraies » suppressions d'emplois s'élevant, hors mesures de périmètre, à 122 ETPT, soit 53 % de départs à la retraite non compensés. Il a émis le souhait que, en dépit de la poursuite du rapprochement des structures « jeunesse et sports » et « santé - solidarité », la grande spécificité des missions « jeunesse et sports », fortement ressentie et appréciée dans les collectivités territoriales, soit préservée.

M. Michel Sergent, rapporteur spécial, a alors proposé, au bénéfice de ces observations et de l'adoption de deux amendements, l'adoption des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

Un débat s'est instauré à l'issue de cette présentation.

M. Jean Arthuis, président, a déploré le retard de l'administration dans l'envoi des réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial.

M. Bernard Vera ayant souhaité connaître les conséquences pratiques de la baisse des crédits finançant le FONJEP et les projets éducatifs locaux, M. Michel Sergent, rapporteur spécial, a précisé que cela se traduira par une diminution du nombre de postes FONJEP et de projets soutenus. Toutefois, s'agissant d'actions diffuses, dont les effets n'ont, à chaque fois, qu'une incidence territoriale, il est difficile d'établir une mesure précise.

A la demande de M. François Trucy, M. Michel Sergent, rapporteur spécial, a indiqué que le lancement du plan « grands stades » est subordonné à l'obtention par la France de l'organisation du championnat d'Europe des Nations de football en 2016. Le financement de l'Etat, qui serait de 150 millions d'euros, devra nécessairement être accompagné par les collectivités territoriales. De ce point de vue, la spécialisation des dépenses serait très contre-productive. Pour l'heure, neuf stades entrent dans le champ du plan « grands stades », trois autres sites étant « en soutien », cette dernière position risquant d'être la source de grandes incertitudes pour les villes concernées.

A l'invitation de M. Jean Arthuis, président, M. Michel Sergent, rapporteur spécial, a ensuite présenté son premier amendement. Le projet de budget intègre une demande de crédits supplémentaires pour les travaux de rénovation de l'INSEP (5,5 millions d'euros d'AE et 15,8 millions d'euros de CP) dont le rapporteur spécial n'a pas été informé, alors même qu'il effectuait un contrôle budgétaire relatif à l'Institut. Une diminution de crédits d'un million d'euros en AE et en CP permettrait de faire passer le « message » qu'un chantier, une fois lancé, ne dispose pas de crédits illimités. De plus, cette somme permettrait de rétablir à leur niveau de 2009 les crédits destinés aux postes FONJEP et aux projets éducatifs locaux.

Le second amendement propose de prélever deux millions d'euros de crédits, en AE et en CP, sur les 40 millions d'euros destinés au service civique. En effet, l'hypothèse d'un recrutement de 10 000 volontaires dès 2010, soit plus qu'un triplement par rapport à 2009, paraît très optimiste. La somme ainsi dégagée permettrait de financer un soutien de l'Etat aux « petites » fédérations sportives qui auraient du mal à « suivre » la hausse des tarifs pratiqués par l'INSEP.

Après que la commission eut adopté les deux amendements portant sur les crédits présentés par le rapporteur spécial, elle a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2010 ainsi modifiés.

Puis M. Michel Sergent, rapporteur spécial, a présenté l'article 60 du projet de loi de finances, rattaché à la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». Il a indiqué que cet article vise à relever le taux de la contribution sur la cession des droits de diffusion de manifestations ou de compétitions sportives (dite « taxe Buffet ») et à en affecter le produit supplémentaire à l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD).

Il a déclaré que, actuellement, la « taxe Buffet » consiste en un prélèvement de 5 % sur les droits de diffusion des événements sportifs afin de financer le CNDS, le produit estimé de cette taxe étant de 43 millions d'euros en 2010. Il a noté que la mesure propose de passer ce taux à 5,5 %, tout en précisant que 10 % du produit total de la « taxe Buffet », plafonné à 4 millions d'euros, financera l'AFLD.

Il a approuvé le principe de ce dispositif, estimant logique que le financement d'une autorité administrative indépendante telle que l'AFLD ne repose pas entièrement sur des crédits budgétaires. Il a ajouté que le lien entre la recette et le bénéficiaire est fondé et qu'il conviendra simplement de vérifier que, dans trois ans, la renégociation des droits télévisuels du championnat de France de football ne tarisse pas cette ressource.

Enfin, M. Michel Sergent, rapporteur spécial, a proposé un amendement à cet article. Il a rappelé le risque de difficulté que pourrait rencontrer le CNDS pour équilibrer son budget en 2010 du fait du retard pris dans l'examen du projet de loi relatif à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne. Dans la mesure où la « taxe Buffet » en est la principale source de financement, il a proposé, au titre de cette seule année, un taux exceptionnel de 6 % pour cette contribution.

M. Jean Arthuis, président, a regretté la multiplication des taxes et des prélèvements affectés, M. François Trucy relevant que les mises sur les jeux de hasard en fournissent l'illustration.

M. Michel Sergent, rapporteur spécial, a estimé que, dans ce cas précis, il existe un lien plus clair entre la ressource et l'organisme financé.

La commission a adopté l'amendement proposé par le rapporteur spécial, puis l'article 60 ainsi modifié.

M. Adrien Gouteyron s'est interrogé sur le fonctionnement concret du CNDS, en particulier sur la façon dont il examine les dossiers présentés par les collectivités territoriales.

M. Michel Sergent, rapporteur spécial, a déclaré que le CNDS est un lieu privilégié de dialogue entre l'administration, les rapporteurs spéciaux et pour avis des deux assemblées et le monde sportif, représenté par le Comité national olympique et sportif français (CNOSF). Le CNDS contribue à élaborer l'action publique en faveur du « sport pour tous » et il apporte un concours précieux au financement d'infrastructures sportives dans les territoires.

Après que M. Adrien Gouteyron eut exprimé sa crainte que soit exclusivement privilégiée la construction de « grands équipements », au détriment du monde rural, M. Michel Sergent, rapporteur spécial, a reconnu qu'environ un projet sur dix seulement est retenu par le CNDS. Ces dernières années, les équipements plus « structurants », de portée territoriale élargie, ont été privilégiés. Cependant, Mme Rama Yade, secrétaire d'Etat chargée des sports, a fait part au rapporteur spécial de sa volonté de rééquilibrer l'action du CNDS en faveur du monde rural.

M. Jean Arthuis, président, a observé que ce débat illustre la concentration de la valeur ajoutée dans les grandes agglomérations et met en cause l'organisation territoriale de la France.

Loi de finances pour 2010 - Budget annexe Publications officielles et information administrative - Examen du rapport spécial

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport de M. Bernard Vera, rapporteur spécial, sur le budget annexe « Publications officielles et information administrative ».

M. Bernard Vera, rapporteur spécial, a tout d'abord annoncé que le rapprochement entre la direction des Journaux officiels (DJO) et la direction de la Documentation française (DDF), débuté en 2005 par le Secrétaire général du Gouvernement suite à un contrôle de la Cour des comptes, a été mené avec célérité au point d'aboutir à la fusion des deux entités à partir du 1er janvier 2010. La nouvelle direction sera créée par décret avant la fin de l'année et portera le nom de « direction de l'information légale et administrative » (DILA). Elle exercera ses missions dans le cadre d'un budget annexe.

Le rapporteur spécial a rappelé que les directions ont réussi l'informatisation de leurs métiers respectifs et que les évolutions technologiques se sont accompagnées d'un élargissement de l'accès au droit et d'une meilleure qualité du service rendu.

Il a noté que, si la mise en oeuvre de la LOLF n'a pas nécessité de changements fondamentaux dans l'organisation des deux entités, elle a déclenché un processus de recherche d'une meilleure productivité. Il a précisé que, à la fin de l'année 2007, le Conseil de modernisation des politiques publiques a donné « mission aux deux entités de revoir l'organisation de la mission d'édition, de diffusion et d'information dans l'objectif d'une meilleure utilisation des moyens dématérialisés d'accès à l'information ». Il a rappelé que le rapprochement des Journaux officiels et de la Documentation française poursuit un double objectif : optimiser l'offre de services aux usagers en rassemblant les potentialités de chacune des deux directions et réduire le coût des services en instaurant des collaborations dans leurs domaines respectifs.

Il a indiqué que, parallèlement, les centres interministériels de renseignement administratif (CIRA) ont été rattachés à la DDF dans le but de créer un pôle unique de l'information administrative pour un meilleur service aux usagers.

M. Bernard Vera, rapporteur spécial, a constaté que le rapprochement s'est effectué en pleine mutation technologique, chacune des directions devant mener de profondes restructurations. Il a ajouté que des plans sociaux ont été mis en place à la DJO et à la société anonyme de composition et d'impression des Journaux officiels (SACI-JO), en étroite collaboration avec les représentants syndicaux, et l'objectif a été de trouver l'équilibre entre l'intérêt des personnels et la pérennisation des missions de service public.

Le rapporteur spécial s'est dit satisfait de la création d'une structure unique qui devrait avoir vocation à devenir un grand pôle public d'édition, de diffusion, d'impression et d'information administrative. Il a approuvé la programmation d'importants crédits d'investissement dès 2010, destinés à financer majoritairement l'outil de production dont une nouvelle rotative, ayant lui-même relevé les besoins en la matière dans ses derniers rapports budgétaires.

Il a précisé que ces investissements répondent à la demande du Secrétaire général du Gouvernement de moderniser profondément les modalités d'exécution de ses missions d'édition, de diffusion et d'information afin que la DILA reste un organisme de référence. Il a tenu à rappeler que, à l'occasion d'un contrôle mené sur les tâches d'impression de l'Etat, il avait relevé que des frais considérables sont engagés chaque année par les ministères. Il a précisé que des réformes sont en cours dans le cadre de la politique de modernisation de l'Etat et que la DILA avait vocation à capter une partie du marché des impressions des administrations et organismes publics.

Le rapporteur spécial a souligné que cela devrait entraîner, à l'avenir, de nouvelles recettes, nécessaires pour le budget annexe. A ce sujet, le rapporteur spécial a indiqué que la nouvelle direction sera confrontée au défi d'assurer ses missions de service public dans un contexte général de baisse des ressources.

Enfin, M. Bernard Vera, rapporteur spécial, a souhaité que les réformes continuent de se faire en étroite concertation avec les personnels, ce qui constitue une des conditions de réussite de la fusion. Il a souligné avoir ressenti une certaine inquiétude chez les salariés, en particulier sur l'importance des travaux qui devront être développés afin d'assurer un niveau de ressources suffisant au maintien de l'équilibre budgétaire du budget annexe.

Le rapporteur spécial a également transmis la déception des personnels de la SACI-JO, qui ont été « touchés » par les remarques de la Cour des comptes émises à l'occasion de la sortie de son rapport annuel, en février 2009. La Cour estime que ces salariés bénéficient d'avantages exorbitants du droit commun « parce que la direction des Journaux officiels estime ne pas pouvoir se permettre un conflit social compromettant la parution quotidienne du JO « Lois et décrets » ». Le rapporteur spécial considère que c'est faire peu de cas des efforts et du professionnalisme de chacun d'entre eux, indispensable en matière de prépresse et d'impression.

M. Bernard Vera, rapporteur spécial, a indiqué que les effectifs de la mission ont été réduits de façon drastique ces dernières années et que cela n'a pu se faire sans une totale adhésion des personnels : - 50 % à la SACI-JO, - 30 % à la DJO et - 20 % à la DDF. Il a précisé que le plafond d'emplois pour 2010 est fixé à 898 ETPT.

Il a ensuite indiqué que le budget annexe proposé pour 2010 présente un léger excédent, les ressources étant estimées à 194,4 millions d'euros, en baisse de 1,04 %, alors que les crédits de paiement se situent au niveau de 2009, avec 192,6 millions d'euros. Les autorisations d'engagement sont en hausse de 4 %, soit 199,4 millions d'euros, ce qui reflète les engagements de la nouvelle direction en matière d'investissement.

La commission a alors décidé de proposer au Sénat l'adoption sans modification des crédits du budget annexe « Publications officielles et informations administratives » inscrit dans le projet de loi de finances pour 2010.

Contrôle budgétaire - Caisses de congés payés du bâtiment et des travaux publics - Communication

Puis la commission a entendu une communication de M. Jean Arthuis, président, sur les caisses de congés payés du bâtiment et des travaux publics.

Après avoir rappelé que les membres des commissions des affaires sociales et de l'économie ont été conviés à cette réunion, M. Jean Arthuis, président, a indiqué que cette seconde communication sur le contrôle des caisses de congés payés du bâtiment et des travaux publics (BTP) fait suite au rapport d'étape présenté le 3 juin dernier. Celui-ci avait pour objet d'examiner l'emploi et la destination des quelque six milliards d'euros de cotisations patronales collectées par les 32 caisses de congés payés qui administrent les ressources finançant les congés de 1,6 million de salariés du secteur du BTP.

Revenant sur les principaux constats formulés lors de la précédente communication, il a rappelé la nécessité, en cette période de crise économique, d'explorer toutes les pistes permettant de rendre une partie de la ressource prélevée aux entreprises. En outre, il avait également relevé l'absence de présentation de comptes consolidés pour l'ensemble du régime, l'absence d'évaluation et de suivi de l'état de la trésorerie et de la valeur du patrimoine immobilier, des disparités de gestion entre les caisses, notamment en ce qui concerne les frais de dossier, compris entre 15 et 75 euros, et les taux des cotisations, qui varient selon les régions entre 16,75 % et 17,25 % dans les départements d'outre-mer, et entre 18,5 % et 20,6 % en métropole créant ainsi des distorsions dans les charges supportées par les entreprises.

Il a noté la célérité des actions engagées par l'Union des caisses de France pour annoncer la mobilisation de 100 millions d'euros, prélevés sur les fonds disponibles des caisses, pour financer les projets de réhabilitation du secteur HLM et afin de mettre en oeuvre un plan d'action destiné à renforcer la transparence et à harmoniser la gestion du réseau, ainsi que la publication par le Gouvernement du décret n° 2009-493 du 29 avril 2009 permettant aux entreprises, dont l'activité principale ne relève pas d'une convention du BTP, d'assurer le paiement direct des congés payés à leurs salariés dans les conditions du droit commun, sans cotiser aux caisses. M. Jean Arthuis, président, a ensuite rappelé les cinq recommandations qu'il a transmises au ministre en charge du travail, à l'Union des caisses de France (UCF) et aux organisations professionnelles :

- la gestion du régime des congés payés du BTP doit s'engager dans la présentation de comptes consolidés et synthétiques ainsi que dans l'élaboration d'un suivi mensuel de l'état de la trésorerie et de la valeur du patrimoine, y compris immobilier, de l'ensemble des caisses ;

- le montant des réserves doit être réduit au strict niveau nécessaire au bon fonctionnement du régime, les excédents devant être redistribués en priorité aux adhérents pour l'exercice écoulé, et vers des actions d'intérêt général pour les excédents antérieurs ;

- la gouvernance des caisses de congés payés doit être améliorée non seulement en direction de l'ensemble des adhérents, mais aussi des salariés qui, in fine, bénéficient des indemnités de congés payés. Une réflexion sur une ouverture des conseils d'administration à des personnalités extérieures et à des représentants des salariés doit être engagée ;

- la mise en recouvrement des cotisations doit faire l'objet d'un examen approfondi des caisses, en liaison avec les services de la tutelle, afin d'éviter que les poursuites engagées par les caisses ne conduisent, à elles seules, les entreprises vers des procédures de redressement et de liquidation judiciaires ;

- les prélèvements effectués par les caisses doivent être clairement identifiés au regard de leur fondement et de leur affectation. Les adhérents doivent recevoir une information explicite sur leur caractère obligatoire ou facultatif.

M. Jean Arthuis, président, s'est félicité que toutes les parties prenantes aient répondu aux recommandations de la commission des finances et a constaté que la vertu de cette procédure contradictoire a été de donner un « coup d'accélérateur » à la volonté de réforme du fonctionnement des caisses de congés payés.

Il a notamment relevé que les réponses apportées par l'UCF aux recommandations de la commission des finances font apparaître des avancées très significatives :

- ses membres se sont engagés à mettre en place prochainement un suivi mensuel de la trésorerie consolidée de l'ensemble des caisses ; le niveau moyen de la trésorerie globale du régime s'établissait à environ 6,4 milliards d'euros au 31 mars 2009, cette somme étant composée des réserves et des cotisations collectées ;

- une évaluation commandée par l'UCF chiffre à 115 millions d'euros la valeur du patrimoine immobilier du réseau ; il reste à en préciser la composition ;

- l'UCF a décidé la réduction du plafond des réserves de 50 à 35 jours de cotisations ce qui aura pour effet de baisser le niveau de celles-ci de 749 millions d'euros au 31 mars 2009 à 598 millions d'euros en 2010 et d'engager un vaste mouvement de rétrocession de fonds auprès des entreprises ;

- 50 millions d'euros supplémentaires au titre de la participation des caisses au soutien de l'activité du secteur ont été ajoutés aux 100 millions décidés en mars 2009 en faveur de la réhabilitation des logements HLM ;

- la certification et la publicité systématique des comptes des caisses demandées par la commission des finances seront généralisées à toutes les caisses ;

- la participation de personnalités extérieures aux conseils d'administration fait l'objet d'un débat entre les organisations professionnelles. A cet égard, la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB) et la Confédération française démocratique du travail (CFDT) se sont prononcées en faveur d'une représentation des salariés au sein des conseils d'administration des caisses alors que la Fédération française du bâtiment (FFB), organisation majoritaire, y est opposée ;

- une étude de quantification du contentieux lié au recouvrement et à ses effets sur la pérennité des entreprises en temps de crise est lancée tant par l'UCF que par l'autorité de tutelle afin d'envisager la mise en place de procédures particulières de suivi des entreprises en difficulté ;

- et, enfin, les services du ministère du travail ont validé un bordereau type de perception des cotisations dans lesquelles les cotisations professionnelles, distinctes des cotisations obligatoires de congés ou intempéries sont clairement identifiées.

Parmi les autres apports positifs de ce contrôle, l'UCF a également décidé de supprimer les frais de dossier afin de mettre un terme aux disparités relevées par la commission des finances. En outre, elle a apporté des éléments de justification des taux de cotisation pratiqués outre-mer, la situation de l'emploi local et le fait qu'au-delà de 50 salariés, ces exonérations sont réduites de moitié, expliquant que les exonérations ne sont pas répercutées en totalité sur les prélèvements au titre des congés payés dans ces territoires.

Enfin, M. Jean Arthuis, président, a pris acte des engagements pris par le réseau des caisses de congés payés pour se réformer et démontrer sa légitimité. C'est pourquoi il a proposé que, pour veiller à leur bonne mise en oeuvre, les recommandations issues de ce contrôle, complétées par les éléments nouveaux précédemment exposés, soient publiées sous la forme d'un rapport d'information.

Après avoir salué le fait que les travaux menés par la commission des finances sont à l'origine de l'ouverture du dialogue entre l'union sociale pour l'habitat (USH) et le régime des congés payés du bâtiment pour soutenir l'activité de rénovation et de réhabilitation dans le secteur HLM, M. Thierry Repentin, membre de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, s'est inquiété de la véritable teneur de l'engagement de l'UCF à investir 150 millions d'euros dans le plan de relance de l'économie. Il a mis en lumière le fait que, pour l'heure, le projet n'est pas de procéder à des versements mais de proposer des prêts bancaires « bonifiés » à un taux d'intérêt de 1 %. Dans ces conditions, il a exprimé ses doutes quant à la mobilisation concrète des fonds annoncés.

M. Jean Arthuis, président, a confirmé que l'UCF s'est bien engagée à porter de 100 à 150 millions d'euros la mobilisation des réserves des caisses pour soutenir l'activité du BTP afin d'abonder un fonds de réhabilitation des logements sociaux sous la forme de prêts au taux réduit de 1 % pendant 15 ans. Néanmoins, après avoir donné lecture du courrier de M. Xavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, confirmant que l'agrément du ministère a été sollicité pour autoriser cette opération dérogatoire aux règles prudentielles de placement instituées par la tutelle, M. Jean Arthuis, président, s'est élevé contre toute tentation des caisses de se soustraire à leur engagement. Il a plaidé pour une mobilisation rapide de ces fonds sans qu'il soit nécessaire que le législateur intervienne par voie d'amendement.

M. Thierry Repentin a regretté que, depuis l'annonce faite au mois d'avril par l'UCF et la FFB, le dispositif ne soit toujours pas opérationnel alors que les travaux de rénovation et d'isolation des logements sociaux de type D, E, F et G dans la classification des performances énergétiques exigera dans les dix prochaines années des investissements très importants, de l'ordre de 40 milliards d'euros.

M. Philippe Dallier s'est tout d'abord félicité que le réseau des caisses de congés payés se soit engagé à réformer sa gouvernance et sa gestion mais s'est interrogé sur l'utilité de conserver un réseau régionalisé de caisses. Une unification du dispositif ou une fusion des établissements seraient de nature à réduire les frais de collecte et de gestion.

M. Jean Arthuis, président, a considéré qu'une réflexion en ce sens pourra utilement prolonger le travail d'harmonisation des taux de cotisation et d'homogénéisation des services fournis par les caisses. En tout état de cause, il conviendrait de déterminer la part des économies de gestion que pourrait induire une telle fusion ainsi que le niveau d'étiage de la trésorerie afin de définir ce qui pourrait être raisonnablement redirigé vers les entreprises. Aussi, il a souhaité que le régime des congés payés du bâtiment et des travaux public étudie des propositions nouvelles de soutien aux entreprises et d'accompagnement du plan de relance de l'économie en 2010.

La commission a donné acte, à l'unanimité, à M. Jean Arthuis, président, de sa communication, et en a autorisé la publication sous la forme d'un rapport d'information.

Loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 - Demande de saisine et désignation d'un rapporteur pour avis

Enfin, la commission a demandé à être saisie pour avis du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, en cours d'examen par l'Assemblée nationale, et a désigné M. Jean-Jacques Jégou rapporteur pour avis de ce projet de loi.