Mardi 23 juin 2009

- Présidence de M. Jacques Legendre, président -

Restitution par la France des têtes maories - Examen du rapport et du texte proposé par la commission

La commission a procédé à l'examen du rapport de M. Philippe Richert et du texte proposé par la commission pour la proposition de loi n° 215 (2007-2008) visant à autoriser la restitution par la France des têtes maories.

M. Philippe Richert, rapporteur, a indiqué que ce texte, déposé le 22 février 2008 par Mme Catherine-Morin-Desailly, a été cosigné par de nombreux sénateurs issus de différents groupes politiques. Cette initiative rappelle celle qu'avait prise en 2002 M. Nicolas About pour rendre à l'Afrique du Sud la dépouille mortelle de Saartjie Baartman, dite la « Vénus Hottentote ».

Il a ajouté que les têtes humaines momifiées et tatouées, tradition du peuple Maori, avaient fait l'objet d'un trafic sordide avec l'arrivée des colons européens en Nouvelle-Zélande, et que certaines d'entre elles se sont ainsi retrouvées dispersées dans des musées. En octobre 2007, le conseil municipal de la ville de Rouen a adopté, à l'unanimité, une délibération visant à rendre aux autorités néo-zélandaises -qui en avaient fait la demande- une tête maorie conservée dans les réserves de son Muséum d'histoire naturelle. Or, saisi par le préfet à la demande de la ministre de la culture, le juge administratif a annulé cette décision : en effet, le muséum, ayant obtenu l'appellation « musée de France », est régi par les dispositions de la loi du 4 janvier 2002, aux termes desquelles les biens constituant les collections de ces musées sont inaliénables et toute décision de déclassement ne peut être prise qu'après avis conforme d'une commission scientifique. Le juge a considéré que les dispositions du code civil issues des lois « bioéthique » de 1994, qui prévoient que le corps humain ne peut faire l'objet d'un droit patrimonial, n'étaient pas applicables en l'espèce. M. Philippe Richert, rapporteur, a relevé que, lors des débats sur la « Vénus Hottentote », le ministre de la recherche s'était pourtant appuyé sur ces dispositions pour justifier, alors, qu'une loi était selon lui inutile.

Il a précisé que la proposition de loi permettait de déroger à la procédure spécifique de déclassement prévue par la loi de 2002. Six musées -dont celui du Quai Branly et cinq musées territoriaux- ont, d'après les informations transmises par le ministère, une ou plusieurs de ces têtes dans leurs réserves, soit au total une douzaine. Il reviendra ensuite aux responsables des musées concernés et aux collectivités propriétaires des collections de définir, en étroite coopération avec le musée Te Papa de Nouvelle-Zélande, les modalités de la restitution. Il a indiqué ne pas avoir entendu, au cours de ses auditions, d'argument valable pour s'opposer à la restitution de ces têtes maories. Plusieurs critères en justifient le bien-fondé :

- d'abord, la Nouvelle-Zélande souhaite le retour des têtes maories, même si cette demande est exprimée avec beaucoup de précautions ; le musée national Te Papa est chargé de piloter le programme de rapatriement et de conduire les négociations avec les musées étrangers ; depuis 1987, dix pays ont déjà répondu favorablement à cette sollicitation ;

- ensuite, la restitution se justifie au regard du principe de dignité humaine, de l'éthique et du respect dû aux cultures et croyances d'un peuple vivant : d'une part, il s'agit de restes humains, et non de biens culturels ordinaires ; d'autre part, l'objectif du retour est d'offrir aux ancêtres une sépulture digne, conforme aux rites ancestraux ;

- enfin, les têtes maories n'ont jamais fait l'objet en France de recherches scientifiques ; il conviendrait, néanmoins, de conserver la trace de ce témoignage historique, comme le permettent les techniques de numérisation, pour ne pas aboutir à des « trous » dans la connaissance de l'humanité dont les musées sont aussi responsables.

M. Philippe Richert, rapporteur, a reconnu, cependant, que cette démarche pouvait susciter des craintes, en particulier celle d'une dérive vers de nouvelles revendications. Il a souligné que les mêmes réserves s'étaient exprimées en 2002 mais qu'elles n'ont pas été suivies de telles demandes.

Puis, tout en proposant à la commission de souscrire à la proposition de loi, il a souhaité que ce texte soit aussi l'occasion de faire avancer les choses sur des sujets majeurs pour la politique des musées. En effet, ce débat a révélé le retard de la France sur les questions de gestion éthique des restes humains. Par ailleurs, il a permis de constater que la procédure de déclassement des biens des collections des musées, introduite dans la loi de 2002 à l'initiative de la commission, était restée virtuelle.

Certes, une commission scientifique nationale des collections des musées de France a été instituée par le décret du 25 avril 2002. Toutefois, si cette commission a tenu plusieurs réunions, consacrées à des questions de restauration et d'acquisition, elle n'a jamais eu à statuer sur un problème de déclassement. Elle n'a pas davantage engagé de réflexion pour définir des critères en vue d'éventuels déclassements, comme le législateur l'avait pourtant invitée à le faire au moment des débats en séance publique.

Il a rappelé que M. Jacques Rigaud, chargé par Mme Christine Albanel d'une mission sur la question de l'aliénation des oeuvres collections publiques, avait indiqué, dans son rapport, tout en réaffirmant la portée du principe d'inaliénabilité, que cette procédure aurait au moins mérité d'être expérimentée.

Aussi, M. Philippe Richert, rapporteur, a-t-il proposé de compléter la proposition de loi en vue de « réactiver » cette procédure de déclassement, tout en l'encadrant de fortes précautions. Il a jugé utile, en ce sens, d'élargir la composition de la commission compétente, pour qu'elle ne réunisse pas uniquement des professionnels de la conservation, et de préciser sa « feuille de route ». Renommée « commission nationale scientifique des collections », son champ de compétence est étendu, au-delà des seules collections des musées de France, à d'autres collections publiques et notamment aux oeuvres du Fonds national d'art contemporain. Cette commission aura également vocation à définir une doctrine générale en matière de déclassement, permettant d'éclairer les propriétaires et gestionnaires de collections dans leurs décisions. Elle devra rendre compte de ses réflexions devant le Parlement, en remettant un rapport dans un délai d'un an à compter de la publication de la loi. Compte tenu de l'importance des enjeux sur lesquels elle aura à se pencher (par exemple s'agissant des restes humains), la composition de cette commission est élargie aux représentants du monde politique, de l'Etat et des collectivités territoriales (en tant que propriétaires de collections publiques), et à des personnalités qualifiées notamment dans le domaine scientifique.

Enfin, il a proposé d'introduire dans la proposition de loi une disposition de nature à simplifier et clarifier la gestion de certaines oeuvres inscrites au Fonds national d'art contemporain (FNAC).

Un large débat a suivi l'intervention du rapporteur.

M. Ivan Renar s'est déclaré favorable à la restitution des têtes maories. Celles-ci ont suscité un engouement des collectionneurs publics et privés au 19e siècle, dans un contexte colonialiste et raciste, si bien que certains esclaves ont eu la tête tatouée puis coupée en vue de satisfaire à la « demande ». L'anthropologie est d'ailleurs née dans ce contexte de racisme et a contribué à justifier scientifiquement certaines pratiques.

Il a avancé trois raisons rendant cette restitution légitime :

- il s'agit de restes humains et non de biens culturels ordinaires ;

- les Maoris sont un peuple contemporain ;

- la demande émane de l'ensemble de la nation néozélandaise, démocratique, et non d'une ethnie particulière.

Il a reconnu que les restes humains ne pouvaient être restitués à n'importe quelle condition et qu'il pouvait être important d'en conserver une trace, grâce aux techniques modernes, pour conserver ce témoignage de l'histoire et en vue d'éventuelles études ultérieures. Il s'est interrogé sur les raisons scientifiques qui pourraient justifier, selon certains, que l'on conserve ces têtes maories, et a estimé que la dimension éthique devait primer.

Il a regretté, cependant, que certaines dispositions que le rapporteur propose d'introduire dans ce texte conduisent à en changer la portée et à affaiblir la démarche initiale des signataires de la proposition de loi. Il a considéré, notamment, que la situation du FNAC constituait un sujet en soi.

M. Philippe Richert, rapporteur, a indiqué que l'objet premier de la proposition de loi était de permettre la restitution des têtes maories à la Nouvelle-Zélande, qui a adopté une démarche exemplaire. Il a estimé que la décision de « réactiver » la commission compétente en matière de déclassement contribuait à renforcer la portée de la proposition de loi, en insistant sur la nécessité d'engager une réflexion qui n'a pas été conduite depuis sept ans. Cette commission aura notamment à se pencher sur la dimension éthique de cette question. Il a reconnu, toutefois, que la disposition concernant le transfert de propriété d'oeuvres du FNAC était plus éloignée de l'objet initial de la proposition de loi, même si elle répond à des attentes.

Mme Catherine Morin-Desailly a précisé que la proposition de loi avait été cosignée, à ce jour, par 57 sénateurs. Elle a rappelé que le muséum de Rouen avait souhaité s'engager, à l'occasion de sa réouverture, dans une gestion éthique des collections et avait suggéré, en ce sens, de rendre la tête maorie qu'il conservait. La ville de Rouen a renoncé à détenir celle-ci dans ses collections, en s'appuyant sur les dispositions de l'article 16-1 du code civil, mais aussi sur la déclaration des Nations Unies sur les droits des populations autochtones de 2007 et sur le code de déontologie du conseil international des musées (ICOM). La ville avait considéré qu'une saisine de la commission de déclassement serait vouée à l'échec, compte tenu de sa composition. La délibération ayant été adoptée à l'unanimité, la nouvelle municipalité rouennaise a réaffirmé sa volonté de poursuivre la procédure.

Elle a rappelé que les peuples demandant le retour de leurs « ancêtres » portent un regard différent du nôtre sur ces restes humains. L'exposé des motifs de la proposition de loi mentionne des critères précis pour justifier la restitution des têtes maories, afin de ne pas ouvrir la « boîte de Pandore ». Puis elle a fait observer que l'interdiction récente, par le juge, de l'exposition « Our Body » avait permis de prendre conscience des problèmes éthiques posés par l'exposition de corps humains. Elle a apporté son soutien à la décision de réactiver la procédure de déclassement et aux amendements présentés en ce sens par le rapporteur, avec lequel elle a travaillé en étroite collaboration. Elle a jugé nécessaire, en outre, de parvenir à un état des lieux plus précis des restes humains conservés dans les musées et de combler le relatif vide juridique concernant leur statut. Elle a souhaité, en ce sens, qu'une mission d'information puisse être conduite sur le sujet.

M. Serge Lagauche a considéré qu'il aurait été préférable de demander à la commission scientifique existant déjà de se prononcer sur le déclassement éventuel des têtes maories, avant d'en créer une nouvelle.

M. Pierre Bordier s'est interrogé sur le cas des momies égyptiennes.

Mme Marie-Christine Blandin a indiqué que la commission scientifique aura sans doute à se pencher sur la question des têtes réduites des Indiens, qui sont revendiquées par des tribus, ainsi que sur la question des laboratoires d'anthropologie. Elle a regretté l'insertion de dispositions concernant le FNAC.

M. Jacques Legendre, président, a fait observer que les Egyptiens modernes pouvaient parfois revendiquer une certaine filiation avec les pharaons. Sur l'objectif premier et ponctuel de la proposition de loi, il a estimé légitime que la France réponde favorablement à une demande qui est exprimée avec beaucoup de délicatesse par la Nouvelle-Zélande. Il a jugé nécessaire, au-delà, de prolonger la réflexion en prévoyant que la commission scientifique compétente en matière de déclassement se penche effectivement sur le sujet et élabore des principes généraux.

En réponse à Mme Monique Papon, M. Philippe Richert, rapporteur, a indiqué que, selon les indications qui lui ont été transmises, six musées de France ont une ou plusieurs têtes maories dans leurs réserves, sans que l'on dispose d'un inventaire précis, et que d'autres se trouvent dans des collections privées.

Il a précisé que la nouvelle commission devra conduire une réflexion scientifique et éthique importante pour déterminer des critères ou orientations en matière de déclassement. Il a indiqué que les Britanniques avaient effectué un tel travail et défini plusieurs critères, dont l'un est lié à l'âge des restes humains, ce qui permet d'écarter, notamment, toute restitution de momies égyptiennes.

Puis, la commission est passée à l'examen de la proposition de loi.

A l'article unique (Sortie des collections des têtes maories conservées par les musées de France), elle a adopté, après les interventions de Mme Béatrice Descamps, de M. Philippe Richert, rapporteur, de Mme Catherine Morin-Desailly et de M. Jacques Legendre, président, l'amendement n° C6 présenté par M. Philippe Richert, rapporteur, visant à expliciter la finalité du texte, en précisant qu'une fois sorties des collections des musées les têtes maories devront être remises à la Nouvelle-Zélande.

La commission a ensuite examiné l'amendement n° C1 présenté par M. Philippe Richert, rapporteur, portant article additionnel après l'article unique et visant à préciser la composition et les missions de la « commission scientifique nationale des collections », compétente en matière de déclassement, qui se substitue à celle prévue par la loi de 2002 relative aux musées de France.

Elle a adopté, en outre, deux amendements présentés par M. Philippe Richert, rapporteur, le n° C2, de coordination, et le n° C3 visant à prévoir que cette commission remettra, dans un délai d'un an suivant la publication de la loi, un rapport sur ses orientations en matière de déclassement.

La commission a ensuite examiné l'amendement n° C4 présenté par M. Philippe Richert, rapporteur, tendant à prévoir de nouvelles possibilités de transfert de propriété d'oeuvres inscrites sur l'inventaire du FNAC et mises en dépôt auprès de collectivités territoriales, élargissant ainsi les possibilités de transfert déjà ouvertes par la loi de 2002 relative aux musées de France. Après les interventions de M. Ivan Renar et de Mme Marie-Christine Blandin, M. Jacques Legendre, président, a proposé de reprendre cette disposition sous la forme d'une proposition de loi distincte. M. Philippe Richert, rapporteur, a partagé cette position et accepté, en conséquence, de retirer cet amendement.

Enfin la commission a adopté l'amendement n° C5, présenté par M. Philippe Richert, rapporteur, visant à modifier l'intitulé de la proposition de loi afin de tirer les conséquences de l'adoption des amendements n° C1 à C3.

La commission a alors adopté le texte de la proposition de loi ainsi modifié.

Mercredi 24 juin 2009

- Présidence de M. Jacques Legendre, président -

Audition de M. Alexandre Bompard, président-directeur général d'Europe 1

La commission a tout d'abord entendu M. Alexandre Bompard, président-directeur général d'Europe 1.

M. Alexandre Bompard, président-directeur général d'Europe 1, a d'emblée déclaré que le modèle économique de la radio généraliste est dynamique. Il devrait le rester, dans la mesure où la radio constitue un média à la fois très populaire, puisqu'il rassemble 81,5 % des Français, souple, réactif et mobile. Mais la spécificité de la radio est aussi qu'elle vit exclusivement de la publicité, au contraire de la télévision qui a trouvé de nouveaux modes de financement. Ainsi, en raison de l'arrivée de nouveaux médias et de la situation de crise du marché publicitaire, le média radio est dans une crise conjoncturelle à laquelle Europe 1 n'échappe pas. Une chute de 10 à 20 % du chiffre d'affaires peut être anticipée pour l'année 2009.

Il a indiqué que les difficultés du marché de la publicité étaient liées à celles des grands annonceurs de la grande distribution, des banques et de l'automobile. Un facteur aggravant pour les radios résulte des obligations en matière de mentions légales qui pénalisent la diffusion claire des messages, notamment les plus courts.

Il s'est cependant félicité qu'Europe 1 parvienne, dans ce contexte, à améliorer son audience et à gagner des parts de marché publicitaire. L'idée principale pour renforcer ce dynamisme est de travailler sur le coeur de métier d'Europe 1, qui doit être une radio à la fois généraliste, populaire et exigeante, présente sur l'information, le divertissement, la musique et le sport. Il faut en outre que le lien avec l'auditeur soit renforcé. C'est la raison pour laquelle Europe 1 s'installe chaque mois dans une ville et va à la rencontre de sa population.

Il a ensuite insisté sur l'exhaustivité de l'offre d'Europe 1, qui se décline sur Internet, sur les mobiles et sur la radio numérique terrestre :

- le site Internet est une référence en matière d'information, de sport, d'économie et de services, édite des contenus spécifiques et fournit des données locales. Il est aussi un support radiophonique, puisque 13 millions de Français écoutent la radio sur Internet, ce qui permet à la chaîne de gagner 10 % d'auditeurs. La mise en place d'un outil de mesure du nombre d'auditeurs sur Internet par Médiamétrie permet au demeurant de commercialiser cette audience ;

- en matière de téléphonie mobile, Europe 1 existe via une application sur l'« Iphone », et prochainement sur le « Googlephone » ;

- la radio numérique terrestre (RNT) aura pour atouts la gratuité et la facilité d'accès.

Rappelant que 20 % des auditeurs d'Europe 1 écoutent encore la radio sur les longues ondes, M. Alexandre Bompard, président-directeur général d'Europe 1, a toutefois mis en avant le fait que les chaînes devaient dorénavant financer 4 grands réseaux (longues ondes, FM, Internet et la RNT), ce qui représente une réelle difficulté dans un contexte budgétaire difficile.

Il a estimé qu'afin de briser sa dépendance à la ressource publicitaire, qui représente 98 % de son budget, Europe 1 doit définir un nouveau modèle s'appuyant sur la monétisation des partenariats, l'utilisation des marques que la chaîne a créées, et, éventuellement, les paris en ligne. Par ailleurs, les évolutions réglementaires suivantes seraient les bienvenues :

- l'actualisation des seuils anticoncentration ; reconnaissant l'intérêt des radios locales, qui représentent 30 % de la bande FM, il a néanmoins souligné que ces seuils limitaient l'accès des grandes radios à certains départements ;

- et la remise en cause du système des mentions légales.

Un débat s'est ensuite engagé.

M. Michel Thiollière, rapporteur de la mission « Médias », a souhaité savoir comment Europe 1 parvenait à augmenter le nombre de ses auditeurs et connaître le sentiment du président-directeur général d'Europe 1 sur le choix du Conseil supérieur de l'audiovisuel de lancer la RNT dans les seules villes de Paris, Marseille et Nice.

M. Alexandre Bompard, président-directeur général d'Europe 1, a insisté sur le fait que, plutôt que de respecter la règle traditionnelle de la radio, qui consiste à ne modifier les grilles de programmes que très lentement, Europe 1 a fait le choix de bouleverser son offre. Ce dynamisme lui a permis d'attirer de nouveaux clients, dont de nombreux auditeurs entre 20 et 30 ans. Une grille diversifiée avec des moments privilégiés d'écoute pour chaque génération est la clef de la réussite.

A Mme Monique Papon qui regrettait la timidité de la chaîne vis-à-vis des élus locaux, il a répondu que les déplacements mensuels étaient l'occasion de faire participer ces élus aux émissions d'Europe 1, mais que cette participation devenait en effet trop ponctuelle. Il a ajouté que les correspondants de la station dans toutes les régions françaises permettaient également une présence de la vie régionale sur la radio.

M. Ivan Renar a demandé quels étaient les moyens pour la radio de diversifier son auditoire d'une part, et d'assurer son indépendance éditoriale, d'autre part.

M. Alexandre Bompard, président-directeur général d'Europe 1, a donné comme exemple d'évolution le choix de fixer de véritables tranches horaires pour l'information tout en la traitant de manière moins rébarbative, ce qui a permis d'augmenter l'audience « jeune » sur ce créneau. Il a ensuite indiqué qu'une règle simple est fixée à Europe 1 : les journalistes sont complètement libres de traiter de tous les sujets, notamment économiques. Si un annonceur se plaint, la station n'infléchit en rien son comportement, au risque que certains d'entre eux la boycottent.

A M. Yves Dauge qui l'interrogeait sur les dimensions culturelles et francophones d'Europe 1, il a répondu que la station rencontrait un réel succès avec la diffusion de concerts évènementiels. La vocation initiale d'Europe 1 de détection de nouveaux talents doit en outre être maintenue. Enfin, le rayonnement francophone de la radio a longtemps été limité du fait de sa diffusion uniquement hertzienne, mais le développement d'Internet et de la radio sur les téléphones mobiles permet de toucher une population plus importante à l'étranger.

M. René-Pierre Signé a, quant à lui, considéré que la publicité nuisait à la qualité des programmes, dont certains ne faisaient pas de l'exigence leur priorité.

M. Alexandre Bompart a répondu que 40 % des journalistes de la chaîne étaient aussi présents sur un autre média, en général de service public. En outre Europe 1 a développé des partenariats ayant permis l'organisation d'expositions comme celle relative à Andy Warhol. Enfin la diffusion de lectures de livres à partir de minuit rencontre un réel succès d'audience.

Mme Béatrice Descamps a pour sa part déploré la mauvaise qualité de l'expression française à la radio.

M. Alexandre Bompart a reconnu un relâchement linguistique regrettable, souligné par de nombreux auditeurs, contre lequel il essaie de lutter en ayant des entretiens avec les journalistes et animateurs sur cette question. La progression en la matière reste cependant assez faible.

Audition de MM. Philippe Gault, président, et Mathieu Quétel, vice-président, du Syndicat interprofessionnel des radios et télévisions indépendantes (SIRTI)

Puis la commission a entendu MM. Philippe Gault, président, et Mathieu Quétel, vice-président, du Syndicat interprofessionnel des radios et télévisions indépendantes (SIRTI).

Présentant tout d'abord son organisation, M. Philippe Gault, président du syndicat interprofessionnel des radios et télévisions indépendantes (SIRTI) a indiqué qu'elle représente plus de 150 entreprises, dont l'audience cumulée constitue un quart de l'audience nationale, avec 10 millions d'auditeurs quotidiens. Le groupement d'intérêt économique (GIE) mis en place par 118 entreprises du SIRTI a, au demeurant, un marché publicitaire national important, géré par la régie publicitaire de TF1 depuis le 1er janvier dernier. Les petites et moyennes entreprises membres du SIRTI, en dépit de leurs 2 000 salariés, ont cependant des capacités de développement difficiles, principalement en raison de la rareté des fréquences radios. Les télévisions membres du SIRTI sont moins nombreuses, en raison d'un modèle économique plus complexe.

Mme Catherine Morin-Desailly a souhaité avoir des informations complémentaires à la fois sur la formation des journalistes des radios du SIRTI et sur les conditions de réussite du passage à la radio numérique terrestre (RNT) pour ces radios.

M. Mathieu Quétel, vice-président du SIRTI, a répondu de la manière suivante :

- les journalistes des radios indépendantes ont le plus souvent une formation classique, mais ont parfois été formés en interne, ce qui constitue une spécificité ;

- si le succès de la télévision numérique terrestre est incontestable, la réussite du passage à la RNT est beaucoup moins assurée, dans la mesure où celle-ci n'apporte pas une offre suffisamment élargie et en raison du choix du Conseil supérieur de l'audiovisuel de la lancer par étapes, en commençant par les villes de Paris, Marseille et Nice.

Après avoir souligné que le choix du CSA de lancer la RNT par étapes était lié à l'extinction progressive de la diffusion de Canal + en mode analogique, M. Serge Lagauche a demandé si le SIRTI avait engagé une réflexion collective sur le développement de la RNT.

M. Mathieu Quétel a justifié ses critiques à l'encontre du CSA de la façon suivante :

- le choix de l'autorité de régulation de procéder par régions successives ne prend en compte ni les problèmes industriels liés à la fabrication des nouveaux récepteurs numériques, ni l'importance de la médiatisation et de l'accompagnement du lancement de la RNT pour sa réussite, ni encore les problèmes de multiplexage que la RNT va poser ;

- un lancement national sur dix-neuf villes au moment où Canal + aura fini de basculer vers le numérique aurait été à la fois plus simple, plus cohérent et plus efficace. Le problème n'est donc pas lié à la décision du CSA de promouvoir la RNT mais plutôt au calendrier choisi.

Ayant noté que le développement des télévisions locales était difficile, Mme Françoise Laborde a souhaité savoir quelles étaient les télévisions indépendantes membres du SIRTI.

M. Philippe Gault a déclaré que les télévisions appartenant au SIRTI étaient le plus souvent des chaînes thématiques fonctionnant sur le modèle de l'abonnement.

M. Michel Thiollière, rapporteur « Médias » de la commission, s'est interrogé sur la possibilité pour les radios à vocation nationale de connaître un développement harmonieux sur la RNT dans la mesure où les appels à candidature sont régionaux.

M. Philippe Gault a reconnu qu'il s'agissait d'une situation paradoxale et a regretté que le projet de la RNT ne soit pas mieux piloté.

Nomination d'un rapporteur

Au cours de la même réunion, la commission a nommé M. Michel Thiollière rapporteur du projet de loi n° 498 (2008-2009) relatif à la protection pénale de la propriété littéraire et artistique sur internet.