Travaux de la commission des affaires culturelles



Mercredi 3 novembre 2004

- Présidence de M. Ambroise Dupont, vice-président. -

PJLF pour 2005 - Audition de M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, et de M. François d'Aubert, ministre délégué à la recherche

La commission a procédé à l'audition de M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, et de M. François d'Aubert, ministre délégué à la recherche.

A titre liminaire, M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, a indiqué que cette audition intervenait à un moment clé, entre la présentation du budget pour 2005, la préparation de la loi d'orientation sur l'école et l'élaboration de celle sur la recherche, qui était abordée avec une conviction centrale, celle que l'ambition française est indissociable d'une stratégie éducative et scientifique performante, en vue de bâtir la plus-value de notre pays sur le haut niveau de qualification de notre jeunesse et sur nos capacités d'innovation scientifique.

A cette fin, il a rappelé que l'action du ministère répondait tout d'abord, à la demande du Président de la République, au souci d'adapter l'école, en réajustant les objectifs de la loi d'orientation de 1989, en repensant l'organisation du système scolaire et en rénovant les pratiques.

Il a ajouté que le rapport Thélot constituait une base de travail riche et stimulante, mais que le Gouvernement entendait construire un projet sur la base de ses convictions propres, animé par trois objectifs principaux :

- l'élévation générale du niveau d'études de la population française, objectif central de notre système depuis l'après-guerre ;

- la lutte contre des « points noirs » inacceptables, comme le fait que 15  % des élèves ont de grandes difficultés pour lire, écrire, compter et que 150 000 d'entre eux sortent chaque année du système scolaire sans diplôme, ni qualification ;

- enfin, la prise en compte des évolutions des missions de l'école, sous la pression de son environnement social, culturel et économique, telles que l'adaptation aux exigences technologiques et professionnelles, la gestion des phénomènes de violence, la restauration des repères civiques.

Sur ce dernier point, il s'est félicité que la détermination commune à faire valoir les valeurs républicaines par l'adoption de la loi sur la laïcité ait porté ses fruits, une soixantaine de cas de jeunes filles portant le voile ayant été recensés cette année, contre 1 465  l'an dernier, qui ont donné lieu à 9 exclusions par décision des conseils de discipline.

En réponse à ces défis, le ministre a souhaité que le projet de loi d'orientation sur l'école s'inscrive dans une vision de la société axée sur trois priorités :

- doter les enfants des clés culturelles leur permettant d'accéder à la liberté intellectuelle, qui sera capitale dans le monde standardisé qui risque d'être le nôtre ;

- les préparer à la mobilité professionnelle qui sera vitale pour s'adapter aux mutations économiques ;

- enfin, les éduquer au vivre ensemble pour qu'ils deviennent des citoyens responsables.

Il a indiqué que ce projet de loi devait être tourné vers l'ambition d'une école plus juste et plus efficace, ce qui implique tout d'abord de mettre l'accent sur ce que l'on juge essentiel dans la formation initiale des jeunes, à savoir le socle, au sein duquel doit s'inscrire, en priorité, la maîtrise de la langue française. A cette fin, certaines méthodes éprouvées, comme la dictée, la récitation ou la lecture, méritent de retrouver leurs lettres de noblesse.

Tout en se déclarant, ensuite, favorable à l'objectif des 80  % d'une classe d'âge au niveau du baccalauréat, il a préféré insister, face au constat d'un trop grand nombre de jeunes sortant du système sans formation et d'un taux de chômage élevé, sur l'objectif de 100  % de qualifiés, qui nécessite une meilleure évaluation des élèves et une orientation mieux choisie. Relevant que l'école avait également pour mission de préparer les adolescents à l'entrée dans la vie active, il a estimé essentiel de réhabiliter les voies professionnelles, ce vers quoi tend la réforme de la classe de 3e en proposant à tous les jeunes, dès l'année prochaine, un enseignement de trois ou six heures par semaine qui sera consacré aux métiers et à la vie professionnelle.

M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, a ajouté, en outre, que le projet d'une école plus juste et plus efficace devrait également aborder la question de la formation des maîtres, du soutien aux élèves les plus méritants, de l'apprentissage des langues étrangères, pour lequel notre pays accuse un retard inquiétant, et de la généralisation de l'usage des nouvelles technologies.

S'agissant du calendrier de préparation de la loi d'orientation sur l'école, il a indiqué qu'une phase de concertation avait été engagée avec les organisations représentatives, syndicats, mais aussi fédérations de parents d'élèves, personnels de direction et représentants de l'enseignement privé, et que cinq réunions de travail auront lieu d'ici le 16 novembre autour des thèmes suivants : les finalités de la scolarité obligatoire, l'ouverture de l'école sur le monde d'aujourd'hui, les premiers apprentissages (c'est-à-dire la question de la maternelle et des apprentissages de base à l'école élémentaire), les filières des lycées et les métiers de l'éducation.

Enfin, il a ajouté qu'une nouvelle phase de concertation serait lancée, fin novembre, avec les partenaires sociaux, centrée, cette fois-ci, autour du projet de loi, lequel devrait être présenté en conseil des ministres fin décembre-début janvier, puis discuté au Parlement au premier trimestre 2005, afin de pouvoir être mis en oeuvre à la rentrée 2006.

Le ministre a ensuite abordé le budget de l'enseignement supérieur. Il a tout d'abord souligné que les établissements devaient relever le double défi de la démocratisation et de l'excellence scientifique.

Il a relevé un phénomène propre à la France qui, parce qu'elle concentre ses efforts sur le primaire et le secondaire, finance moins son enseignement supérieur que les autres Etats comparables. Il a souhaité redresser progressivement la barre sur plusieurs années et souligné que le budget 2005 enregistrait une hausse de 3 % par rapport à l'année dernière.

Il a ensuite insisté sur la nécessité d'accompagner le mouvement inéluctable de démocratisation des études supérieures, que ce soit en matière de logement, de santé ou d'emploi. S'agissant du logement étudiant, il a mis en avant l'accélération envisagée avec pour objectif, d'ici 10 ans, de construire 50.000 logements et d'en réhabiliter 70.000.

M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, a ensuite souhaité que le système d'enseignement supérieur clarifie son organisation, accroisse son efficacité et amplifie son rayonnement culturel et scientifique.

Tel est l'objet de la réforme « LMD » (licence-master-doctorat), dont il a reconnu qu'elle avait parfois provoqué des tensions, mais dont il a également souligné qu'elle mettait de la « clarté et du dynamisme dans le système ». Après avoir rappelé les objectifs spécifiques de chacun des trois cursus, il a indiqué que cette réforme conduisait à une refonte pragmatique des universités. Il a estimé que celle-ci supposait une nouvelle approche des pouvoirs publics, tendant à :

- ne plus disperser nos forces dans le maillage du territoire universitaire, mais renforcer les sites existants, en affirmant leur identité ;

- juguler la compétition stérile entre établissements français (universités, organismes nationaux de recherche, grandes écoles, centres hospitaliers universitaires, mais aussi entreprises), sur un même site pour instaurer leur coopération, afin de « regrouper et affûter nos atouts », face à la bataille mondiale de l'intelligence.

Le ministre a estimé que ce regroupement des compétences devait s'articuler avec la relance de la recherche française, pour laquelle le « scénario de la confiance et du mouvement » était en train de prendre corps.

Il a relevé qu'en 2004, derrière la question qu'il a qualifiée de « maltraitée » des postes, se révélait en réalité une crise existentielle profonde, comme si tout un système était « essoufflé et grippé ».

Il a rappelé que le Gouvernement avait fait les gestes nécessaires à l'apaisement des craintes immédiates et qu'il avait lié ces gestes à l'instauration d'un débat de fond pour rénover le système. Il a précisé que ce débat avait eu lieu, les Etats généraux s'étant conclus la semaine dernière, ce qui avait permis d'évoquer de façon plutôt constructive des sujets autrefois tabous au sein de la communauté scientifique (celui des carrières, de l'évaluation, de l'articulation entre recherche publique et privée...). Si les points de vue sont encore divers, il lui a semblé qu'il existait un « chemin pour moderniser de façon collective le système de recherche français ».

Dans la perspective de ces deux réformes, il a déclaré que les trois budgets dont il avait la charge étaient des budgets, non pas d'attente, mais de transition et d'impulsion, reposant sur des choix raisonnables permettant de répondre à nos priorités.

Pour l'enseignement scolaire, il a indiqué que le choix d'augmenter les effectifs d'enseignants dans le premier degré et de les diminuer dans le second degré était conforme aux prévisions d'évolution du nombre d'élèves. Il s'est félicité, par ailleurs, de la montée en puissance du dispositif des assistants d'éducation, les 9.000 postes supplémentaires, ainsi que la création de 800 auxiliaires de vie scolaire, permettant d'atteindre un effectif de 42.800 assistants d'éducation à la rentrée 2005, contre 33.000 en 2004. En outre, il a souligné que, conformément aux engagements qui avaient été pris, le nombre et la répartition de postes aux concours avaient été annoncés dès l'ouverture des inscriptions afin de donner aux étudiants une meilleure visibilité. Ainsi, 26.500 postes seront ouverts aux concours externes de personnels enseignants, soit 1.000 de plus qu'en 2004 pour tenir compte de la hausse des départs à la retraite.

S'agissant de l'enseignement supérieur et de la recherche, il a indiqué qu'un effort tout particulier était prévu pour permettre à la France de rattraper son retard.

Puis M. François d'Aubert, ministre délégué à la recherche, a indiqué que la progression des moyens, la plus importante depuis 20 ans, permettra de mener une politique de recherche ambitieuse, en cohérence avec les objectifs en matière de croissance et d'innovation fixés au sommet de Lisbonne et dans le processus de Barcelone (3 % du produit intérieur brut (PIB) consacrés à la recherche, contre 2,3 % aujourd'hui pour la France, même s'il conviendrait de nuancer cette appréciation par l'effort en volume et par des critères plus qualitatifs).

Il a précisé qu'un milliard d'euros de financement public supplémentaire serait consacré à des dépenses de recherche (+ 10 % par rapport à 2004), l'engagement pris par le Gouvernement d'accroître de 3 milliards d'euros d'ici à 2007 l'effort public en faveur de la recherche publique et privée étant ainsi respecté.

Le ministre a souligné le caractère prioritaire et ambitieux du budget, qui mobilise tous les leviers de notre système de recherche et d'innovation : il donne à la recherche publique les moyens de conduire une recherche d'excellence en confortant ses moyens récurrents, tout en accroissant les crédits sur projets dont pourront disposer les laboratoires ; dans le même temps, il stimule la recherche privée au travers de la montée en charge du crédit d'impôt recherche et de mesures en faveur de l'innovation.

Il a présenté les trois grandes priorités du budget : le renforcement de la recherche fondamentale avec l'amélioration de la situation des personnels et des laboratoires, l'accroissement du financement par projets de la recherche française avec la création de l'Agence nationale pour la recherche, et l'amplification des mesures en faveur du couple recherche et innovation.

Il a souligné la très forte progression du budget civil de recherche et développement technologique (BCRD) qui, à 9,3 milliards d'euros, connaît une hausse exceptionnelle : la plus forte en volume depuis 10 ans, soit quatre fois plus qu'en 2004 et deux fois et demie plus que l'augmentation annuelle moyenne sur les dix dernières années, et une progression très supérieure à l'évolution du PIB en volume.

Le ministre a précisé que cette hausse bénéficierait à hauteur de 97 % aux personnels et aux laboratoires des établissements de recherche et des universités.

Il a ajouté que l'accroissement des moyens de paiement des établissements publics scientifiques et techniques (EPST) (+ 32 %), des établissements publics industriels et commerciaux (EPIC) (+ 22 %) et de la recherche universitaire (+ 13 %) leur permettra de couvrir tous leurs engagements passés (notamment les contrats de plan Etat-région), de faire face à des investissements lourds en 2005 et d'accroître significativement les moyens récurrents des laboratoires par rapport à 2004, année durant laquelle le niveau de ces moyens était historiquement élevé car il incluait les reports gelés de l'année 2002 à hauteur de 230 millions d'euros. Le budget 2005 permettra une hausse d'au moins 5 % des crédits récurrents au-delà de ce montant et ces crédits nouveaux seront répartis selon des critères d'évaluation objectifs, privilégiant la performance et l'excellence scientifique.

Le ministre a indiqué, par ailleurs, avoir soumis au Premier ministre des propositions visant à alléger les lourdeurs administratives et à simplifier la vie quotidienne dans les laboratoires, mesures qui devraient être arrêtées d'ici fin 2004.

Dès 2005, devrait ainsi être supprimé le contrôle financier a priori dans trois EPST, avec l'objectif d'un élargissement à tous les autres organismes en 2006, car il alourdit les procédures et retarde l'exécution des dépenses. De même, les laboratoires ne devront plus requérir le visa du contrôleur financier pour le recrutement de personnel non permanent.

M. François d'Aubert, ministre délégué à la recherche, a ensuite évoqué la croissance du potentiel scientifique des établissements universitaires de recherche, avec le maintien de tous les emplois statutaires dans les EPST, tous les départs donnant lieu à un recrutement. Il a précisé que cette décision s'inscrivait dans une stratégie de moyen terme de préservation de l'emploi statutaire, ce qui compte tenu des départs à la retraite prévus, signifiait un accroissement à moyen terme du volume des recrutements et donc des débouchés dans la recherche publique pour les étudiants.

Il a, par ailleurs, insisté sur la création de 20 chaires d'excellence (assorties d'un crédit pour recruter une équipe sur un projet) et de 200 postes d'accueil de haut niveau avec un niveau de rémunération très attractif (60.000 euros bruts par an), afin de permettre aux établissements de renforcer leur attractivité vis-à-vis des meilleurs chercheurs étrangers et français expatriés souhaitant revenir travailler en France. Il a souhaité, à cet égard, que les établissements améliorent les conditions de retour des jeunes chercheurs expatriés.

Il a indiqué, en outre, que le soutien aux jeunes chercheurs était renforcé à tous les stades de leurs parcours : avant leur entrée dans les établissements (augmentation de 7 % des moyens consacrés à la formation « à et par » la recherche, poursuite du programme « Initiative Post docs », résorption des libéralités à hauteur de 2 millions d'euros supplémentaires) et une fois entrés dans les établissements (doublement du nombre de jeunes chercheurs bénéficiant des « Package » mis en place par les organismes pour les jeunes chercheurs).

Le ministre a ensuite apporté des précisions concernant l'Agence nationale pour la recherche :

- elle fonctionnera au début sous la forme d'un groupement d'intérêt public (GIP) et sera dotée, en 2005, de 350 millions d'euros (issus du compte d'affectation spéciale des privatisations), auxquels s'ajoutera le reliquat des crédits, non utilisés en 2004, destinés d'une part, aux fondations et, d'autre part, au fonds pour la recherche technologique et au fonds national pour la science ;

- sa mission sera de financer, après sélection, les meilleurs projets de recherche dans les thématiques prioritaires du Gouvernement, qui seront, pour 2005 : les sciences de la vie, les sciences et technologies de l'information et de la communication, et l'énergie et le développement durable ;

- son mode de fonctionnement sera double : elle pourra financer elle-même des projets de recherche ou faire des dotations en capital à des fondations de recherche reconnues d'utilité publique ; elle pourra également déléguer l'exécution de programmes de recherche à certains établissements de recherche dans leur fonction d'agence de moyens. Dans les deux cas, les projets seront sélectionnés sur des critères d'excellence scientifique et technique et selon des modalités claires, éprouvées et conformes aux meilleurs usages, faisant appel à des procédures transparentes et à des comités d'experts internationaux ;

- un certain nombre de représentants des grands établissements publics de recherche seront membres de son conseil d'administration.

S'agissant enfin des mesures en faveur du couple recherche et innovation, il a souhaité que l'on n'oppose pas les différents types de recherche, notamment la recherche publique et la recherche privée.

Avançant des comparaisons internationales, le ministre a souligné la proportion très importante, en France, des financements en provenance des administrations publiques (près de 40 % de la dépense intérieure de recherche et développement (DIRD), contre 23 % pour l'Allemagne par exemple) et la faiblesse relative des dépenses de recherche et développement des entreprises.

Il a donc estimé nécessaire d'accroître très fortement le financement de la recherche en entreprise, qu'il s'agisse des grands groupes ou des PME-PMI, et d'éviter la délocalisation de leurs laboratoires de recherche. Il a précisé qu'environ 200 millions d'euros seraient consacrés au soutien de la recherche privée grâce, en particulier, à une progression de 235 millions d'euros du crédit d'impôt recherche, à la mise en place des pôles de compétitivité (les entreprises y participant bénéficieront, en effet, d'exonérations fiscales et sociales) et de mesures ciblées de soutien à l'innovation (création d'un nouveau contrat d'épargne d'assurance-vie, davantage orienté vers l'innovation, et amélioration du régime des fonds communs de placement immobilier (FCPI)).

M. François d'Aubert, ministre délégué à la recherche, a jugé que ce budget ambitieux posait également les jalons d'une nouvelle organisation de notre système de recherche et d'innovation vers davantage d'efficacité et de responsabilisation, et que l'accroissement des moyens était un gage donné à la communauté scientifique que la réforme nécessaire de notre système de recherche et d'innovation se ferait dans le cadre de moyens en croissance. Il a conclu qu'il s'agissait là d'une chance, mais aussi d'une responsabilité pour tous.

A l'issue de l'exposé des ministres, un large débat s'est engagé.

M. Philippe Richert, rapporteur pour avis des crédits de l'enseignement scolaire, s'est déclaré satisfait d'un budget qui traduit l'ambition de notre pays pour l'avenir et pour sa jeunesse, d'abord par une augmentation générale des moyens, rappelant à ce titre que la part du budget de l'enseignement scolaire dans l'ensemble du budget de l'Etat avait connu une progression constante depuis 10 ans, passant de 17,3 % en 1993 à 19,7 % en 2005, ensuite par un souci d'ajustement des emplois à la démographie scolaire et une volonté de mieux gérer des questions sensibles comme les remplacements et les « surnombres », et enfin par une hausse des effectifs d'auxiliaires de vie scolaire. Néanmoins, mettant en exergue la montée en puissance, d'ici 2007, des prévisions de départs en retraite d'enseignants, au rythme de plus de 30.000 par an, 1er et 2nd degrés confondus, il a insisté sur la nécessité d'anticiper les besoins de recrutements, par la mise en place d'une programmation pluriannuelle mieux calibrée.

Concernant, ensuite, le transfert aux collectivités territoriales des personnels techniciens, ouvriers et de service (TOS), il s'est interrogé sur la façon dont seront pris en compte les personnels recrutés sur contrats aidés, qui représentent environ 20 % des effectifs, et dont le nombre a déjà fortement diminué à la rentrée 2004.

Il a souligné, en outre, la nécessité de réviser l'ensemble du dispositif d'aide sociale aux familles, dans la mesure où les effectifs d'élèves boursiers stagnent, voire diminuent, avant de regretter l'absence de création d'emplois de personnels médico-sociaux pour 2005, faisant observer que ces fonctions seraient mieux exercées si elles étaient confiées aux départements.

Dans le contexte de la seconde étape de la décentralisation et de la relance de l'apprentissage, Mme Annie David, rapporteur pour avis des crédits de l'enseignement technologique et professionnel, a souligné la nécessité d'assurer une cohérence et une complémentarité entre la filière professionnelle scolaire et l'apprentissage, avant de s'interroger sur les perspectives de relance de la voie professionnelle, alors que des établissements sont contraints de fermer certaines sections et que des suppressions de postes de professeurs de lycée professionnel sont prévues pour 2005, malgré une hausse des effectifs scolarisés.

Se réjouissant, ensuite, du développement rapide du dispositif de validation des acquis de l'expérience (VAE), elle s'est interrogée, néanmoins, sur les conditions d'accompagnement des candidats, notamment les moins qualifiés, dans l'étape de constitution du dossier, ainsi que sur la formation des enseignants participant aux jurys.

Enfin, constatant que plus de 9 % des enseignants en lycées professionnels sont sous statut précaire, contre moins de 3 % dans les lycées généraux, elle a demandé quelles suites allaient être données au plan « Sapin », qui arrive à son terme en 2005.

Après s'être réjoui des priorités affichées par le ministre et du souci de rééquilibrage des crédits en faveur de l'enseignement supérieur, M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis du budget de l'enseignement supérieur, a félicité le ministre pour sa capacité de dialogue et d'écoute, reconnue par l'ensemble des représentants des organisations d'étudiants qu'il a auditionnés.

S'agissant de l'accompagnement social des étudiants, il a relevé que la revalorisation des bourses était à peine supérieure au taux d'inflation et il a soulevé le problème des étudiants qui, issus des classes sociales intermédiaires, ne bénéficient ni des aides sous condition de ressources, ni de l'effet du quotient familial. Après avoir noté les efforts considérables en faveur du logement étudiant, il a demandé au ministre les suites qu'il entendait donner aux propositions du Conseil national pour le développement de la mobilité internationale des étudiants.

Le rapporteur pour avis a ensuite souligné que le problème de l'orientation des jeunes se posait, pour l'essentiel, en amont du système universitaire. A cet égard, il a relevé que seulement 38 % des bacheliers professionnels réussissaient leur Diplôme d'études universitaires générales (DEUG) et que, bien souvent, ils avaient choisi cette filière par défaut.

Il a ensuite indiqué que, selon les interlocuteurs qu'il avait rencontrés, la durée des contrats entre les établissements d'enseignement supérieur et l'Etat devrait passer de 4 à 5 ou 6 ans, et il a demandé l'avis du ministre sur ce sujet.

Il l'a ensuite interrogé sur la façon dont il envisageait de combiner les pôles de compétitivité (nécessairement en nombre limité), d'éventuels campus de recherche et la politique de sites.

Après avoir constaté le véritable succès de la réforme LMD, désormais appliquée dans 75 % des universités, il a toutefois relayé un certain nombre de préoccupations concernant la situation des redoublants, l'hétérogénéité des dénominations des différentes formations et la difficulté pour certaines filières de rentrer dans le système : formation d'infirmières et de kinésithérapeutes par exemple, mais aussi les filières bac + 2 et bac + 4 ainsi que les formations dispensées par les écoles consulaires.

M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis du budget de l'enseignement supérieur, a exposé que les établissements universitaires étrangers étaient, à des degrés variables, sur le chemin d'une autonomie croissante. Il a demandé au ministre de préciser les avancées qu'il comptait proposer dans le futur projet de loi sur la recherche en termes d'autonomie et de gouvernance des universités (globalisation du budget, dévolution du patrimoine immobilier, etc.). Il a estimé qu'il conviendrait également d'évoquer sans a priori les moyens d'assurer aux établissements d'enseignement supérieur un financement à long terme, qui peut passer à la fois par les droits d'inscription, les subventions publiques, les fondations, des revenus propres, etc.

Evoquant enfin la nécessité de regrouper les compétences et de développer les partenariats entre les secteurs public et privé, il s'est interrogé sur les moyens de bénéficier des synergies et d'accroître à la fois la lisibilité et la compétitivité du système français.

Alors que le conseil des ministres franco-allemand, qui s'est réuni la semaine dernière, a annoncé une série d'initiatives destinées à enrayer la chute du nombre d'élèves apprenant l'allemand, revenus de 36 % en 1971 à 12 % en 2003 pour les effectifs de seconde langue, M. Marcel Vidal s'est inquiété de la proposition du rapport de la commission présidée par M. Claude Thélot, consistant à généraliser l'apprentissage de l'anglais dès l'école primaire, avant de demander quelles seraient les orientations du Gouvernement sur ce sujet. Il s'est interrogé, ensuite, sur l'avenir de la formation professionnelle continue relevant de l'éducation nationale, soulignant les nombreux dysfonctionnements des GRETA (groupements d'établissements), mis en place à partir de 1971, d'une part en raison de la précarité des contrats des formateurs intervenant dans ces établissements, qui pourraient être réduits de 12 à 6 mois, d'autre part en raison de la fragilisation de leur financement, notamment due au manque de promotion de ces structures auprès des entreprises, et enfin, en raison de lourdeurs administratives.

Revenant enfin sur les transferts de compétences intervenus lors de la première étape de la décentralisation, concernant les constructions de collèges et lycées, il a demandé s'ils avaient suscité de fortes disparités entre les départements ou régions et s'ils avaient eu un impact sur l'évolution de la carte scolaire.

Faisant remarquer que le budget de l'éducation nationale ne progressait, hors inflation, que de 1 %, M. Yannick Bodin a émis de fortes réserves quant à la volonté d'impulsion mise en avant par le ministre, avant de regretter que la baisse des effectifs d'élèves se traduise, en parallèle, par une diminution du nombre d'enseignants, alors qu'elle pourrait être une opportunité d'améliorer la qualité de l'encadrement dans les établissements.

Soulignant l'intérêt de la création d'un éventuel statut social du lycéen professionnel, il s'est appuyé sur l'exemple de conventions signées entre des organisations professionnelles et certaines académies, afin que les lycéens puissent percevoir une gratification à l'issue de leur période de stage.

Il s'est déclaré préoccupé, enfin, par les conditions du transfert des personnels TOS, estimant qu'il devrait se faire en tenant compte des besoins réels des établissements.

Relayant une préoccupation partagée par de nombreux sénateurs de la commission, notamment face au constat d'un déficit d'enseignants dans les disciplines scientifiques, Mme Marie-Christine Blandin a plaidé en faveur du rétablissement du dispositif de pré-recrutement des instituts préparatoires à l'enseignement secondaire (IPES), dont le rôle d'ascenseur social et la contribution en faveur de l'insertion multiculturelle sont unanimement reconnus.

Mme Annie David a souhaité avoir des précisions, tout d'abord, sur la récente circulaire relative à l'organisation des procédures disciplinaires dans les établissements scolaires, puis sur le projet de constitution d'un groupe de travail sur les conditions d'accès à la hors classe des enseignants, avant de s'interroger sur la façon dont était enseignée la guerre d'Algérie et sur les mesures mises en oeuvre en vue de sensibiliser les élèves à la prévention, notamment en matière de violences faites aux femmes et ou de lutte contre l'alcoolisme.

Tout en souscrivant au principe de conduire 100 % des jeunes à une qualification, M. René-Pierre Signé s'est déclaré réservé sur les possibilités réelles d'y parvenir, soulignant à ce titre l'ampleur des inégalités sociales mais aussi territoriales affectant le système scolaire.

Regrettant ensuite que l'orientation vers l'enseignement professionnel intervienne, bien souvent, après un premier échec dans la voie générale, il a estimé qu'un repli sur les fondamentaux n'était pas une réponse adaptée à la modernisation de notre société. Il s'est enfin prononcé en faveur d'une valorisation des activités culturelles, notamment dans le cadre périscolaire ou parascolaire.

En réponse à ces questions, M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, a apporté les précisions suivantes :

- le nombre de postes ouverts aux concours d'enseignants est calibré en fonction des prévisions d'évolution d'effectifs et de départs à la retraite, ces dernières pouvant être revues à la baisse en raison des changements de comportements résultant de la récente réforme des retraites ; afin de donner une plus grande visibilité aux candidats, la loi d'orientation sur l'école pourrait mettre en place une programmation pluriannuelle des recrutements, sur 5 ans ;

- les contrats aidés s'inscrivent dans le cadre de la politique de l'emploi en faveur de l'insertion des publics en difficulté, qui n'a pas vocation à être décentralisée ; concernant les personnels qui exercent leurs fonctions au sein de l'éducation nationale et qui sont recrutés sur ces types de contrats, il pourrait être envisagé de transférer aux collectivités territoriales concernées la part de financement qui est actuellement prise en charge par le ministère de l'éducation nationale ; mais rien ne se fera sans concertation ni sans une évaluation partagée des enjeux ; quant au transfert des gestionnaires des TOS, il se fera sur la base des effectifs constatés cette année ;

- une mesure nouvelle en faveur des bourses est inscrite au projet de loi de finances pour 2005, afin de permettre la revalorisation de 1,7 % de la part des bourses de lycée et l'extension du bénéfice du fonds social aux lycéens des établissements d'enseignement privé ; il serait néanmoins nécessaire d'envisager une refonte de l'ensemble du système d'aide sociale, pour le rendre plus ambitieux, sans pour autant retenir le principe d'une rémunération des lycéens professionnels -suggéré par le rapport Thélot- qui pourrait présenter des effets pervers ;

- le maintien de formations dans des secteurs où il n'existe plus de besoins économiques n'est pas un choix pertinent, mais la rationalisation de l'offre est parfois difficile à faire accepter sur le terrain ;

- l'objectif consistant à augmenter de 50  % les flux d'entrée en apprentissage ne pourra être atteint qu'avec la participation active de l'éducation nationale ; afin de promouvoir cette voie, les dispositifs d'alternance mis en place dès la classe de 4e ou l'option découverte professionnelle en 3e ont vocation à susciter des choix d'orientation positifs, à travers l'organisation de visites de centres de formation d'apprentis ou l'amélioration des partenariats avec les entreprises et les établissements professionnels ; en outre, le développement de plateformes de formation permettra de réunir, sur un site unique, formation scolaire et apprentissage, afin de faciliter les passages de l'un à l'autre ; enfin, la valorisation de la filière professionnelle passe par l'amélioration des conditions de poursuites d'études, du BEP vers le baccalauréat professionnel et du baccalauréat professionnel vers le brevet de technicien supérieur, voire la licence professionnelle, pour les meilleurs élèves ; quant au CAP, il devra être plus clairement positionné vers l'insertion professionnelle, et pouvoir être obtenu en un an, pour les élèves ayant suivi une filière générale ou technologique ;

- si l'accompagnement des candidats à la VAE pendant la phase de constitution du dossier n'est pas obligatoire, de tels dispositifs sont de plus en plus fréquemment proposés par les GRETA, et un système d'habilitation des acteurs de cet accompagnement devrait être mis en place, afin d'en garantir la qualité ; s'agissant de la formation des enseignants participant aux jurys, qui relève des académies, il serait nécessaire d'en unifier les pratiques ;

- le rythme annuel de construction des logements étudiants est passé de 1.000 à 4.000 en 2004, puis à 5.000 à partir de 2005 ;

- le groupe de travail mis en place par le ministère avec les associations représentatives des étudiants poursuit ses travaux sans qu'aucun sujet soit considéré comme tabou, afin de réfléchir à la mise en place d'un système d'aides sociales plus efficace en faveur des étudiants,

- outre l'augmentation de 1,5 % des bourses, le plafond de ressources est relevé, des bourses de mérite supplémentaires sont créées à l'intention des titulaires d'une mention « très bien » au bac, une allocation d'aide d'urgence unique est mise en place et les prêts d'honneur bénéficient de 4 millions d'euros supplémentaires ;

- les universités doivent, elles aussi, assumer leurs responsabilités en matière d'orientation et mieux informer les jeunes sur les débouchés professionnels ; elles n'ont jamais respecté, à cet égard, leur obligation de publier chaque année des statistiques concernant l'insertion professionnelle de leurs anciens étudiants ;

- le Gouvernement n'est pas hostile à un allongement de la durée des contrats conclus avec les établissements d'enseignement supérieur ;

- il est indispensable, parallèlement au développement de quelques grands pôles, de regrouper au sein de réseaux des laboratoires et des formations d'excellence (même issues de petites universités), afin d'accroître leur visibilité ; les ambassadeurs de France à l'étranger ont, en effet, souligné à quel point la visibilité du système d'enseignement supérieur français à l'étranger était mauvaise ;

- le rythme de mise en place du système LMD s'avère beaucoup plus rapide que prévu ; dans ces conditions, il suscite quelques difficultés pratiques liées en particulier à l'hétérogénéité des intitulés des formations ; quelques ajustements devront être effectués, mais un référentiel national est d'ores et déjà achevé qui devrait résoudre le problème des redoublants et de l'insertion dans le système des formations plus courtes ;

- tous les chantiers ne peuvent être menés de front ; la mise en oeuvre à la fois du système LMD, des pôles de compétitivité et de la réforme de la recherche, rend peu souhaitable une réforme simultanée des modes de gouvernance et de financement des universités, même si une réflexion sur l'accroissement de leur autonomie est envisageable ;

- la chute du nombre d'élèves apprenant l'allemand est inquiétante, compte tenu des intérêts politiques communs qui unissent la France et l'Allemagne, mais aussi en vue de préserver la diversification culturelle et linguistique en Europe ; c'est pourquoi le Gouvernement est réservé sur la proposition du rapport Thélot tendant à généraliser l'apprentissage de l'anglais dans le primaire ; en effet, dans le cadre du conseil des ministres franco-allemand, il a été décidé de renforcer l'information des élèves sur l'intérêt, y compris sur le plan professionnel, de parler allemand, ainsi que de développer les équivalences entre diplômes et les échanges d'élèves ; enfin, une idée, encore contestée, serait de mettre en place une sorte de prime pour les élèves germanistes aux examens ;

- les investissements des collectivités territoriales en matière scolaire ont souvent été inversement proportionnels à leur richesse économique ;

- l'enseignement scolaire représente aujourd'hui 24  % du budget de l'Etat, et notre pays consacre à l'éducation un point de PIB de plus que les autres pays européens ; dans la mesure où le nombre de professeurs a continué d'augmenter alors que les effectifs d'élèves diminuaient, les taux d'encadrement se sont améliorés, s'établissant à un professeur pour douze élèves dans le second degré et un enseignant pour dix-sept élèves dans le premier degré ; la gestion plus rigoureuse des remplacements et des surnombres répond au souci général de maîtrise de la dépense publique, alors que 25  % des dépenses de fonctionnement de notre pays sont financés par le recours à l'emprunt ;

- le débat sur le statut des grands élèves de l'enseignement professionnel mérite d'être abordé, au regard de la situation des apprentis ;

- le transfert des personnels TOS se fera sur la base des effectifs actuels, et non des besoins futurs ;

- le système des IPES serait financièrement lourd pour l'Etat, mais reste à considérer face à la nécessité de mettre en place des dispositifs incitatifs dans certaines disciplines déficitaires ; il a également un grand intérêt en matière de promotion sociale ;

- la circulaire sur les procédures disciplinaires vise à donner davantage de liberté aux enseignants dans la gestion de leur classe, même si le cadre juridique général reste inchangé et que des instances de recours existent ; elle a également pour but de restaurer l'autorité des enseignants ;

- les conditions d'accès à la hors-classe, qui posent un réel problème juridique, feront prochainement l'objet d'un texte où les engagements du ministère seront tenus, la concertation avec les partenaires sociaux est actuellement en cours ;

- la guerre d'Algérie est abordée de façon objective dans les programmes scolaires ;

- la notion de socle commun renvoie aux connaissances qu'il est essentiel de posséder pour pouvoir progresser dans la scolarité.

Le ministre a enfin indiqué qu'il répondrait par écrit aux questions sur le fonctionnement des GRETA, les conséquences de la décentralisation des bâtiments scolaires et sur la politique de prévention menée par l'éducation nationale.

Après s'être réjoui de la priorité affichée par le Gouvernement pour l'enseignement supérieur et la recherche, qui trouve une traduction réelle dans le budget pour 2005, M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis du budget de la recherche, a rappelé sa proposition d'un grand emprunt européen en faveur de la recherche, auprès de la Banque européenne d'investissement (BEI).

Evoquant ensuite la réorganisation des structures, il a demandé au ministre si les pôles de compétitivité auraient une mission essentiellement défensive (notamment de lutte contre les délocalisations) ou s'ils pourraient jouer un rôle plus offensif en faveur d'industries innovantes ; il s'est interrogé sur leur effet de levier sur la recherche privée.

Insistant ensuite sur l'intérêt des mesures prises l'an dernier en faveur des fondations de recherche, il a souhaité qu'elles se développent davantage, y compris en direction des opérateurs étrangers installés en France, car elles constituent un moyen efficace d'évolution du système de recherche français. Il a demandé au ministre de préciser les intentions du ministère de la recherche, mais aussi du ministère des finances, dans ce domaine.

Il a ensuite interrogé le ministre sur les possibilités d'expérimenter, dans certaines zones du territoire, la mise en place de campus de recherche.

M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis du budget de la recherche, s'est ensuite réjoui de l'initiative du Gouvernement de créer une Agence nationale pour la recherche, de nature à apporter de la flexibilité au système, et de son adhésion à un certain nombre d'autres propositions avancées par le groupe de réflexion du Sénat sur l'avenir de la recherche, commun aux trois commissions compétentes.

Il a ensuite souhaité que l'Europe saisisse l'opportunité qu'ouvre le relatif affaiblissement de l'attractivité des Etats-Unis, en vue d'attirer les doctorants et les chercheurs. Il a estimé possible de lancer des expérimentations en la matière, avec le soutien de l'Agence nationale pour la recherche, en commençant par quelques sites tels que ParisTech, Paris Sud et Sophia-Think Tank.

Il a enfin demandé au ministre son avis sur la relance de grands programmes d'innovation, qui pourraient encourager des synergies entre enseignement supérieur, recherche et industrie.

M. Jack Ralite a évoqué les débats qui se sont déroulés à Grenoble, en fin de semaine dernière, à l'occasion des Etats généraux de la recherche auxquels il a participé. Il s'est réjoui qu'une partie de ces réflexions aient été prises en compte par le Gouvernement. Il s'est toutefois interrogé sur la réponse apportée à la question lancinante du nombre de postes de maîtres de conférence. Il a indiqué, par ailleurs, que les chercheurs souhaitaient créer un comité de suivi associant, outre les organisations des chercheurs, des parlementaires de toutes obédiences politiques.

Il s'est ensuite interrogé sur la synthèse qui pourra être faite de l'ensemble des rapports et contributions, lesquels émanent tant des Etats généraux de la recherche que des présidents d'universités et de grandes écoles, de chercheurs tels que le professeur Kourilsky ou d'organismes tels que Futuris.

En réponse à ces questions, M. François d'Aubert, ministre délégué à la recherche, a apporté les précisions suivantes :

- les pôles de compétitivité bénéficieront d'un certain nombre de mesures d'accompagnement de nature fiscale proposées dans le projet de loi de finances pour 2005. Les appels d'offres seront lancés en janvier et les premiers pôles devraient être labellisés à la fin du premier trimestre 2005. Ils ne répondront pas à un modèle unique ; certains s'imposeront d'emblée (tels que Grenoble et Sophia Antipolis par exemple) et d'autres acquerront le label, l'essentiel étant de garantir une visibilité et une lisibilité internationale ; en effet, le classement inquiétant des universités françaises tel qu'établi par une université de Shanghai (qui place la première université française à la 65e place), montre qu'il faut à la fois atteindre une masse critique et l'excellence scientifique (même si celle-ci n'existe pas pour l'ensemble des domaines que peut couvrir une université). La conjonction d'un cahier des charges et d'un système d'appels d'offres doit permettre d'encourager l'innovation et la création d'entreprises de haute technologie ;

- les fondations bénéficient désormais d'un dispositif fiscal favorable ; le système anglo-saxon l'est toutefois encore davantage, grâce à l'autorisation de déplafonnement pour un certain nombre d'actions. Les fondations pour la recherche bénéficieront d'un euro de subvention publique pour un euro de ressource privée. Un certain nombre sont en cours de création et concernent des thématiques prioritaires, permettant de mobiliser l'ensemble d'une filière. Les crédits destinés à les financer en 2004 (150 millions d'euros) ne seront pas intégralement consommés cette année et le solde sera reversé à l'Agence nationale pour la recherche ;

- proche de la notion de « pôle », celle de « campus » permet une meilleure coordination et valorisation de la recherche entre universités et établissements publics de recherche sur un même territoire ; il pourrait être envisagé, dans un premier temps, d'en développer un dans l'Ouest parisien ;

- l'Agence nationale pour la recherche sera dotée de 350 millions d'euros en 2005, et au moins autant les années suivantes ; ces ressources viendront s'ajouter aux moyens de base des laboratoires, en vue de financer des projets de recherche sur certaines thématiques ;

- la BEI s'avère en réalité relativement réticente à contribuer au financement de projets de recherche, mais il faudra continuer à la solliciter et à relayer cette intéressante proposition ;

- dans la perspective de la préparation du 7e programme cadre pour la recherche et le développement (PCRD), la France demande un allègement des procédures européennes, aujourd'hui beaucoup trop bureaucratiques ; le taux de retour pour notre pays est très divers (assez bon pour l'aéronautique, beaucoup moins par exemple pour les sciences de la vie) et il conviendra d'améliorer la présentation de nos objectifs ;

- les Etats-Unis semblent effectivement souffrir aujourd'hui d'une baisse relative de leur attractivité ; en outre, un nombre croissant de jeunes chercheurs chinois et indiens rentrent dans leurs pays d'origine ;

- la recherche française demeure attractive : les établissements publics comptent 12 % de chercheurs étrangers, 25 % des thèses soutenues en 2003 l'ont été par des étrangers et notre pays accueille 15.000 doctorants étrangers ;

- le développement de « think tank » et de partenariats crée une dynamique et donne une meilleure visibilité ;

- un certain nombre de grands programmes de recherche se poursuivent (dans le domaine spatial par exemple), d'autres devraient être développés dans des domaines tels que les nanotechnologies ou l'énergie et le développement durable ; la commande publique, dans des proportions toutefois modérées, constitue l'instrument privilégié pour gérer ce type de programmes ; le système américain présente l'avantage d'en réserver une partie pour les petites et moyennes industries ;

- les Etats généraux de la recherche se sont déroulés dans un climat constructif et passionné, et une forte volonté de réforme s'y est exprimée ; cette contribution, ainsi que les autres, nombreuses, constituent un corpus de propositions qui vient enrichir le débat préparatoire à l'élaboration du projet de loi d'orientation et de programmation de la recherche, à laquelle doivent être étroitement associés les commissions parlementaires et l'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques. Ce projet de loi devrait être examiné par le Parlement à la fin du deuxième trimestre 2005.