AFFAIRES CULTURELLES

Table des matières


Mardi 23 novembre 1999

- Présidence de M. Adrien Gouteyron, président -

PJLF pour 2000 - Cinéma et théâtre dramatique - Examen du rapport

La commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Marcel Vidal sur les crédits pour 2000 du cinéma et du théâtre dramatique.

A titre liminaire, M. Marcel Vidal a indiqué que le cinéma et le théâtre avaient en commun de bénéficier de dispositifs publics de soutien, très différents dans leur économie mais comparables dans leur finalité : garantir le pluralisme de la création et l'élargissement de leurs publics. Ces exigences constituent le fondement de l'intervention de l'Etat dans des domaines où le libre jeu des règles du marché ne suffit pas à lui seul à les satisfaire. Cette conception du rôle de l'Etat en matière culturelle trouve un écho singulier dans les débats suscités par les prochaines négociations commerciales qui s'ouvriront lors de la conférence de Seattle.

A ce titre, le rapporteur pour avis s'est félicité de la fermeté avec laquelle le Gouvernement avait défendu auprès de ses partenaires européens le droit pour les Etats de définir et de mettre en oeuvre une politique culturelle et audiovisuelle. Cette position, qui repose sur le principe de l'exception culturelle acquise lors du cycle de l'Uruguay, répond à une nécessité politique mais également économique.

Avant de présenter les crédits du cinéma inscrits dans le projet de loi de finances, M. Marcel Vidal, rapporteur pour avis, a évoqué la situation économique de ce secteur.

En 1998, avec 170 millions d'entrées, la fréquentation a augmenté de plus de 14 % par rapport à l'année précédente, consacrant ainsi le renouveau enregistré depuis 1993. Les multiplexes, qui représentent désormais 22 % de la fréquentation pour seulement 12 % de fauteuils, ont joué un rôle déterminant dans cette évolution.

M. Marcel Vidal a indiqué cependant que si, comme lors des années précédentes, l'incidence des multiplexes sur la fréquentation demeurait considérable, elle ne constituait pas le seul facteur de la croissance significative constatée en 1998. En effet, les cinémas " classiques " connaissent également une augmentation, certes plus modeste mais néanmoins satisfaisante, de leur fréquentation, soit 7,7 % en 1998 contre 1,15 % en 1997.

Le rapporteur pour avis, s'interrogeant sur les conséquences de l'augmentation du nombre des multiplexes, a considéré que la transposition des règles de l'urbanisme commercial à l'exploitation cinématographique constituait une solution encore peu adaptée à ses spécificités. Il a estimé souhaitable que soient apportés au dispositif en vigueur des aménagements. A cet égard, pourrait être envisagée une modification de la composition des commissions départementales d'équipement cinématographique ou de leur compétence géographique ou encore une meilleure prise en compte des préoccupations de politique culturelle et d'aménagement du territoire lors de l'octroi de l'autorisation.

M. Marcel Vidal, rapporteur pour avis, a souligné que la situation de la production cinématographique était satisfaisante à plusieurs titres. En 1998, 183 films ont reçu l'agrément du centre national de la cinématographie, contre 163 en 1997. Le renouvellement de la création constitue une garantie de sa diversité : le nombre de premiers films atteint un niveau inégalé depuis 20 ans et le nombre de seconds films augmente également sensiblement.

Le rapporteur pour avis a cependant observé qu'en dépit de ces signes positifs, auxquels s'ajoutait une amélioration des recettes à l'exportation des films français, la situation du cinéma restait fragile. En effet, alors que le nombre de films français produits s'accroît, leurs parts de marché reculent à nouveau en 1998, soit 24 % contre 34  % en 1997.

Il a observé que cette évolution, si elle se confirmait, risquait de remettre en cause l'efficacité des mécanismes de soutien. Les aides versées à l'industrie cinématographique ont pour objet de garantir le pluralisme de la création mais aussi l'existence d'une production nationale dynamique. Ces deux objectifs sont en pratique étroitement liés. En effet, faute d'oeuvres nationales appréciées du public, il y a fort à craindre que les quotas et les obligations de financement imposés aux chaînes de télévision soient à terme remis en cause.

M. Marcel Vidal, rapporteur pour avis, a indiqué que l'analyse des causes du recul du cinéma français s'avérait particulièrement nécessaire alors que le Gouvernement s'engageait de manière résolue dans la défense de la diversité culturelle à la veille de l'ouverture d'un nouveau cycle de négociations au sein de l'organisation mondiale du commerce (OMC).

Il a souligné que les termes du mandat confié par le conseil à la commission européenne afin de préparer la conférence de Seattle présentaient d'incontestables garanties. Il est sans précédent que les Etats de l'Union européenne s'accordent aussi clairement sur le principe de l'exception culturelle obtenue lors du cycle de l'Uruguay. En dépit de ce succès qui résulte de l'effort de persuasion entrepris par le Gouvernement, il conviendra de rester vigilants à l'égard des tentatives américaines pour contourner les positions européennes lors des débats sur le commerce électronique ou à l'occasion d'éventuelles négociations sur les investissements. La France devra également s'attacher au sein de l'Union européenne, notamment à l'occasion de l'élaboration du plan Média III, à faire prévaloir le bien-fondé d'une intervention publique en faveur de l'industrie cinématographique et plus largement de la création.

Le rapporteur pour avis a ensuite présenté le budget du cinéma qui s'établit en 2000 à 1.686,2 millions de francs, en progression de 2,7 % par rapport à 1999. Ces crédits proviennent, pour 1.399,1 millions de francs, de la section " cinéma " du compte de soutien et, pour 287,1 millions de francs, du budget du ministère de la culture.

Les recettes de la section " cinéma " du compte de soutien progressent de 4,1 % sous l'effet de l'augmentation de la fréquentation, qui devrait en 2000 se maintenir à un niveau élevé.

L'augmentation des recettes permettra de renforcer l'aide automatique accordée au secteur de la distribution et notamment aux entreprises indépendantes. L'objectif est d'assurer une meilleure diffusion des films français qui pâtissent aujourd'hui de la concentration croissante que connaît ce secteur. Il conviendra l'an prochain d'évaluer l'effet d'une telle mesure. En 2000, les crédits du soutien automatique à la distribution s'établissent à 100 millions de francs, contre 60 millions de francs en 1999. Les crédits consacrés au soutien automatique à la production et à l'exploitation s'élèvent respectivement à 412 millions de francs et 308 millions de francs.

Les crédits du budget de la culture destinés au cinéma, en légère diminution par rapport à l'an passé, sont affectés aux actions culturelles du Centre national de la cinématographie. Si les crédits d'intervention progressent, afin notamment de renforcer les moyens consacrés aux programmes d'éducation à l'image, les crédits d'investissement reculent sensiblement.

La dotation de fonctionnement du CNC s'établit à 12,6 millions de francs. Les crédits d'intervention, dont la part gérée à l'échelon déconcentrée est de 17 % en 2000, contre 11,3 % en 1999, augmentent de 2,2 % pour s'élever à 219 millions de francs.

Les crédits d'investissement gérés par le CNC, soit 55,5 millions de francs, diminuent sensiblement. Le rapporteur pour avis a toutefois indiqué que pour apprécier l'effort d'investissement consenti dans le domaine du cinéma, il convenait de tenir compte des dotations consacrées au projet de maison du cinéma. Le budget pour 2000 consacre 102 millions de francs en autorisations de programme à ce projet qui permettra à de grandes institutions comme la cinémathèque française, le musée du cinéma ou encore la bibliothèque du film de travailler dans de meilleures conditions.

Dans le domaine de la formation, la généralisation des dispositifs d'initiation au cinéma en milieu scolaire devrait se poursuivre, ce qui sera de nature à réduire les disparités qui subsistent entre les régions.

Le rapporteur pour avis a relevé que les crédits consacrés aux actions conduites en partenariat avec les collectivités territoriales demeuraient modestes. Il a souhaité qu'à l'avenir, les moyens dont dispose le CNC à ce titre soient accrus afin de renforcer l'action culturelle mais également d'accompagner les efforts déployés par les collectivités territoriales pour soutenir l'industrie cinématographique et encourager son implantation en province.

M. Marcel Vidal, rapporteur pour avis, a enfin présenté les crédits du théâtre.

En 2000, l'augmentation de 4,33% des crédits consacrés au spectacle vivant par le ministère de la culture permet de poursuivre la remise à niveau des aides de l'Etat aux structures théâtrales qui avait été engagée en 1999.

Les subventions de fonctionnement versées aux théâtres nationaux progressent de 6,4 %. Cette augmentation est destinée pour une large part à financer la perte de recettes qui résulte de l'instauration d'un tarif unique à 50 francs le jeudi.

Le réseau de la décentralisation dramatique voit ses moyens renforcés. Les mesures nouvelles destinées aux scènes nationales et aux centres dramatiques s'élèvent respectivement à 13 millions de francs et à 6 millions de francs. Les crédits consacrés à ces structures s'établissaient en 1999 à 264 millions de francs pour les premières et à 326 millions de francs pour les secondes. L'aide aux compagnies à laquelle étaient consacrés en 1999 174 millions de francs, bénéficiera d'une mesure nouvelle de 12 millions de francs.

Les dépenses d'investissement consacrées au théâtre représentent en 2000 193 millions de francs contre 153 millions de francs en 1999. Cette progression, conjuguée à l'achèvement du centre du costume de scène à Moulins, permet de conforter la politique d'équipement conduite par les collectivités territoriales.

Le rapporteur pour avis a relevé que cet effort budgétaire significatif s'accompagnait d'une volonté de clarifier les modalités d'intervention de l'Etat afin de tirer les conséquences de la déconcentration. Les mesures prises en ce domaine visent à mieux encadrer les obligations qui incombent aux structures en contrepartie de l'engagement financier de l'Etat. Ainsi, les aides aux compagnies ont été réformées afin de remédier au saupoudrage qui prévalait jusqu'ici. Le renouvellement des contrats de décentralisation des centres dramatiques a été l'occasion d'évaluer avec plus de précision que par le passé le travail des équipes artistiques. Par ailleurs, se mettent progressivement en place les contrats d'objectifs destinés à lier par une convention unique les scènes nationales et leurs différents financeurs publics.

M. Marcel Vidal, rapporteur pour avis, a souligné cependant que la progression des crédits du théâtre ne levait pas toutes les incertitudes qui pesaient sur l'équilibre financier des structures théâtrales, en particulier celles liées à l'application du nouveau statut fiscal des associations. En dépit des assouplissements apportés par le projet de loi de finances, ces nouvelles dispositions fiscales risquent fort de se traduire par un alourdissement des charges des associations théâtrales qui, pour l'essentiel, devraient être considérées comme des associations à but lucratif. Les conséquences des instructions fiscales sont encore mal appréciées par les services du ministère de la culture, essentiellement faute d'une connaissance exacte du secteur. Il serait sans doute utile qu'un effort de recensement soit accompli pour remédier à cette lacune et permettre une réflexion prospective sur la politique du théâtre.

Compte tenu de ces observations, le rapporteur pour avis a proposé à la commission de donner un avis favorable à l'adoption des crédits pour 2000 du cinéma et du théâtre.

Un débat s'est alors engagé.

Mme Danièle Pourtaud, observant que l'accélération du rythme de création de multiplexes coïncidait avec le recul des parts de marché du cinéma français, a souhaité obtenir des précisions sur le calendrier retenu pour réformer la procédure d'autorisation des multiplexes.

M. Jean-Pierre Fourcade s'est interrogé sur l'évolution des crédits d'investissement destinés aux théâtres qui ne sont pas des théâtres nationaux.

M. Gérard Collomb, évoquant à son tour les conséquences du développement des multiplexes, s'est déclaré favorable, plutôt qu'à un contingentement de leur nombre, à des solutions privilégiant la prise en compte de l'impact de ces équipements sur l'équilibre du tissu urbain. Après avoir souligné qu'une telle démarche exigeait de la part des collectivités territoriales un effort de planification, il a cité l'exemple du schéma d'implantation des équipements culturels établi pour Lyon et les effets très positifs qui en étaient résultés pour l'ensemble de l'agglomération.

En réponse aux intervenants, M. Marcel Vidal, rapporteur pour avis, a indiqué que les multiplexes apparaissaient désormais comme un mal nécessaire. On recense aujourd'hui 50 multiplexes et 30 nouveaux projets en cours d'examen. Les professionnels du cinéma sont désormais unanimes pour reconnaître la nécessité d'aménager la procédure d'octroi des autorisations. Les conclusions du rapport confié à M. Francis Delon, qui devraient être connues d'ici la fin de l'année, permettront de dégager des voies de réforme. La modification de la composition des commissions afin d'accroître la représentation des professionnels du cinéma et des services du ministère de la culture apparaît souhaitable. Par ailleurs, dans un souci bien compris d'aménagement du territoire, il pourrait être opportun de substituer aux actuelles commissions départementales des commissions régionales.

Enfin, le rapporteur pour avis a indiqué que la progression de 25 % des autorisations de programme consacrées aux théâtres bénéficiait essentiellement aux opérations d'aménagement et de rénovation des théâtres ne relevant pas directement de la tutelle de l'Etat. L'enveloppe destinée à ces théâtres s'élèvera en 2000 à 144,8 millions de francs, en augmentation de 47,6 % par rapport à 1999. Cette progression significative rendue possible par l'achèvement du centre du costume de scène de Moulins témoigne d'une volonté de rééquilibrage susceptible de conforter la politique conduite par les collectivités territoriales.

A l'issue de ce débat, la commission, suivant les propositions de son rapporteur, a décidé, à l'unanimité des commissaires présents, de donner un avis favorable à l'adoption des crédits pour 2000 du cinéma et du théâtre dramatique.

PJLF pour 2000 - Enseignement scolaire - Examen du rapport

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Jean Bernadaux sur les crédits pour 2000 de l'enseignement scolaire.

M. Jean Bernadaux, rapporteur pour avis, a d'abord indiqué que le projet de budget de l'enseignement scolaire pour 2000 s'élevait à 208,7 milliards de francs, soit une progression de 3,5 %. Il a ajouté que le passage du cap symbolique des 300 milliards de francs illustrait d'une manière singulière le passage à l'an 2000 pour notre système éducatif, témoignant de la poursuite d'une dérive budgétaire dénoncée par la commission d'enquête du Sénat sur la gestion des personnels de l'éducation nationale.

Il a observé que cette progression budgétaire, certes quelque peu ralentie, se conjuguait à une baisse démographique persistante, et résultait pour la plus grande part de mesures décidées les années antérieures, notamment en matière de rémunération et de retraite : les réformes annoncées avec éclat par le ministre ne peuvent donc bénéficier que d'une part résiduelle des crédits supplémentaires.

Il a rappelé que l'enseignement scolaire restait le premier budget de l'Etat et que sa dérive continue était commandée par le poids des dépenses de personnel, des services votés et par l'effet d'entraînement des plans de revalorisation et d'intégration : à cet égard, il a noté que l'intégration inévitable des instituteurs dans le corps des professeurs des écoles coûtera environ 11 milliards de francs pour la période 1990-2007. Il a ensuite souligné l'évolution divergente des crédits budgétaires et des effectifs d'élèves scolarisés : ces deux courbes se sont croisées en 1995 et divergent de manière préoccupante depuis 1997.

Il a ajouté que le projet de budget pour 2000 entretenait cette tendance en autorisant la création de 4.300 emplois, dont 3.360 emplois de professeurs dans le second degré, 810 personnels ATOS et 150 personnels médico-sociaux, pour un coût de 267 millions de francs.

Concernant l'évolution démographique, il a rappelé que l'enseignement scolaire avait perdu 317.000 élèves depuis dix ans et que le premier degré risquait de perdre 220.000 élèves dans les dix années à venir, tandis que le second degré perdra quelque 393.000 élèves jusqu'en 2007.

Il a constaté que cette rente démographique était complètement ignorée par le budget, que la croissance des crédits n'avait qu'une faible incidence sur les taux d'encadrement et que le contrôle des emplois restait embryonnaire.

Evoquant ensuite les deux réformes destinées à réduire les dysfonctionnements observés lors de chaque rentrée scolaire, le rapporteur pour avis a noté, d'une part, que le bilan de la déconcentration du mouvement des enseignants du second degré pouvait être considéré comme mitigé dans certaines académies : réduction du volant de remplaçants, nomination de débutants sur des postes difficiles, manque de candidats pour des postes à exigences particulières. Il a fait observer, d'autre part, que la réforme du système de remplacement n'avait pas remédié au phénomène trop développé des " classes sans enseignants et des enseignants sans classe " et a regretté que les propositions de la commission d'enquête qui tendaient à introduire plus de souplesse et de polyvalence dans la définition des périmètres disciplinaires au collège n'aient pas été retenues.

Soulignant le recours toujours excessif aux variables d'ajustement -maîtres auxiliaires, contractuels, heures supplémentaires- il a rappelé que le coût des quelque 60.000 emplois-jeunes avait été de 1,84 milliard de francs en 1999 ; ceux-ci sont désormais implantés dans la moitié des collèges, 40 % des lycées professionnels et dans le tiers des écoles et des lycées. Si leur utilité est indéniable, leur avenir problématique conduit à s'interroger sur la nécessité d'un nouveau recrutement de 5.000 aides-éducateurs alors que 14.000 d'entre eux quittent chaque année l'éducation nationale et que 3.000 seulement sont susceptibles d'être intégrés dans la fonction publique.

Le rapporteur pour avis s'est ainsi demandé si les aides-éducateurs d'aujourd'hui ne risquaient pas de devenir les enseignants de demain.

Evoquant ensuite les réformes annoncées à grand bruit par le ministre, il a avoué sa perplexité devant celle de l'école primaire qui est expérimentée sous l'égide de l'Institut national de la recherche pédagogique, qui peut difficilement apparaître comme un modèle de rigueur. Il a exprimé la crainte que l'aménagement des rythmes scolaires, l'intrusion de multiples intervenants extérieurs dans l'école, la transformation du maître en une sorte de chef d'orchestre ou d'animateur socio-culturel ne sonnent le glas de l'école républicaine.

Il a rappelé que 10 % des jeunes sortaient du système scolaire sans maîtriser les apprentissages fondamentaux, et notamment la lecture dont les éléments essentiels ne sont pas acquis par la moitié des élèves entrant au collège ; il a estimé que l'ère des colloques et des états généraux sur la lecture était révolue et qu'il convenait désormais d'avancer des solutions.

Il a par ailleurs souhaité que le régime de la responsabilité pénale des enseignants, lors des sorties scolaires, soit précisé.

Abordant la réforme dite du " collège pour tous ", il a fait observer que certaines mesures allaient dans le bon sens -meilleure liaison entre l'école et le collège, aide personnalisée aux élèves en difficulté-, celles-ci apparaissant cependant trop timides pour renforcer le maillon faible de notre système éducatif : l'échec scolaire, la relégation dans certaines filières, le défaut d'orientation, l'hétérogénéité des élèves, le développement de la violence constituent autant de facteurs appelant une réflexion plus ambitieuse sur le collège unique.

S'agissant de la réforme du lycée, le rapporteur pour avis a remarqué que celle-ci n'avait en rien empêché le développement du dernier mouvement lycéen, provoqué davantage par des postes d'enseignants non pourvus que par une prétendue inertie des collectivités locales à financer des " lieux de vie " dans les établissements.

Il a noté que cette réforme n'avait apporté aucun remède à la multiplication excessive du système des options, qui est coûteux en termes budgétaires et qui permet de détourner la sectorisation.

M. Jean Bernadaux a enfin évoqué trois chantiers engagés par le ministre.

Il a indiqué que le rapport Blanchet, concernant la nécessaire revalorisation de la fonction des chefs d'établissement, avait formulé une quarantaine de propositions, dont certaines -élargissement du recrutement, développement de leurs prérogatives sur l'équipe éducative- rejoignaient les mesures préconisées par la commission d'enquête du Sénat.

S'agissant de l'évaluation des enseignants, il a fait observer que le rapport Monteil répondait aussi en partie aux propositions de la commission d'enquête, sans toutefois préconiser un renforcement des moyens de l'inspection ; il a noté à cet égard que le projet de budget ne prévoyait que 40 postes supplémentaires d'inspecteurs d'académie alors que le ministre avait annoncé son intention d'augmenter de moitié les effectifs actuels.

Il a enfin exposé les propositions du recteur Bancel qui sont destinées à améliorer les conditions de travail et de vie des enseignants ; là encore, si certaines mesures rejoignent celles préconisées par la commission d'enquête, il a regretté que le rapport n'évoque aucun aménagement de l'obligation de service hebdomadaire des enseignants qui permettrait pourtant d'apporter une aide individualisée, et plus efficace, aux élèves en difficulté.

Il a estimé que ces trois chantiers importants étaient certes porteurs d'avenir mais comportaient aussi une grande part d'incertitude.

Constatant que la dérive persistante des crédits ne s'accompagnait pas d'une réorientation des moyens, il a proposé à la commission de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits de l'enseignement scolaire pour 2000.

Un large débat s'est alors engagé.

M. Jean-Louis Carrère a souligné le caractère quelque peu " comptable " de la présentation faite par le rapporteur pour avis. Il a rappelé que certains budgets antérieurs, qui étaient pourtant moins satisfaisants, avaient été votés par la majorité du Sénat et que l'évolution du budget de l'enseignement scolaire était pour l'essentiel commandée par celle des rémunérations.

Il s'est par ailleurs demandé si une réduction du nombre des enseignants constituerait la meilleure solution pour relancer une politique efficace en faveur de l'apprentissage de la lecture.

Mme Hélène Luc a souligné les efforts engagés depuis l'an dernier pour réduire les effectifs par classe dans les lycées, et notamment en classe terminale, cette réduction devant faire l'objet d'une programmation sur plusieurs années.

Elle s'est félicitée de certaines mesures prises pour le collège, notamment en matière d'aide individualisée aux élèves, et a souhaité que cette action prioritaire soit confortée par des moyens plus importants.

S'agissant de l'avenir des emplois-jeunes, elle a rappelé que des conventions avaient été signées avec de grandes entreprises publiques, et aussi privées, pour accueillir ces aides-éducateurs en cours ou en fin de contrat ; elle a estimé qu'il convenait de proposer à ces jeunes une véritable formation et de valoriser leur période d'activité à l'éducation nationale, lors de leur passage en IUFM, pour ceux qui se destineraient à l'enseignement.

Elle a par ailleurs estimé que la relance actuelle de l'économie devrait permettre de porter de 3,5 à 5 % la part du PIB consacrée à l'éducation nationale.

Elle a enfin indiqué qu'elle ne pourrait suivre les propositions du rapport et qu'elle voterait le projet de budget de l'enseignement scolaire.

M. Jean-Pierre Fourcade a d'abord fait observer que le budget de l'Etat ne constituait qu'une part de la dépense intérieure d'éducation.

Il a par ailleurs souligné l'imprécision des chiffres concernant l'intégration progressive des instituteurs dans le corps des professeurs des écoles. Il a enfin estimé que le défaut de maîtrise des apprentissages fondamentaux par les élèves arrivant au collège, s'agissant notamment de la lecture, relevait davantage d'un problème de méthodes que de crédits.

Citant les résultats obtenus par " l'école de la deuxième chance " notamment à Marseille, il a souhaité que diverses méthodes soient expérimentées précocement au plan local, afin de prévenir des rattrapages de plus en plus difficiles au cours de la scolarité au collège, la non-acquisition de ces fondamentaux alimentant, selon lui, certaines formes de délinquance et l'exclusion sociale.

M. Philippe Richert a évoqué le problème de la pérennisation des fonctions assurées par les emplois-jeunes dans les établissements difficiles, qui répondent incontestablement à des besoins d'encadrement traditionnellement remplis par les surveillants.

Il a par ailleurs exprimé ses réserves sur l'extension des bourses de mérite au collège, qui seraient selon lui susceptibles d'introduire une discrimination trop élitiste entre les bons élèves ; il a estimé que cette formule était d'une autre nature que l'ancien système des écoles normales d'instituteurs, où les élèves s'engageaient à servir l'éducation nationale pendant dix ans.

Il a également souhaité que les bourses de collège soient attribuées aux familles selon des critères objectifs, à l'inverse des divers fonds à vocation sociale.

Il a enfin considéré que la revalorisation de la fonction de chef d'établissement devrait faire l'objet de mesures d'urgence, sauf à perpétuer la vacance de nombreux postes.

Jugeant excessive la sévérité du rapporteur, M. Gérard Collomb a estimé qu'il ne fallait pas charger l'éducation nationale de toutes les difficultés de la société ; il a rappelé que l'école restait souvent le dernier service public présent dans les quartiers difficiles et qu'il ne fallait pas demander l'impossible aux enseignants.

Il a fait observer que le taux moyen d'encadrement des élèves par classe recouvrait des écarts très importants et qu'il était difficile de transférer des enseignants des zones rurales aux zones urbaines.

Il a souligné la mobilité importante des aides éducateurs qui devraient, en outre, bénéficier d'une aide plus importante pour préparer des concours.

Il a enfin considéré que la revalorisation de la fonction de chef d'établissement passait d'abord par une revalorisation indemnitaire.

S'appuyant sur son expérience personnelle, M. Jean-Louis Carrère a souligné les efforts entrepris en matière d'apprentissage de la lecture, au travers des groupes psychopédagogiques qui permettent notamment d'évaluer les pré-requis, d'individualiser les durées d'apprentissage pour chaque élève et de changer éventuellement de méthode de lecture au cours de l'année scolaire.

M. Jean Bernard a rappelé que les postes des établissements difficiles, notamment en ZEP, étaient souvent pourvus par de jeunes enseignants et qu'il y avait peu de candidats expérimentés pour occuper de tels postes.

M. Adrien Gouteyron, président, rappelant une visite effectuée par la commission dans un collège difficile de ZEP, a indiqué que la jeunesse des enseignants pouvait aussi être un atout et que le chef d'établissement jouait un rôle essentiel dans la cohérence et la mobilisation de l'équipe éducative.

Estimant que les méthodes d'enseignement ne valaient que par le maître qui les applique, M. Pierre Martin a dénoncé le manque de courage de l'éducation nationale qui se refuse à écarter certains professeurs ne méritant pas de conserver la responsabilité d'une classe et qui hypothèquent la réussite scolaire de trop nombreux élèves.

Répondant à ces interventions, M. Jean Bernadaux, rapporteur pour avis, a notamment apporté les précisions suivantes :

- l'apprentissage de la lecture est en effet plus une question de méthode que de moyens, l'utilisation de certaines méthodes ayant dans le passé " cassé " des générations d'élèves ;

- les aides-éducateurs devraient bénéficier d'une aide adaptée pour préparer les concours ou acquérir une véritable formation complémentaire ;

- les taux moyens d'encadrement des élèves dans l'enseignement primaire, et dans le second degré, recouvrent en effet des réalités très différentes selon les établissements ;

- le travail individuel doit être distingué du travail individualisé qui permet d'évaluer la situation personnelle de chaque élève ;

- entre 1990 et 1998, 121.000 enseignants du premier degré ont bénéficié de mesures catégorielles, statutaires et indiciaires ; à cette dernière date, le Gouvernement a décidé d'accélérer l'unification des corps enseignants du premier degré et d'en rapprocher le terme à 2007, soit 20.735 transformations d'emplois par an ;

- il pourrait être envisagé de moduler le montant des bourses de mérite selon les résultats scolaires afin de ne pas introduire une discrimination entre les bons élèves ;

- les chefs d'établissement sont soumis aux multiples pressions de leur hiérarchie, de l'administration, des parents d'élèves, des enseignants, des élèves ; compte tenu de la difficulté de la fonction, certains d'entre eux sont tentés de revenir à l'enseignement quelques années avant leur départ en retraite ;

- les efforts déployés par les enseignants dans les établissements difficiles doivent être salués, notamment dans certains quartiers qui sont désertés par les autres services publics ;

- en dépit de la réforme du mouvement, trop de jeunes enseignants sont encore affectés dans des établissements difficiles, alors qu'il conviendrait de confier ces classes aux professeurs les plus expérimentés ;

- il importe de veiller tout particulièrement à la qualité du recrutement des personnels de direction qui jouent un rôle décisif dans le bon fonctionnement des établissements.

Suivant les propositions de son rapporteur pour avis, la commission a décidé de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits pour 2000 de l'enseignement scolaire.

Mercredi 24 novembre 1999

- Présidence de M. Adrien Gouteyron, président. -

PJLF 2000 - Relations culturelles, scientifiques et techniques - Examen du rapport

Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport pour avis de Mme Danièle Pourtaud sur les crédits pour 2000 consacrés aux relations culturelles, scientifiques et techniques..

Mme Danièle Pourtaud, rapporteur pour avis, a relevé que dans le budget pour 2000 de la direction générale de la coopération internationale et du développement (DGCID), les crédits intéressant la coopération culturelle et scientifique bénéficiaient d'un traitement nettement plus favorable que ceux qui intéressent la coopération au développement, second domaine d'intervention de la direction générale.

La coopération culturelle et scientifique bénéficiera ainsi de 127 millions de francs de mesures nouvelles et devra réaliser 29,7 millions de francs d'économies, alors que, si la coopération au développement bénéficiera de 322 millions de francs de mesures nouvelles, elle devra aussi réaliser 410 millions de francs d'économies.

Mme Danièle Pourtaud, rapporteur pour avis, a ensuite présenté les chapitres budgétaires qui recensent les actions liées à la coopération culturelle et scientifique.

La dotation du chapitre 37-95 - crédits de fonctionnement aux établissements culturels, de coopération et de recherche à l'étranger - va diminuer de 3,8 % en raison d'une économie forfaitaire de 16 millions de francs sur les subventions de fonctionnement allouées aux établissements culturels. Cette mesure est l'unique réserve que peut susciter le projet de budget de la coopération culturelle et scientifique, compte tenu du rôle important joué par ces établissements pour le rayonnement de la culture française.

Le chapitre 42-11, qui regroupe des crédits d'intervention divers en faveur de la coopération culturelle et scientifique, verra, en revanche, ses crédits augmenter de 1,8 % à structure constante et s'établira à 1 milliard 790 millions de francs.

En ce qui concerne les crédits de l'enseignement français à l'étranger, qui figurent au chapitre 36-30, la subvention à l'AEFE augmentera de 1,1 % pour s'établir à près de 2 milliards de francs. Cette augmentation résulte en particulier d'une mesure nouvelle de 15 millions de francs en faveur des bourses scolaires destinées aux enfants français.

Enfin, les crédits de l'audiovisuel extérieur, inscrits au chapitre 42-14, prennent une place croissante dans les crédits d'intervention du ministère des affaires étrangères. En augmentation de 2,4 % par rapport à 1999, ils représenteront 11,12 % des crédits d'intervention du ministère en 2000 contre 9,65 % pour l'exercice 1999.

Mme Danièle Pourtaud, rapporteur pour avis, a ensuite évoqué les inflexions récentes de la politique de coopération culturelle et scientifique, spécialement dans le domaine de la politique audiovisuelle extérieure.

Une communication présentée par le ministre des affaires étrangères au Conseil des ministres du 30 avril 1998 avait proposé de mobiliser plus efficacement les outils existants de la politique audiovisuelle extérieure pour assurer une présence internationale accrue des programmes français. Il s'agissait aussi de rationaliser nos interventions en évitant en particulier la concurrence entre TV5 et CFI, et de diversifier l'offre française face à l'explosion des chaînes satellitaires, en apportant une aide aux acteurs privés qui relèvent le défi de l'exportation.

Cette démarche a trouvé son point d'orgue dans le plan stratégique de TV5, lancé le 8 janvier 1999 avec la mise en place de quatre signaux régionalisés, et actuellement en voie d'achèvement avec le lancement d'un cinquième signal vers la France, la Belgique et la Suisse, à la mi-novembre.

Après avoir rappelé le contenu du plan d'entreprise de TV5, Mme Danièle Pourtaud, rapporteur pour avis, a jugé ses premiers résultats très positifs en termes de couverture et d'audience. Elle a notamment relevé que TV5 avait dépassé CNN en Espagne et BBC World dans l'ensemble des zones couvertes.

Le budget de 2000 poursuit l'effort financier engagé en 1999, en attribuant 25,3 millions de francs supplémentaires à TV5 pour :

- achever la mise en place des serveurs numériques qui permettent de dissocier les signaux émis par TV5 Europe ;

- mettre en place un signal France-Belgique-Suisse dissocié du signal qui couvre l'Europe non francophone, afin de faciliter l'acquisition pour cette zone de droits de diffusion non disponibles pour la France ;

- améliorer les programmes sur les différents réseaux ;

- poursuivre le sous-titrage et l'amélioration de l'information sur TV5 Amérique latine et Etats-Unis.

Elle a ensuite évoqué les difficultés de la branche nord-américaine de TV5, indépendante de TV5 Europe et dirigée par une équipe canadienne, et l'échec subi par elle lors du lancement de TV5 aux Etats-Unis : 4.800 abonnements ont été souscrits sur les 60.000 attendus à la fin de 1999.

Les partenaires européens de TV5, qui financent 85 % du dispositif nord-américain, ont souhaité, devant la réticence des Canadiens à relayer la stratégie mise en oeuvre avec succès en Europe, engager une réflexion sur l'avenir de TV5 Amérique.

Parmi les pistes explorées actuellement pour sortir de la crise de confiance marquée par le report de la conférence ministérielle qui devait avoir lieu en automne, se trouve l'idée de découpler le signal destiné aux Etats-Unis et celui destiné à l'Amérique latine. Le coût de cette mesure avoisinerait 10 millions de francs. Mme Danièle Pourtaud, rapporteur pour avis, a souhaité qu'elle ne soit pas financée par la mesure nouvelle de 25,3 millions de francs accordée à TV5.

Evoquant ensuite la rationalisation des relations de CFI et de TV5, deuxième axe de la relance de l'audiovisuel extérieur, elle a estimé que la présidence commune des deux sociétés avait abouti à de bons résultats. Le plan stratégique de CFI distingue trois missions :

- CFI-TV diffuse sur l'Afrique une chaîne de télévision dont la grille de programme a été harmonisée avec celle de TV5 ;

- CFI-PRO, banque de programmes gratuits destinés à des chaînes partenaires, a vu sa zone de diffusion resserrée afin d'éviter de concurrencer les exportations commerciales de programmes qui se développent sous l'impulsion de l'association de producteurs TVFI ;

- CFI devrait enfin à partir de cette année développer ses activités d'ingénierie audiovisuelle, ce qui imposera de clarifier le rôle de la SOFIRAD et celui de ses filiales telles que PORTINVEST.

Mme Danièle Pourtaud, rapporteur pour avis, a aussi rappelé que les exportations de programmes français avaient en un an augmenté de 30 %.

Elle a ensuite abordé l'action radiophonique extérieure, pilotée par RFI avec de bons résultats et une certaine largesse de l'Etat en termes de moyens. Elle a rappelé à cet égard que l'économie de 80 millions de francs provenant du repli de la diffusion en ondes courtes en 1999, serait en 2000 presque totalement restituée à RFI pour financer son redéploiement en FM et sur Internet, ce qui ne contribuera pas au rééquilibrage entre les moyens consacrés respectivement à la télévision et à l'action radiophonique extérieures.

Mme Danièle Pourtaud, rapporteur pour avis, a ensuite évoqué l'enseignement français à l'étranger, notant que l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger bénéficiera en 2000 de 21,4 millions de francs de crédits supplémentaires, dont 15 millions de francs pour les bourses destinées aux enfants français à l'étranger, ce qui représente une augmentation de 6,9 % par rapport à 1999. Observant qu'une augmentation de 0,2 % du nombre des boursiers avait correspondu à l'augmentation de 10,15 % du crédit des bourses en 1999, elle a estimé nécessaire de porter une attention particulière à l'affectation des crédits supplémentaires. Il serait souhaitable, en effet, d'augmenter le nombre ou le montant des bourses plutôt que de susciter l'augmentation du montant des droits d'écolage.

L'un des grands chantiers de l'enseignement français à l'étranger est la réforme du statut des enseignants. Il existe entre les expatriés, les résidents et les recrutés locaux des disparités qui suscitent une pression à la hausse des coûts salariaux. Le ministère des affaires étrangères a décidé de tenter une réforme du système des rémunérations afin de diminuer, à coût global constant, les écarts de rémunérations.

Mme Danièle Pourtaud, rapporteur pour avis, a ensuite évoqué la politique d'accueil des étudiants étrangers. Celle-ci comporte deux volets, les bourses universitaires et la promotion de l'enseignement supérieur français. Il s'agit d'une politique essentielle, dont les prolongements économiques sont potentiellement très vastes, dans la mesure où les cadres étrangers formés en France seront plus ouverts que d'autres aux échanges et aux partenariats avec l'économie française.

Le premier volet de cette politique est mis en oeuvre avec des instruments tels que le programme Eiffel de bourses d'excellence, qui bénéficiera d'une mesure nouvelle de 35 millions de francs s'ajoutant aux 50 millions dégagés en 1999. Les crédits prévus en 2000 devraient permettre de financer entre 500 et 800 bourses annuelles, l'objectif étant d'arriver à 1.500 bourses dans quatre ou cinq ans, pour un coût d'environ 150 millions de francs.

L'autre volet de cette politique est pris en charge par Edufrance, GIP doté en 2000 d'un budget de 17,5 millions de francs contre 10 millions en 1999, et créé par le ministère des affaires étrangères, le ministère de l'éducation nationale et des établissements d'enseignement supérieur. L'objectif est d'assurer la promotion de l'enseignement supérieur français auprès des étudiants étrangers solvables. L'activité d'Edufrance, qui comporte en particulier la participation à des salons d'étudiants et la mise en place de plates-formes de services, a débuté en 1999.

En conclusion de sa présentation, Mme Danièle Pourtaud, rapporteur pour avis, a proposé à la commission de prononcer un avis favorable à l'adoption des crédits de la coopération culturelle et scientifique en 2000.

Un débat a suivi.

M. Jean-Paul Hugot, saluant le volontarisme et le dynamisme qui marquent la mise en oeuvre du plan stratégique de TV5, a demandé ce qui expliquait les obstacles rencontrés en ce qui concerne la chaîne d'information continue, concept intéressant qu'il serait dommage d'abandonner, ainsi que les difficultés constatées dans la mise en oeuvre de la synergie entre TV5 et RFI et la relance de TV5 Amérique.

Il a aussi déploré la diminution des subventions de fonctionnement des centres culturels et a demandé ce qui pouvait expliquer l'interruption brutale de stages d'étudiants étrangers récemment constatée dans certaines villes moyennes.

M. Jean-Luc Miraux a demandé ce qui permettait d'expliquer l'évolution défavorable des crédits de coopération technique gérés par la DGCID.

M. Jean-François Picheral a demandé de préciser le rôle d'Edufrance et a souhaité savoir si cet organisme favorisait l'envoi d'étudiants français à l'étranger, compte tenu de la demande d'étudiants français exprimée par un certain nombre de grandes entreprises implantées à l'étranger -il a cité à cet égard le cas de la Chine- afin d'enseigner le français aux cadres locaux.

Mme Danièle Pourtaud, rapporteur pour avis, a fourni les réponses suivantes :

- il faut rendre hommage à l'action du président de TV5, qui a mené à bien le reformatage de la chaîne et un découplage de la diffusion qui, permettant d'ajuster région par région la diffusion de la grille aux fuseaux horaires, représente un progrès considérable. Par ailleurs, TV5 dispose actuellement de la régie numérique la plus moderne d'Europe. Il peut y avoir un revers de médaille, c'est ainsi que TV5 fait face à des exigences croissantes de la part des producteurs, sur le montant des droits de diffusion des programmes. En ce qui concerne l'information, la mise en oeuvre du plan est aussi un succès : TV5 est diffusée en permanence dans les régies des chaînes de télévision à côté de CNN, car elle fournit 24 heures sur 24 une information actualisée toutes les heures. La chaîne d'information est un projet supplémentaire qui vise à utiliser, pour un coût additionnel de 15 millions de francs, les contenus fournis par les télévisions partenaires de TV5. L'annonce prématurée de ce projet dans la presse, et l'apparente sous-estimation de son coût (si l'on prend en compte le coût des contenus fournis gratuitement par les chaînes partenaires, le coût global de la chaîne d'information serait en fait de 150 millions de francs) en ont retardé l'adoption ;

- le président de RFI avait pris l'engagement de travailler à l'établissement de synergies avec TV5. Il serait utile de l'interroger sur sa façon d'envisager la poursuite de ce projet ;

- TV5 Amérique est une entité indépendante de TV5 Europe, et présidée par un Canadien. Son président a récemment changé, ce qui devrait favoriser la reprise du dialogue entre le pôle américain et le pôle européen. Il n'est pas exclu que la conférence des ministres qui se réunira au début de l'année prochaine modifie la configuration de TV5 Amérique ;

- la diminution des crédits de fonctionnement des centres culturels à l'étranger est due aux arbitrages inéluctables entre les priorités de la coopération culturelle et scientifique, et notamment à l'accent mis sur le développement de la politique audiovisuelle extérieure ;

- les crédits de la coopération technique intéressent la politique de coopération au développement et ne relèvent donc pas de la compétence de la commission ;

- Edufrance n'envoie pas d'étudiants français à l'étranger. Son rôle est de promouvoir l'enseignement supérieur français auprès des étudiants étrangers, spécialement dans les salons d'étudiants où l'on constate une très forte présence de pays comme l'Australie et les Etats-Unis. Il existe, en effet, de la part des entreprises françaises, une demande d'étudiants français susceptibles de participer à la formation des cadres locaux à l'étranger. Il faut cependant observer que la politique de formation en France de stagiaires étrangers exerçant ensuite dans leur pays des fonctions d'encadrement, est susceptible de créer d'excellents relais internationaux à l'économie française. Il faut, en outre, noter que la Chine a d'énormes besoins de formation supérieure, qu'elle est actuellement incapable de satisfaire.

Suivant les conclusions de son rapporteur, la commission a ensuite décidé, à l'unanimité des commissaires présents, de donner un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés aux relations culturelles, scientifiques et techniques pour 2000.

PJLF 2000 - Environnement - Examen du rapport

Puis la commission a examiné le rapport pour avis de M. Ambroise Dupont sur les crédits pour 2000 de l'environnement.

Après avoir exprimé ses regrets que Mme Dominique Voynet n'ait pu venir présenter son budget devant la commission du fait d'une surcharge de son emploi du temps, M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis, a analysé les crédits affectés à l'environnement par le projet de budget de 2000.

Ces crédits enregistrent une hausse de 8,6 %, succédant à celle de 14,8 % intervenue l'an passé. M. Ambroise Dupont s'est interrogé sur les capacités d'un emploi efficace de ces augmentations successives, précisant qu'elles ne semblaient concentrées que sur une partie de l'action du ministère, celle consacrée à la protection de la nature.

Il a également rappelé l'évolution préoccupante de l'assiette de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), dont une partie du produit sera affectée en 2000 à des actions sans rapport avec l'environnement, mais destinées à soutenir la politique gouvernementale de réduction du temps de travail. Il s'est interrogé à ce sujet sur les limites de l'efficacité du principe " pollueur-payeur " lorsqu'il s'applique à la production de produits de grande consommation, comme les lessives, la taxe risquant alors d'être simplement répercutée sur le consommateur.

Au total, 4,297 milliards de francs seront affectés à la politique de l'environnement -TGAP incluse- en 2000. Ces moyens permettront notamment la création de 140 emplois nouveaux, dont 50 à l'administration centrale, 36 dans les directions régionales de l'environnement (DIREN), les autres créations de postes devant notamment étoffer le corps des inspecteurs des installations classées (54 postes). S'il s'est félicité du renforcement des moyens de l'inspection des établissements classés, le rapporteur pour avis s'est en revanche interrogé sur la nécessité de l'augmentation des effectifs de l'administration centrale.

Passant à l'examen des actions prévues par le ministère pour 2000, M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis, a constaté que la protection des espaces naturels était le secteur qui bénéficiait le plus de la croissance des crédits. Les parcs nationaux reçoivent ainsi 10,21 millions de francs de fonds supplémentaires, et dix-neuf emplois sont créés pour soutenir la création de trois nouveaux parcs à l'étude en Corse, en mer d'Iroise et en Guyane.

Les trente-sept parcs naturels régionaux devraient voir leur nombre porté à quarante-quatre en 2000.

En revanche, le conservatoire du littoral enregistre une stagnation de ses crédits, (32 millions de francs de crédits de fonctionnement, 117,05 millions de francs de crédits de paiement) ce que le rapporteur pour avis a déploré, compte tenu de la qualité reconnue de ses actions et de sa gestion.

Quant à la mise en place du réseau européen de sites protégés " Natura 2000 ", elle entre dans une phase décisionnelle avec la transmission, par la France, à la commission européenne d'une liste de 531 sites.

Passant en revue trois autres domaines d'action du ministère de l'environnement auxquels il avait souhaité s'intéresser plus cette année -l'urbanisme et la publicité, l'eau, et l'élimination des déchets et des boues d'épuration-, le rapporteur pour avis a estimé que ces secteurs, qui relèvent incontestablement du " développement durable " tant évoqué par le ministère de l'environnement, étaient cependant globalement délaissés.

En ce qui concerne la protection des entrées de villes, ou plutôt des entrées d'agglomérations, il a rappelé que l'amendement qui avait été introduit à son initiative dans la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement tendait à favoriser une prise de conscience et une réflexion commune des élus pour remédier, par un effort de planification et d'aménagement, à la prolifération anarchique des constructions et des enseignes publicitaires, en particulier le long des voies à grande circulation. M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis, a relevé que le moment était propice pour faire progresser cette réflexion et y associer les investisseurs, un certain nombre d'installations commerciales qui ne répondent plus à la demande du public étant en voie de rénovation ou de transformation. Il a donc espéré une relance de l'activité du comité des entrées de ville, en particulier grâce au soutien d'élus comme M. Jean-François Picheral ou M. Jean-Pierre Sueur.

Il s'est enfin inquiété de l'inaction du ministère de l'environnement dans le domaine de la réglementation de l'affichage, ce qui conduit à s'interroger sur la pertinence du transfert de ce domaine de compétence, décidé au mois d'avril 1997, du ministère de l'équipement à celui de l'environnement.

Abordant la question de la gestion des eaux, M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis, a évoqué la création, en 2000, du fonds national de solidarité pour l'eau (FNSE), qui bénéficiera de 500 millions de francs de crédits prélevés sur les sommes dont disposent les agences de bassin. Il a estimé que cette création n'emportait guère l'adhésion, car ce fonds sera consacré à des actions d'information dont on discerne mal la nécessité, et il a souligné que dans ce domaine, la première priorité, dans une perspective de développement durable, devait être la préservation de la ressource et celle de la qualité de l'eau.

Enfin, M. Ambroise Dupont s'est dit inquiet de l'immobilisme du ministère sur les problèmes posés par la gestion des déchets, et des boues résiduelles des stations d'épuration. Les plans départementaux sont " en panne ", faute pour les autorités compétentes de disposer des éléments leur permettant d'effectuer les choix stratégiques qui leur incombent. Quant aux boues d'épuration, les agriculteurs sont de plus en plus réticents à les utiliser comme fertilisants, ce qui participe d'un souci tout à fait compréhensible de sécurité alimentaire. Mais si l'épandage devient impossible, il faut envisager d'autres solutions, qui risquent d'être très coûteuses, et sur lesquelles le ministère ne semble mener aucune réflexion.

En conclusion, au vu de ces éléments insatisfaisants, le rapporteur pour avis a proposé à la commission de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits de l'environnement pour 2000.

Un débat s'est ensuite engagé.

M. Serge Lepeltier, s'associant aux propos du rapporteur pour avis, a souligné que la politique de gestion des déchets et des boues issues des stations d'épuration semblait être totalement " dans l'impasse ". Il a ensuite interrogé M. Ambroise Dupont sur une éventuelle réflexion menée par le Conservatoire du littoral sur les conséquences, à long terme, de l'effet de serre.

M. Jean-Luc Miraux s'est inquiété de la dégradation des paysages entraînée par le développement des relais de téléphonie mobile, dont l'implantation ne fait apparemment l'objet d'aucune concertation entre les différents opérateurs, et des paraboles de télévision. Il a également évoqué, à propos de la prévention des risques, les accidents entraînés par l'existence de marnières, dont beaucoup, qui ont été comblées à la hâte au siècle dernier pour échapper à l'impôt qui les frappe n'ont pas été recensées. Il a souligné que les conséquences de ces accidents restaient généralement, en définitive, à la seule charge des victimes ou des communes, faute d'assurances appropriées : il serait opportun de réfléchir à la mise en place d'un mécanisme de solidarité.

M. Daniel Eckenspieller a évoqué les dépenses considérables engendrées, pour les collectivités locales, par la gestion des déchets, et a déploré que les aides apportées par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) pour leur traitement aient décru. Il a vivement déploré la " diabolisation " qui frappait aujourd'hui les procédures d'incinération, même les plus modernes et les plus performantes, et évoqué notamment une nouvelle technologie permettant une co-incinération des déchets et des boues.

M. Jean-François Picheral s'est déclaré favorable à l'augmentation des personnels des DIREN, qui sont actuellement peuplées d'agents contractuels en perpétuelle mutation. Il a en revanche regretté que le ministère de l'environnement n'apporte aucune orientation sur le meilleur traitement à réserver aux déchets, et, s'associant aux propos de M. Daniel Eckenspieller sur la " diabolisation " de l'incinération, il a rappelé que les stations d'épuration modernes produisaient des boues d'un faible volume, mais d'une forte concentration en éléments dangereux.

M. Michel Dreyfus-Schmidt a noté que le problème des boues d'épuration ne pouvait rester sans solution. Si on ne peut plus les épandre, il faudra bien les brûler. S'il existe de nouvelles techniques permettant de le faire dans de bonnes conditions, il faut que le ministre explore ces possibilités.

Le président Adrien Gouteyron, évoquant le Plan Loire-Grandeur-Nature, a souligné que sa réalisation n'a pas, jusqu'à présent, suffisamment pris en compte la protection des riverains contre les risques. Il s'est d'autre part inquiété, à la suite de l'abandon du barrage de Serre-de-la-Fare et de l'intention affirmée par l'Etat de ne pas financer le barrage de Chambonchard, de l'avenir des relations entre l'Etat et l'établissement public d'aménagement de la Loire et de ses affluents (EPALA).

En réponse aux différents intervenants, M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis, a apporté les précisions suivantes :

- le Conservatoire du littoral ne s'est pas penché, à sa connaissance, sur les conséquences à venir, pour les zones humides, de l'effet de serre ;

- on peut en effet se demander si l'incinération ne sera pas en fin de compte le seul recours pour traiter les boues d'épuration mais, outre ses coûts élevés, elle est accusée de contribuer à la pollution de l'air. Ce qui serait en tout cas indispensable, c'est que le ministère indique au moins dans quelle voie il faut chercher des solutions. Si les boues ne peuvent plus être un engrais, elles seront un déchet, et il faut réfléchir au moyen de les traiter ;

- les DIREN seront opportunément renforcées par les créations d'emplois qui sont prévues pour 2000, mais l'augmentation des effectifs de l'administration centrale paraît moins justifiée ;

- des textes sont en préparation en matière d'implantation des pylônes de téléphonie mobile, mais il est à craindre qu'ils ne soient applicables que lorsque tout le territoire français aura déjà été équipé ;

- le Plan Loire-Grandeur-Nature était une grande initiative pour mieux utiliser et valoriser le plus grand fleuve naturel de notre pays. Il serait très regrettable que ce vaste projet ne puisse aboutir faute d'une poursuite de la collaboration entre les collectivités territoriales, et entre celles-ci et l'Etat.

A l'issue de ce débat, la commission, suivant la proposition de son rapporteur, a décidé d'émettre un avis défavorable à l'adoption des crédits de l'environnement pour 2000.

Nomination de rapporteur

Au cours de la même réunion, la commission a désigné M. Marcel Vidal, rapporteur de la proposition de loi n° 38 (1999-2000) de MM. Simon Sutour, Raymond Courrière, André Vézinhet et les membres du groupe socialiste et apparentés, relative à la validation des admissions au concours d'entrée en deuxième année du premier cycle d'études médicales de l'Université de Montpellier I.

PJLF 2000 - Recherche scientifique et technique - Examen du rapport

Au cours d'une seconde réunion tenue dans l'après-midi, la commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Pierre Laffitte, sur les crédits pour 2000 de la recherche scientifique et technique.

M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis, a relevé que les crédits du budget civil de recherche et de développement (BCRD) pour 2000 s'élèveraient à 54,646 milliards de francs, soit une progression de 1,3 % par rapport à 1999, correspondant globalement à un maintien des moyens financiers de la recherche. Il a noté que cette évolution était comparable à la progression des dépenses civiles de l'Etat (+1,2 %), mais qu'elle était inférieure à l'augmentation du produit intérieur brut, qui est estimée à 2 % pour 2000.

Examinant ensuite les moyens en personnel, M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis, a relevé que le projet de loi de finances pour 2000 ne prévoyait pas de nouveaux postes de chercheurs, mais 18 créations de postes d'ITA (ingénieurs, techniciens, administratifs) ; il a rappelé que les années 1998 et 1999 avaient été marquées par la création de 500 postes de chercheurs et celle de 234 ITA.

Le rapporteur pour avis a précisé que le ministère estimait que les départs naturels (retraite, mobilité) de personnels permettront d'assurer en 2000, sans création d'emplois, un renouvellement d'environ 3 % des effectifs.

Il a noté que la priorité lui semblait devoir être, à l'heure actuelle, moins axée sur de nouvelles créations d'emplois permanents que sur une plus forte incitation à la mobilité des chercheurs d'une part entre les divers organismes de recherche et l'université, et, d'autre part, entre recherche publique et industrie. Cette mobilité des chercheurs publics devrait, selon lui, s'accompagner de meilleures possibilités d'accueil, pour des périodes limitées, de personnels divers -étudiants, chercheurs étrangers, chercheurs issus du secteur privé- par la création de contrats temporaires : à cet égard, l'action du ministère semble encore trop timide.

Abordant la politique de la recherche, M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis, a constaté que l'action d'orientation volontariste proclamée par M. Claude Allègre ne produisait pas tous les effets espérés.

Il a reconnu au ministre le mérite d'avoir défini certains axes stratégiques d'action en matière de recherche, rompant ainsi avec la politique antérieure qui se contentait de reconduire des crédits pour les institutions en place.

Il a salué les efforts du ministre pour " réorienter un budget qui avait dangereusement dérivé ", et privilégier les recherches en matière de nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC). La valorisation est également une de ses priorités, se substituant aux importants crédits consacrés à soutenir, sans grands effets, la recherche dans les grandes entreprises.

M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis, s'est félicité que le ministre appuie fortement la création d'une nouvelle section du CNRS consacrée aux NTIC, qui requièrent également des recherches poussées en amont, par exemple dans les domaines des nouveaux matériaux à utiliser en informatique ou de la cryptologie. Il a entièrement approuvé ces initiatives, car le très bas taux de chômage enregistré aux Etats-Unis est largement dû au développement des NTIC et des biotechnologies dans ce pays dont l'économie avait été, un temps, sérieusement menacée par la dynamique japonaise.

Il a estimé que l'inflexion française en faveur des NTIC devrait être relayée par les régions françaises, sur le modèle des remarquables résultats obtenus par le Land de Bavière qui, sous l'impulsion d'Edmund Staueber, consacrera près de 9 milliards de francs en 2000 à une " offensive en faveur des hautes technologies ".

Le rapporteur pour avis a relevé que les chiffres avancés dans le cadre des contrats de plan Etat-régions actuellement en discussion ne semblent pas être du même ordre de grandeur. Pourtant, a-t-il estimé, les régions, telles Provence-Alpes-Côte d'Azur et Rhône-Alpes, sont demanderesses, mais c'est la quote-part de l'Etat qui n'est pas à la hauteur des besoins.

Evoquant ensuite la politique en faveur des télécommunications et de l'espace, M. Pierre Laffitte a rappelé le souhait du ministre de développer ce qu'il a appelé " l'espace utile ", c'est-à-dire les actions de recherche permettant de contrer la très forte concurrence qui se développe dans ce domaine. Le rapporteur pour avis a précisé qu'il s'agissait notamment de soutenir la mise au point de nouveaux satellites de télécommunication, utilisés en constellation, mais pour lesquels la répartition des fréquences utiles est soumise à de fortes convoitises internationales. Il a relevé qu'en ce domaine seule une forte cohérence européenne permettrait de faire face à la pression américaine, mais qu'il n'était pas certain que cette cohérence se manifeste, malgré le projet GALILEO.

M. Pierre Laffitte a cependant estimé que le bilan de la politique du ministère en faveur de l'innovation était nuancé. Il a rappelé que la commission avait beaucoup oeuvré pour que la loi sur l'innovation ait pu être définitivement adoptée par le Parlement à la fin du mois de juin dernier, en étant approuvée par le Sénat à une quasi-unanimité.

Mais l'espoir que cette adoption serait le prélude à une opération majeure de ferme soutien aux entreprises innovantes, qui se traduirait en termes budgétaires dans le projet de loi de finances pour 2000, a été déçu.

Certes, les décrets d'application de la loi devraient, selon la promesse du ministre faite devant la commission des affaires culturelles, être tous parus d'ici la fin de l'année ; les incubateurs d'entreprises recevront 200 millions de francs en 2000, et les fonds de capital-risque, 600 millions de francs.

Le rapporteur pour avis a également rappelé que le concours d'entreprises innovantes avait rencontré un succès considérable, puisque 2.000 demandes de participation avaient été enregistrées, aboutissant à la sélection de 240 entreprises, ce qui constitue un bon début et démontre qu'il existe de fortes potentialités.

Il a cependant estimé qu'il fallait une meilleure prise en considération des districts d'innovation, comme ceux de Grenoble, de Sophia-Antipolis, de Toulouse, de Nancy, Metz, Rennes et d'Ile-de-France, pour leur permettre d'utiliser pleinement le réservoir d'inventivité qu'elles constituent. Il a souhaité que les " start-up " françaises, qui peuvent, comme on l'observe dans les régions les plus dynamiques du globe, jouer un rôle moteur dans le développement de l'activité, puissent être appuyées par des mesures fiscales spécifiques, comme les bons de souscription à la création d'entreprises, et il a noté que, faute de mesures de cette nature, on n'éviterait pas une fuite des cerveaux et des entrepreneurs.

Evoquant certains organismes de recherche particulièrement dignes d'être soutenus, comme l'Institut national de la recherche en informatique et en automatique (INRIA) et le Centre national d'études des télécommunications (CNET), il a déploré qu'ils ne bénéficient pas de moyens à la hauteur de leurs performances. L'INRIA, en particulier, qui a largement démontré sa capacité à former des ingénieurs capables de créer leur propre entreprise, devrait bénéficier de crédits supplémentaires pour accueillir temporairement des étudiants en fin d'études.

M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis, a regretté la multiplicité des organismes de consultation existant en matière de recherche, citant les exemples du Conseil supérieur de la recherche et de la technologie (CSRT), du Conseil national de la science ou encore du Conseil national d'évaluation de la recherche (CNER) et il a souhaité leur regroupement.

Il a conclu son exposé en proposant à la commission de s'en remettre à la sagesse du Sénat pour l'adoption des crédits de la recherche pour 2000.

Un débat s'est ensuite instauré.

M. Ivan Renar a évoqué les réserves que lui inspirait le projet de budget de la recherche, qui ne permet pas la résorption des nombreux personnels à statut précaire qui travaillent dans ce secteur. Il a également appelé de ses voeux l'organisation d'un débat parlementaire sur la nature du financement des grands équipements de recherche, ainsi que sur leur implantation.

M. Serge Lagauche a relevé, pour sa part, que le ministre avait tenté de faire évoluer des équipes de recherche, qui manquent parfois de dynamisme, et semblent plus se préoccuper de leur propre avenir que de celui de la recherche française. Revenant sur l'exemple de la Bavière cité par M. Pierre Laffitte, il s'est interrogé sur la possibilité de comparer le budget d'un land allemand à celui d'une région française, et a estimé que le financement de la recherche publique relevait davantage de l'Etat que des régions.

M. Albert Vecten a estimé que l'évolution de la recherche française dépendait moins de crédits supplémentaires que de l'établissement de fortes relations entre le secteur de la recherche et le développement industriel. Il a cité en exemple une fondation créée dans son département pour la valorisation de l'industrie agricole et alimentaire, qui est restée pour l'instant sans résultat concret. Il a donc déploré un manque de liaison entre chercheurs, universitaires et industriels.

M. Jean-Pierre Fourcade a déploré que le CNRS " écrase " la recherche française par la masse de ses crédits et de ses personnels, relevant qu'aucun organisme de ce type n'existe dans un autre pays européen comparable à la France. Il a rejoint M. Pierre Laffitte dans son jugement positif sur le rôle de l'INRIA en matière de créations d'entreprises. Au sujet du projet " Soleil ", il a rappelé que le conseil régional d'Ile-de-France avait exprimé sa disponibilité à financer le tiers de son coût total, estimé à 2 milliards de francs, et a regretté que cette disponibilité ne soit pas mise à profit pour la réalisation d'autres équipements de recherche. Il a également regretté que le projet " Diamond " n'ait pas fait l'objet d'un débat préalable permettant d'y voir plus clair sur la meilleure localisation de ce futur synchrotron.

M. Jacques Valade a également exprimé le souhait que l'action de l'INRIA soit mieux valorisée. S'agissant des grands équipements de recherche, il s'est interrogé sur les motifs qui avaient conduit le ministre Claude Allègre à se rallier au projet Diamond implanté en Grande-Bretagne, et il a noté que si l'on pouvait certes admettre le caractère " européen " d'un tel projet, il ne s'ensuivait pas qu'il ne pouvait pas être réalisé en France.

M. Ivan Renar est revenu sur ce sujet en déplorant également l'absence d'un débat préalable qui aurait permis d'éclairer les raisons de cette implantation.

Le président Adrien Gouteyron a estimé que le débat budgétaire devrait être l'occasion de poser à nouveau ces questions au ministre. Il a observé qu'il semblait avoir été a priori exclu que le futur synchrotron puisse être réalisé sur l'un des sites possibles en France. Il a approuvé le rapporteur dans son jugement sur le manque de cohérence entre la priorité donnée par M. Claude Allègre à l'innovation et les maigres moyens attribués par le budget pour 2000 à l'INRIA.

En réponse aux intervenants, M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis, a apporté les précisions suivantes :

- il s'est félicité que la nouvelle Direction générale de la recherche de la Commission européenne soit beaucoup plus ouverte au dialogue que l'ancienne Direction générale XII à laquelle elle se substitue. Il a estimé que les dépenses affectées à la recherche par le budget européen devraient être affectées en priorité, d'une part à la mobilité des chercheurs entre les laboratoires et les petites entreprises innovantes au sein de l'Union européenne et, d'autre part, au financement des grands équipements de recherche, dont l'Union européenne ne finance qu'un petit nombre, ce qui est regrettable ;

- abordant le problème posé par l'abandon du projet Soleil, il a fait valoir qu'au-delà du débat suscité par la localisation du projet Diamond qui s'y substituera, il faudrait proposer à l'Union européenne un certain nombre de grands projets, par exemple en matière de biotechnologies ou de sécurité alimentaire, dont certains pourraient être localisés en France ;

- le budget de la recherche pour 2000 comporte, certes, de bonnes orientations mais il faut regretter qu'elles ne se traduisent pas par un " souffle " plus marqué, notamment en faveur de la création de petites entreprises par des chercheurs, domaine dans lequel la France est en position d'infériorité marquée par rapport à ses principaux concurrents. Il a également énuméré d'autres domaines dans lesquels la commission pourrait inciter à des efforts plus importants, tels la recherche en matière de télécommunications, l'octroi de moyens supplémentaires à l'INRIA ou une relance de la recherche duale.

Suivant les propositions du rapporteur pour avis, la commission a décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat pour l'adoption ou le rejet des crédits de la recherche pour 2000.

PJLF 2000 - Enseignement supérieur - Examen du rapport

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Jacques Valade sur les crédits pour 2000 de l'enseignement supérieur.

M. Jacques Valade, rapporteur pour avis,
a estimé qu'avec 52,4 milliards de francs, l'enseignement supérieur apparaissait comme le parent pauvre du vaste département ministériel de l'éducation nationale, moins d'ailleurs du fait de la progression de ses crédits (2,6 %) que de l'absence de toute esquisse de transfert entre le budget de l'enseignement scolaire et celui de l'enseignement supérieur. Au-delà de l'évolution des crédits, il a constaté que l'enseignement supérieur ne faisait l'objet d'aucun grand projet mobilisateur.

Il a indiqué que la faible progression des crédits se répercutait naturellement sur les créations d'emplois prévues pour 2000 : 1.200 enseignants chercheurs, 500 personnels IATOS, dont seulement 80 pour les bibliothèques, soit un nombre d'emplois sensiblement inférieur à celui de 1999.

Il a ensuite indiqué que cette évolution des crédits devait être appréciée par rapport à la baisse non négligeable des effectifs étudiants qui se conjugue cependant avec une certaine progression des effectifs dans les filières sélectives ; cette décrue relative devrait s'accélérer à terme (-50.000 étudiants à l'horizon 2008).

Il a par ailleurs souligné le caractère préoccupant des orientations massives en STAPS (38.000 étudiants à la rentrée 1999), alors que le recrutement d'enseignants d'éducation physique et sportive ne représentait que 1.050 postes à la session de 1999, et a souhaité, outre un élargissement des débouchés de cette filière sportive, une régulation en amont des flux d'étudiants.

Il a évoqué la désaffection des bacheliers à l'égard des DEUG scientifiques et a estimé que la rénovation de cette filière, expérimentée dans quelques universités, ne saurait se substituer à une réflexion plus générale sur l'enseignement scientifique.

Le rapporteur pour avis a ensuite souligné la portée modeste de certaines réformes.

S'agissant de l'ouverture de l'enseignement supérieur à l'international, il a dénoncé les moyens trop limités de l'agence Edufrance qui lui paraissent insuffisants pour redonner à notre université la capacité d'accueillir de nouveaux étudiants étrangers. Il a souligné le retard de la France en ce domaine et évoqué l'implantation, selon des formules diverses, des universités anglo-saxonnes dans plusieurs pays européens.

Il a par ailleurs insisté sur le caractère largement virtuel d'un marché mondial de l'enseignement supérieur, la mobilité des étudiants étant en fait plus commandée par une logique de notoriété que par une logique de marché ; l'autonomie de nos universités est en outre trop limitée pour proposer des offres de formations spécifiques qui seraient évaluées par des organismes indépendants et internationaux.

Evoquant la mise en place progressive d'un espace universitaire européen, il a indiqué que le grade du mastaire avait enfin été consacré par le décret du 30 août 1999 ; il a par ailleurs noté que le rapprochement des grandes écoles et de l'université, prôné par le rapport Attali, devenait une réalité.

Concernant la professionnalisation des cursus universitaires, qui a fait l'objet dans le passé d'initiatives isolées, il a salué la naissance de la nouvelle licence universitaire qui s'accompagne cependant de nombreuses incertitudes ; il serait souhaitable que le ministre puisse les lever, et d'abord celle relative au caractère éventuellement sélectif de cette nouvelle filière.

Il a noté que l'avenir de la filière technologique restait incertain, en particulier celui des IUT ; il a exposé les inquiétudes exprimées par les directeurs d'IUT (menaces sur l'autonomie de ces instituts, réduction du volume des heures complémentaires, conditions de délivrance de la nouvelle licence professionnelle, articulation du DUT avec les nouveaux cursus européens) et a rappelé son attachement aux IUT qui ont fait la preuve de leur efficacité en mêlant la tradition universitaire et un enseignement appliqué, ces instituts jouant par ailleurs un rôle majeur dans l'aménagement du territoire. Il a également souligné que l'université était encore bien loin de bénéficier de la manne supposée de la formation continue.

Le rapporteur pour avis a ensuite rappelé la portée modeste du plan social étudiant et a signalé la création bienvenue d'une bourse destinée à remédier aux situations de perte brutale de bourse sur critères sociaux.

Il a annoncé la création de 200 bourses supplémentaires de mérite et rappelé que 7,135 milliards de francs avaient été affectés en 1999 aux 410.000 étudiants boursiers, 677 millions de francs devant s'y ajouter à la rentrée 2000.

Il a cependant regretté qu'aucune réflexion n'ait été engagée pour réduire la part trop importante des aides indirectes accordées sans conditions de ressources et pour définir un statut spécifique aux étudiants, afin de favoriser leur autonomie.

Evoquant enfin le plan U3M, il a rappelé que celui-ci s'inscrivait, à la différence du schéma Université 2000, dans un contexte de baisse démographique et dans une approche plus qualitative.

Après avoir exposé les grandes lignes de ce plan, il a souligné l'importance des crédits budgétaires engagés pour le désamiantage du campus de Jussieu, 600 millions de francs étant prévus dans le projet de loi de finances pour accompagner la montée en charge du chantier.

Il a exprimé le souhait que le ministre apporte lors du débat budgétaire des précisions sur le coût total du plan U3M, et surtout sur la contribution qui sera demandée aux régions, celles-ci n'ayant guère de latitude pour remettre en cause les priorités de ce programme ; il a exprimé la crainte que l'effort demandé aux régions ne conduise celles-ci à procéder à des arbitrages douloureux.

Il a enfin souhaité que ce débat soit l'occasion pour le ministre de fournir des indications sur les orientations du plan U3M, à la suite de la publication du rapport d'étape de son comité stratégique, ces orientations étant à l'évidence susceptibles d'avoir des incidences sur le rôle des premiers cycles et sur le maillage universitaire du territoire.

Compte tenu de la modestie des moyens annoncés, de l'absence de transfert interne au sein de ce budget et d'une définition insuffisante des objectifs, il a proposé à la commission de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits de l'enseignement supérieur pour 2000.

Un large débat s'est alors instauré.

M. Ivan Renar a estimé qu'il convenait d'analyser les raisons de la désaffection constatée à l'égard des études scientifiques, qui résultent d'abord, selon lui, d'un enseignement mal adapté au lycée. Il a observé que l'afflux des bacheliers vers les filières sportives, dans sa région, se conjuguait à une forte orientation vers les filières " culturelles " qui offrent encore moins de débouchés professionnels.

Il a souhaité que l'enseignement supérieur relève le défi de la qualité, tant en termes d'accueil et d'orientation des étudiants que de contenu des formations, cet objectif ne nécessitant selon lui que des moyens limités.

Après avoir souligné la part trop réduite de l'Etat dans le financement du plan U3M, il a indiqué que sa région n'était pas en mesure de supporter les deux tiers des dépenses, qui d'ailleurs ne relèvent pas de la compétence régionale.

Il a enfin souhaité que soit engagé un grand débat sur la place de l'université dans la cité.

M. James Bordas a rappelé le retard pris dans l'exécution du schéma Université 2000 qui a sollicité à l'excès les collectivités locales et les grandes villes. Il a souhaité obtenir des précisions sur l'état d'achèvement de ce schéma et a estimé que le plan U3M était d'ores et déjà mort-né, les régions n'étant pas, selon lui, capables d'assurer un tel financement.

M. Fernand Demilly s'est également inquiété du financement régional du plan U3M et a rappelé que la seule modernisation des collèges de son département devrait coûter quelque 700 millions de francs, alors qu'un point de fiscalité locale ne représente que 8 millions de francs.

M. Serge Lagauche a fait observer qu'un accueil satisfaisant des étudiants supposait une rénovation de fond de notre système universitaire.

Il a ajouté que certaines d'entre elles étaient tentées de " faire du chiffre " et que de nombreux étudiants ne donnaient pas suite à leur inscription.

Il s'est demandé s'il convenait d'agrandir les universités existantes pour accueillir en premier cycle des bacheliers mal préparés à l'enseignement supérieur et s'il ne fallait pas plutôt multiplier les filières courtes et professionnalisées.

Il a estimé que la désaffection constatée à l'égard de la filière scientifique pouvait s'expliquer par la difficulté de ces études, et rappelé par ailleurs que les bacheliers de la série S se dirigeaient plus volontiers vers les grandes écoles.

Soulignant l'encadrement insuffisant des premiers cycles universitaires, il a fait observer que ces problèmes n'étaient pas de nature à être seulement réglés par une augmentation des crédits et qu'il fallait engager une réflexion plus générale sur l'accueil des bacheliers à l'université.

M. Albert Vecten a indiqué que les collectivités territoriales étaient sans doute disposées à participer au financement des formations supérieures, pour peu que celles-ci soient adaptées aux besoins régionaux et offrent de véritables débouchés, alors que trop d'emplois ne sont pas pourvus.

Il a enfin souhaité un développement de la formation continue, celle-ci ayant également pour conséquence de réduire la durée de la formation supérieure initiale.

M. Pierre Martin a évoqué l'opportunité d'une certaine sélection au cours des études universitaires. Il a expliqué l'importance de l'échec en premier cycle par la dévalorisation du baccalauréat et une orientation inexistante des bacheliers.

Il a regretté que trop d'étudiants entrent dans l'enseignement supérieur sans motivation et pour " passer le temps ".

Mme Hélène Luc a estimé que la sélection n'était pas une solution en ce domaine et qu'il convenait de donner aux jeunes, dans l'enseignement secondaire, une solide formation générale, qui leur permettra notamment de faire face aux inévitables changements de métiers.

Répondant à ces interventions, M. Jacques Valade, rapporteur pour avis, a notamment apporté les précisions suivantes :

- le baccalauréat constitue désormais un diplôme de fin d'études, un peu comme autrefois le certificat d'études primaires ; ce diplôme ne devrait pas être considéré comme impliquant systématiquement un passage dans l'enseignement supérieur, sauf à envisager des structures d'accueil adaptées pour les bacheliers professionnels ;

- il ne serait pas inconcevable d'envisager une plus grande reconnaissance du baccalauréat pour les jeunes qui souhaitent entrer dans la vie active et qui sont susceptibles de poursuivre ultérieurement leurs études par le biais de la formation continue ;

- la désaffection à l'égard des filières scientifiques se traduit également par un afflux des bacheliers " S " dans les formations juridiques et économiques qui offrent de meilleures perspectives de carrière ;

- il convient d'établir un équilibre réaliste dans le financement du plan U3M entre l'Etat et les régions, la charge incombant à ces dernières devant être adaptée à leurs capacités contributives, sauf à observer des transferts de charges extravagants : la recherche d'une clé de répartition réaliste devrait faire l'objet d'un débat national et par filières de formation, privilégiant par exemple les formations de proximité afin de tenir compte de la démocratisation de l'enseignement supérieur.

A l'issue de ce débat, suivant les propositions de son rapporteur pour avis, la commission a décidé de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits pour 2000 de l'enseignement supérieur.

PJLF 2000 - Enseignement technique - Examen du rapport

La commission a enfin procédé à l'examen du rapport pour avis de Mme Hélène Luc sur lescrédits pour 2000 de l'enseignement technique.

Abordant en premier lieu les grandes lignes de la réforme de l'enseignement professionnel intégré, Mme Hélène Luc, rapporteur pour avis, a rappelé les étapes qui ont permis au ministre d'annoncer, depuis la table ronde de mai 1998, une véritable refondation de cet enseignement : rapport Meirieu, annonce de la réforme des lycées, propositions du rapport Marois, plan d'urgence pour l'avenir des lycées, publication de la Charte, lancement de la campagne de promotion animée par M. Aimé Jacquet, colloque de Lille...

Elle a ensuite exposé les grandes lignes de la charte dite de l'enseignement professionnel intégré, qui a été présentée le 24 juin dernier, ses objectifs étant de concilier les impératifs de la formation générale, de la formation professionnelle et de l'environnement économique.

La réalisation de ces objectifs passe par un apprentissage de la citoyenneté et l'acquisition d'une culture générale permettant des réorientations.

L'intégration de l'enseignement professionnel par rapport à l'éducation nationale, à la formation générale et à l'entreprise suppose un partenariat avec les entreprises, la négociation de périodes de formation en entreprise négociées avec les branches professionnelles et l'établissement d'un contrat de formation à dimension pédagogique entre l'élève, son établissement et l'entreprise.

Mme Hélène Luc, rapporteur pour avis, a ajouté que cette intégration impliquait aussi la désignation d'un coordonnateur au sein des établissements, l'utilisation par les PME-PMI des plates-formes technologiques des lycées professionnels et l'institution d'un coordonnateur au niveau académique, chargé de vérifier l'adéquation des formations à l'emploi local.

Elle a indiqué que la réforme se traduirait également par une rénovation des formations conduisant aux diplômes professionnels, celle-ci consistant notamment à consacrer un temps plus important aux projets pluridisciplinaires et à l'aide aux élèves en difficulté. Enfin, une réflexion sera engagée sur le statut des lycéens professionnels, sur leur orientation et sur leurs débouchés.

Pour leur part, les futurs professeurs de lycée professionnel devraient bénéficier d'une formation pédagogique adaptée en IUFM et de stages en entreprises.

Le rapporteur pour avis a indiqué que cette charte était expérimentée dans quelques établissements volontaires, le colloque de Lille ayant permis de préciser certaines de ses mesures, et notamment l'enrichissement du contenu des formations.

Elle a cependant regretté que ce colloque n'ait pas suffisamment abordé le problème des élèves en difficulté, les questions de la gratification des stagiaires, de la revalorisation des bourses et de la réduction des horaires des enseignants.

Elle a ensuite rappelé l'impact de la campagne de promotion animée par M. Jacquet, qui s'est traduite dans certaines académies par une hausse de 15 % des candidatures en lycée professionnel : elle a exprimé le regret que cette campagne n'ait pas été assortie de moyens correspondants, 2.000 postes restant non pourvus deux mois après la dernière rentrée.

Elle a ensuite constaté que les objectifs ambitieux du Gouvernement ne se retrouvaient pas dans les crédits prévus pour 2000, qui s'élèveront à 37,697 milliards de francs contre 37,148 milliards de francs en 1999.

Ces crédits permettront cependant de créer 1.100 emplois de PLP2 et 96 emplois de personnels non enseignants.

Les mesures de revalorisation permettront de transformer les 2.086 derniers emplois de PLP1 en autant d'emplois de second grade, pour un coût de 18,95 millions de francs.

En dépit de ces avancées significatives, Mme Hélène Luc, rapporteur pour avis, a jugé ce budget quelque peu insuffisant au regard des ambitions de la réforme de l'enseignement professionnel.

Abordant ensuite la nécessaire rénovation de la voie technologique, elle a rappelé que cette filière accueillait 30 % des effectifs des lycées et préparait à quatre baccalauréats diversifiés autour de 21 diplômes différents.

Afin de réduire cette " balkanisation " technologique, le recteur Forestier a proposé dans son rapport de développer notamment les baccalauréats scientifiques généraux et technologiques et de réduire la progression des baccalauréats tertiaires.

Soulignant l'intérêt de ces propositions, elle a estimé qu'il conviendrait aussi de favoriser une meilleure orientation des élèves fragiles vers les séries technologiques, de mieux prendre en compte l'hétérogénéité des élèves et de développer les débouchés post baccalauréat dans certaines séries.

Elle a par ailleurs jugé nécessaire de renforcer la formation générale dans les baccalauréats professionnels afin d'assurer une égale dignité entre les filières et s'est félicitée de la création d'une nouvelle licence professionnelle qui permettra de réduire une ségrégation qui n'a plus lieu d'être dans l'enseignement supérieur.

Elle a ensuite rappelé que l'enseignement professionnel était aussi un lieu d'accueil pour les élèves en difficulté et que l'effort entrepris pour diminuer le nombre des sorties sans qualification du système éducatif devait être poursuivi.

Elle a ainsi détaillé les divers dispositifs qui concourent à cet accueil : programme " nouvelles chances ", classes et internats relais, mission générale d'insertion de l'éducation nationale, sections d'enseignement général et professionnel adapté, groupes " nouvelles technologies appliquées " et classes de troisième à option technologique qui sont appelées à se substituer aux classes de technologie des collèges.

Elle s'est cependant interrogée sur le caractère peut-être trop ambitieux des objectifs assignés à certaines de ces structures, qui accueillent le plus souvent des élèves en très grande difficulté scolaire.

Elle a enfin développé les raisons pour lesquelles l'enseignement professionnel se devait de développer des formations d'excellence, compte tenu notamment de la reprise économique qui se traduit par une forte demande de main d'oeuvre qualifiée, cette demande appelant une actualisation des formations, notamment vers les technologies nouvelles, et une adaptation aux évolutions de l'emploi et des métiers.

Elle a indiqué que le développement de la formation générale dans ces formations devrait permettre une orientation vers l'enseignement supérieur, au moyen de passerelles adaptées et faciliterait des reconversions professionnelles futures.

Elle a appelé de ses voeux un système d'aides spécifique aux lycéens professionnels afin de leur permettre de choisir leur orientation en toute liberté : revalorisation des bourses pour couvrir les dépenses d'équipement et de stages, création d'une allocation de rentrée.

Elle a estimé qu'une gratification des stagiaires s'imposait à l'évidence, compte tenu de l'origine souvent modeste des élèves et de la durée allongée des nouveaux stages en entreprise, une telle gratification devant, à son sens, être prévue dans la convention nationale type de stage.

Elle a également proposé diverses mesures tendant à rendre plus attractive la fonction de professeur de lycée professionnel, qui fait aujourd'hui l'objet d'une réelle désaffection, et elle est convenue que le recours aux professeurs associés, sous réserve d'une formation pédagogique satisfaisante, était nécessaire en attendant que l'élargissement des concours de recrutement produise ses effets.

Elle a enfin estimé nécessaire d'instituer une véritable programmation budgétaire pluriannuelle pour l'enseignement professionnel, celle-ci lui paraissant indispensable pour mettre en oeuvre la réforme de l'enseignement intégré et procéder aux recrutements indispensables qui permettront de répondre aux besoins de formation exprimés par les jeunes.

Sous réserve de ces observations, elle a proposé à la commission de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de l'enseignement professionnel pour 2000.

Un large débat s'est alors instauré.

Soulignant l'intérêt de l'exposé de Mme Hélène Luc, M. Jacques Valade s'est interrogé sur l'articulation des formations technologiques et professionnelles avec les filières courtes de l'enseignement supérieur et a souligné les limites de la professionnalisation des cursus.

M. Fernand Demilly a insisté sur le déphasage existant encore entre les formations et les besoins des entreprises et a constaté notamment un déficit de candidats dans certaines disciplines médicales, un manque de téléopérateurs formés aux nouvelles technologies, un besoin de main d'oeuvre qualifiée dans l'industrie aéronautique.

M. James Bordas a pour sa part indiqué que les métiers du bâtiment souffraient d'une désaffection des jeunes et a souligné la nécessité d'une information en amont des familles pour sensibiliser celles-ci à l'intérêt des formations technologiques.

M. Serge Lagauche a rappelé que, par tradition, le secteur du bâtiment avait recours à une main d'oeuvre immigrée et qu'il convenait de dispenser une formation adaptée et des conditions de travail acceptables pour attirer les jeunes.

Il a également indiqué que certaines disciplines médicales, particulièrement contraignantes en termes d'horaires, étaient aujourd'hui délaissées.

Il a enfin souhaité une multiplication des filières technologiques, une meilleure information en direction des parents d'élèves, et il a jugé nécessaire que les efforts des enseignants motivés qui font découvrir à leurs élèves l'intérêt du métier soient pris en compte.

M. Albert Vecten a fait observer que les conseillers d'orientation étaient en nombre insuffisant et qu'il faudrait leur donner une connaissance plus concrète des possibilités d'emploi, notamment grâce à des stages en entreprise. Il a noté que le renforcement de cette fonction d'orientation était d'autant plus nécessaire que les enfants ignorent désormais la réalité des activités professionnelles, y compris celles de leurs parents, alors qu'ils avaient une perception plus directe des métiers d'autrefois.

Répondant à ces interventions, Mme Hélène Luc, rapporteur pour avis, a notamment apporté les précisions suivantes :

- l'adaptation des formations aux nouveaux métiers porteurs d'emplois ne se réalise que trop lentement ;

- la licence professionnelle devrait contribuer à renforcer l'intérêt des élèves pour les formations technologiques et professionnelles ;

- la fonction d'orientation doit être développée par une multiplication des conseillers d'orientation et des centres d'information et d'orientation, ainsi que par des visites de lycées professionnels et d'entreprises ;

- les stages sont particulièrement appréciés par les lycéens professionnels et par les entreprises qui souhaitent fréquemment conserver les élèves qu'elles ont accueillis.

La commission a ensuite décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat pour l'adoption ou le rejet des crédits pour 2000 de l'enseignement technique.