COMMISSION MIXTE PARITAIRE

Mardi 19 juillet 2022

- Présidence de M. Sacha Houlié, député, président -

La réunion est ouverte à 14 heures.

Commission mixte paritaire sur la proposition de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière de prévention de la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne

Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution, et à la demande de Mme la Première ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière de prévention de la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne s'est réunie à l'Assemblée nationale le 19 juillet 2022.

Elle a procédé à la désignation de son bureau, constitué de M. Sacha Houlié, député, président, M. François-Noël Buffet, sénateur, vice-président, M. Benjamin Haddad, député, étant désigné rapporteur pour l'Assemblée nationale ; Mme Nathalie Goulet, sénateur, rapporteur pour le Sénat.

La commission mixte paritaire procède ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.

M. Sacha Houlié, député, président. - Cette proposition de loi, déposée le 11 janvier sur le bureau de l'Assemblée nationale par notre ancienne collègue Aude Bono-Vandorme, qui était également la rapporteure du texte en première lecture, et par les membres du groupe La République en marche de la XVe législature, a été adoptée par l'Assemblée nationale le 16 février, avant la suspension de nos travaux ; le Sénat l'a ensuite adoptée le 12 juillet.

La proposition de loi comporte un article unique, sur lequel les deux assemblées ont largement convergé. Il nous reste à trouver des rédactions communes pour certains alinéas.

Mme Nathalie Goulet, rapporteur pour le Sénat. - Je remplace notre collègue André Reichardt, à qui je souhaite un prompt rétablissement, ainsi qu'à notre collègue député Didier Paris, également empêché.

Cette proposition de loi est technique et la marge de manoeuvre laissée par le règlement européen est assez étroite et définie par ce texte. Sur le fond, cette proposition de loi fait plutôt consensus, mais il reste des ajustements à opérer sur quelques points.

La nouvelle procédure d'injonction de retrait devrait permettre de mieux lutter contre la diffusion de contenus à caractère terroriste sur internet au sein de l'Union européenne, et je me réjouis que nous soyons parvenus à un accord qui conserve les avancées du Sénat.

Les autorités compétentes désignées sont celles qui ont déjà l'expérience des procédures de retrait en application de l'article 6-1 de la loi pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN). Le suppléant pourra exercer sa mission auprès de la personnalité qualifiée de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) quel que soit le fondement juridique de la procédure. Enfin, et surtout, toutes les injonctions de retrait seront transmises à la personnalité qualifiée, qui pourra superviser l'ensemble des demandes de retrait concernant des contenus terroristes et saisir le président du tribunal administratif d'une injonction de retrait nationale si celle-ci s'avérait non conforme.

Le point sur lequel nous avions encore des divergences était la procédure de recours contre les décisions du président du tribunal administratif. Nous avions souhaité que ces décisions, prises dans l'urgence, dans un délai de soixante-douze heures, ne retrouvent pas le cours normal des appels devant les cours administratives d'appel, dont le délai moyen de traitement s'élève à dix mois. C'est la raison pour laquelle le Sénat avait envisagé un appel direct devant le Conseil d'État dans un délai très réduit, afin d'aboutir rapidement à une décision définitive permettant, le cas échéant, le rétablissement du contenu supprimé.

Dans un esprit de compromis, nous avons accepté de renoncer à cette procédure dérogatoire et de redonner compétence à la cour administrative d'appel, à condition toutefois que les délais soient brefs. Nous proposons ainsi un délai de dix jours pour faire appel et un délai maximum d'un mois pour trancher le contentieux - bien que cela paraisse long, ce serait, nous dit-on, le délai requis pour faire respecter le principe du contradictoire.

Serait explicitement rappelée, par ailleurs, l'existence des procédures de référé-suspension et de référé-liberté, ce dernier référé permettant d'obtenir une décision très rapide en cas d'atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'expression, à laquelle nous sommes tous attachés.

Le reste des modifications proposées est davantage d'ordre légistique, à l'exception du remplacement du recours en réformation par un recours plus classique en annulation. En effet, les juridictions administratives ne s'estiment pas compétentes pour prendre des décisions à la place de la personnalité qualifiée de l'ARCOM ou de l'ARCOM elle-même.

Voilà les termes de l'accord qu'avec Benjamin Haddad, nous vous proposons pour permettre la mise en application du règlement européen du 29 avril 2021.

M. Benjamin Haddad, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je souhaite aussi un prompt rétablissement à nos collègues Didier Paris et André Reichardt, que je remercie pour tout leur travail sur ce texte.

Nous avons l'honneur de participer à la première commission mixte paritaire (CMP) de la XVIe législature. J'espère que l'issue favorable de cette CMP sera de bon augure pour les suivantes - elles furent souvent conclusives, et c'est heureux, durant la précédente législature.

La proposition de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière de prévention de la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne a été déposée sous la précédente législature par la députée Bono-Vandorme, dont je souhaite saluer le travail et l'engagement en la matière.

Ce texte, sous l'impulsion d'un droit européen de plus en plus protecteur, a pour ambition de mieux lutter contre la propagation des contenus à caractère terroriste. Il décline, pour y parvenir, le dispositif européen de retrait ou de blocage de tels contenus dans l'heure - la fameuse golden hour - qui est prévu par le règlement relatif à la lutte contre la diffusion des contenus à caractère terroriste en ligne, entré en vigueur le 7 juin dernier.

Les fournisseurs de services d'hébergement et de contenus sont ainsi contraints de retirer ou de bloquer dans les soixante minutes les contenus faisant l'objet d'une injonction émise par les autorités des États membres, tout en bénéficiant de garanties solides contre les atteintes à la liberté de communication.

Après son passage à l'Assemblée nationale, où il avait été enrichi par notre commission des lois, le texte a été modifié par le Sénat, en commission à l'initiative de son rapporteur, André Reichardt, et en séance publique par deux amendements du Gouvernement.

Ces ajouts n'avaient pas vocation à modifier en profondeur ce texte, dont nous partageons tous l'objectif, mais à contribuer à l'améliorer, notamment sous l'angle de l'intelligibilité du dispositif. Je m'en réjouis, car la clarté, en particulier s'agissant de dispositions techniques qui sont parfois complexes, est un gage essentiel de qualité de la loi.

À l'issue de l'examen de la proposition de loi par nos deux chambres, les divergences étaient minimes. Seule une difficulté persistait, au sujet des modalités d'appel des décisions de blocage ou de retrait des contenus, après un premier examen au fond par le juge administratif.

Alors que le Sénat souhaitait initialement confier cette prérogative au Conseil d'État, statuant dans un délai de soixante-douze heures, nos travaux communs ont abouti à une solution alternative permettant d'éviter la multiplication des voies d'exception. L'appel, dans la rédaction qui vous est soumise, sera formé auprès des cours administratives d'appel. La durée qui leur sera laissée pour statuer sera néanmoins aménagée, puisqu'elles devront rendre une décision dans un délai d'un mois.

Nous avons également souhaité rappeler dans la proposition de loi que le recours au référé-liberté demeurera possible dans les conditions de droit commun pour les fournisseurs de services d'hébergement et les fournisseurs de contenus.

Je tiens à remercier le rapporteur de la commission des lois du Sénat, André Reichardt, pour son écoute et sa disponibilité, qui ont permis d'aboutir à un compromis.

Cette proposition de loi, renforcée lors de son examen par le Parlement, tend à instaurer un dispositif à la fois efficace et proportionné, respectueux des libertés individuelles et du droit européen. J'espère que le texte que nous vous proposons recueillera massivement vos suffrages.

Mme Élisa Martin, députée. - Les membres du groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale de l'Assemblée nationale ne sont pas, d'une manière générale, favorables à cette proposition de loi.

Nous nous interrogeons, tout d'abord, sur l'efficacité et l'applicabilité du texte, compte tenu, en particulier, des délais imposés aux hébergeurs de contenus.

Par ailleurs, la proposition de loi confère à ces derniers une responsabilité qui nous paraît très grande et difficile à exercer : ils devront juger seuls du caractère terroriste des troubles à l'ordre public susceptibles d'exister et ils pourront faire l'objet de peines d'emprisonnement.

Plus encore, l'absence du juge judiciaire dans cette procédure d'exception ne nous paraît pas très démocratique et pourrait conduire à des difficultés ou à des décisions qui ne seraient pas de bon aloi.

Les modifications souhaitées par le Sénat ne changent pas, cela a été dit, la nature du texte. Elles permettent peut-être de donner un tout petit peu plus de temps, ce qui est en soi bienvenu, mais ne règlent pas les problèmes de fond que pose la rédaction de la proposition de loi.

La commission mixte paritaire a ensuite procédé à l'examen des dispositions restant en discussion.

Article unique

L'article unique est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

La commission mixte paritaire adopte, ainsi rédigées, les dispositions restant en discussion de la proposition de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière de prévention de la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne.

La réunion est close à 14 h 15

Mercredi 20 juillet 2022

- Présidence de M. Claude Raynal, président de la commission des finances du Sénat -

La réunion est ouverte à 17 h 30.

Commission mixte paritaire sur le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021

Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande du Premier ministre, la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021 se réunit au Sénat le mercredi 20 juillet 2022.

Elle procède tout d'abord à la désignation de son Bureau, constitué de M. Claude Raynal, sénateur, président, de M. Éric Coquerel, député, vice-président, de M. Jean-François Husson, sénateur, rapporteur pour le Sénat, et de M. Jean-René Cazeneuve, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale.

La commission mixte paritaire procède ensuite à l'examen des dispositions du projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021.

M. Claude Raynal, sénateur, président. - Je veux d'abord dire le plaisir que nous avons toujours à rencontrer de nouveaux parlementaires lors des commissions mixtes paritaires (CMP) et à les accueillir pour la première fois dans la salle de la commission des finances du Sénat. Je salue également nos collègues députés plus expérimentés.

En application de l'article 45 de la Constitution, nous voici réunis en commission mixte paritaire afin de proposer un texte sur les dispositions du projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021 restant en discussion.

Le Sénat a marqué son mécontentement quant au report du dépôt du projet de loi. Si celui-ci est traditionnel lors des années d'élections, il a été particulièrement important cette année. C'est d'autant plus regrettable que la majorité gouvernementale n'a pas changé depuis la fin du mois d'avril. En disposant des documents au mois de juin, nous aurions pu travailler dans l'esprit de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) révisée - le rapporteur général du Sénat et moi-même l'avions approuvée, même si toutes ses dispositions ne nous paraissaient pas d'une utilité parfaite -, c'est-à-dire en nous donnant du temps pour analyser les choses. Au lieu de cela, nous avons eu une demi-journée... Nous espérons sincèrement que c'est la dernière fois que les choses se passent ainsi.

Le projet de loi initial comportait 8 articles, dont l'article liminaire, tandis que le texte adopté par l'Assemblée nationale en comptait 9. Le Sénat l'a, quant à lui, rejeté. Tous les articles restent, par conséquent, en discussion.

Dans ces conditions, nos rapporteurs devraient pouvoir nous dire rapidement s'il est envisageable de parvenir à un accord...

M. Éric Coquerel, député, vice-président. - Je suis très heureux de participer à cette première CMP depuis le début de la législature. Je remercie le Sénat de son accueil.

Je partage votre préoccupation concernant la LOLF et la question du respect des délais.

Nous aurons l'occasion de nous retrouver prochainement, au début du mois d'août, pour la CMP sur le projet de loi de finances rectificative pour 2022, pour laquelle nous vous accueillerons à l'Assemblée nationale, conformément à la règle de l'alternance entre nos deux assemblées.

Je laisse la parole à nos rapporteurs respectifs. Je pense que nous serons rapidement fixés sur la possibilité d'un accord...

M. Jean-François Husson, rapporteur pour le Sénat. - Je m'associe aux mots de bienvenue du président.

Le résultat des votes est sans appel.

Je ne reviendrai pas sur les conditions dans lesquelles le texte nous a été transmis. Je veux dire quelques mots sur les raisons qui nous ont conduits à le rejeter, malgré de bons résultats économiques, même si nos performances sont plutôt moins bonnes que ce que dit le Gouvernement et, en tout état de cause, moins bonnes que celles de nos partenaires européens.

Ce rattrapage économique a eu un coût par ailleurs : celui de la dégradation significative des comptes publics. Je ne rappellerai pas les chiffres : nous les avons tous en tête.

Rétrospectivement, on peut observer que l'année 2021 a préfiguré un certain nombre des chocs économiques que nous subissons en 2022 : choc d'approvisionnement en matières premières, choc sur l'évolution des prix, choc sur les marges des entreprises et choc sur le coût de financement de la dette.

Dans ce contexte, la situation de nos finances publiques est la suivante. Les recettes publiques ont été sous-évaluées lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative (PLFR) de fin de gestion 2021. On évoque aujourd'hui une « manne » de 30 milliards d'euros supplémentaires, mais la prévision de croissance du Gouvernement pour 2021 était de 6,25 %, quand on savait que, mécaniquement, elle s'établirait à au moins 6,6 %. Si les dépenses publiques sont inférieures de 10 milliards d'euros à la prévision retenue dans le PLFR de fin de gestion, leur montant nous éloigne encore fortement des objectifs inscrits en loi de programmation des finances publiques.

Notre déficit est principalement supporté par l'État, tandis que les collectivités locales parviennent quasiment à l'équilibre et que les administrations de sécurité sociale ont divisé leur déficit par plus de deux. Quant à notre endettement public, il reste à un niveau très élevé en comparaison européenne, puisqu'il est de plus de 40 points supérieur à celui de l'Allemagne.

S'agissant du budget de l'État, je rappellerai juste que le déficit s'établissait, en 2021, à plus de 170 milliards d'euros.

Au total, le surcroît de dépenses entre 2019 et 2021 est plus de trois fois supérieur aux sommes qui avaient été mises en oeuvre lors de la crise financière de 2008 à 2010.

Enfin, nous déplorons le montant très élevé des reports de crédits : ils se sont élevés à plus de 36 milliards d'euros de 2020 sur 2021, alors que, depuis l'entrée en vigueur de la LOLF, le montant des crédits reportés chaque année avait toujours été inférieur à 3,8 milliards d'euros.

Convenez qu'il soit difficile, dans ces conditions, de considérer qu'il y a là « bonne gestion »... Je regrette que le Gouvernement s'exonère des règles de la loi organique - je pense notamment aux principes de spécialité et d'annualité -, tout en appelant à la rigueur des comptes.

Au regard de ces constats, le Sénat n'a pas adopté le présent projet de loi de règlement. Par ailleurs, je rappelle qu'il n'avait pas voté le projet de loi de finances initiale pour 2021, qu'un certain nombre de libertés ont été prises au cours de l'année par rapport aux objectifs et que nous avions également exprimé notre forte opposition au versement d'une indemnité inflation lors du second projet de loi de finances rectificative pour 2021, opposition qui avait été balayée d'un revers de main à l'Assemblée nationale.

Notre rejet du projet de loi de règlement a été massif : seule une cinquantaine de sénateurs l'ont voté. Je dois cependant dire, par honnêteté, que les raisons de ce rejet ont été diverses.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Monsieur le rapporteur pour le Sénat, je partage votre constat sur la dégradation des comptes publics en 2021. Chacun en connaît les causes principales : une pandémie, qui a coûté cher en crédits d'urgence ; un plan de relance substantiel, pour lequel l'année 2021 a été la première année de plein décaissement ; un début d'envolée des prix, qui a conduit à de premières mesures de protection des Français ; une mise en oeuvre des lois de programmation fidèle au vote des parlementaires.

Je vous trouve un peu sévère, car le rebond de notre économie a été bien meilleur que dans la majorité des autres pays. Nous faisons partie des pays qui s'en sortent le mieux par rapport à 2019.

Tous les choix budgétaires que j'ai évoqués étaient justifiés selon moi. Je rencontre peu de parlementaires qui estiment qu'il n'aurait pas fallu prendre telle ou telle mesure... Je crois qu'il y a au contraire une certaine unanimité sur les dispositions qui ont été prises pour essayer de préserver notre économie et nos concitoyens dans la crise.

Vous avez parfaitement raison, les collectivités territoriales ont très bien passé cette crise. Il faut dire que nous avons mis les moyens pour les soutenir ! Elles terminent l'année 2021 très correctement.

L'année 2021 est une année hors norme. Par définition, on ne peut pas demander à cet exercice d'être le reflet d'une politique budgétaire de rétablissement des finances publiques, que j'appelle moi aussi de mes voeux.

Vous avez fait valoir les pratiques budgétaires, comme celle des reports massifs, qui atténuent la portée de l'autorisation budgétaire votée par le Parlement. Je la regrette également, mais il faut reconnaître qu'il s'est passé, en 2020 et 2021, un certain nombre d'événements qu'il était très délicat de prévoir à l'avance.

Le texte qui nous est soumis se borne à prendre acte des résultats comptables de l'année 2021. Ne nous trompons pas d'exercice : il ne s'agit en aucune manière d'approuver la gestion du Gouvernement. Il faut remonter au milieu du XIXe siècle pour trouver une loi de règlement qui n'ait pas été adoptée...

En outre, je ne crois pas qu'il soit de bonne pratique de priver le pays et son administration, face aux observateurs et investisseurs internationaux, du texte qui grave ces résultats dans le marbre législatif.

L'Assemblée nationale a voté ce texte ; le Sénat l'a rejeté. Chacun l'a compris, nous ne nous mettrons pas d'accord. Je vous propose d'en prendre acte sans délai supplémentaire.

Au demeurant, il est arrivé, dans les années passées, que le Sénat rejette le projet de loi de règlement sans que cela empêche des CMP conclusives sur les PLFR durant l'été... C'est une note d'espoir pour notre prochaine rencontre !

Mme Isabelle Briquet. - Si le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain n'a pas voté le projet de loi, c'est pour des motivations différentes de celles qu'a exprimées le rapporteur pour le Sénat. Nous avons pu développer les raisons de notre rejet lors de l'examen du texte en séance publique.

M. Claude Raynal, sénateur, président. - Reconnaissons au rapporteur pour le Sénat de l'avoir précisé.

La commission mixte paritaire constate qu'elle ne peut parvenir à l'adoption d'un texte commun sur le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021.

La réunion est close à 17 h 45.

Jeudi 21 juillet 2022

- Présidence de M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois -

La réunion est ouverte à 14 heures.

Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi maintenant provisoirement un dispositif de veille et de sécurité sanitaire en matière de lutte contre la covid-19

Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande du Premier ministre, la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi maintenant provisoirement un dispositif de veille et de sécurité sanitaire en matière de lutte contre la covid-19 se réunit au Sénat le jeudi 21 juillet 2022.

Elle procède tout d'abord à la désignation de son Bureau, constitué de M. François-Noël Buffet, sénateur, président, de M. Sacha Houlié, député, vice-président, de Mme Caroline Abadie, députée, rapporteure pour l'Assemblée nationale, et de M. Philippe Bas, sénateur, rapporteur pour le Sénat.

La commission mixte paritaire procède ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.

M. François-Noël Buffet, président. - Je souhaite la bienvenue, à l'occasion de cette commission mixte paritaire (CMP), aux députés nouvellement élus qui ne sont jamais venus au Sénat et laisse immédiatement la parole à nos deux rapporteurs pour nous présenter leurs travaux.

Mme Caroline Abadie, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Quelle que soit l'issue de cette réunion, nous savons d'ores et déjà que nous sortirons dès le 1er août prochain des régimes d'exception mis en oeuvre pour lutter contre l'épidémie de covid-19. Ensemble, députés et sénateurs, presque main dans la main, nous avons pris utilement les mesures qui s'imposaient pour protéger les Français - un grand nombre de CMP ont été conclusives, sous l'oeil vigilant de Philippe Bas.

Si nous pouvons être fiers de notre travail de législateur, nous pouvons nous réjouir que les Français retrouvent à la fin de ce mois un régime de pleine liberté, ainsi que nous nous y étions engagés. Néanmoins, nous le savons tous, le virus n'a pas disparu et nous impose de maintenir deux outils indispensables à leur protection et à la lutte contre la circulation épidémique. Je me félicite que le Sénat ait souscrit à cette analyse en adoptant des dispositifs pertinents et équilibrés aux articles 1er et 2, adoptés en commission et maintenus en séance publique.

Je partage pleinement votre volonté de renforcer les garanties qui encadreront les prérogatives que nous accordons au Gouvernement. À cet égard, nous avions co-construit à l'Assemblée nationale des amendements avec les oppositions sur plusieurs points : la date d'échéance de ces outils, mais aussi l'inscription dans la loi du comité de veille et d'anticipation des risques sanitaires, la consultation des exécutifs locaux et des parlementaires d'outre-mer sur la mise en oeuvre du certificat sanitaire applicable aux déplacements extra-hexagonaux et, enfin, un dispositif d'information renforcée du Parlement pendant toute cette période.

Je me réjouis également que la question, très discutée dans nos deux chambres, de la suspension des personnels soignants non vaccinés ait été résolue grâce à l'article 2 bis introduit par la commission des lois du Sénat. J'avais souligné l'importance de ce sujet auprès du ministre de la santé et de la prévention. Le dispositif flexible que vous proposez est susceptible de répondre à l'enjeu.

Un accord semble à notre portée. Je tiens à remercier Philippe Bas pour les échanges de grande qualité que nous avons eus. Je lui ai indiqué le point sur lequel il importait de poursuivre notre travail - je crois qu'il m'a prêté une oreille attentive -, je veux parler de l'application, au-delà d'un mois, du certificat sanitaire applicable aux frontières nationales.

Pour conclure, je veux insister sur la nécessité de rappeler à nos concitoyens qu'il sera essentiel de poursuivre les consignes sanitaires et d'avoir un schéma vaccinal complet.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie, sénatrice. - N'est-ce pas un peu contradictoire avec ce que vous proposez ?...

Mme Caroline Abadie, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - J'entends parfaitement les arguments scientifiques avancés par le rapporteur du Sénat pour ne pas retenir le certificat de vaccination comme document exigé pour les contrôles aux frontières - il s'agit néanmoins d'une évolution importante dans notre approche de la gestion de l'épidémie -, mais, quoi qu'il en soit, la vaccination, même après le 1er août, continuera de protéger des formes graves du virus, et elle seule permettra d'éviter la saturation de notre système de santé.

M. Philippe Bas, rapporteur pour le Sénat. - Je tiens à remercier très sincèrement Caroline Abadie, qui énonce clairement ses positions, sans arrière-pensées, ce qui nous a permis de travailler dans de bonnes conditions. Comme disait Jacques Barrot, on ne fait pas de bonne politique sans bonne technique - c'est une règle fondamentale. Nous avons pu circonscrire de la manière la plus claire possible les points de vue éventuellement divergents pour rechercher les conditions d'un rapprochement - il n'est pas si simple d'aborder l'un des premiers textes d'une législature.

Je souscris à l'idée que l'épidémie de covid n'est pas terminée, et la vaccination reste un enjeu essentiel. Il importe de faire en sorte que les personnes vaccinées complètent leur schéma vaccinal, et ce en dépit des mots d'ordre qui circulent, notamment sur les réseaux sociaux. La vaccination reste en effet le moyen privilégié pour éviter les formes graves de la maladie ainsi que, dans un nombre non négligeable de cas, la contamination elle-même.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - C'est pour cette raison que vous avez supprimé la possibilité de présenter le certificat vaccinal aux frontières ?...

M. Philippe Bas, rapporteur pour le Sénat. - Tous les jours, des personnes meurent encore en France de cette maladie, dont une grande partie est d'ailleurs vaccinée, mais vulnérable au virus.

Nous proposons aujourd'hui une méthode appropriée reposant sur la confiance, la liberté et la responsabilité des Français. Toutefois, il importe que le Parlement indique clairement que les Français ne doivent pas baisser la garde, au contraire ! La vaccination reste un élément essentiel, avec les gestes barrières, pour lutter contre une épidémie qui n'est pas terminée et qui peut connaître de nouveaux rebondissements, même si sa courbe de vie est conforme à celle qui a été observée dans le passé pour d'autres épidémies, c'est-à-dire avec des variants de plus en plus contagieux, mais de moins en moins dangereux - ce qui ne signifie pas inoffensifs pour autant. Nous devons communiquer auprès de nos concitoyens et leur dire strictement la vérité, ce que nous nous sommes d'ailleurs efforcés de faire durant nos débats dans chacune de nos assemblées.

Des approximations doivent être levées.

Tout d'abord, l'état d'urgence sanitaire et le régime de gestion de la crise sanitaire sont-ils définitivement derrière nous ou sont-ils réactivables ? Selon une analyse juridique précise, ils ne seront plus activables après le 31 juillet prochain, sans une disposition législative. Mais si l'on fait une lecture quelque peu superficielle du code de la santé publique, toutes les dispositions relatives à l'état d'urgence sanitaire y figureraient ; de même, toutes les dispositions prévues dans la loi du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire demeureraient. Le Sénat est soucieux de la lisibilité du droit, et les choses qui vont sans dire vont parfois mieux en les disant. C'est pourquoi nous avons voulu expressément abroger les régimes d'exception pour revenir à l'état du droit en vigueur avant l'épidémie de covid : il n'y aura plus de passe vaccinal, plus de passe sanitaire, plus de confinement, plus de couvre-feu, plus de possibilité d'interdire des manifestations, plus d'interdiction possible de réunions, plus de possibilité d'imposer le port du masque. Cette clarté est, me semble-t-il, attendue par nos compatriotes ; à cet égard, je remercie sincèrement Caroline Abadie d'avoir adhéré à cette démarche, de même que le Gouvernement, qui ne s'y est pas opposé.

Ensuite, se pose la question de la protection des Français contre l'irruption d'un nouveau variant extrêmement dangereux - c'est fort improbable, mais possible - dans un pays lointain ou proche. Ne rien faire reviendrait à ne laisser aux pouvoirs publics que deux instruments de police administrative : l'interdiction des vols ou du franchissement de la frontière pour les personnes en provenance de ce pays ou, à l'arrivée en France, la quarantaine. Nous avons préféré une méthode plus souple, à savoir donner aux autorités sanitaires la possibilité d'exiger un test négatif.

Nous avons eu une longue discussion à ce sujet au Sénat. N'aurait-il pas fallu, comme le prévoit le règlement européen sur le certificat sanitaire de voyage, maintenir le choix entre le test, le certificat de vaccination à jour ou un certificat de rétablissement ? J'avais abordé cette question de manière sans doute un peu superficielle dans un premier temps, en m'en tenant à la pratique qui a prévalu. Mais à y regarder de plus près, j'ai constaté que le vaccin était de moins en moins efficace non pas pour prévenir les formes graves de la maladie, mais pour faire barrière aux contaminations. En France, ce sont aujourd'hui très majoritairement des personnes vaccinées qui contractent la maladie et la transmettent. Le vaccin fait barrage dans un tiers des cas. Le test présente donc actuellement une efficacité supérieure. C'est la raison - et la seule raison ! - pour laquelle la commission des lois du Sénat, puis le Sénat dans son ensemble ont décidé que, dans cette circonstance exceptionnelle, seul un test négatif soit exigé, plutôt qu'une preuve de vaccination à jour. La durée du test dépendra du nouveau variant - soixante-douze heures, trente-six heures, vingt-quatre heures...

L'Assemblée nationale s'est aussi interrogée sur ce sujet, mais je crois que c'est la solution la plus efficace. Nous ne pouvons pas calquer notre position sur celle de l'année dernière, car nous sommes confrontés à de nombreux variants. Nous avons une obligation d'adaptation, plutôt que de nous crisper sur les positions antérieures que nous avions prises et qui ne conviennent plus.

Par ailleurs, il faut étendre cette question à l'outre-mer, mais celle-ci ne se pose pas dans les mêmes termes. Le problème tient en effet à l'engorgement des structures hospitalières. Il peut être nécessaire de filtrer les arrivées outre-mer. S'il y a saturation à Mulhouse, ce n'est pas la même chose qu'à Fort-de-France, par exemple. Dans l'Hexagone, nous pouvons organiser des évacuations sanitaires dans d'autres villes, ce qui est rarement possible outre-mer.

M. Ugo Bernalicis, député. - Ou en Allemagne !

M. Philippe Bas, rapporteur pour le Sénat. - En effet, cela s'est produit.

Il y a là une clause de sauvegarde hospitalière en quelque sorte. Toutes nos collectivités d'outrer mer sont confrontées à d'importantes difficultés en matière d'offre hospitalière, même en l'absence de contaminations virales exceptionnelles.

Nous n'avons donc pas voulu donner un chèque en blanc aux autorités sanitaires : on écoutera leurs besoins, qu'il s'agisse d'un variant dangereux ou de la saturation de l'offre de soins dans une collectivité d'outre-mer. Les pouvoirs que nous leur donnons ne sont pas indifférenciés, mais aussi spécifiques que leurs besoins. Il n'y aura pas de restriction aux libertés qui ne soit strictement nécessaire pour combattre une possible recrudescence de l'épidémie. Voilà le sens de ce que nous avons voulu faire : ce qui doit justifier nos positions, ce sont uniquement les nécessités de la lutte contre la covid. Pour les treize textes examinés par le Sénat sur ce sujet, telle aura toujours été notre grille de lecture.

Enfin, un débat a eu lieu sur la réintégration des membres du personnel soignant, mais aussi administratif, des structures hospitalières et médico-sociales, ou encore des sapeurs-pompiers, suspendus à la suite de l'instauration de l'obligation vaccinale. Celle-ci découle de nos lois d'exception. Elle aurait pu entraîner une rupture du lien entre l'agent qui refuse de se faire vacciner et l'institution qui l'emploie, mais le Parlement a refusé cette rupture, considérant qu'il ne convenait pas de punir ces agents, qui exerçaient leur liberté fondamentale de ne pas être vacciné de force ; dès lors, les licencier aurait été disproportionné par rapport à l'unique objectif poursuivi : les écarter des personnes vulnérables qui auraient ainsi pu contracter le virus. Faudrait-il, maintenant, leur dire : « Vous ne reviendrez jamais. » ? Cette position est envisageable, mais elle n'a pas été, jusqu'à présent, celle du Parlement : cette obligation vaccinale a été posée comme temporaire, dans l'espoir que l'épidémie le serait aussi. Nous nous sommes rendu compte, qu'aux termes des dispositions que nous avions adoptées, nous avions laissé la réintégration de ces personnes à la discrétion du Gouvernement. Nous avons donc cherché le moyen, non pas de les réintégrer - nous n'avons pas pris parti en faveur de cette réintégration, j'ai même pris position contre à l'instant présent -, mais de sortir du flou la procédure au terme de laquelle la réintégration pourrait avoir lieu.

C'est pourquoi nous avons prévu que la Haute Autorité de santé (HAS), qu'elle soit saisie par le Gouvernement, par le nouveau comité médical, par l'une des deux commissions des affaires sociales du Parlement, ou de sa propre initiative, se prononcera solennellement sur la nécessité de prolonger l'obligation vaccinale ; si elle conclut que celle-ci n'a plus lieu d'être, ces personnes devront être réintégrées le lendemain même ! Nous sommes même allés un peu plus loin : on pourra procéder par catégories de personnels, dans la mesure où le degré d'exposition des personnes vulnérables diffère selon l'emploi de l'agent en question. En tout cas, nous sortons de l'ombre ce sujet qui empoisonne le débat public et soulève des questions de principe.

J'estime que notre proposition est raisonnable, le Sénat en a jugé de même. J'ai ressenti une très grande ouverture d'esprit de la part de Caroline Abadie, j'ai consulté quelques-uns des membres de cette commission mixte paritaire et il me paraît que nous pourrons avancer sur cette base. Nous avons souhaité aboutir à un dispositif précis, efficace et clair. Enfin, le principe de liberté que nous avons posé prendra corps avec l'abrogation de tous les régimes d'exception.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Je salue les députés nouvellement élus et le nouveau président de la commission des lois de l'Assemblée nationale. Je suis d'autant plus triste de les voir participer à une commission mixte paritaire Potemkine. De fait, elle a déjà eu lieu, sans nous !

M. François-Noël Buffet, président. - Pourtant, vous pouvez vous y exprimer !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Que les rapporteurs aient des échanges en amont, nous en avons l'habitude, c'est même productif, mais je n'avais jamais vu des accords en commission mixte paritaire conclus avant l'examen du texte en séance publique par le Sénat ! Notre exercice est donc plutôt une scénographie, et le rapporteur Philippe Bas fait quelque peu insulte à notre intelligence par ses explications.

Madame Abadie, je vous entends exprimer un vibrant soutien pour les tests, qui seraient bien plus efficaces que le vaccin, même si celui-ci reste important... Vous prenez une responsabilité majeure face aux Français à qui l'on a expliqué pendant des mois qu'ils devaient se faire vacciner, à plusieurs reprises, et que les soignants ne devaient pas être au chevet des malades s'ils n'étaient pas vaccinés. Or tout à coup, dans la nuit du 18 au 19 juillet dernier, il s'est passé quelque chose : notre rapporteur avait déposé la veille un amendement tendant à réintroduire le certificat de vaccination ; au matin, cet amendement avait été rectifié pour le faire disparaître ! M. Bas aurait-il été touché par la grâce, une onde de lumière qui jaillit dans la nuit, pour ainsi modifier cet amendement ?

M. Philippe Bas, rapporteur pour le Sénat. - C'est christique !

M. Ugo Bernalicis. - À tout le moins transcendantal !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Nous allons donc faire semblant de débattre, alors qu'une majorité s'est déjà formée autour du texte du Sénat. Pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain du Sénat, Bernard Jomier, Jean-Pierre Sueur et moi-même avons exprimé en séance publique les points qui nous ont conduits à nous abstenir sur ce texte. Nous souhaitions en rester au délai adopté par l'Assemblée nationale relativement au système d'information national de dépistage (SI-DEP). Comme nous croyons au vaccin, nous souhaitions qu'il soit l'un des trois moyens retenus pour le passe sanitaire, ce qui n'a pas été le cas parce que certains groupes de l'Assemblée nationale sans lesquels une majorité serait impossible n'y sont pas favorables. Enfin, nous sommes opposés à ce que ce texte ouvre la voie à la réintégration des soignants non vaccinés. Sur ce dernier point, on pourrait dire que ce texte est bavard, qu'il ne fait qu'envoyer un signe - cela justifie encore notre opposition à cet article.

Nous nous sommes abstenus hier parce que nous considérions qu'un texte était nécessaire, en dépit de nos désaccords sur ces trois points ; nous ferons de même aujourd'hui.

M. Ugo Bernalicis - Il y a certes une part de scénographie dans nos échanges, mais c'était déjà le cas pendant la précédente mandature, où l'on connaissait d'avance l'issue des votes. Aujourd'hui, les rapports de force ont complètement changé à l'Assemblée nationale. Des positions divergentes s'expriment même entre l'Assemblée nationale et le Sénat au sein des mêmes forces politiques, ce qui peut mener à des majorités différentes sur certains points. Ainsi, madame de La Gontrie, je vous rejoins sur la date du 31 janvier pour le SI-DEP.

Le texte adopté par le Sénat est intéressant, il obéit à une certaine logique. Quant au principe de s'en tenir aux tests pour limiter la propagation du virus - le vaccin demeurant ce qu'il y a de plus efficace pour en limiter la dangerosité -, un amendement similaire avait été déposé par mon groupe à l'Assemblée nationale. Le Sénat en a débattu de manière plus détaillée et a convenu que c'était la seule approche logique. Reste un élément déterminant pour mon groupe : la gratuité des tests reste subordonnée à un schéma vaccinal complet, expression que le ministre de la santé et de la prévention n'a su m'expliquer clairement et dont l'application est parfois illogique : le certificat de rétablissement a une durée de validité de six mois, la vaccination de neuf mois... Quelqu'un qui a guéri de la covid-19 et ne va ainsi pas recevoir de dose de rappel perd donc, après six mois, le bénéfice de la gratuité des tests, alors qu'il a respecté toutes les étapes ! Des personnes de bonne foi vont devoir recevoir une nouvelle dose pour obtenir un test gratuit alors même que cette dose n'est recommandée que pour les personnes de plus de soixante ans. En l'absence de tests gratuits, nous ne pourrons pas approuver un dispositif reposant sur les tests, malgré toutes ses qualités.

M. Bas a affirmé que la lutte contre la covid-19 repose essentiellement sur les Français. C'est en partie vrai, mais il ne faudrait pas exonérer l'État de sa responsabilité de lutter contre la pandémie. Des mesures qui ne restreignent pas les libertés pourraient être mises en place, telles que l'installation de purificateurs d'air dans les écoles. Ce n'est toujours pas fait, alors que ce serait un outil de lutte contre la propagation de l'épidémie !

Sur la réintégration des personnels suspendus, monsieur le rapporteur pour le Sénat, vous avez raison de dire qu'il faut prévoir des paliers, une approche différenciée suivant les situations. J'ai dans mon entourage une personne qui enseigne dans une école pour personnes sourdes et malentendantes et qui a refusé de se faire vacciner ; comme il s'agit d'un établissement médico-social, elle a été suspendue, alors qu'il n'y avait là aucune situation de comorbidité ou de vulnérabilité particulière.

Quant à la suppression des régimes d'exception, bravo ! Vous avez exaucé l'un de nos voeux les plus chers. Ainsi, s'il fallait les remettre en place, une loi serait nécessaire et il faudrait rediscuter de toutes ces dispositions une à une. Nous voulons que ce soit le Parlement qui décide et non l'exécutif tout seul.

Nous sommes donc très intéressés par le travail du Sénat, bien meilleur que la version de la majorité à l'Assemblée nationale. Néanmoins, il nous faudra un signal très fort de l'exécutif sur la gratuité des tests, puisque l'article 40 de la Constitution nous empêche de résoudre ce problème nous-mêmes...

M. Philippe Gosselin, député. - Ce texte, sans être aussi important que ceux qui ont été étudiés précédemment sur ce sujet, a suscité de l'émoi, voire de la stupeur au cours de son examen par l'Assemblée nationale.

Je salue d'abord l'abrogation expresse des régimes d'exception par le Sénat, qui représente une réelle avancée. J'avais déposé un amendement en ce sens ; cela rejoint du reste l'avis publié par le Conseil d'État le 24 juin dernier. Cela évitera toute circulation d'informations douteuses sur les réseaux sociaux, toute interprétation fallacieuse de certains non-dits. De tels régimes ne pourraient être rétablis qu'après un débat et un vote du Parlement.

De même, le passe sanitaire général disparaît. C'est clair et net ! Idem pour le passe vaccinal.

Ce texte comprend donc des avancées que nous étions nombreux à attendre et que mon groupe avait exigées à l'Assemblée nationale.

Restent quelques éléments d'interrogation.

Pour SI-DEP, nous préférerions que la date retenue soit celle que nous avions adoptée, c'est-à-dire le 31 janvier 2023. C'était le compromis auquel la commission des lois de l'Assemblée nationale était parvenue et qui avait recueilli l'accord unanime de l'ensemble des groupes. En repoussant au mois de juin, on allonge considérablement les délais. Nous avions envisagé pour notre part une clause de revoyure.

S'agissant des mineurs, un amendement avait été adopté pour supprimer toute obligation les concernant. J'entends bien que le passe européen s'applique jusqu'à fin juin 2023 et qu'il intègre les mineurs à partir de 12 ans, mais nous ne devons pas nécessairement nous aligner.

Ces deux points mis à part, il me semble que les échanges ont été nourris et francs, et finalement assez habituels, car on arrive rarement les mains dans les poches dans une commission mixte paritaire ! Nous avions la volonté de trouver une solution par le haut, et j'ai essayé modestement, en tant qu'orateur de mon groupe, de participer à ces travaux. Le Gouvernement avait été un peu maladroit sur la question de la réintégration des personnels suite à l'instauration de l'obligation vaccinale. La formule trouvée par le Sénat, qui a une lecture légèrement différente de la nôtre des articles 45 et 40 de la Constitution - nous nous en réjouissons -, permet d'envoyer un signal, attendu, en vue d'une réintégration des soignants non vaccinés, même si elle ne peut pas être immédiate et générale.

M. Philippe Bonnecarrère, sénateur. - Je souhaite à nos collègues députés réélus ou élus, ainsi qu'à M. le président de la commission des lois de l'Assemblée nationale, le meilleur succès dans leur mandat.

Le texte présenté par le Gouvernement ne posait pas de difficulté au groupe centriste du Sénat. Nous comprenons bien l'intérêt de supprimer les dispositifs exceptionnels contre lesquels nous nous sommes fréquemment élevés et de prévoir le rétablissement de mesures de contrôle des transports internationaux en situation de crise.

Il est très intéressant de regarder comment se traduisent les modifications politiques intervenues dans la représentation de l'Assemblée nationale. Celles-ci contribuent à un rééquilibrage de nos institutions, avec un régime moins présidentiel et une République plus parlementaire, mais ce n'est pas ce à quoi nous avons assisté hier soir au Sénat ! Nous avons constaté qu'il y avait un accord politique préalable - je pense aux retraits d'amendements qui sont intervenus. Surtout, nous avons assisté à une prise de parole totalement décomplexée de nos collègues « antivax ». Nous n'étions pas habitués à les entendre s'exprimer de manière aussi conquérante.

Nous voterons le texte, en n'étant pas dupes des conditions de son élaboration.

Je relève trois différences avec le texte initial du Gouvernement.

La première est l'abrogation expresse de tout ce qui est dispositif exceptionnel : on ne peut que dire bravo ! La deuxième, c'est que, dans les mesures susceptibles d'être mises en place en cas de crise, le certificat de vaccination passe à la trappe. La troisième, c'est l'article 2 bis, qui envoie un signal en direction des personnels soignants non vaccinés, auxquels on laisse entrevoir un parcours de réintégration.

Quelles que soient les déclarations que nous avons entendues sur la nécessité de la vaccination, ce texte, avec les deux dernières modifications que j'ai citées, porte un discours que je ne qualifierai pas d'anti-vaccin...

M. Philippe Bas, rapporteur pour le Sénat. - Ce serait faux !

M. Philippe Gosselin. - Ce n'est pas le cas !

M. Philippe Bonnecarrère. - ... mais qui, a minima, diminue l'importance de la vaccination dans notre pays. Dans les mois qui viennent, vous verrez le taux de vaccination de nos concitoyens décliner, y compris pour toutes les autres vaccinations obligatoires. Nous ne sommes pas certains - c'est un euphémisme ! - que ce soit une évolution positive pour l'intérêt général.

Mme Véronique Guillotin, sénatrice. - J'interviens au nom du groupe RDSE sans prendre part au vote, puisque nous ne sommes que suppléants au sein de cette commission mixte paritaire.

J'évoquerai d'abord nos regrets.

Il s'agit de la disparition de la preuve de vaccination comme document à présenter aux frontières. La vaccination ne protège pas seulement contre les formes graves de la covid, elle diminue également la transmission et donc la circulation virale. J'avais déposé sur ce sujet un amendement au nom de mon groupe qui n'a pas été retenu.

Derrière cette mesure, je relève que les discours « antivax » et les fausses informations ont circulé de manière libérée dans l'hémicycle hier. Pour notre haute assemblée, certains propos ont été regrettables : ils n'encouragent pas à poursuivre la vaccination, que l'on sait pourtant protectrice.

J'avais également proposé de supprimer l'article 2 bis. La HAS va décider seule de la levée de certaines mesures alors que, dans le texte initial, un décret devait être pris après avis de cette autorité. Je craignais que cet article ne serve d'accroche à différents amendements visant à réintroduire les soignants non vaccinés, et c'est effectivement ce qui s'est passé.

Petite lueur positive, l'amendement que nous avions proposé sur le délai des deux mois dans lesquels le Parlement devrait se prononcer est finalement proposé par les rapporteurs à notre commission mixte paritaire.

Plus largement, il faut souligner la clarté de l'article 1er A et de la rédaction qui a été adoptée pour acter que nous sommes sortis de la situation d'urgence. Le contrôle aux frontières n'a pas été supprimé : l'article a été réintroduit, avec un compromis qui ne me convient pas. Ne tergiversons pas sur les tests : ils sont fiables, et aucune solution n'offre un contrôle sûr à 100 %.

Pour conclure, nous ne voterons pas contre le texte, mais nous ne savons pas encore si nous déciderons de nous abstenir ou de voter pour en séance.

M. Thomas Ménagé, député. - Je suis un nouvel élu et je remercie nos collègues sénateurs de leur accueil. Je les félicite pour les avancées qu'ils ont introduites.

La rédaction de l'article 1er A envoie un signal important aux Français, qui seront rassurés de savoir qu'il est mis fin aux dispositifs exceptionnels et à l'état d'urgence sanitaire. De la même manière, la réécriture de l'article 2 est une bonne chose. Par ailleurs, il est cohérent de dire que le vaccin n'empêche pas la contamination et que seul le test peut être pris en compte, même si cela peut envoyer un message contradictoire aux personnes qui sont forcées de se faire vacciner. Enfin, j'approuve le signal envoyé à destination des soignants suspendus. Dans mon territoire, je connais un jardinier qui est suspendu : il est compliqué de lui expliquer les raisons pour lesquelles il serait ad vitam aeternam empêché de travailler alors qu'il n'est pas au contact des malades... La situation actuelle nous permet de faire preuve de bon sens pratique.

Malgré ces bons points, le groupe Rassemblement national ne pourra pas voter le texte, même si j'ai bien compris que cela n'avait pas forcément d'intérêt, car la réunion à laquelle nous participons aujourd'hui était en quelque sorte une pièce de théâtre !

En ce qui concerne la date retenue pour les données SI-DEP, je rejoins mon collègue Philippe Gosselin : nous avions trouvé un accord avec M. Houlié et Mme Abadie sur la date du 31 janvier 2023. Par ailleurs, nous souhaitions épargner les mineurs, qui ont été souvent très meurtris par la situation - il suffit de se rendre dans les unités qui traitent les maladies psychologiques et psychiatriques pour le constater.

Dernier sujet, la question de l'outre-mer ; c'est pour nous un point bloquant. Je peux comprendre la volonté de préserver les hôpitaux outre-mer, mais je rappelle que la situation dans les hôpitaux relève de la responsabilité des gouvernements qui se sont succédé. Indirectement, cela stigmatise nos compatriotes ultramarins. Le risque de saturation, c'est tout le temps ! Cette rédaction peut rassurer une partie des Français, mais, dans les faits, on sait très bien que le dispositif prévu pourra être mis en place à tout moment.

Les évolutions ne sont donc pas suffisantes pour nous permettre de voter ce texte en l'état.

M. François-Noël Buffet, président. - Que M. Ménagé se rassure, toutes les CMP font l'objet d'échanges en amont entre les rapporteurs des deux assemblées pour proposer, lorsque cela est possible, une position commune. Imaginez le temps que cela prendrait si ce n'était pas le cas, pour les textes comprenant 80 ou 90 articles !

M. Alain Richard, sénateur. - Le vote des membres de la CMP est libre. Ce qui compte, ce n'est pas qu'un accord soit obtenu en CMP, mais que le texte soit adopté en des termes identiques par chaque assemblée. Les véritables acteurs de la CMP sont ceux qui n'ont pas décidé de voter contre quoi qui l'arrive. Si l'on ne prend en compte que les messages politiques et non le droit, on perd son temps en CMP.

Cela illustre les problèmes que pose la précipitation de la législation. Si l'Assemblée nationale avait eu quinze jours ou trois semaines de plus pour délibérer, les positions se seraient sans doute davantage rapprochées. Il est logique que le Sénat, qui a bénéficié d'un délai plus long, ait pu parvenir à un compromis.

Rappelons que le code de la santé publique consiste, du premier au dernier article, en une série de dispositions encadrant les comportements et fixant des obligations pour des motifs de santé publique. L'ensemble des dispositions précisant et encadrant les règles du confinement étaient rassemblées en un article imparfait et peu protecteur de ce code. Avec la crise sanitaire, nous avons, en l'espace de quelques jours, rédigé la dizaine d'articles constituant le support de gestion d'un risque pandémique majeur.

Nous nous réjouissons tous, aujourd'hui, de mettre ces articles au panier ; moi aussi, avec cependant une once d'hypocrisie. Car si nous ne faisons rien, à la prochaine pandémie nous serons contraints de nous remettre à l'ouvrage, comme des bricoleurs... En tout et pour tout, nous avions travaillé en sept jours. La CMP s'était déroulée le dimanche matin, pour une adoption définitive le dimanche après-midi.

Nous votons sur l'objectif partagé par le Gouvernement et le Parlement de faire le bilan, d'analyser l'application des dispositions que nous abrogeons. Il me semble que, au terme de ce bilan, il conviendrait, toujours de manière concertée, d'établir un cadre juridique pouvant répondre de matière permanente aux impératifs de gestion d'une pandémie, plutôt que d'imaginer que nous ferions mieux que tout le monde en les imaginant à la veille d'une prochaine pandémie...

Mme Sandra Regol, députée. - Enfin une ligne claire, jusque dans le titre du texte : nous revenons au cadre de l'État de droit, et nous sortons de celui des mesures d'exception. L'écologiste que je suis en est particulièrement touchée : au début de la crise sanitaire, nous avions soutenu, à l'époque sous les huées, que le cadre de l'État de droit devait prévaloir pour la gestion des pandémies contemporaines. Je me félicite qu'il existe d'autres cadres que celui de l'Assemblée nationale où l'on peut co-construire une réponse.

Je relève au demeurant avec amusement ce terme de co-construction : mes collègues ici présents pourront témoigner du fait que nous n'en aurons guère vu à l'Assemblée nationale.

Un peu de cohérence est bienvenu : les Françaises et les Français en ont d'autant plus besoin que, malgré ce texte plutôt positif, nous ne savons pas réellement où nous en sommes. Sommes-nous sortis de la phase de danger, ou est-il toujours possible de sombrer à nouveau, avec les inquiétudes liées à la variole du singe ? Heureusement, le maintien des rapports fréquents transmis par les autorités sanitaires nous permettra d'y voir plus clair.

Dans les deux cas, l'État de droit nous donne les outils nécessaires pour prendre en charge les Françaises et les Français. Ces outils sont parfois défaillants, en témoigne la saturation des hôpitaux.

Tout le monde se retrouve dans la proposition concernant les délais du SI-DEP ; je remercie le président de la commission des lois de l'Assemblée nationale, Sacha Houlié, de les avoir intégrés dans la discussion.

En revanche, je ne comprends pas la justification scientifique du retour au seuil de 12 ans pour les tests, alors que nous étions arrivés à l'âge de 18 ans. Je crois aussi, comme certains de mes collègues, que la rédaction actuelle peut instiller le doute sur les politiques de vaccination. Nous ne sommes pas favorables au retour du passe sanitaire, mais il est possible de trouver des formulations indiquant sans ambiguïté que le vaccin fait baisser la charge vaccinale et permet de se prémunir collectivement du virus.

M. Ugo Bernalicis. - Tous les sénateurs n'ont pas exprimé leur position quant à la date du 31 janvier 2023. Y a-t-il une majorité en faveur de cette date ?...

Mme Caroline Abadie, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Je rappelle que nous avons co-construit cette date, avec tous mes collègues députés ici présents, au cours d'une suspension de réunion de la commission des lois. Ce sont les nouvelles habitudes de l'Assemblée nationale...

Cette date du 31 janvier 2023 était un compromis. J'avais néanmoins averti que nous serions obligés de légiférer à nouveau pour prolonger le SI-DEP jusqu'au 30 juin 2023, date retenue par le Parlement européen pour le certificat. J'avais également proposé de dissocier les deux dates, suscitant alors un rejet franc et massif de mes collègues.

Malgré cet accord, l'article a disparu dans la suite de l'examen du texte. C'est au Sénat qu'il est revenu de réécrire le dispositif, en reprenant ma proposition de dissocier les dates. Sur le plan intellectuel, je n'y vois aucun inconvénient. La date du 30 juin répond à l'exigence européenne, la date du 31 janvier à une volonté de ne pas prolonger outre mesure le régime d'exception. En des termes plus clairs, l'une est porteuse de contraintes pour nos concitoyens, l'autre est porteuse d'avantages.

De plus, le Sénat a ajouté une clause de consentement de la personne dont les données sont recueillies. C'est une garantie nécessaire à la prorogation. Dans ces conditions, la clause de revoyure ne me paraît plus nécessaire.

Concernant le test PCR, j'étais très attachée à l'exigence d'un schéma complet pour le franchissement des frontières. Il faut cependant trouver des compromis, et celui que propose le Sénat me semble raisonnable.

M. Philippe Bas, rapporteur pour le Sénat. - Si le Sénat a pris une disposition qui semble prolonger le SI-DEP, c'est dans le seul but de permettre aux Français de voyager à l'étranger. Le SI-DEP a été inscrit dans la loi parce qu'il portait atteinte au secret médical, en transmettant à l'Assurance maladie des données nominatives recueillies sans le consentement de l'intéressé. La prolongation au 30 juin 2023 a été assortie par le Sénat de la mention du consentement obligatoire de l'intéressé. Ainsi les Français pourront présenter, sur leur portable, le certificat sanitaire dont ils auront éventuellement besoin pour franchir les frontières jusqu'à cette date. C'est une mesure de pure commodité.

L'avancée de la fin du SI-DEP du 31 mars au 31 janvier 2023, à laquelle le Sénat souscrit, se justifie par la volonté de limiter dans le temps la circulation d'informations couvertes par le secret médical, recueillies sans le consentement de la personne concernée. De même, en respectant la volonté des députés, nous permettons, sans porter atteinte au secret médical, aux Français de voyager avec un simple smartphone, sans résultats d'analyse biologique ou autres, si un autre pays européen rétablissait des restrictions à ses frontières.

Le Sénat et l'Assemblée nationale ont donc abordé ces deux sujets dans une approche identique, celle du respect des droits fondamentaux de la personne. Ce sont des mesures concrètes, qui seront perçues comme une facilité donnée aux Français pour la durée de vie du règlement européen.

Le seuil des 12 ans a suscité des débats nourris. Le passe vert prévu par le règlement européen inclut la tranche d'âge des 12-18 ans. Si nous devions demander un test à l'aéroport à Bombay, par exemple, ce serait pour protéger les résidents de l'Hexagone d'un variant très dangereux. Or on peut aussi bien importer ce variant à 13 ans qu'à 19.

M. Ugo Bernalicis. - Ou à 11 ans !

M. Philippe Bas, rapporteur pour le Sénat. - La règle doit donc aussi s'appliquer aux 12-18 ans. Certes, la pure logique de protection sanitaire aurait voulu que nous imposions l'obligation du test à partir du berceau avant l'accès au sol français, en cas d'irruption d'un variant dangereux... Nous ne l'avons pas suivie.

Enfin, je répète qu'il y a, du point de vue de l'efficacité sanitaire, supériorité du test sur le vaccin. Cela ne veut absolument pas dire qu'il faille baisser la garde et renoncer à appeler chacun à avoir un schéma vaccinal complet ! Il s'agit simplement de régir une situation tout à fait particulière, puisqu'il n'y a, de toute façon, plus de passe vaccinal.

Selon certains, il faudrait rétablir le passe vaccinal pour ne pas déconsidérer le vaccin et ne pas dissuader les gens de se faire vacciner. Arrêtons-en avec les logiques trop théoriques ! L'efficacité commande que nous nous adaptions à l'évolution de la situation, en ne restant pas crispés sur des positions qui étaient très justifiées voici un an, mais qui ne le sont plus aujourd'hui.

Monsieur le président, il était nécessaire que les choses soient très claires sur ces trois points, pour que chacun puisse se prononcer en fonction de la réalité de ce qui est proposé, et non d'idées générales, aussi respectables soient-elles.

M. François-Noël Buffet, président. - Ces précisions étaient utiles en effet.

M. Sacha Houlié, député, vice-président. - Je félicite les rapporteurs d'être parvenus à un accord. Néanmoins, si j'en accepte le principe, je souhaite exprimer trois réserves.

Premièrement, je partage en partie ce qu'a dit Alain Richard sur la sortie des mesures exceptionnelles. Personne ne remet en cause l'existence pérenne dans notre droit d'un dispositif analogue sur l'état d'urgence sécuritaire. À cet égard, je regrette que ce que nous avons construit brique après brique dans le code de la santé publique disparaisse d'un revers de main - je salue, du reste, la minutie de la rédaction qui va conduire à son effacement.

Je trouve quelque peu théorique l'hypothèse où ne reviendrait ni ce virus, ni un variant, ni même un autre virus qui nous pousse à adopter des mesures de santé publique impliquant des restrictions de liberté comme nous en avons connu et comme nous en connaîtrons probablement à l'occasion d'autres crises, qu'elles soient sécuritaires, sanitaires ou écologiques - d'autres régimes d'urgence peuvent justifier de telles restrictions de liberté. Cette disparition, je l'avoue, me chagrine, car nous serons, je le crois, contraints d'y revenir un jour ou l'autre dans ce code-ci ou dans un autre.

Deuxièmement, je regrette la disparition de la preuve vaccinale pour le contrôle sanitaire aux frontières. Cela fait prévaloir le test sur le vaccin, ce qui, je le pense, n'est pas une bonne nouvelle. Certes, les critères retenus montrent une certaine habileté, qu'il s'agisse de la saturation des hôpitaux outre-mer, dont on sait qu'elle est liée à une vaccination bien moindre que dans l'Hexagone ou en Corse, ou de l'apparition d'un nouveau variant, pour les voyages internationaux.

Il est satisfaisant d'avoir retenu l'âge de 12 ans à partir duquel on peut se faire vacciner.

Par ailleurs, le vaccin n'est pas rendu totalement sans intérêt, puisque la gratuité du test reste conditionnée à la présentation d'un schéma vaccinal complet.

Troisièmement, si je comprends bien qu'il faille faire en sorte que le texte puisse être adopté, je pense que les dispositions sur la réintégration des soignants seront inefficaces, inutiles et dangereuses.

Si elles devaient être contrôlées par le Conseil constitutionnel, elles pourraient être censurées au titre de cavalier législatif. D'ailleurs, si elles n'avaient pas été déclarées irrecevables au titre de l'article 40 à l'Assemblée nationale, elles l'auraient été, de mon fait, en vertu de l'article 45 de la Constitution.

J'espère que la lucidité de la Haute Autorité de santé sera au moins équivalente à celle de l'Académie de médecine ou celle du conseil scientifique à l'égard des personnes exerçant une activité médicale au contact de personnes fragiles et ne permettra pas cette réintégration.

Je comprends l'intérêt du compromis, mais je tenais à exprimer ces réserves. Je souhaite, à ce stade, que le texte soit adopté.

M. Jean-Pierre Sueur, sénateur. - Je me permets, monsieur le président, de saluer les propos de M. le vice-président de la CMP.

Nous avons passé toute la journée d'hier à dire que nous ne comprenions pas pourquoi l'on supprimait le vaccin pour les contrôles aux frontières. Quel message envoie-t-on en le faisant ?

La CMP n'est pas figée : rien n'interdit d'être convaincu par ce que vient de dire le président de la commission des lois de l'Assemblée nationale ! Pour ma part, je suis encore plus convaincu qu'auparavant. Je souscris totalement à ses propos sur l'article 45. Je répète à M. le rapporteur pour le Sénat que nous prenons un risque sur la question des soignants qui n'ont pas voulu se faire vacciner.

Comme je l'ai dit hier soir, le texte que nous allons voter est une aporie : en somme, quand le problème sera clos, il sera clos... Certes ! Mais une fois que l'on aura écrit cela, aura-t-on fait avancer l'État de droit ?

M. Ugo Bernalicis. - Je souhaite que nous puissions nous prononcer précisément sur la date du 31 janvier pour SI-DEP.

M. François-Noël Buffet, président. - Nous allons voter article par article, et évidemment sur l'article 1er qui traite de cette question.

Article 1er A

L'article 1er A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 1er

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 2

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 2 bis

L'article 2 bis est adopté dans la rédaction du Sénat, sous réserve d'une modification rédactionnelle.

Article 3

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Intitulé du projet de loi

L'intitulé du projet de loi est adopté dans la rédaction du Sénat.

La commission mixte paritaire adopte, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion du projet de loi maintenant provisoirement un dispositif de veille et de sécurité sanitaire en matière de lutte contre la covid-19.

La réunion est close à 15 h 40.