Mardi 13 octobre 2020

- Présidence de M. François-Noël Buffet, président -

La réunion est ouverte à 9 h 35.

Questions diverses

M. François-Noël Buffet, président. - Je salue tous nos collègues présents, et également ceux qui sont reliés à nous par visioconférence. En effet, dans le respect des mesures prévues par le bureau du Sénat, la présence physique est limitée lors des réunions de commission en fonction des salles qui les accueillent. De plus, je vous invite à conserver votre masque, y compris lorsque vous prenez la parole, et à laisser un siège sur deux libre.

Je souligne que nos collègues reliés à nous par visioconférence peuvent bien sûr intervenir lorsqu'ils le souhaitent, mais seuls les collègues présents peuvent voter, éventuellement avec les délégations qui leur ont été données.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - Sans mésestimer les difficultés que nous connaissons, la situation n'est pas satisfaisante au regard du respect des institutions et de la pratique démocratique. Il n'est pas acceptable que les parlementaires ne puissent pas voter pendant des mois - c'est ainsi que cela va se passer. Il est sans doute possible de voter en commission via la visioconférence, mais le problème sera plus criant encore en séance publique. Le président du Sénat a rappelé à plusieurs reprises, y compris en Conférence des présidents, l'avis du Conseil constitutionnel aux termes duquel il n'est pas possible d'interdire à des parlementaires d'accéder à l'hémicycle et de participer aux travaux du Parlement.

Aussi, je souhaite que vous demandiez à la Conférence des présidents une organisation pérenne de nature à permettre aux parlementaires d'exercer toutes leurs fonctions.

M. François-Noël Buffet, président. - Je le ferai.

Projet de loi prorogeant le régime transitoire institué à la sortie de l'état d'urgence sanitaire - Désignation des candidats pour faire partie de l'éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion (en téléconférence)

La commission soumet au Sénat la nomination de MM. François-Noël Buffet, Philippe Bas, Mmes Jacky Deromedi, Dominique Vérien, Marie-Pierre de la Gontrie, MM. Jean-Pierre Sueur et Thani Mohamed Soilihi comme membres titulaires, et de Mmes Jacqueline Eustache-Brinio, Catherine Di Folco, Marie Mercier, MM. Hervé Marseille, Jean-Yves Leconte, Mmes Éliane Assassi et Maryse Carrère comme membres suppléants de l'éventuelle commission mixte paritaire pour examiner les dispositions restant en discussion du projet de loi prorogeant le régime transitoire institué à la sortie de l'état d'urgence sanitaire.

Projet de loi relatif à la prorogation des chapitres VI à X du titre II du livre II et de l'article L. 851-3 du code de la sécurité intérieure - Désignation des candidats pour faire partie de l'éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion (en téléconférence)

La commission soumet au Sénat la nomination de MM. François-Noël Buffet, Marc-Philippe Daubresse, Mme Muriel Jourda, MM. Philippe Bonnecarrère, Jean-Yves Leconte, Mme Marie-Pierre de la Gontrie et M. Alain Richard comme membres titulaires, et de M. François Bonhomme, Mmes Jacky Deromedi, Jacqueline Eustache-Brinio, MM. Hervé Marseille, Jean-Pierre Sueur, Mme Éliane Assassi et M. Jean-Yves Roux, comme membres suppléants de l'éventuelle commission mixte paritaire réunie pour examiner les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la prorogation des chapitres VI à X du titre II du livre II et de l'article L. 851-3 du code de la sécurité intérieure.

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, prorogeant le régime transitoire institué à la sortie de l'état d'urgence sanitaire - Examen des amendements sur le texte de la commission (en téléconférence)

M. François-Noël Buffet, président. - Nous abordons l'examen des amendements relatifs au texte prorogeant le régime transitoire institué à la sortie de l'état d'urgence sanitaire.

EXAMEN DE L'AMENDEMENT DU RAPPORTEUR

Article 2 bis

M. Philippe Bas, rapporteur. - Le comité scientifique doit rendre publiques ses recommandations dès qu'il les a émises. Cette exigence doit s'appliquer à la fois pendant l'état d'urgence sanitaire, mais aussi pendant le régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire, comme le prévoit mon amendement n°  45 de coordination.

L'amendement n° 45 est adopté.

EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION

Article 1er

M. Philippe Bas, rapporteur. - Les amendements identiques nos  1, 14 rectifié et 21 de suppression de l'article 1er sont contraires à la position de la commission.

La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 1, 14 rectifié et 21.

M. Philippe Bas, rapporteur. - L'amendement n°  39 du Gouvernement, qui vise à rétablir l'échéance du 1er avril 2021 pour la prorogation du régime transitoire de sortie de l'état d'urgence sanitaire, est contraire à la position de la commission. Avis défavorable.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 39.

Articles additionnels après l'article 1er

M. Philippe Bas, rapporteur. - L'amendement n°  22 vise à supprimer la possibilité reconnue au Premier ministre d'interdire la circulation des personnes et des véhicules dans les zones de circulation active du virus. Le Sénat n'avait pas souhaité que cette disposition figurât dans le texte adopté par l'Assemblée nationale en juillet dernier. Néanmoins, compte tenu du niveau de contamination actuel, il me paraît difficile que nous privions le Gouvernement de cette possibilité. Mon avis est défavorable.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - Permettez-moi d'indiquer que nous reprenons là une position du Sénat. Il s'agit non pas d'empêcher la réglementation, mais simplement de prévoir que ne puisse pas être prononcée l'interdiction. Est-on sorti de l'état d'urgence ou est-on dans l'état d'urgence ? Dans le cadre de la sortie de l'état d'urgence, il semble pertinent de prévoir la possibilité de la réglementation et non pas de l'interdiction.

M. Philippe Bas, rapporteur. - La sortie de l'état d'urgence est un long tunnel : on applique des mesures dérogatoires au droit commun, mais prévues par le législateur. Le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur cette disposition de la loi de juillet dernier et précise qu'elle ne peut en aucun cas permettre aux autorités de l'État d'interdire aux personnes de sortir de leur domicile.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 22.

M. Philippe Bas, rapporteur. - L'amendement no  23, les amendements identiques nos  5 rectifié et 7, l'amendement n°  17 ainsi que les amendements identiques nos  6 rectifié et 8 concernent la fermeture d'établissements recevant du public (ERP), dont les discothèques. Mon avis est défavorable sur les amendements nos 23, 5 rectifié, 7 et 17. Je demande au Président du Sénat de se prononcer sur l'irrecevabilité des amendements nos 6 rectifié et 8 en application de l'article 41 de la Constitution.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - Ces amendements sont transpartisans.

M. Philippe Bas, rapporteur. - Nous examinons les amendements non pas en fonction de leurs auteurs, mais de leur contenu.

La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 23, 5 rectifié, 7 et 17.

La commission demande au Président du Sénat de se prononcer sur l'irrecevabilité des amendements nos 6 rectifié et 8 en application de l'article 41 de la Constitution.

M. Philippe Bas, rapporteur. - Conformément à la jurisprudence de la commission des lois, je suis défavorable à l'amendement n°  20 rectifié, qui vise à demander au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 20 rectifié.

M. Philippe Bas, rapporteur. - L'amendement n°  16 prévoit de prendre en compte dans la réglementation de l'accès aux ERP les caractéristiques de ceux-ci. Sont ici visés les stades. Il s'agit d'apporter de la souplesse en permettant l'instauration de jauges proportionnelles à la capacité d'accueil des établissements. Je comprends l'intention, mais juridiquement, l'autorité administrative dispose déjà de la possibilité de prendre en compte les capacités d'accueil des ERP. Mon avis est défavorable.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 16.

M. Philippe Bas, rapporteur. - J'émets un avis défavorable sur l'amendement n°  19 rectifié, qui prévoit la remise d'un rapport.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 19 rectifié.

M. Philippe Bas, rapporteur. - Il en est de même pour l'amendement n°  2, pour les mêmes raisons.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 2.

Article additionnel après l'article 1er bis (Supprimé)

M. Philippe Bas, rapporteur. - L'amendement n°  38 du Gouvernement a retenu toute mon attention : il concerne les problèmes de paiement des loyers des petites entreprises. Les locataires ont certainement besoin d'être protégés dans la période actuelle quand leur entreprise ne leur permet pas d'avoir un chiffre d'affaires suffisant, mais les bailleurs eux-mêmes ne sont pas toujours de grands groupes financiers. Le Gouvernement a mis en place, à juste titre, de nombreuses aides pour les entreprises, qui devraient leur permettre de faire face à leurs charges.

Je n'ai pas voulu m'opposer à cet amendement politiquement légitime, mais je vous propose, au travers des sous-amendements n°  46 et n°  47, des mesures conservatoires pour protéger le bailleur. Si l'entreprise locataire est en liquidation ou en redressement judiciaire, l'entreprise bailleur aura des droits de créancier privilégié pour récupérer tout ou partie du montant de ses loyers. Je suis favorable à l'amendement du Gouvernement sous réserve de l'adoption de ces deux sous-amendements.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - Quid de l'article 45 concernant ces dispositions ? Je me réjouis qu'il ne s'applique pas, mais j'aimerais avoir votre éclairage...

M. Philippe Bas, rapporteur. - Cette mesure ayant trait à la situation d'urgence sanitaire, je n'ai pas jugé utile d'opposer l'article 45 à cette disposition relative aux petites entreprises. Mais votre remarque est tout à fait justifiée. Si la commission souhaitait le faire, je serais impuissant à résister à cette lame de fond.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - Telle n'est pas ma demande ; je souhaitais simplement un éclairage de votre part.

M. Alain Richard. - Cette disposition est la conséquence d'une mesure de restriction d'activité liée au coeur du projet de loi, elle est donc recevable.

Le sous-amendement n° 46 est adopté, de même que le sous-amendement n° 47.

La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 38, ainsi sous-amendé.

Article 1er ter A

M. Philippe Bas, rapporteur. - Au travers des amendements nos  27 et 18 rectifié, nos collègues prévoient une dérogation pour les ressortissants français en leur permettant de regagner le territoire national en toute circonstance, même lorsque ceux-ci ne sont pas en situation de présenter à l'embarquement le résultat d'un test virologique concluant à l'absence de contamination. Par principe, un Français doit pouvoir rentrer dans son pays, mais l'exigence du test est une exigence de sécurité sanitaire : le virus n'a pas de nationalité. Si le retour de l'un de nos compatriotes devait être retardé parce qu'il est porteur du virus du covid-19, cela n'est en rien un empêchement définitif à revenir en France et il peut obtenir un laissez-passer consulaire pour lui permettre de voyager. Il ne serait pas prudent de faire droit à ces amendements.

M. Jean-Yves Leconte. - Je vous demande de faire évoluer votre position. Oui, nos ressortissants peuvent obtenir des laissez-passer consulaires, mais ceux-ci sont délivrés de manière totalement aléatoire et, qui plus est, les consulats sont surchargés. C'est la raison pour laquelle je souhaite que le décret d'application tienne compte de la difficulté que peuvent rencontrer des ressortissants français ou des personnes étrangères résidant légalement en France. Je demande la mise en place d'une procédure d'instruction transparente. D'ailleurs, le Conseil d'État a jugé qu'il n'était pas possible de bloquer un Français qui souhaitait entrer sur le territoire français. J'ajoute que les personnes concernées trouvent des moyens détournés pour venir en France.

Je précise en outre que le dépistage virologique ne signifie pas test PCR.

L'adoption de cet amendement serait de nature à faire évoluer la position du Gouvernement vers plus de transparence, sans changer fondamentalement les choses.

Mme Jacky Deromedi. - Je soutiens l'amendement de mon collègue. Les Français de l'étranger sont dans une situation extrêmement difficile : dans certains pays, ils ne peuvent pas faire de test. L'idée serait de leur demander de faire un test à l'arrivée et de trouver une solution d'hébergement le temps du résultat. Bien souvent, ils contournent l'obstacle en atterrissant dans un autre pays européen. Cette situation mérite d'être examinée.

M. Philippe Bas, rapporteur. - J'entends bien vos arguments, mais notons que cette situation ne concerne que quatre pays : le Bahreïn, les Émirats arabes unis, les États-Unis et le Panama. Il n'est pas contestable que nos ressortissants ont le droit constitutionnel de pouvoir rejoindre le territoire national, mais ils peuvent différer leur retour de quelques jours ou demander un laissez-passer consulaire. Aussi, permettre à une personne, quelle que soit sa nationalité, de monter à bord d'un avion alors qu'elle n'a pas prouvé qu'elle n'est pas contagieuse constitue une prise de risque. Je préfère que nous en restions à la position que j'ai exprimée précédemment.

M. Jean-Yves Leconte. - Nous avons vraiment besoin de votre aide pour demander au Gouvernement de faire évoluer sa position. Aujourd'hui, le décret n'est pas applicable. Les consulats délivrent des laissez-passer consulaires sans règle, ou nos concitoyens contournent le problème. Il serait donc préférable d'édicter une règle qui soit applicable, avec une procédure de délivrance de laissez-passer transparente.

La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 27 et 18 rectifié.

M. Philippe Bas, rapporteur. - Je suis défavorable à l'amendement n°  28 rectifié, qui prévoit une demande de rapport.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 28 rectifié.

Article additionnel après l'article 1er ter A

M. Philippe Bas, rapporteur. - Les habitants de Saint-Pierre-et-Miquelon sont inquiets : le Canada et les États-Unis connaissent une période d'activité virale intense. Le préfet recommande donc non seulement de respecter l'obligation de présenter un test de dépistage négatif de moins de 72 heures avant l'embarquement au départ du Canada, mais aussi de rester à l'isolement pendant sept jours.

Par l'amendement n°  31, nos collègues souhaitent que ce soit non plus une recommandation, mais une obligation. La difficulté évoquée ne vient toutefois pas d'une insuffisance du cadre légal : les pouvoirs publics ont déjà le droit d'imposer une quarantaine en application de la loi de sortie de l'état d'urgence sanitaire ou des dispositions permanentes établies en matière de quarantaine. Je suis donc défavorable à cet amendement.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 31.

Article 1er ter B

M. Philippe Bas, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n°  40, qui est contraire à la position de la commission.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 40.

Article 1er ter

M. Philippe Bas, rapporteur. - Il en est de même pour l'amendement n°  42.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 42.

Article 1er quater

M. Philippe Bas, rapporteur. - Je suis favorable à l'amendement n°  15, sous réserve de l'adoption du sous-amendement n°  48, afin de compléter la liste des instances administratives qui seraient autorisées à se réunir à distance.

Le sous-amendement n° 48 est adopté.

La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 15, ainsi sous-amendé.

M. Philippe Bas, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n°  36 du Gouvernement, qui est contraire à la position de la commission.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 36.

Article additionnel après l'article 1er quater

M. Philippe Bas, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n°  35 rectifié, qui concerne la caducité des mesures d'urgence prises par ordonnance au 1er avril 2021. Il se peut que certaines dispositions doivent perdurer après cette date.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 35 rectifié.

Article 1er quinquies

M. Philippe Bas, rapporteur. - L'amendement n°  37 est contraire à la position de la commission : avis défavorable.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 37.

Article additionnel après l'article 1er quinquies

M. Philippe Bas, rapporteur. - Les amendements nos  4 rectifié bis, 34 et  33 visent à prolonger jusqu'au 31 décembre 2020 une ordonnance du 25 mars 2020 pour permettre des réunions d'instances d'entreprise. Mme Hélène Conway-Mouret m'a indiqué que son amendement lui avait été suggéré par le Medef. Je comprends les motivations des entreprises, qui veulent avoir un peu de souplesse. Je me suis toutefois interrogé sur la recevabilité de ces amendements au titre de l'article 45 de la Constitution. Estimant qu'ils étaient recevables, j'émets un avis favorable.

La commission émet un avis favorable aux amendements nos 4 rectifié bis, 34 et 33.

M. Philippe Bas, rapporteur. - L'amendement n°  30 rectifié prolonge le délai d'approbation des comptes des personnes morales et entités de droit privé. Cet amendement est doublement inopportun : pour celles qui ont clos un exercice comptable à la fin de la période couverte par l'ordonnance du 25 mars, l'amendement aurait des effets contreproductifs ; à l'inverse, pour celles qui ont clos un exercice comptable au début de ladite période, on ne saurait reporter jusqu'à la fin décembre 2020 l'approbation des comptes de l'année 2019. Mon avis est défavorable.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 30 rectifié.

Article 2

M. Philippe Bas, rapporteur. - Avis défavorable aux amendements identiques nos  3 et 13 rectifié de suppression de l'article 2, ainsi qu'à l'amendement n°  41, qui vise à rétablir la date du 1er avril 2021, tous contraires à la position de la commission.

La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 3, 13 rectifié et 41.

M. Philippe Bas, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement n°  44 du Gouvernement, qui est un amendement de précision.

La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 44.

Articles additionnels après l'article 2 bis

M. Philippe Bas, rapporteur. - Les amendements nos  9 et 10 visent à autoriser le vote par correspondance en vue des élections régionales et départementales de mars 2021. Le Sénat a adopté des amendements de même nature au cours de l'examen d'un précédent texte, mais l'Assemblée nationale n'avait pas souhaité les maintenir.

Le vote par correspondance a été supprimé à la fin des années 1970 en raison d'un certain nombre d'excès. Si l'on diffère au fil du temps toutes les élections, il faudra se poser la question de la présidentielle et des législatives. Nous sommes condamnés à trouver les moyens d'une expression du suffrage universel qui soit sûre pour éviter les fraudes et quelles que soient les circonstances sanitaires.

Le débat est justifié, et je n'ai pas d'objections de principe à favoriser le vote par correspondance et le vote électronique. Toutefois, tels qu'ils sont rédigés, ces amendements ne me paraissent pas présenter toutes les garanties suffisantes. C'est pourquoi je m'en remets à la sagesse du Sénat. Mettons à profit le débat qui aura lieu dans l'hémicycle pour progresser sur cette question et sécuriser ce mode de votation.

Mme Cécile Cukierman. - Je reste très dubitative sur l'utilisation du vote par correspondance. Quand les formations politiques ont donné leur avis lors des élections municipales, aucune d'entre elles n'a jugé utile de revenir au vote par correspondance tant la question de la légitimité de ce mode de votation pouvait donner lieu à de nombreux contentieux électoraux.

Cependant, vous ne pouvez laisser à penser, monsieur le rapporteur, qu'une élection se cantonne à l'organisation des opérations électorales le jour du vote. La campagne électorale qui précède l'élection semble aujourd'hui très fortement compromise en raison du contexte sanitaire. Je ne doute pas qu'elle donnera plus encore que de coutume la prime au sortant, mais je ne suis pas sure que cela soit une bonne chose pour la vitalité démocratique de notre pays.

M. Alain Richard. - Nous avons déjà eu cette discussion sur les difficultés et les avantages du vote par correspondance et nous avions alors envisagé de constituer un groupe de travail en vue d'analyser les conditions dans lesquelles on pourrait instaurer ce mode de votation avec les garanties qui s'y attacheraient. Mettons-nous au travail pour apporter une réponse.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - Ce sujet est délicat. Nous proposons ces amendements de manière très pragmatique. Je lis dans la presse qu'il est question de ne pas exclure le report des élections régionales et départementales.

Lorsque nous avons abordé ce point lors de la révision du texte qui allait entrer en vigueur avant les élections municipales, certains, je peux le comprendre, avaient évoqué la précipitation, ou plutôt la difficulté de prendre des dispositions dans les délais impartis. Nous sommes absolument ouverts à toute réécriture plus conforme juridiquement : même dans un état de crise sanitaire aggravé, les opérations électorales doivent pouvoir se dérouler. Sans comparer avec d'autres pays qui ont recours au vote par correspondance, dont l'un qui défraie aujourd'hui la chronique, je reste persuadée qu'il doit être possible d'organiser un tel mode de votation stable. Nous devons nous assurer que les Français pourront voter lors des élections départementales et régionales.

Mme Valérie Boyer. - Comment assortir le vote par correspondance de dispositions permettant d'organiser une campagne par correspondance, sachant qu'en seront exclues les personnes n'ayant pas accès aux outils numériques ? Il me semble difficile d'examiner l'un de ces éléments sans l'autre.

M. Christophe-André Frassa. - Le vote par correspondance a été pratiqué jusqu'à une date récente pour les Français de l'étranger, pour des raisons pratiques. Avec l'arrivée du vote électronique, le ministère de l'intérieur a usé d'un lobbying assez important pour supprimer le vote par correspondance.

Aujourd'hui, nous avons essayé à plusieurs reprises de sensibiliser le Gouvernement à cette question. C'est l'un des moyens utiles d'expression des suffrages lors d'une crise sanitaire. Mme de la Gontrie a parlé d'un exemple qui défraie la chronique, mais ce mode de votation fonctionne très bien en Suisse, en Italie. Si le processus est encadré, il n'y a pas de raison que nous connaissions les errements des années 1970. À titre personnel, je voterai cet amendement.

M. Jean-Yves Leconte. - Il faut anticiper : quid de la situation sanitaire lors des prochaines élections ? Il nous faut interroger le Gouvernement sur ses intentions.

Nous avons reporté d'un an les élections des conseillers des Français de l'étranger et d'un an les élections pour les sénateurs représentant les Français de l'étranger. Compte tenu de l'évolution de la situation mondiale, nous ne sommes pas du tout certains que les premières élections pourront se tenir en mai prochain. Il est donc indispensable de prévoir de nouveaux modes de votation. Le système de vote électronique retenu par le ministère des affaires étrangères est mis en oeuvre par une société en liquidation judiciaire ; nous ne savons absolument pas si le système sera opérationnel.

Ces amendements nous permettent d'anticiper, car nous serions en réelles difficultés si les élections des conseillers des Français de l'étranger ne pouvaient pas être tenues, ce qui remettrait en cause les élections sénatoriales de 2021.

Mme Marie Mercier. - Le second tour des élections municipales a été organisé bien après le premier ; les élections sénatoriales se sont déroulées dans des conditions très particulières. Nous vivons certes une situation inédite, mais cela va se reproduire. Aussi est-il nécessaire d'anticiper - c'est notre rôle.

M. Philippe Bas, rapporteur. - Ce débat est utile. J'entends bien ce qu'a dit Cécile Cukierman, les élections sans campagne électorale seraient préjudiciables à la vitalité démocratique. Mais l'absence d'élections le serait plus encore. L'enjeu est de faire en sorte que les élections soient organisées. Aux États-Unis, l'élection présidentielle va se tenir en dépit du débat autour du vote par correspondance.

Au fond, on entend que l'on pourrait reporter les élections municipales, régionales ou départementales, alors que nous, représentants des collectivités territoriales de la République, nous ne saurions souscrire à un tel raisonnement. Mais imaginez que l'élection présidentielle ait lieu l'année prochaine... On s'interdirait alors tout débat sur la tenue ou non de l'élection. Sans vouloir être un oiseau de mauvais augure, nous ne savons pas quelle sera la situation sanitaire en 2022. Mettons notre démocratie en situation de pouvoir fonctionner aussi normalement que possible, quelles que soient les circonstances sanitaires. Le choc que nous venions de subir avant les élections municipales était trop récent pour agir, mais là nous avons le temps de la réflexion.

Les amendements dont nous discutons ont le mérite de soulever un problème, que nous avons déjà posé au cours d'un précédent débat législatif, comme l'a rappelé Alain Richard. Menons en effet une réflexion complète à la fois sur la sécurisation d'un vote électronique ou d'un vote par correspondance et sur les modalités d'organisation d'une campagne électorale dans un contexte de crise épidémique. Aussi ai-je envie de vous proposer d'émettre un avis défavorable sur ces amendements en vue d'engager une réflexion.

Mme de la Gontrie s'est dite ouverte au dialogue ; présentons en séance des amendements plus complets, même si je n'ai pas l'illusion de penser qu'ils règleront tous les problèmes, et soulevons le problème en commission mixte paritaire. Nous aurons ainsi mis sur la table la nécessité que notre démocratie s'adapte aux circonstances sanitaires telles que celles que nous connaissons.

Dans ces conditions, j'émets plutôt un avis défavorable, un avis qui peut vous paraître paradoxal, mais qui est justifié par le souci de faire une proposition de rédaction plus complète.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - La plaidoirie est un exercice au résultat inégal : nous avons réussi à vous faire basculer d'un avis de sagesse vers un avis défavorable...

Nous sommes ouverts à toute rédaction plus aboutie. Mais si nous ne saisissons pas dès ce soir l'occasion d'introduire des dispositions dans le projet de loi, nous n'en aurons pas d'autres dans des délais satisfaisants. Mettons à profit les quelques heures qui nous séparent de l'examen du projet de loi en séance.

M. François-Noël Buffet, président. - Au bénéfice de l'ensemble de ces observations, donnons-nous le temps d'élaborer une nouvelle proposition, qui pourrait vous être présentée cet après-midi à l'issue de l'audition de Mme Simonnot, si M. le rapporteur en est d'accord.

M. Philippe Bas, rapporteur. - J'en suis d'accord.

La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 9 et 10 rectifié.

M. Philippe Bas, rapporteur. - L'amendement n°  43 permet à chaque mandataire de disposer de deux procurations pour les élections régionales et départementales de mars 2021. J'y suis favorable, mais là aussi nous pourrions sans doute améliorer la proposition du Gouvernement dans les mêmes délais.

La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 43.

M. Philippe Bas, rapporteur. - Je suis défavorable à l'amendement n°  32, qui demande la remise d'un rapport.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - Nous avions présenté un autre amendement, qui a été déclaré irrecevable en application de l'article 40 de la Constitution. Aussi ai-je proposé un rapport pour soulever la question en séance publique.

La prison de Seysses a fait émerger un problème simple : les détenus n'ont pas droit au masque. Le tribunal administratif a considéré qu'il y avait lieu de donner injonction à l'établissement pénitentiaire de fournir des masques, une décision annulée par le Conseil d'État.

Nous sommes obligés de porter un masque partout. Alors que l'épidémie s'aggrave, le port du masque n'est pas possible dans les prisons et les centres de rétention parce que les personnes qui y sont retenues n'en disposent pas. Un employeur est obligé de proposer des masques à ses salariés ; j'avais donc proposé que la fourniture de masques soit obligatoire dans ces établissements. Mais l'article 40 m'a été opposé. D'où ce nouvel amendement, car j'aimerais que le Gouvernement s'exprime sur ce point.

M. Philippe Bas, rapporteur. - Je donnerai un avis défavorable à cette demande de rapport, par cohérence avec la jurisprudence de la commission. Mais je suis sensible au problème que vous soulevez. Il est souhaitable d'ouvrir le débat pour que le Gouvernement s'explique. Je relaierai votre demande.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 32.

Article 3 (Supprimé)

M. Philippe Bas, rapporteur. - L'amendement n°  25 est contraire à la position de la commission : avis défavorable.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 25.

Article 4 (Supprimé)

M. Philippe Bas, rapporteur. - L'amendement n°  26 est également contraire à la position de la commission : avis défavorable.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 26.

Le sort des amendements du rapporteur examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Sort de l'amendement

Articles additionnels après l'article 1er bis

Mme BAS, rapporteur

46

Adopté

Mme BAS, rapporteur

47

Adopté

Article 1er quater

Mme BAS, rapporteur

Ss-amdt 48

Adopté

Article 2 bis

Mme BAS, rapporteur

45

Adopté

Articles additionnels après l'article 2 bis

Mme BAS, rapporteur

49

Adopté

Mme BAS, rapporteur

50

Adopté

La commission a donné les avis suivants sur les autres amendements de séance :

Auteur

Avis de la commission

Article 1er

Mme ASSASSI

1

Défavorable

Mme BENBASSA

14 rect.

Défavorable

Mme de LA GONTRIE

21

Défavorable

Le Gouvernement

39

Défavorable

Articles additionnels après l'article 1er

Mme de LA GONTRIE

22

Défavorable

Mme de LA GONTRIE

23

Défavorable

M. BABARY

5 rect. bis

Défavorable

M. BRISSON

7

Défavorable

M. SAVIN

17

Défavorable

M. BABARY

6 rect.

Irrecevable au titre de
l'article 41 de la Constitution

M. BRISSON

8

Irrecevable au titre de
l'article 41 de la Constitution

Mme BENBASSA

20 rect.

Défavorable

M. SAVIN

16

Défavorable

Mme BENBASSA

19 rect.

Défavorable

Mme ASSASSI

2

Défavorable

Article additionnel après l'article 1er bis (Supprimé)

Le Gouvernement

38

Favorable

Article 1er ter A

M. CADIC

27

Défavorable

M. LECONTE

18 rect. bis

Défavorable

M. CADIC

28 rect.

Défavorable

Article additionnel après l'article 1er ter A

M. ARTANO

31

Défavorable

Article 1er ter B

Le Gouvernement

40

Défavorable

Article 1er ter

Le Gouvernement

42

Défavorable

Article 1er quater

Mme IMBERT

15

Favorable

Le Gouvernement

36

Défavorable

Article additionnel après l'article 1er quater

M. LECONTE

35 rect. bis

Défavorable

Article 1er quinquies

Le Gouvernement

37

Défavorable

Articles additionnels après l'article 1er quinquies

Mme CONWAY-MOURET

4 rect. bis

Favorable si rectifié

M. SAVIN

34

Favorable

M. LECONTE

33

Favorable si rectifié

Mme CONWAY-MOURET

30 rect.

Défavorable

Article 2

Mme ASSASSI

3

Défavorable

Mme BENBASSA

13 rect.

Défavorable

Le Gouvernement

41

Défavorable

Le Gouvernement

44

Favorable

Articles additionnels après l'article 2 bis

M. KERROUCHE

9

Défavorable

M. KERROUCHE

10 rect.

Défavorable

Le Gouvernement

43

Favorable

Mme de LA GONTRIE

32

Défavorable

Article 3 (Supprimé)

Mme de LA GONTRIE

25

Défavorable

Article 4 (Supprimé)

Mme de LA GONTRIE

26

Défavorable

La réunion, suspendue à 10 h 30, est reprise à 15 h 30.

Audition de Mme Dominique Simonnot, candidate proposée par le Président de la République aux fonctions de Contrôleur général des lieux de privation de liberté, en application des articles 13 et 65 de la Constitution ainsi que de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relatives à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution

M. François-Noël Buffet, président. - Mes chers collègues, nous entendons aujourd'hui, dans le cadre de la procédure prévue par l'article 13 de la Constitution, Mme Dominique Simonnot, candidate présentée par le Président de la République pour exercer les fonctions de Contrôleur général des lieux de privation de liberté, nommé pour un mandat de six ans non renouvelable.

Conformément à la loi organique et à la loi ordinaire du 23 juillet 2010, le Président de la République devra renoncer à cette nomination si l'addition des votes négatifs exprimés à l'Assemblée nationale et au Sénat représente, au total, au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés.

Le vote aura lieu à la suite de cette audition, qui est publique et que nous avons également ouverte à la presse, tout en adaptant cette obligation de publicité aux conditions sanitaires actuelles. Nous devrons procéder au dépouillement aux alentours de dix-neuf heures, afin de respecter l'obligation organique d'un dépouillement simultané dans les deux assemblées. Les délégations de vote ne sont pas autorisées, conformément à l'article 1er de l'ordonnance du 7 novembre 1958.

Le poste de Contrôleur général des lieux de privation de liberté a été créé par une loi du 30 octobre 2007, lui ayant conféré le statut d'autorité administrative indépendante. Le Contrôleur général, assisté d'une équipe d'une cinquantaine de personnes, a pour mission de visiter les établissements pénitentiaires, les locaux de garde à vue, les centres de rétention administrative, les centres éducatifs fermés ou encore les établissements de santé, afin de s'assurer que les droits fondamentaux des personnes privées de liberté y sont bien respectés.

Environ 150 visites sont effectuées chaque année. Chacune d'entre elles donne lieu à l'établissement d'un rapport assorti de recommandations. Par ailleurs, un rapport annuel est adressé au Président de la République, au Premier ministre et au Parlement.

Deux personnalités ont assumé jusqu'ici les fonctions de Contrôleur général : M. Jean-Marie Delarue, de 2008 à 2014, puis Mme Adeline Hazan, dont le mandat est arrivé à échéance dans le courant du mois de juillet dernier.

Madame Simonnot, vous connaissez bien l'univers carcéral et vous êtes une observatrice attentive du fonctionnement de notre justice pénale. Après des études de droit, vous avez travaillé comme éducatrice dans l'administration pénitentiaire. Vous avez suivi des personnes bénéficiant d'une libération conditionnelle, condamnées à un sursis probatoire ou condamnées à un travail d'intérêt général, afin de les accompagner dans leur parcours de réinsertion.

En 1991, vous êtes devenue journaliste au sein du quotidien Libération, où vous avez suivi les grandes affaires judiciaires, mais aussi la justice du quotidien. Vous avez notamment chroniqué les audiences de comparution immédiate dans une rubrique intitulée « Carnets de justice ».

En 2006, vous avez été recrutée par Le Canard enchaîné. Vous avez continué à suivre le fonctionnement de l'institution judiciaire et à tenir la chronique des audiences de comparution immédiate, tout en menant régulièrement des enquêtes sur de grands sujets de société.

Vous êtes l'auteur de plusieurs ouvrages : en 2003, Justice en France : une loterie nationale ; en 2014, Plus noir dans la nuit, consacré à la grande grève des mineurs de 1948 ; en 2018, Amadora, une enfance tzigane, qui raconte l'itinéraire d'une famille rom ; enfin, en 2019, Coups de barre. Justice et injustices en France.

Ces rappels faits, je vous cède la parole pour une intervention liminaire, afin que vous puissiez nous présenter votre candidature et votre projet. Puis, mes collègues et moi-même vous poserons quelques questions.

Mme Dominique Simonnot, candidate aux fonctions de Contrôleur général des lieux de privation de liberté. - Mesdames, messieurs les sénateurs, je suis tout à la fois intimidée et fière d'être ici. J'ai été la première surprise que l'on me propose ce poste ; je n'avais jamais pensé une seconde l'occuper un jour et j'escomptais plutôt terminer tranquillement ma carrière au Canard Enchaîné. C'est pourquoi j'ai longtemps réfléchi avant d'accepter. Pour autant, au regard de ma vie professionnelle, cette proposition m'apparaît comme un aboutissement.

En effet, mon premier « travail sérieux », c'était au sein de l'administration pénitentiaire. En tant qu'éducatrice, je me suis occupée de tous les lieux placés, aujourd'hui, sous la houlette du Contrôleur général, à commencer par les prisons, quand j'avais échoué à remettre les personnes dans le droit chemin ou quand je préparais leur sortie.

À cet égard, je mentionnerai ce rapport du Sénat intitulé Prisons : une humiliation pour la République, qui a fait date par son extrême sévérité. Oui, le nombre de malades mentaux en prison est une catastrophe ! La prison se met à jouer le rôle asilaire des vieux asiles d'antan : on a fermé des lits en psychiatrie, en caressant le rêve de « remettre le fou dans la cité », mais les centres d'accueil de jour dont on avait besoin n'ont pas été créés en nombre suffisant, et des personnes, laissées sans soins, se retrouvent ainsi dans les box d'accusés, souvent en comparution immédiate. C'est un fait que j'avais en tête, déjà, lorsque je travaillais dans l'administration pénitentiaire, et j'observe qu'Adeline Hazan et Jean-Marie Delarue ont eu parmi leurs préoccupations premières de visiter les hôpitaux psychiatriques.

Je suis impressionnée par le travail qui se profile, mais, si je suis nommée, je m'y consacrerai entièrement.

Je connais également les centres de rétention. À une certaine époque, il était plus facile d'y entrer qu'aujourd'hui. Je me faisais passer pour une proche d'un retenu et je pouvais observer ce qui s'y passait. J'ai arrêté de procéder ainsi, car je n'aime pas mentir, mais, quand je dépose des demandes officielles, elles sont refusées.

J'aurai également à coeur de m'occuper des geôles de garde à vue et des palais de justice. J'ai vu tant de personnes sortir de garde à vue dans des états préoccupants. Je me souviens d'un bûcheron de l'est de la France venu manifester à Paris avec son fils : il avait passé deux jours de garde à vue à Aubervilliers ; en racontant l'état de la cellule et les conditions de sa garde à vue, il en pleurait. Non seulement ces situations peuvent être choquantes du point de vue de la dignité, mais il est en plus difficile d'aller se défendre devant des juges quand on sent mauvais ou que l'on n'a plus de ceinture à son pantalon. Au palais de justice de Paris, pourtant tout neuf et tout beau, il y aurait eu des dérives en termes de maltraitance au niveau du dépôt. Cela prouve l'attention qu'il faut porter à ces endroits.

J'aurai tout autant à coeur de m'occuper des centres éducatifs fermés. Combien d'enfants ai-je reçus dans mon bureau ou vus présenter en comparution immédiate qui avaient été jetés à la rue par leurs parents, placés dès leur plus tendre enfance, baladés de familles d'accueil en foyers. Certains s'en sortent, mais la plupart ne s'en sortent pas - en serions-nous capables ? - et on les retrouve sur les bancs de la correctionnelle. Alors, on entend le juge égrener ce qu'ils ont vécu et l'on a tendance à passer sur cette partie de leur vie, sans doute déterminante... Il faudrait peut-être s'y intéresser un peu plus.

Je n'ai jamais pu aller en zone d'attente, mais j'irai. Je citerai juste cette anecdote : des amis touristes tellement sûrs d'eux dans la vie qu'ils étaient convaincus de ne jamais connaître un jour de zone d'attente ou de centre de rétention qu'ils en ont négligé de renouveler leur visa en France et ont eu, de ce fait, l'occasion de me raconter les choses de l'intérieur.

Mesdames, messieurs les sénateurs, j'essaierai de remplir cette lourde tâche avec le plus d'honnêteté, d'impartialité et d'acharnement possible, si, bien sûr, vous acceptez d'entériner ma nomination.

M. Jean-Pierre Sueur. - Je suis de ceux qui ont suivi, avec beaucoup de respect, le travail accompli par Jean-Marie Delarue et Adeline Hazan. Notre République s'honore d'avoir une institution telle que le Contrôleur général, qui permet un regard objectif sur ces lieux de privation de liberté.

Nous connaissons vos écrits. Si vous étiez nommée, nous ressentirions une certaine frustration le mercredi matin, car nous serions privés de votre chronique, témoignant d'un grand attachement au réel. Mais nous aurions alors la chance de lire des rapports, certainement nourris par votre expérience...

Quelle est votre position sur la question de la création de nouvelles places en prison ? La priorité est-elle de créer des places ou de restaurer les lieux de détention actuels, dont certains méritent de l'être ? Par ailleurs, que pensez-vous utile de faire au regard de la décision récente du Conseil constitutionnel et des remarques de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), demandant une législation complémentaire autour du respect de la dignité au sein des prisons et du droit à la dignité des personnes détenues ?

Mme Catherine Di Folco. - Merci de vos propos liminaires, empreints d'une grande sensibilité et d'une grande humanité. Les recommandations du Contrôleur général sont souvent suivies de peu d'effets, ou alors de manière différée. Peut-on remédier à ce problème ? Si oui, comment ?

Mme Esther Benbassa. - Comme M. Sueur, je veux rendre hommage à vos prédécesseurs et je rejoins Mme Di Folco sur le fait que votre rapport sensible à cette question des lieux de privation de liberté nous est précieux. En cette période, il y a beaucoup à faire. J'ai visité, samedi dernier, la prison de Bourg-en-Bresse : les consignes concernant la pandémie n'y sont pas suivies, les détenus ne portent pas de masque et il n'y a pas eu de tests, alors même que 50 cas de Covid ont été recensés parmi le personnel et 9 parmi le personnel de Sodexo. La situation de cet établissement est donc problématique, et on peut imaginer que c'est le cas dans d'autres. Il faudrait être encore plus attentif que d'habitude. Par ailleurs, que comptez-vous faire pour les centres de rétention, qui sont dans un piteux état ?

M. Jean-Yves Leconte. - Nous étions nombreux à nous inquiéter de la vacance de ce poste pendant ces derniers mois, de surcroît en cette période complexe, qui a vu le nombre de suicides augmenter en prison. De même, la situation dans les centres de rétention administrative (CRA) est très préoccupante compte tenu de la pandémie, d'autant que certains de ceux qui s'y trouvent n'ont aucune perspective d'éloignement. Certains des centres que j'ai visités ne mettent pas de gel hydroalcoolique à disposition, et les personnes qui y sont retenues, outre qu'elles ne portent pas de masque, doivent boire à un robinet commun. Même les personnels de la police aux frontières dénoncent la qualité de la nourriture qu'ils donnent aux personnes retenues.

Vous avez indiqué comment vous comptiez aborder cette belle mission, mais pensez-vous qu'avec 33 personnes et 5 millions d'euros de budget vous pourrez atteindre vos objectifs ? Cent cinquante visites, c'est bien peu pour faire le tour de la question.

Autre sujet de préoccupation : quelle est l'utilité des rapports, qui sont remis dix mois après les visites ? Comptez-vous faire autant de visites, demander davantage de moyens pour pouvoir rendre ces rapports plus rapidement ? Les questions de l'hygiène, de la nourriture, des droits humains n'attendent pas.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Pour ce type de poste, l'indépendance est une qualité essentielle. À cet égard, votre parcours professionnel me rassure, comme m'avaient rassuré ceux d'Adeline Hazan et de Jean-Marie Delarue.

Autre nécessité : la passion pour un sujet qui peut paraître rébarbatif. Vos chroniques, comme l'a dit Jean-Pierre Sueur, témoignaient du réel. Si l'on n'a jamais assisté aux audiences de comparution immédiate, soit comme prévenu, soit comme avocat, soit comme magistrat, on ne sait pas ce qui s'y passe. Pour tout un chacun, la justice, ce sont les grandes affaires judiciaires, les erreurs judiciaires, mais c'est rarement le quotidien.

Ma première question porte sur l'articulation de l'action du Contrôleur avec celle de la Défenseure des droits. Toutes les deux avez des profils atypiques, êtes engagées sur cette question des droits : comment imaginez-vous d'agir pour un maximum d'efficacité ?

Ma seconde question a trait à une situation plus récente, qui m'a d'ailleurs amenée à déposer un amendement au projet de loi prorogeant le régime transitoire institué à la sortie de l'état d'urgence. Un détenu de la maison d'arrêt de Seysses a assigné en référé l'administration pénitentiaire pour qu'on lui fournisse un masque. Le tribunal administratif de Toulouse lui a donné raison, jugement cassé par le Conseil d'État. Cette situation est assez ubuesque : chacun doit porter un masque, sauf les détenus, d'autant qu'ils ne peuvent pas s'en procurer, sauf à « cantiner ». L'histoire devient cruelle quand on sait qu'on suspecte un cluster dans cette maison d'arrêt, où deux détenus et trois gardiens sont malades. Comment agiriez-vous face à une telle situation ?

Mme Cécile Cukierman. - Je veux aborder la question de l'internement psychiatrique. Même si l'obligation pour tout un chacun de porter un masque n'est pas comparable à celle des prisonniers, c'est parfois un facteur d'oppression supplémentaire dans les établissements psychiatriques. En outre, l'altération de la santé mentale de nombre de nos concitoyens pendant le confinement et, peut-être plus encore, depuis la fin du confinement a conduit à un certain nombre de cas de violence et à une augmentation du nombre de ces internements dans ces établissements, où la dignité humaine n'est pas toujours respectée et où le personnel manque. Quelle attention porterez-vous à ces lieux particuliers de privation de liberté ?

Mme Brigitte Lherbier. - C'est une évidence, le placement d'un jeune dans un foyer de l'aide sociale à l'enfance (ASE) peut le déstructurer. Comment le Contrôleur général peut-il aller à l'encontre de cette situation ? Comment lutter contre ce déterminisme, casser cette spirale qui entraîne ce jeune vers la prison ? La prison doit rester une réponse à un acte répréhensible.

Mme Dominique Simonnot. - Monsieur le sénateur Sueur, comme Jean-Marie Delarue et Adeline Hazan, je m'interroge : à quoi bon construire de nouvelles places de prison quand on n'est pas capable de rendre dignes celles qui existent ? Cette surpopulation n'est pas viable. C'est ce qui a amené Adeline Hazan à promouvoir un système de régulation carcérale. Imaginez ce que peut être le métier de surveillant quand vous avez sous votre garde 110 détenus, dont plus de 30 % souffrent de graves pathologies mentales. Ces conditions souvent indignes ne sont pas humaines.

La solution de facilité, c'est d'ouvrir de nouvelles places. Ensemble, le législateur et le Contrôle général, n'est-il pas possible de définir des mécanismes de régulation ? Je pense par exemple à la ferme de Moyembrie, qui accueille des détenus en fin de peine, au bracelet électronique, à ce qu'on appelait autrefois les arrêts domiciliaires, c'est-à-dire la prison à la maison. Une loi avait été votée en ce sens, mais il faudrait aller plus loin.

Après avoir connu une diminution, la population carcérale recommence à augmenter assez fortement. C'est pourquoi il faut essayer toutes les alternatives possibles. Une agence du travail d'intérêt général et de l'insertion professionnelle a même été créée, qui nous aurait été bien utile à l'époque où j'étais éducatrice.

En outre, les partenariats public-privé coûtent très cher, et quand l'État devient enfin propriétaire des lieux, ceux-ci sont tellement dégradés qu'il faut tout reconstruire.

S'agissant des décisions du Conseil constitutionnel, de la Cour européenne des droits de l'homme et de la Cour de cassation sur la dignité humaine en détention, si vous me faites l'honneur de confirmer cette proposition de nomination à ces fonctions, je mettrai à votre disposition les nombreuses ressources documentaires du Contrôle général. Par ailleurs, et fort logiquement, après les personnes en détention provisoire, tous les détenus pourront demander au juge judiciaire d'être libérés en raison des conditions indignes de celle-ci. Cela doit aller de pair avec la diminution de la population carcérale.

Mme Di Folco m'interroge sur les recommandations qui restent sans suite. Si je suis nommée à ces fonctions, je n'ai pas l'intention de diriger une autorité qui servirait d'alibi à la République. Adeline Hazan trouvait cela inacceptable, Jean-Marie Delarue s'est emporté à de nombreuses reprises à ce sujet. À un moment, il faut passer à la vitesse supérieure. En tout cas, je ne me priverai pas d'alerter la presse et de vous demander de l'aide pour que ces recommandations soient suivies d'effet.

Madame Benbassa, la situation que vous décrivez au centre pénitentiaire de Bourg-en-Bresse est terrible : ce qui devait arriver est arrivé. Si je suis nommée à ces fonctions, je m'y rendrai.

S'agissant des centres de rétention, Adeline Hazan a parlé à leur sujet d'univers carcéral : on y menotte les gens alors qu'ils n'ont pas commis de délit, et que la nourriture y soit immonde n'a rien d'étonnant. Leur situation doit être améliorée.

Comme M. Leconte, je m'interroge : qui est placé en centre de rétention administrative (CRA) et pourquoi ? Je ne dispose pas d'informations fiables sur le sujet. C'est d'autant plus étonnant que pratiquement personne ne peut quitter la France compte tenu de la situation sanitaire. J'ai écrit des articles à ce sujet : peut-être vaudrait-il mieux consacrer plus d'argent à l'amélioration de ces lieux, qui coûtent très cher.

Concernant le budget, si je suis nommée, nous nous débrouillerons. Ce n'est sans doute pas le meilleur moment pour demander une augmentation du budget, mais il paraît qu'il faut toujours le faire, faute de quoi on n'obtient rien ! Adeline Hazan avait demandé un ou deux contrôleurs supplémentaires ; je ferai de même si je suis nommée.

Je souhaite également hâter la publication des rapports après chaque visite, car, lorsque la publication est trop tardive, le rapport risque d'être déconnecté de la réalité.

Je rends hommage au Canard enchaîné, car j'ai appris au sein de ce journal qui ne dépend de personne ce qu'est la vraie indépendance. Cela me brise coeur de penser que je vais le quitter si j'ai la chance d'être nommée.

L'articulation avec le Défenseur des droits se fera naturellement, car nos missions se recoupent. J'espère que nous pourrons travailler en symbiose.

La décision du Conseil d'État sur les masques est incompréhensible. Il vous reviendra peut-être de voter une loi sur un besoin primaire tel que celui de masques. Cette décision a pour effet d'obliger les détenus à cantiner leurs masques.

La surpopulation n'a jamais cessé dans les maisons d'arrêt. L'administration pénitentiaire est mon ancienne maison, et en tant que journaliste, je n'ai jamais voulu l'attaquer, car elle ne peut pas afficher complet. Comme le personnel pénitentiaire, elle subit les conditions de détention.

La dégradation mentale que l'on observe depuis le début du confinement est très préoccupante, mais c'est un élément d'un tout que le Contrôle général ne pourra pas réformer à lui seul. Quand des enfants ne sont pas placés chez les bonnes personnes, qu'ils sont enlevés trop tard ou trop brutalement à leurs parents, cela crée des troubles. Les hôpitaux psychiatriques n'ont pas assez de lits. Le personnel s'use, comme dans les prisons, car il est usant de se sentir impuissant au travail. J'ai éprouvé ce sentiment d'impuissance quand j'étais éducatrice.

Mme Laurence Harribey. - Comment passer du statut de témoin critique à celui de Contrôleur général ? Quels seraient, selon vous, quatre ou cinq indicateurs de la réussite de votre éventuel mandat ? Pouvez-vous citer des expériences menées dans d'autres pays qui vous inspireraient ?

Mme Catherine Belrhiti. - Vous ne souhaitez pas qu'on construise plus de maisons d'arrêt, mais comment résoudre le problème de la surpopulation ? Il me semble difficile de libérer pour libérer.

Mme Marie Mercier. - Avez-vous un projet concernant l'accueil des familles dans les centres de rétention, en particulier quand il y a des mineurs ?

M. François-Noël Buffet, président. - Quel est le qualificatif qui traduirait le mieux votre engagement ?

Mme Dominique Simonnot. - Je comprends l'inquiétude que peut susciter mon métier de journaliste, mais je conçois le passage de ce métier aux fonctions de Contrôleur général comme un saut. Je ne balancerai jamais d'informations à la presse, pas plus qu'en tant que journaliste, je n'ai balancé de source.

Mme Cécile Cukierman. - Encore heureux !

Mme Dominique Simonnot. - Je préfère le préciser. Par ailleurs, si un Contrôleur général doit avoir l'esprit critique, j'aimerais aussi pouvoir dire que les choses se passent bien si c'est le cas.

J'en viens aux indicateurs d'une éventuelle réussite. J'aimerais qu'il y ait moins de monde en prison, qu'on améliore les soins en psychiatrie, que l'on porte une extrême attention aux centres éducatifs fermés pour enfants et aux quartiers pour mineurs dans les prisons. Un autre indicateur serait que les recommandations du Contrôleur général soient suivies d'effets.

Il peut paraître contradictoire de ne pas construire de maisons d'arrêt alors que celles qui existent sont surpeuplées, mais on dispose d'un large éventail d'alternatives à l'emprisonnement. Il faudrait d'abord développer le recours à ces alternatives et les évaluer, car enfermer les gens est la dernière extrémité. Par ailleurs, les malades mentaux n'ont pas leur place en prison. Je n'ai pas parlé de libérer pour libérer, mais de libérer avec des mesures d'accompagnement. Cela peut très bien fonctionner si tant est que les conseillers pénitentiaires de probation et d'orientation puissent faire leur métier.

Les enfants ne devraient pas être en centre de rétention, et si je suis nommée je ferai tout pour qu'on cesse de les enfermer au profit de l'assignation à résidence.

Quant à mon engagement, le mot qui le caractérise est l'acharnement.

M. François-Noël Buffet, président. - Nous vous remercions.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

Vote sur la proposition de nomination par le Président de la République de Mme Dominique Simonnot aux fonctions de Contrôleur général des lieux de privation de liberté

M. François-Noël Buffet, président. - Nous avons procédé à l'audition de Mme Dominique Simonnot, dont la nomination par le Président de la République est envisagée pour exercer les fonctions de Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

Nous allons maintenant procéder au vote sur cette proposition de nomination.

Ce vote se déroulera à bulletins secrets comme le prévoit l'article 19 bis de notre Règlement. En application de l'article 1er de l'ordonnance du 7 novembre 1958, les délégations de vote ne sont pas autorisées.

Je vous rappelle que le Président de la République ne pourra pas procéder à la nomination de Dominique Simonnot si les votes négatifs au sein des commissions des lois de l'Assemblée nationale et du Sénat représentent au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés.

Je vous rappelle que le dépouillement aura lieu vers dix-neuf heures, simultanément à celui de nos collègues députés.

Il est procédé au vote.

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, prorogeant le régime transitoire institué à la sortie de l'état d'urgence sanitaire - Suite de l'examen des amendements sur le texte de la commission

M. François-Noël Buffet, président. - Nous examinons désormais la suite des amendements au texte prorogeant le régime transitoire institué à la sortie de l'état d'urgence sanitaire.

Nous revenons en particulier sur la question du vote par correspondance et des procurations. Lors de la réunion de ce matin, nous avions missionné notre rapporteur pour qu'il nous propose des rédactions de compromis.

EXAMEN DES AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR

Articles additionnels après l'article 2 bis

M. Philippe Bas, rapporteur. - Notre commission n'a pas été prise au dépourvu, ce matin, lorsque nous avons évoqué le vote par correspondance et les procurations : nous avions déjà examiné ces sujets en juin dernier, pour préparer le second tour des élections municipales.

Tout en reprenant l'objectif poursuivi au travers des amendements de M. Kerrouche, j'ai cherché à rédiger un amendement plus complet. Parallèlement, notre collègue a rectifié les siens et, finalement, les résultats ne sont pas très éloignés...

Mon amendement n°  49 porte ainsi sur le vote par correspondance pour les élections régionales et départementales de mars 2021, avec le souci d'éviter les fraudes. Le mécanisme proposé s'inspire des exemples de la Bavière ou de certains cantons suisses, ainsi que du dispositif de vote par correspondance prévu pour les élections législatives des Français de l'étranger.

Le matériel électoral adressé aux électeurs comporterait trois enveloppes : une enveloppe d'expédition, une enveloppe d'identification et une enveloppe électorale. Afin de permettre le contrôle de son identité, l'électeur signerait l'enveloppe et y insérerait une copie de sa pièce d'identité.

Son pli, qui comprendrait aussi l'enveloppe contenant le vote, devrait être transmis au tribunal d'instance et non à la mairie. C'est une garantie de sécurité : les plis seraient conservés dans un lieu sécurisé du tribunal, sous la responsabilité du greffier en chef, qui établira un registre ad hoc pour assurer un suivi du vote par correspondance.

Il serait possible de recourir ensuite à des officiers de police judiciaire (OPJ) pour acheminer les plis jusqu'au bureau de vote, notamment en cas de défaillance du système postal. Les plis seraient conservés en cas de contentieux électoral. Toute fraude serait passible d'une sanction de deux ans d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.

Ce dispositif me semble donc meilleur qu'une abstention forcée de la part d'électeurs, notamment lorsqu'il s'agit de personnes vulnérables. Je vous propose d'adopter mon amendement, de préférence aux amendements de M. Kerrouche car il me semble plus complet pour la prévention des fraudes.

M. Jean-Yves Leconte. - Serait-il possible de rectifier l'amendement du rapporteur pour viser aussi les élections consulaires pour les Français de l'étranger ?

M. Philippe Bas, rapporteur. - Ne peut-on se reposer sur le vote électronique qui existe déjà ?

M. Jean-Yves Leconte. - La société qui en charge du vote électronique est actuellement en liquidation judiciaire !

M. François-Noël Buffet, président. - Le mieux ne serait-il pas d'organiser un travail complémentaire concernant les élections consulaires en procédant, le cas échéant, à de nouvelles auditions ?

M. Philippe Bas, rapporteur. - Le mécanisme prévu dans mon amendement repose sur les tribunaux d'instance, qui n'existent pas à l'étranger. C'est pourquoi je me rallie à la suggestion de notre président. Évitons d'improviser au risque de parvenir à un texte boiteux. Pour éviter toute fraude électorale, il faut garantir un dépôt sécurisé des plis avant le vote.

M. François-Noël Buffet, président. - Nous prenons acte de la demande de M. Leconte et nous engageons à trouver une solution dans les prochaines semaines. Il ne s'agit pas d'enterrer la question, mais de trouver la meilleure solution.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - L'amendement du rapporteur est très proche du nôtre. Il faut une loupe pour voir la différence. Il est tellement bien rédigé qu'il est dommage qu'il se limite aux élections régionales et départementales de 2021...

Mme Cécile Cukierman. - Comme j'ai eu l'occasion de le dire en juin dernier ou encore ce matin, je reste convaincue qu'on ne peut pas modifier « à la légère » les opérations électorales.

Je souhaite que l'on réfléchisse à un élargissement du vote par correspondance à l'élection présidentielle. Alors, puisque le mot à la mode est « l'expérimentation », autant expérimenter le dispositif à l'occasion des élections locales avant une éventuelle extension. La généralisation de la double procuration pour les élections régionales et départementales de mars prochain ne remet pas en cause le mode opératoire des élections dans notre pays.

Ce n'est toutefois pas le vote par correspondance qui réconciliera les Français avec le suffrage : l'abstention massive aux élections municipales du 15 mars dernier ne s'explique pas uniquement par la crise sanitaire. Soyons donc prudents.

Je regrette que l'on modifie le code électoral au détour d'un amendement. Dans tous les cas, cela ne doit valoir que pour les prochaines élections et il nous appartiendra d'en tirer les leçons pour l'avenir.

L'amendement n° 49 est adopté.

M. Philippe Bas, rapporteur. - Mon amendement n°  50 reprend l'objectif de l'amendement n° 43 du Gouvernement pour faciliter le recours au vote par procuration pour les élections régionales et départementales de mars 2021. Il s'inspire des propositions faites par le Sénat pour l'organisation du second tour des élections municipales de 2020, qui n'avaient pas toutes été retenues en commission mixte paritaire.

Outre la possibilité de détenir deux procurations, l'amendement permet d'établir sa procuration depuis son domicile lorsque son état de santé le justifie, sans avoir à produire de certificat médical. Les électeurs pourraient saisir les autorités compétentes par différents moyens - voie postale, téléphone ou voie électronique -, en indiquant la raison de leur impossibilité de se déplacer.

Par ailleurs, l'amendement élargit le vivier des mandataires qui reçoivent les procurations : le mandant pourrait confier sa procuration à tout électeur, y compris lorsque celui-ci est inscrit sur la liste électorale d'une autre commune.

M. François-Noël Buffet, président. - L'amendement du rapporteur reprend des dispositions en faveur desquelles le Sénat a déjà eu l'occasion de se prononcer.

L'amendement n° 50 est adopté.

Le sort des amendements du rapporteur examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Sort de l'amendement

Articles additionnels après l'article 2 bis

Mme BAS, rapporteur

49

Adopté

Mme BAS, rapporteur

50

Adopté

La réunion, suspendue à 16 h 50, est reprise à 19 h 10.

Dépouillement simultané au sein des commissions des lois des deux assemblées sur la proposition de nomination par le Président de la République de Mme Dominique Simonnot aux fonctions de Contrôleur général des lieux de privation de liberté

La commission procède au dépouillement du scrutin sur la proposition de nomination, par le Président de la République, de Mme Dominique Simonnot aux fonctions de Contrôleur général des lieux de privation de liberté, simultanément à celui de la commission des lois de l'Assemblée nationale.

M. François-Noël Buffet, président. - Voici le résultat du scrutin, qui sera agrégé à celui de la commission des lois de l'Assemblée nationale :

Nombre de votants : 16

Bulletins blancs : 2

Bulletin nul : 0

Suffrages exprimés : 14

Pour : 7

Contre : 7

La réunion est close à 19 h 15.

Mercredi 14 octobre 2020

- Présidence de M. François-Noël Buffet, président -

La réunion est ouverte à 9 h 30.

Projet de loi organique relatif à la simplification des expérimentations mises en oeuvre sur le fondement du quatrième alinéa de l'article 72 de la Constitution - Désignation d'un rapporteur

La commission désigne M. Mathieu Darnaud et Mme Françoise Gatel rapporteurs sur le projet de loi projet de loi organique n° 680 (2019-2020) relatif à la simplification des expérimentations mises en oeuvre sur le fondement du quatrième alinéa de l'article 72 de la Constitution.

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la prorogation des chapitres VI à X du titre II du livre II et de l'article L. 851-3 du code de la sécurité intérieure - Examen des amendements sur le texte de la commission

M. François-Noël Buffet, président. - Nous examinons les amendements au texte établi par la commission sur le projet de loi relatif à la prorogation des chapitres VI à X du titre II du livre II et de l'article L. 851-3 du code de la sécurité intérieure. .

EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION

Article 1er

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. - Avis défavorable aux amendements de suppression nos  1, 3 rectifié et 5. La commission a souhaité procéder à la pérennisation de quatre mesures temporaires de la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme (loi SILT). J'ai mené, pendant deux ans, une mission de suivi et de contrôle des dispositions de cette loi. Il en ressort que tous les acteurs que nous avons entendus, judiciaires comme administratifs, s'accordent sur l'efficacité de ces mesures et la nécessité de les maintenir. Le Conseil constitutionnel a par ailleurs confirmé leur conformité à la Constitution et considéré qu'elles ne portaient pas une atteinte disproportionnée aux droits et libertés. Il n'y a donc pas lieu de s'inquiéter de la sécurité juridique de la pérennisation que nous proposons.

La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 1, 3 rectifié et 5.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. - Pour les mêmes raisons, avis défavorable à l'amendement n°  13 par lequel le Gouvernement souhaite rétablir sa rédaction initiale, en vue de procéder à une prorogation simple des mesures de la loi SILT.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 13.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. - L'amendement n°  8 vise à rétablir un contrôle parlementaire renforcé sur les mesures de la loi SILT. Celui-ci était lié à leur caractère expérimental ; il n'apparaît plus nécessaire, dès lors que le législateur a confirmé leur efficacité. Cela n'empêchera pas le Parlement de continuer à exercer pleinement sa mission de contrôle, conformément à l'article 24 de la Constitution.

On pourrait d'ailleurs s'interroger sur la constitutionnalité de ce régime de contrôle renforcé s'il venait à être maintenu pour une longue période. Dans sa décision du 11 mai dernier sur la loi de prorogation de l'état d'urgence sanitaire, le Conseil constitutionnel a en effet considéré que la transmission sans délai de tous les actes réglementaires individuels pris en application de la loi portait une atteinte disproportionnée à la séparation des pouvoirs.

M. Jean-Yves Leconte. - Il est dommage de supprimer le contrôle parlementaire au moment où l'on pérennise des mesures sur lesquelles nous avions des réserves.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 8.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n°   9 qui revient également sur la pérennisation des quatre mesures évoquées de la loi SILT et conduit à y mettre un terme à compter du 1er janvier 2021.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 9.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. - L'amendement n°  6 vise à inscrire dans la loi une réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel sur la réalisation des contrôles aux abords des périmètres de protection. Il s'agit de préciser que ces contrôles doivent exclure toute pratique discriminatoire. J'y suis favorable, sous réserve d'une rectification : il me semble qu'il serait préférable, pour la clarté de la loi, d'insérer cet ajout après l'alinéa 6 plutôt qu'à la fin de l'article L. 226-1.

La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 6, sous réserve d'une rectification.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. - Le rapport de la mission de contrôle et de suivi de la loi SILT, que j'ai présenté à la commission des lois au mois de février dernier, recommandait la mise en place d'un référentiel, en vue d'améliorer la motivation des requêtes de visites domiciliaires adressées au juge des libertés et de la détention. Toutefois, contrairement à ce que propose l'amendement n°  7, je crois que la définition de ce référentiel ne relève pas d'un décret en Conseil d'État. Il ne s'agit pas d'en faire un acte réglementaire normatif, mais plutôt de construire un outil de travail pour accompagner les services préfectoraux dans la rédaction de ces requêtes.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 7.

Article 2

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. - Les amendements identiques nos  2 et 4 rectifié sont contraires à la position de notre commission. Avis défavorable.

Je comprends les inquiétudes de mes collègues sur la technique de l'algorithme. Lors de l'examen de la loi relative au renseignement en 2015, le Sénat avait d'ailleurs fait preuve de prudence, invitant à ce que la technique ne soit autorisée qu'à titre expérimental. Aujourd'hui toutefois, nous avons un peu plus de recul. Tout n'est certes pas satisfaisant, mais il faut laisser le temps à nos services de monter en compétence. Nous préconisons de poursuivre l'expérimentation, et de traiter la question dans la future loi sur le renseignement.

La commission émet un avis défavorable aux amendements identiques nos 2 et 4 rectifié.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. - Avec l'amendement n°  14, le Gouvernement souhaite rétablir à douze mois, au lieu de sept, la durée de la prorogation de la technique de l'algorithme, revenant sur la modification de l'Assemblée nationale. Cet allongement est justifié par l'arrêt rendu le 6 octobre dernier par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) sur la conservation des données de connexion. Cette décision pourrait en effet remettre en cause l'existence de plusieurs techniques de renseignement. Je vous propose en conséquence d'accepter la souplesse demandée par le Gouvernement, qui me semble justifiée. Avis favorable.

La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 14.

Articles additionnels après l'article 2

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. - Comme la semaine dernière en commission, avis défavorable à l'amendement n°  11, non pour des questions de fond. Il me semble simplement préférable d'aborder la réforme de la loi relative au renseignement dans sa globalité.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 11.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. - De même, avis défavorable à l'amendement n°  10 que nous avions déjà repoussé la semaine dernière en commission. Pour rappel, il s'agit de conforter le pouvoir de contrôle de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR). Le débat est légitime. Mais là encore, il semble préférable d'attendre la future loi sur le renseignement.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 10.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. - Même avis pour l'amendement n°  12 pour les mêmes raisons.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 12.

Article 3

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n°  15 par cohérence avec l'avis donné sur l'amendement rétablissant la rédaction initiale de l'article 1er.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 15.

La commission a donné les avis suivants aux amendements de séance :

Auteur

Avis de la commission

Article 1er
Pérennisation et adaptation des dispositions de la loi « SILT »

Mme ASSASSI

1

Défavorable

Mme BENBASSA

3 rect.

Défavorable

M. LECONTE

5

Défavorable

Le Gouvernement

13

Défavorable

M. LECONTE

8

Défavorable

M. LECONTE

9

Défavorable

M. LECONTE

6

Favorable si rectifié

M. LECONTE

7

Défavorable

Article 2
Prolongation de la technique de renseignement dite de l'algorithme

Mme ASSASSI

2

Défavorable

Mme BENBASSA

4 rect.

Défavorable

Le Gouvernement

14

Favorable

Article additionnel après l'article 2

M. LECONTE

11

Défavorable

M. LECONTE

10

Défavorable

M. LECONTE

12

Défavorable

Article 3
Application en outre-mer

Le Gouvernement

15

Défavorable

Projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif au Conseil économique, social et environnemental - Examen des amendements sur le texte de la commission

M. François-Noël Buffet, président. - Nous examinons les amendements au texte établi par la commission sur le projet de loi organique relatif au Conseil économique, social et environnemental (CESE).

EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION

Article 1er

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - L'amendement n°  16 de Guy Benarroche précise que le CESE prend en compte « notamment » les effets de long terme lorsqu'il suggère des évolutions en matière économique, sociale ou environnementale.

Avis défavorable : d'une part, l'adverbe « notamment » remet en cause la clarté et la précision de la loi ; d'autre part, le CESE doit également examiner des effets de court terme, notamment lorsqu'il est saisi d'un projet de loi. De même, l'Assemblée nationale et le Sénat prennent en compte les effets de long terme de leur décision. Il n'existe pas de monopole du CESE en la matière.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 16.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n°  46 rectifié de Thani Mohamed Soilihi, qui est contraire à la position de la commission.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 46 rectifié.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Laissons le CESE et les conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux (CESER) définir les modalités de leurs relations. Avis défavorable à l'amendement n° 6 rectifié de Victoire Jasmin.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 6 rectifié.

Articles additionnels après l'article 1er

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Demande de retrait des amendements nos  17 et 18 de Guy Benarroche, car ils sont satisfaits par le droit en vigueur.

M. Guy Benarroche. - Je les retirerai en séance.

La commission demande le retrait des amendements nos 17 et 18 et, à défaut, y sera défavorable.

Article 2 (supprimé)

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Avis défavorable aux amendements nos  19 de Guy Benarroche et 42 du Gouvernement, qui sont contraires à la position de la commission.

La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 19 et 42.

Article 3

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - François Bonhomme a déposé plusieurs amendements concernant le droit de pétition devant le CESE.

Son amendement n°  29 maintient le nombre de pétitionnaires requis à 500 000 personnes. Il maintient aussi l'âge du droit de pétition à dix-huit ans, contre seize ans dans le texte de la commission. Il abaisse enfin le délai pour le recueil des signatures à six mois. Je demande le retrait de cet amendement pour pouvoir examiner séparément les amendements suivants, qui portent chacun sur une des mesures.

M. François Bonhomme. - Je le retirerai en séance.

La commission demande le retrait de l'amendement n° 29 et, à défaut, y sera défavorable.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n°  30 : le seuil de 500 000 pétitionnaires devant le CESE n'a été atteint qu'à une seule reprise, pour une pétition déclarée irrecevable... Nous préférons un seuil de 150 000 personnes, assorti d'un critère géographique.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 30.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Sagesse sur l'amendement n°  31 qui propose de revenir à dix-huit ans pour le dépôt d'une pétition devant le CESE.

La commission s'en remet à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 31.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - L'amendement n°  32 réduit le délai de recueil des signatures, qui passerait à six mois, contre un an dans le texte de la commission.

Il n'existe pas de « chiffre d'or » en cette matière. Le délai prévu pour le référendum d'initiative partagée (RIP) est par exemple de neuf mois. Le texte de la commission constitue toutefois une avancée, car, en l'état du droit, aucun délai n'était prévu pour le recueil des pétitions devant le CESE. Avis défavorable.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 32.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Pour garantir le caractère national des pétitions devant le CESE, la commission a prévu un critère simple et objectif : les 150 000 signataires devront être domiciliés dans au moins trente départements ou collectivités d'outre-mer.

Les amendements identiques nos  20 de Guy Benarroche et 43 du Gouvernement proposent de supprimer tout critère géographique. L'amendement no 8 rectifié de Jean-Yves Leconte le remplace par l'obligation de déposer des pétitions sur un « sujet d'intérêt national ». Avis défavorable : le critère géographique du texte de la commission a l'avantage d'être chiffré et objectivable.

L'amendement no  14 de Richard Yung concerne les Français de l'étranger. Contrairement à ce qu'indique son objet, le projet de loi organique leur permet déjà de déposer une pétition devant le CESE, car ils ont la nationalité française. Mais je ne vois pas d'objection à prendre en compte les onze circonscriptions législatives des Français établis de France pour la définition du critère géographique, qui serait donc plus facile à atteindre. Avis favorable.

La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 8 rectifié, 20 et 43.

La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 14.

Article 4 (supprimé)

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Avis défavorable aux amendements nos  21, 22, 2 et 9 rectifié, ainsi qu'aux amendements identiques nos 36 et 47 rectifié, qui sont contraires à la position de la commission sur le tirage au sort.

La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 21, 22, 2, 9 rectifié, 36 et 47 rectifié.

Article 5

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n°  23 de Guy Benarroche, qui vise à supprimer la procédure simplifiée alors qu'elle n'est pas remise en cause par le CESE lui-même.

Dans le texte de la commission, nous avons même repris des demandes exprimées par le CESE. Nous avons maintenu le délai de trois semaines pour l'élaboration des avis (au lieu de deux semaines dans le texte du Gouvernement) et avons prévu que ces avis soient approuvés par le bureau du Conseil, ce qui permettra à chaque groupe de s'exprimer.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 23.

Article 6 (Supprimé)

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Avis défavorable aux amendements identiques nos  37 du Gouvernement et 52 de Thani Mohamed Soilihi, qui sont contraires à la position de la commission.

La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 37 et 52.

Article 7

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - L'amendement n°  44 de François Bonhomme prévoit que le CESE ne comporte aucun membre... C'est une manière déguisée de supprimer le CESE, mais seule une révision constitutionnelle permettrait de le faire. Retrait sinon avis défavorable.

La commission demande le retrait de l'amendement n° 44 et, à défaut, y sera défavorable.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Les amendements suivants portent sur la composition du CESE.

Avis défavorable à l'amendement n°  3 de Marie-Noël Lienemann qui maintient l'effectif du CESE à 233 membres et remplace les personnes qualifiées par des représentants de la société civile. Restons-en au compromis de la commission, qui a supprimé uniquement les personnalités qualifiées, tout en parvenant à un nombre de membres supérieurs à celui du Gouvernement.

Avis défavorable à l'amendement n°  38 du Gouvernement qui vise à rétablir le texte initial. Même avis pour l'amendement n°  24 de Guy Benarroche, qui augmente les effectifs du pôle « protection de la nature et environnement ». Ne modifions pas l'équilibre trouvé entre les différents pôles du CESE !

Les amendements nos  28 de Micheline Jacques, 51 de Thani Mohamed Soilihi, 12 rectifié de Jean-Yves Leconte, 7 rectifié de Victoire Jasmin et 5 rectifié bis de Gérard Poadja portent sur la composition du pôle « cohésion sociale et territoriale, outre-mer et vie associative ».

La commission a déjà amélioré le texte en ajoutant cinq membres supplémentaires et, surtout, en incluant la représentation des outre-mer. Je suis toutefois prête à aller plus loin. Je vous propose un compromis autour de l'amendement n°  12 rectifié de Jean-Yves Leconte, qui précise la répartition des sièges au sein du pôle pour répondre aux inquiétudes des organisations représentées au sein du CESE, tout en préservant la représentation des outre-mer, avec onze membres. Avis favorable à cet amendement, sous réserve de l'adoption de mon sous-amendement n°  53 pour garantir la présence, au sein du Conseil, des représentants des domaines social, culturel, sportif ou scientifique, du logement social et des associations agissant en faveur des personnes handicapées ou des personnes retraitées. Les amendements nos  28, 51, 7 rectifié et 5 rectifié bis seraient alors satisfaits et j'en demanderai le retrait.

Enfin, avis défavorable à l'amendement n°  25 de Guy Benarroche, qui souhaite réserver le pôle « environnement » aux « organismes ayant pour objet principal » la protection de la nature et de l'environnement. Ce nouveau critère me semble à la fois trop flou et trop circonscrit.

M. Jean-Yves Leconte. - Je n'ai pas d'objection à l'adoption du sous-amendement n° 53 proposé par notre rapporteur.

La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 3, 38 et 24.

Elle demande le retrait des amendements nos 28 et 51 et, à défaut, y sera défavorable.

Le sous-amendement n° 53 est adopté. La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 12 rectifié, ainsi modifié.

La commission demande le retrait de l'amendement n° 7 rectifié et, à défaut, y sera défavorable.

Elle émet un avis défavorable à l'amendement n° 25.

Elle demande le retrait de l'amendement n° 5 rectifié bis et, à défaut, y sera défavorable.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n°  13 de Richard Yung : les Français de l'étranger ne sont plus représentés au sein du CESE, car ils sont représentés au sein de l'Assemblée des Français de l'étranger.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 13.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Les amendements identiques nos  1 rectifié bis de Philippe Mouiller et 27 de Claude Kern sont satisfaits par mon sous-amendement n°  53. J'en demande donc le retrait.

La commission demande le retrait des amendements nos 1 rectifié bis et 27 et, à défaut, y sera défavorable.

Elle émet un avis défavorable aux amendements identiques nos  39 et 48 rectifié, ainsi qu'à l'amendement n°  4.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n°  34 de Dominique Théophile, qui crée une sorte de CESER auprès du CESE. Ne multiplions pas les structures !

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 34.

Article 8

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n°  11 rectifié de Victoire Jasmin, qui fixe la liste des délégations permanentes au sein du CESE. Laissons le Conseil libre de décider de son organisation.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 11 rectifié.

Article 9

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Avis défavorable aux amendements identiques nos  40 du Gouvernement et 45 de Thani Mohamed Soilihi ainsi qu'à l'amendement n°  26 de Guy Benarroche, qui rétablissent le tirage au sort pour le travail des commissions du CESE.

Avis défavorable à l'amendement n°  35 rectifié de Dominique Théophile, par cohérence avec notre refus, à l'article 7, de créer une sorte de CESER au sein du CESE.

De même, avis défavorable à l'amendement n°  15 de Richard Yung : l'Assemblée des Français de l'étranger doit rester l'instance de représentation de nos compatriotes expatriés, et non le CESE.

La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 40, 45, 35 rectifié, 15 et 26.

Article 11

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Par cohérence, demande de retrait à l'amendement de coordination no  49 de Thani Mohamed Soilihi.

La commission demande le retrait de l'amendement n° 49 et, à défaut, y sera défavorable.

Article 12

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Pour les mêmes raisons, demande de retrait pour les amendements identiques nos  41 du Gouvernement et 50 rectifié de Thani Mohamed Soilihi.

La commission demande le retrait des amendements nos 41 et 50 rectifié et, à défaut, y sera défavorable.

Le sort de l'amendement du rapporteur examiné par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Sort de l'amendement

Article 7
Composition du CESE

Mme JOURDA, rapporteur

S/amdt 53

Adopté

La commission a donné les avis suivants aux amendements de séance :

Auteur

Avis de la commission

Article 1er
Relations entre le CESE et les autres instances consultatives

M. BENARROCHE

16

Défavorable

M. MOHAMED SOILIHI

46 rect.

Défavorable

Mme JASMIN

6 rect.

Défavorable

Articles additionnels après l'article 1er

M. BENARROCHE

17

Demande de retrait

M. BENARROCHE

18

Demande de retrait

Article 2 (Supprimé)
Saisine du CESE sur la mise en oeuvre de dispositions législatives

M. BENARROCHE

19

Défavorable

Le Gouvernement

42

Défavorable

Article 3
Saisine du CESE par voie de pétition

M. BONHOMME

29

Demande de retrait

M. BONHOMME

30

Défavorable

M. BONHOMME

31

Sagesse

M. BONHOMME

32

Défavorable

M. LECONTE

8 rect.

Défavorable

M. BENARROCHE

20

Défavorable

Le Gouvernement

43

Défavorable

M. YUNG

14

Favorable

Article 4 (Supprimé)
Procédures de consultation du public

M. BENARROCHE

21

Défavorable

M. BENARROCHE

22

Défavorable

Mme LIENEMANN

2

Défavorable

M. LECONTE

9 rect.

Défavorable

Le Gouvernement

36

Défavorable

M. MOHAMED SOILIHI

47 rect.

Défavorable

Article 5
Extension de la procédure simplifiée pour l'adoption des avis du CESE - Suppression des études

M. BENARROCHE

23

Défavorable

Article 6 (Supprimé)
Dispense de consultations pour la présentation des projets de loi

Le Gouvernement

37

Défavorable

M. MOHAMED SOILIHI

52

Défavorable

Article 7
Composition du CESE

M. BONHOMME

44

Demande de retrait

Mme LIENEMANN

3

Défavorable

Le Gouvernement

38

Défavorable

M. BENARROCHE

24

Défavorable

Mme JACQUES

28

Demande de retrait

M. MOHAMED SOILIHI

51

Demande de retrait

M. LECONTE

12 rect.

Favorable

Mme JASMIN

7 rect.

Demande de retrait

M. BENARROCHE

25

Défavorable

M. POADJA

5 rect. bis

Demande de retrait

M. YUNG

13

Défavorable

M. MOUILLER

1 rect. bis

Demande de retrait

M. KERN

27

Demande de retrait

Le Gouvernement

39

Défavorable

M. MOHAMED SOILIHI

48 rect.

Défavorable

Mme LIENEMANN

4

Défavorable

M. THÉOPHILE

34

Défavorable

Article 8
Dénomination et organisation des sections du CESE

Mme JASMIN

11 rect.

Défavorable

Article 9
Remplacement des personnalités associées

Le Gouvernement

40

Défavorable

M. MOHAMED SOILIHI

45

Défavorable

M. THÉOPHILE

35 rect.

Défavorable

M. YUNG

15

Défavorable

M. BENARROCHE

26

Défavorable

Article 11
Frais de mandat et activité des membres du CESE - Indemnisation des personnes extérieures participant aux travaux des commissions

M. MOHAMED SOILIHI

49

Demande de retrait

Article 12
Modalités d'entrée en vigueur

Le Gouvernement

41

Demande de retrait

M. MOHAMED SOILIHI

50 rect.

Demande de retrait

Proposition de loi constitutionnelle visant à garantir la prééminence des lois de la République - Examen du rapport et du texte proposé par la commission

M. François-Noël Buffet, président. - Nous examinons désormais le rapport de notre collègue Christophe-André Frassa sur la proposition de loi constitutionnelle visant à garantir la prééminence des lois de la République, déposée par Philippe Bas, Bruno Retailleau, Hervé Marseille et plusieurs de leurs collègues. Ce texte est inscrit à l'ordre du jour de la séance du lundi 19 octobre 2020.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur. - Nos collègues Philippe Bas, Bruno Retailleau et Hervé Marseille ont déposé en février dernier une proposition de loi constitutionnelle visant à garantir la prééminence des lois de la République. Son examen, qui était initialement prévu en mars, a été repoussé du fait du confinement. Je salue d'ailleurs notre ancienne collègue Catherine Troendlé, à qui je succède en tant que rapporteur.

La société tend aujourd'hui à se fragmenter face à la montée du communautarisme. Pour reprendre les mots de Robert Badinter, le « communautarisme, c'est la mort de la République. Si nous devions avoir des communautés qui négocient leur adhésion ou leur participation, ce serait fini. Ce serait un autre type de République. » Dans le même esprit, le politologue Jérôme Fourquet décrit la France comme un « archipel d'îles » s'ignorant entre elles. Cette fragmentation remet en cause notre pacte social, fondé sur l'indivisibilité de la République, la souveraineté nationale et l'unité du peuple.

Sur le terrain, les coups de boutoir du communautarisme se font de plus en plus pressants, comme l'a démontré notre récente commission d'enquête sur la radicalisation islamiste. Je tiens d'ailleurs à saluer le travail fourni, sous la présidence de Nathalie Delattre, par son rapporteur, notre collègue Jacqueline Eustache-Brinio, dont chacun connaît l'engagement sur ce dossier.

Le communautarisme défie la République dans tous les secteurs de la vie quotidienne, en particulier dans les services publics, les entreprises et le monde sportif. Ce phénomène, longtemps nié par certains, est abondamment documenté.

Dans leur ouvrage intitulé Inch'allah, l'islamisation à visage découvert, les journalistes Gérard Davet et Fabrice Lhomme décrivent par exemple les refus de soins, le mari d'une patiente s'exclamant : « ma femme peut crever, mais au moins je suis en paix avec Dieu. »

Le vivre-ensemble est également remis en cause à l'école : dans le rapport de la commission d'enquête sénatoriale, un recteur admet « qu'il est difficile d'enseigner Voltaire dans certaines classes ». « L'absentéisme sélectif » est aussi une réalité, par exemple pour éviter les cours de natation ou de SVT.

S'agissant des entreprises, 65 % des salariés observent des faits religieux sur leur lieu de travail et 55 % des managers déclarent ne pas disposer des ressources nécessaires pour gérer d'éventuelles situations conflictuelles.

La loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, dite « loi El Khomri », a constitué une première étape. Elle clarifie le fait que le règlement intérieur de l'entreprise peut contenir des dispositions restreignant la manifestation des convictions des salariés. Elle reste toutefois peu mise en oeuvre : seuls 32 % des entreprises ont complété leur règlement en ce sens.

Dernier exemple, le monde du sport. Le sociologue Médéric Chapitaux mentionne plusieurs situations concrètes, comme un club de football portant le nom de Maccabi et refusant de jouer le vendredi et le samedi soir ou des professeurs de clubs de boxe refusant la participation de boxeuses, car elles ne seraient pas suffisamment habillées.

Le communautarisme dépasse donc la problématique de la laïcité : la question n'est plus d'organiser les relations entre les Églises et l'État mais, plus largement, de préserver l'unité nationale dans une société laïque.

Les croyants en sont les premières victimes. Comme l'a écrit notre collègue Jacqueline Eustache-Brinio, « la majorité des musulmans est attachée au modèle républicain. Aspirant à l'anonymat, elle est aujourd'hui prisonnière d'une minorité qui revendique une pratique rigoriste, radicalisée et visible ».

Les femmes paient également un lourd tribut au communautarisme. Nadia Remadna, présidente de la Brigade des mères, a par exemple avoué qu'elle n'aurait jamais pensé « devoir se battre ici, dans ce pays, pour boire de l'alcool ou fumer une cigarette ».

Face à ces difficultés, le Président de la République enchaîne les discours : discours aux Bernardins, à Mulhouse, au Panthéon, aux Mureaux, etc. Les actes tardent toutefois à venir, malgré l'annonce d'un projet de loi pour la fin de l'année. L'action des cellules départementales de lutte contre l'islamisme mériterait également d'être évaluée plus en profondeur.

Nous pourrons débattre de la notion de « séparatisme », qui peut paraître trop étroite pour rendre compte de la réalité du communautarisme. Sur le terrain, des groupes comme les Frères musulmans ne cherchent pas à vivre en marge de la société mais, au contraire, à y répandre leur mode de vie dans une logique d'entrisme.

Le texte que nous examinons aujourd'hui poursuit un objectif très clair : réaffirmer la prééminence des lois de la République.

Il vise à inscrire, à l'article 1er de la Constitution, le principe selon lequel « nul individu ou nul groupe ne peut se prévaloir de son origine ou de sa religion pour s'exonérer du respect de la règle commune ». Il s'agit d'un acte politique pour donner un coup d'arrêt au communautarisme. J'observe d'ailleurs que cet objectif semble faire consensus.

Dans son discours de Mulhouse prononcé le 18 février dernier, le Président de la République a affirmé qu'on « ne doit jamais accepter que les lois de la religion puissent être supérieures aux lois de la République ». Le recteur de la Grande mosquée de Paris a également déclaré que « la loi de ce pays doit être nécessairement le cadre commun ».

Juridiquement, la proposition de loi constitutionnelle conforte des garanties qui relèvent aujourd'hui de la jurisprudence du Conseil constitutionnel et notamment de ses décisions de 1999 et de 2004. Il s'agit de graver dans le marbre cette jurisprudence, mais également de l'étendre.

Le texte couvre les relations entre les collectivités publiques et les particuliers, ce qui correspond à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, mais également les interactions collectives dans le secteur privé. La notion de « règle commune » intègre, en effet, les lois et règlements de la République, mais aussi les règlements intérieurs des services publics, des entreprises et des associations.

Ce texte s'adresse ainsi aux acteurs de terrain, pour leur donner les moyens juridiques de réagir face aux revendications communautaristes. Je pense notamment aux maires, aux chefs d'entreprise, aux enseignants, aux médecins...

Pour le professeur Dominique Chagnollaud, le texte comporte « une règle de conciliation constitutionnelle », permettant de répondre aux coups de boutoir du communautarisme par des règles claires. Jean-Éric Schoettl, conseiller d'État honoraire, partage cette analyse. Il affirme que « la République a besoin de repères simples à formuler et à respecter. Non, les règles actuelles ne suffisent pas, tant est grande la confusion des esprits. »

L'affaire de la crèche associative Baby Loup illustre ces difficultés : il a fallu plus de cinq ans pour déterminer le droit applicable, la crèche ayant dû, dans l'intervalle, suspendre ses activités puis déménager dans une commune voisine. Il en est de même pour les procédures de licenciement engagées pour prosélytisme religieux, qui sont très difficiles à mener.

La proposition de loi constitutionnelle ne remet pas en cause la conception française de la laïcité. Elle n'affecte pas, notamment, la possibilité, pour les collectivités publiques, de financer la rénovation de lieux de culte dans une logique patrimoniale. De même, les régimes de l'Alsace-Moselle et de la Guyane ne seraient pas remis en cause. Je tiens à rassurer nos collègues issus de ces territoires.

Je rappelle enfin que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) accepte des limitations portées à la liberté religieuse, dès lors qu'elles respectent trois critères cumulatifs : être prévues par la loi, poursuivre un but légitime et être proportionnées au but poursuivi. Dans une jurisprudence de 2017, la CEDH précise par exemple que les croyances religieuses ne justifient pas que des écolières soient exemptées de cours de natation.

J'en viens maintenant au second article de la proposition de loi constitutionnelle. Il impose aux partis et groupements politiques de respecter le principe de laïcité, au même titre que les principes de souveraineté nationale et de démocratie. Il apporte ainsi une nuance à l'article 4 de la Constitution, qui dispose que les partis « se forment et exercent leur activité librement ».

L'objectif est ainsi de lutter contre les partis communautaristes, qui prônent l'application de règles différentes en fonction de l'origine ou de la religion des citoyens. À l'inverse, cette disposition ne concerne pas les partis se revendiquant d'une tradition religieuse, mais respectant l'unité du peuple français, comme les partis issus de la démocratie chrétienne.

Sur le plan opérationnel, le texte donnerait une base constitutionnelle pour interdire le financement des partis communautaristes, voire pour envisager leur dissolution. Là encore, la jurisprudence de la CEDH ne s'oppose pas à de telles mesures.

En conclusion, je vous propose d'adopter sans modification la proposition de loi constitutionnelle de Philippe Bas, Bruno Retailleau et Hervé Marseille. Elle permet de réaffirmer la prééminence des lois de la République dans un contexte où les coups de boutoir du communautarisme remettent en cause notre vivre ensemble.

M. Jean-Yves Leconte. - Cette proposition de loi constitutionnelle avait déjà été inscrite à notre ordre du jour avant les élections municipales de mars 2020, avant d'être reportée à cause de la crise sanitaire. On l'examine aujourd'hui alors que le Gouvernement a annoncé un projet de loi sur le séparatisme. On a quelque peu l'impression qu'il s'agit d'un outil que le groupe Les Républicains utilise à des fins politiques. Je salue les efforts de notre rapporteur pour le défendre, mais sa tentative a été laborieuse : il a même dû citer Robert Badinter, sans convaincre...

Ce texte est inutile et dangereux. Inutile, car il laisse à penser que la loi, qui doit déjà s'appliquer à tous, pourrait être conditionnelle. Paradoxalement, cette démarche en vient à affaiblir la valeur de la loi. Dangereux, car il met en cause la liberté des partis politiques.

La laïcité, qui doit être animée par un esprit de progrès et de conviction, est malmenée par une définition qui la réduit à une dimension simplement normative. La laïcité à la turque a engendré M. Erdogan... Au contraire, la laïcité doit être synonyme d'émancipation. Notre tradition politique n'aurait jamais pu prospérer en France si notre laïcité n'avait pas été fondée sur la liberté.

Ce n'est pas par la loi que nous pourrons combattre les idéologies dangereuses, mais par nos convictions. Ne nous fions pas à des textes qui ne sont que des protections de papier !

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. - Merci à notre rapporteur pour son analyse et la clarté de ses propos. Son analyse est juste. Ce texte est effectivement un geste politique, mais les Français ont besoin d'entendre des propos courageux. Nous sommes à un tournant et nous ne pouvons pas être dans le déni à cet égard. J'invite Jean-Yves Leconte à venir dans les banlieues, son analyse évoluerait peut-être...

Le communautarisme s'installe et nous empêche de vivre selon les règles de la République. Nous devons protéger les femmes et les enfants. Aujourd'hui des enfants sont élevés en dehors des règles de la République. Quels adultes deviendront-ils ? Il ne faut pas oublier non plus qu'une partie de la population musulmane est justement venue en France pour profiter de son caractère inclusif.

En tout état de cause, il ne faut pas nier la réalité. Il est trop facile de prétendre que les dérives n'existent pas au motif qu'on ne les vit pas au quotidien !

M. Philippe Bas. - Merci à notre rapporteur qui a su expliquer les intentions des auteurs de cette proposition de loi constitutionnelle. Merci aussi à Jacqueline Eustache-Brinio - qui s'est beaucoup investie dans la lutte contre la radicalisation - pour son soutien.

Les islamistes recourent à une casuistique pour faire culpabiliser les autorités publiques : ils demandent des dérogations à la règle commune au nom de la liberté religieuse qui est garantie par l'article 10 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Ils s'en servent pour mettre en avant leur conception de la religion, qui n'est pas celle de tous les musulmans. Il appartient alors au juge, dans sa jurisprudence, de trouver les moyens de concilier les principes d'égalité devant la loi et celui de liberté religieuse. La règle, aussi claire qu'elle puisse paraître de premier abord, ne l'est pas en réalité. Il faut donc la proclamer !

En 1789, lorsque les citoyens ont proclamé la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, celle-ci n'avait pas de valeur juridique, mais sa force était telle qu'elle est devenue fondatrice. Nous avons besoin d'une nouvelle proclamation. Elle permettrait de donner un cadre aux milliers de décisions qui doivent être prises chaque jour sur ces sujets. Cette proposition de loi constitutionnelle n'est donc pas inutile, ni dangereuse, mais salvatrice.

Qui peut aussi s'opposer à ce que l'on ajoute dans la Constitution que les partis doivent respecter la laïcité ? L'enjeu est d'éviter que des partis communautaristes ne se forment.

M. Jean-Pierre Sueur. - L'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dispose : « La loi est l'expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement ou par leurs représentants à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les citoyens, étant égaux à ses yeux, sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. »

La loi est donc prééminente en vertu de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, de la Constitution et de son préambule. Les textes sont clairs. Il n'est pas utile de réaffirmer que la loi est prééminente : elle l'est déjà ! Il suffit de l'appliquer !

J'ai l'impression que ce texte participe d'une opération politique, voire politicienne, d'autant plus qu'on l'examine au cours d'une semaine de contrôle. Le président Patrick Kanner a demandé que le Conseil d'État soit saisi en application de l'article 39 de la Constitution. Pourquoi ne l'a-t-il pas été ?

De plus, voter un texte pour affirmer que la loi est prééminente n'est-ce pas sous-entendre qu'elle ne l'est pas ? Nous risquons finalement d'affaiblir la loi...

Mme Esther Benbassa. - Chaque historien des religions sait qu'une personne qui a la foi peut considérer que la loi de Dieu est supérieure à la loi des hommes, sans pour autant s'exonérer du respect de la loi commune. C'est le « b.a.-ba » de la religion ! On peut être croyant et respecter les lois de la République.

On évoque le séparatisme religieux, mais les citoyens des minorités religieuses demandent avant tout une application égale de la loi et dénoncent des distorsions dans son application en raison de leur appartenance. Il est vrai que certains, comme les islamistes, veulent s'exonérer de la règle commune, mais on ne fait pas une loi pour une minorité !

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. - Si, cela est nécessaire !

Mme Esther Benbassa. - Ce texte vise, sans la nommer, la communauté musulmane en France, qui va se sentir encore plus stigmatisée. C'est dommage, car nous avons besoin de davantage de cohésion sociale. De plus, les musulmans ne doivent pas être réduits à une croyance : en France, les musulmans sont de plus en détachés à l'égard de la religion.

Nous nous opposons aussi à la modification constitutionnelle proposée à l'article 2, qui vise l'islam politique. La loi du 9 décembre 1905 prévoit déjà la distinction entre l'Église et l'État. La France est un État de droit, non de foi. La loi religieuse ne saurait prendre le pas sur la loi des hommes. Le parti Égalité et justice (PEJ), considéré comme l'émanation française de l'AKP, le parti de M. Erdogan, n'a récolté que 10 000 voix dans 68 circonscriptions lors des dernières élections législatives. On est donc loin de la vague islamiste que certains décrivent ! Allez-vous proposer, par cohérence, la suppression du parti chrétien-démocrate ?

M. François Bonhomme. - Cela n'a rien à voir.

Mme Esther Benbassa. - Ce parti s'affiche clairement comme chrétien.

Mme Nathalie Goulet. - J'ai cosigné cette proposition de loi constitutionnelle, car il me semble important de garantir la prééminence des lois de la République, même si cela peut sembler une évidence. L'égalité devant la loi est un principe constitutionnel.

J'espère que nous pourrons aussi travailler sur le droit des associations et leur financement selon qu'elles ont un lien direct ou indirect avec un lieu de culte. Beaucoup d'associations « jonglent » entre les statuts prévus par les lois de 1901 et 1905. Cela constitue une tricherie manifeste ! Pourtant, chaque fois que l'on a proposé d'aligner les statuts et les contrôles, pour viser les associations loi 1901 qui ont un lien avec un lieu de culte, cette proposition a été repoussée : dans le cadre de la loi « Égalité et citoyenneté » du 27 janvier 2017, le Conseil constitutionnel y a vu un cavalier législatif. On n'a jamais réussi à faire passer cette disposition qui est pourtant de bon sens.

Réaffirmer la prééminence des lois de la République n'est donc pas inutile. Je rappelle que les premiers à avoir réclamé des horaires séparés à la piscine sont les femmes de la communauté juive de Strasbourg. Nous devrons toutefois être vigilants dans notre manière de traiter ce texte qui précède celui du Gouvernement sur les séparatismes, même si le terme a disparu. Donc, oui sur le principe, mais attention aux modalités.

M. Alain Richard. - Nous nous opposons à cette proposition de loi constitutionnelle : ce n'est pas en ajoutant des dispositions déclaratoires dans la Constitution que l'on résoudra les éventuelles imperfections qui existent dans notre législation.

M. Éric Kerrouche. - Madame Eustache-Brinio, il faut éviter de concevoir la société à l'aune de son expérience personnelle : on risque de prendre son expérience personnelle pour une expérience universelle, ce qui ne correspond pas à la réalité.

Attention aussi au glissement progressif de « communautaire » à « communautarisme ». C'est un peu comme si on affirmait que tous les conservateurs participent à La Manif Pour Tous ! Évitons les raccourcis trop rapides.

Aux dernières élections législatives, l'Union des démocrates musulmans français (UDMF), parti traditionnellement présenté comme communautaire, a recueilli 10 % des voix dans 50 bureaux de vote et 15 % dans 20 bureaux de vote, pour une moyenne de 0,13 % des voix exprimées au niveau national. Bref, du point de vue politique, ce parti est un microphénomène.

De même, il ne faut pas penser que la religion est le ressort du vote musulman. Le potentiel électoral de l'UDMF est de 4 à 5 %, non 0,13 %. Les études montrent que le vote musulman, à la différence du vote des catholiques pratiquants, n'obéit pas à une logique confessionnelle. C'est factuel. Le risque de confusion est donc évident et ce texte à portée symbolique risque d'accroître les fractures.

Certains comportements sont séparatistes. Il faut les combattre, mais pas par la stigmatisation, laquelle ne répond en rien aux phénomènes que nous observons.

M. François Bonhomme. - Je suis favorable à cette proposition de loi constitutionnelle car elle répond à un phénomène qui perdure depuis des décennies. Notre collègue Jean-Yves Leconte en appelle, contre ce texte, à Robert Badinter, j'en appellerai pour ma part à... Élisabeth Badinter : au nom des valeurs universalistes, la philosophe disait en 2015 ne pas croire à la différence heureuse. Elle reprochait à « la gauche communautariste » d'avoir accepté le concept d'islamophobie et ruiné de ce fait celui de laïcité. Élisabeth Badinter ajoutait que l'exaspération était devenue telle que « l'observation religieuse des règles laïques » allait devenir un impératif pour vivre en paix. Je regrette qu'Élisabeth Badinter n'inspire pas davantage la gauche universaliste...

M. Jean-Pierre Sueur. - Pas sûr qu'elle adopterait cette proposition de loi constitutionnelle...

M. Christophe-André Frassa, rapporteur. - Jean-Yves  Leconte juge ce texte est inutile et dangereux. Pour ma part, je le trouve nécessaire : la situation actuelle est-elle à ce point sans difficulté qu'une condamnation constitutionnelle du communautarisme serait inutile ? Cette mention dans la Constitution présente, certes, un aspect déclaratif, comme nous le dit Alain Richard, mais elle ne serait pas la seule dans ce registre et il est important que notre Constitution condamne explicitement le communautarisme. Cette mention serait-elle dangereuse ? Je ne vois pas pourquoi...

Esther Benbassa prend l'exemple du Parti chrétien-démocrate, mais ce parti ne fait pas de ses racines chrétiennes un programme, un manifeste politique ; il les indique seulement comme un point d'origine.

Mme Esther Benbassa. - En êtes-vous bien sûr ?

M. Christophe-André Frassa, rapporteur. - Ce parti n'interdit pas l'adhésion aux non-chrétiens. On peut également penser à la démocratie chrétienne en Italie, qui ne réserve pas l'adhésion aux catholiques pratiquants...

M. Jean-Yves Leconte. - Le christianisme est pourtant une source d'inspiration de ces partis...

M. Christophe-André Frassa, rapporteur. - Oui, mais ils ne visent pas à instaurer un État chrétien. Ce n'est pas la même chose...

Esther Benbassa dit encore que le fait de placer la loi de Dieu au-dessus de la loi de l'État n'est pas propre à l'islam. Je souhaiterais toutefois lui rappeler un passage du Talmud, que le Grand-rabbin de France a cité au cours de son audition : pour les Juifs, « la loi de l'État a force de loi ».

Enfin, je m'inscris en faux contre le postulat regardant ce texte et mon rapport comme une charge contre les musulmans : prenez le temps de les lire, vous constaterez que les exemples mentionnés concernent toutes les religions et que nous ne stigmatisons en rien les musulmans...

Jean-Pierre Sueur nous reproche de ne pas avoir saisi le Conseil d'État, mais on le fait rarement - voire jamais - sur une proposition de loi dont l'inscription est demandée par un groupe politique.

M. Jean-Pierre Sueur. - Il y a pourtant eu une demande écrite dans ce sens pour cette proposition de loi constitutionnelle...

M. Christophe-André Frassa, rapporteur. - Elle a été adressée au président du Sénat, en application de l'article 39 de la Constitution. Je vous réponds à la place qui est la mienne.

Éric Kerrouche estime que cette proposition de loi constitutionnelle est un texte de fracture, mais je ne vois pas en quoi. Au contraire, je pense qu'il est utile d'ancrer dans la Constitution ce principe d'opposition au communautarisme.

C'est peut-être clair pour l'État, mais la Constitution sert de référence bien au-delà de l'État : il y a les collectivités territoriales, les entreprises, les associations, etc. Mon rapport mentionne des problèmes très concrets d'application des règles communes dans la société. Il a fallu attendre cinq ans pour que le droit applicable soit clarifié dans l'affaire Baby Loup, est-ce normal ? Un tiers seulement des entreprises appliquent la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, dite « loi El Khomri » : elle n'a certes que quatre ans, mais les difficultés d'application témoignent d'un problème sérieux et justifient une inscription dans la Constitution.

Je remercie tous ceux qui soutiennent cette proposition de loi constitutionnelle. Je partage l'idée que la laïcité n'a nul besoin d'un adjectif, et que lui adjoindre un adjectif, c'est toujours l'amoindrir. De même suis-je convaincu, comme le président Philippe Bas, que la laïcité est une exigence fondamentale.

Sur le financement des associations, nous ne réglons certes pas toutes les difficultés avec ce texte, mais nous faisons un premier pas, d'autres suivront.

Enfin, l'Union des démocrates musulmans français, que vous prenez comme référence pour mesurer l'impact de l'islam politique, est loin de suffire à circonscrire le phénomène et nous visons bien plus large avec cette proposition de loi constitutionnelle.

Mme Esther Benbassa. - Je me réjouis que vous me répondiez en citant le Talmud et cette phrase araméenne qui dit que « La loi de ton royaume sera ta loi ». Cette formule est récitée à la fin du Shabbat, après avoir imploré Dieu pendant toute la fête... Elle démontre - c'est là que vous apportez de l'eau à mon moulin - qu'on peut penser que la loi de Dieu est supérieure, tout en se prévalant de la loi commune... Cela tient à ce que les Juifs sont un peuple de diaspora depuis longtemps, alors que les musulmans le sont depuis peu, l'islam ayant longtemps été une religion de conquête...

EXAMEN DES ARTICLES

Articles additionnels avant l'article 1er

M. Christophe-André Frassa, rapporteur. - Je suis défavorable aux amendements COM-1, COM-2 et COM-3 de Jean-Louis Masson. Ils poursuivent des objectifs extérieurs au texte que nous examinons.

Les amendements COM-1, COM-2 et COM-3 ne sont pas adoptés.

La commission adopte la proposition de loi constitutionnelle sans modification.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Articles additionnels avant l'article 1er

M. MASSON

1

Primauté de la langue française sur le territoire national

Rejeté

M. MASSON

2

Remise en cause, par un texte ultérieur, des résultats d'un référendum

Rejeté

M. MASSON

3

Possibilité, pour tout parlementaire, de saisir le Conseil constitutionnel d'une loi adoptée par le Parlement

Rejeté

Proposition de loi constitutionnelle et proposition de loi organique pour le plein exercice des libertés locales - Examen du rapport et des textes proposés par la commission

M. François-Noël Buffet, président. - L'ordre du jour appelle l'examen de la proposition de loi constitutionnelle et de la proposition de loi organique pour le plein exercice des libertés locales.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Notre collègue Françoise Gatel étant retenue chez elle du fait de la situation sanitaire, je vous présente en notre nom à tous les deux le résultat de nos travaux sur ces propositions de loi constitutionnelle et organique.

La crise sanitaire nous a conduits à apprécier l'étendue du rôle joué par les collectivités territoriales, pleinement à l'initiative dans la gestion de cette crise. Les collectivités ont su faire preuve de réactivité et d'agilité pour agir concrètement au service de nos concitoyens.

Or, depuis quelques années, une inacceptable recentralisation est à l'oeuvre. Recentralisation financière, par l'assèchement des ressources propres et le contrôle intrusif exercé sur les dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales. Recentralisation normative, par l'excès de normes règlementaires qui enserrent la liberté des collectivités territoriales, l'initiative locale se réduisant régulièrement à la mise en oeuvre de politiques nationales.

Face à ce constat, le président Gérard Larcher a réuni, dès février 2020, un groupe de travail rassemblant l'ensemble des sensibilités du Sénat afin de réfléchir à une nouvelle génération de la décentralisation. À l'issue de plus de six mois de travaux, cinquante propositions pour le plein exercice des libertés locales ont été présentées, sur le rapport de Philippe Bas et de Jean-Marie Bockel, respectivement président de la commission des lois et président de la délégation aux collectivités territoriales. Ces propositions ont été traduites par les deux rapporteurs en trois propositions de loi, constitutionnelle, organique et ordinaire.

Les deux textes que nous examinons aujourd'hui en constituent les volets constitutionnel et organique. Ils visent à donner un nouvel élan aux libertés locales et à consacrer la pleine reconnaissance des responsabilités locales.

Ces propositions de loi poursuivent quatre objectifs : la représentation équitable des territoires ; l'adaptation des compétences des collectivités aux réalités locales ; la garantie de l'autonomie financière des collectivités ; et la réforme du statut constitutionnel des territoires ultramarins.

Premier objectif, la représentation équitable des territoires se verrait consacrée à l'article 1er de la Constitution. Cela permettrait de redéfinir la limite maximale d'écart à la représentation proportionnelle pour les élections locales, en la portant à 30 %. Dans les groupements de collectivités territoriales, elle serait portée à 50 %. Cette proposition permettrait une meilleure conciliation de la nécessaire égalité devant le suffrage et la prise en compte des territoires. Nous vous proposerons toutefois de restreindre l'application du principe d'égalité devant le suffrage, parmi les groupements de collectivités territoriales, à ceux qui exercent à titre obligatoire en lieu et place des collectivités territoriales un nombre déterminant de compétences. Cela permettrait de cibler les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre et d'exclure, par exemple, les syndicats de communes.

Deuxième objectif : adapter les compétences des collectivités aux réalités locales, en encourageant la différenciation des modalités d'exercice des compétences locales. Le pouvoir réglementaire local serait renforcé par les articles 2 et 3 de la proposition de loi constitutionnelle. Le Premier ministre ne pourrait intervenir dans les domaines de compétences des collectivités territoriales qu'après habilitation législative expresse. La proposition de loi restreint les cas dans lesquels le législateur pourrait renvoyer au pouvoir réglementaire national. Nous vous proposerons de supprimer cette limitation, afin que le législateur organise librement, à chaque texte, la répartition entre pouvoir réglementaire national et pouvoir réglementaire local. Cela lui permettra notamment de prendre en compte les éventuelles difficultés en matière d'ingénierie que peuvent rencontrer les collectivités territoriales.

Les propositions de loi rendent également possible la pérennisation des expérimentations locales sur une partie seulement du territoire, afin de mieux adapter les conditions d'exercice des compétences locales aux réalités du terrain.

L'article 4 de la proposition de loi constitutionnelle prévoit de constitutionnaliser la clause de compétence générale des communes. Même si la formulation proposée de la clause de compétence générale visait à en clarifier la portée, nous vous proposerons de retenir la formulation traditionnelle qui nous semble apporter une plus grande sécurité juridique.

L'article 3 de la proposition de loi constitutionnelle permet au législateur de confier des compétences distinctes à des collectivités territoriales appartenant à une même catégorie. Là encore, nous vous proposerons de sécuriser la rédaction de cette disposition, et de renvoyer à une loi organique afin que nous puissions ultérieurement définir la procédure à suivre pour attribuer ces compétences dérogatoires.

Enfin, l'article 1er de la proposition de loi organique améliore l'évaluation des effets des projets de loi sur les collectivités territoriales. Il renforce les études d'impact, en ajoutant une évaluation au regard des principes de subsidiarité et d'autonomie financière d'une part, et en leur adjoignant les avis du Conseil national d'évaluation des normes d'autre part. Nous vous proposerons simplement de corriger une erreur de référence.

Troisième objectif : garantir l'autonomie financière des collectivités locales - grâce à la redéfinition des ressources propres et à la consécration constitutionnelle du principe « qui décide paie ».

L'article 4 de la proposition de loi organique vise à redéfinir la notion de « ressources propres » des collectivités territoriales. Il s'agit d'en exclure les ressources sur lesquelles les collectivités n'ont de pouvoir ni de taux ni d'assiette, car elles donnent une image tronquée de la réalité de l'autonomie financière des collectivités.

Cette « opération-vérité » s'accompagne de quelques difficultés techniques, puisque les ratios d'autonomie financière en seraient largement diminués : potentiellement inférieurs à leur niveau plancher de 2003, ils seraient au surplus très inégaux entre les trois catégories de collectivités territoriales. Cela pose la question de la cohérence juridique de la notion de « part déterminante des ressources totales », que doivent représenter les ressources propres d'une catégorie de collectivités. Nous vous proposerons donc de prévoir que les ressources propres ne constituent qu'une part « significative » du total des ressources d'une catégorie de collectivités : en assouplissant ainsi la portée de l'exigence constitutionnelle, nous entendons renforcer la réalité de la notion et la sincérité de ses indicateurs.

M. Jean-Pierre Sueur. - Que signifie le terme « significatif » ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Nous en débattrons. Nous vous proposerons également de supprimer la procédure de modification du calcul des ratios d'autonomie financière prévue par la proposition de loi organique, qui ne répond pas à une réelle nécessité et pourrait nuire à la sincérité de l'indicateur. Enfin, nous vous présenterons un amendement visant à rendre plus rapide et plus efficace la procédure lorsque les ratios planchers d'autonomie financière ne sont pas respectés.

L'article 5 de la proposition de loi constitutionnelle vise à garantir la pleine compensation financière des compétences dont l'exercice est attribué aux collectivités territoriales, selon le principe « qui décide paie ». Nous vous proposerons de prévoir que la compensation fait l'objet non plus d'une « réévaluation régulière », mais d'un « réexamen régulier », afin de privilégier la mise en oeuvre de cette disposition par des mécanismes de gouvernance, favorisant une gestion concertée des finances locales ; nous vous proposerons également de préciser que le dispositif de compensation financière ne s'applique qu'aux modifications des conditions d'exercice des compétences des collectivités territoriales résultant de décisions de l'État.

Nous avons échangé sur ces sujets avec nos collègues des finances, et plus particulièrement le rapporteur pour avis de la commission des finances sur ces textes, M. Guené. Ces modifications nous semblent constituer un compromis consensuel.

Enfin, ces propositions de loi constitutionnelle et organique visent à rénover le régime constitutionnel des outre-mer, en fusionnant les articles 73 et 74 de la Constitution. Par principe, les collectivités seraient régies par le principe d'identité législative. Elles pourraient toutefois opter pour la définition d'un statut par une loi organique, qui délimiterait les domaines de compétence de la collectivité et ceux de l'État. C'est une position qui paraît à ce stade équilibrée, nous vous proposerons d'y apporter uniquement quelques modifications formelles.

Les propositions de loi que nous examinons aujourd'hui, issues du groupe de travail du président Larcher sur la décentralisation, nous semblent permettre un rééquilibrage des pouvoirs centraux et locaux en France, sans toutefois proposer un nouveau « big bang » territorial. Elles offrent les mécanismes juridiques nécessaires pour libérer les énergies locales et laisser s'exprimer les initiatives du terrain. C'est pour cette raison que nous vous proposons de les adopter, moyennant les quelques modifications.

M. François-Noël Buffet, président. - Je vous remercie de votre présence, monsieur Guené, et de nous présenter l'avis de la commission des finances sur ces textes.

M. Charles Guené, rapporteur pour avis de la commission des finances. -Merci pour votre accueil. Deux mesures ont justifié que la commission des finances se saisisse pour avis : la révision des modalités de compensation des charges transférées aux collectivités territoriales avec la consécration du principe « qui décide paie » et la redéfinition du périmètre des ressources propres des collectivités territoriales.

En cas de transferts de charges, les règles constitutionnelles et organiques n'imposent de compenser intégralement les collectivités territoriales des dépenses mises à leur charge que dans deux cas : lorsqu'une compétence leur est transférée par l'État et lorsque les conditions d'exercice d'une compétence obligatoire sont modifiées par un acte réglementaire qui ne présente par le caractère d'une mesure générale. Ainsi, une compétence transférée entre collectivités territoriales n'ouvrira pas droit au versement d'une compensation intégrale par l'État et l'augmentation du point d'indice de la fonction publique non plus. Ensuite, sous réserve qu'elle présente un caractère obligatoire, la création, l'extension ou la modification des conditions d'exercice d'une compétence par voie législative n'impose que de verser une compensation dont la nature et le montant ne soient pas incompatibles avec les principes d'autonomie financière et de libre administration. Enfin, rien n'oblige l'État à réévaluer le montant des compensations compte tenu de l'évolution du coût d'exercice d'une compétence.

Cependant, nombre de collectivités territoriales ont le sentiment de faire face, du fait des décisions de l'État, à des charges croissantes sans les ressources nécessaires. C'est ce qui a conduit nos collègues Philippe Bas et Jean-Marie Bockel à proposer d'inscrire dans la Constitution deux principes nouveaux : d'une part, celui selon lequel tout transfert, création, extension ou modification des conditions d'exercice de compétence décidé par l'État et supporté par les collectivités territoriales doit faire l'objet d'une compensation intégrale - c'est le « qui décide paie » ; d'autre part, celui d'une réévaluation régulière du montant de ces compensations.

Je souscris entièrement au principe « qui décide paie », mais je pense que le dispositif de réévaluation peut être amélioré et qu'une actualisation régulière en loi de finances du montant des compensations n'est pas la méthode la plus satisfaisante. Ce qu'il faut chercher à construire, c'est une gouvernance nouvelle par laquelle l'adéquation des ressources et des charges des collectivités territoriales serait régulièrement réinterrogée. La réévaluation financière des compensations ne serait alors que l'une des options possibles et on pourrait imaginer également de redimensionner certaines compétences.

Nous avons échangé sur ce point avec les deux rapporteurs de la commission des lois. Nous sommes d'accord pour que la Constitution impose un réexamen régulier des compensations, plutôt qu'une réévaluation régulière. Il reviendra au législateur organique de préciser - d'inventer - cette nouvelle forme de gouvernance.

S'agissant des ressources propres, la Constitution dispose qu'elles représentent une part déterminante de l'ensemble des ressources des collectivités territoriales. C'est le principe d'autonomie financière.

Une loi organique de 2004 est venue préciser deux points centraux. D'abord, la nature de ces ressources propres ; ensuite, la notion de part déterminante.

Les ressources propres telles qu'elles sont définies par la loi organique présentent un caractère plutôt extensif. Sur le plan fiscal, il s'agit des recettes sur lesquelles les collectivités territoriales exercent un pouvoir de taux ou d'assiette, mais également celles sur lesquelles elles n'en exercent pas, c'est-à-dire la fiscalité affectée - par exemple la taxe foncière ou les droits de mutation à titre onéreux, ou encore la fraction de TVA affectée aux régions et la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques.

Les ressources propres interviennent dans la détermination des ratios d'autonomie financière qui ne sont rien de plus que le rapport entre les ressources propres et l'ensemble des ressources des collectivités territoriales. Lorsque l'on dit que ces ressources propres doivent représenter une « part déterminante », on indique, en réalité, que le niveau des ratios d'autonomie financière doit demeurer supérieur à un certain seuil.

Ce seuil est fixé par la loi organique et correspond à la situation constatée en 2003. Sur le plan juridique, le fait que les ratios d'autonomie financière demeurent bien supérieurs à leur valeur de 2003 présente un caractère impératif. En effet, si une mesure législative devait les conduire en dessous des planchers, le juge constitutionnel censurerait. De même, si ces ratios demeuraient en dessous des planchers plus de deux ans, le législateur serait contraint d'adopter des mesures correctives en loi de finances sous peine de censure par le Conseil constitutionnel. Toutefois, ces ratios sont très hauts : 71,4 % pour les communes, 74,4 % pour les départements et 77,4 % pour les régions - avec une définition aussi extensive de la notion de ressources propres, il pouvait difficilement en être autrement. Comme l'indiquait notre collègue député Charles de Courson : « Supprimons toute la fiscalité locale et remplaçons-la par des prélèvements sur les impôts nationaux et le taux d'autonomie financière progressera encore. »

C'est dans ce contexte que les deux propositions de loi excluent du périmètre des ressources propres toutes les recettes fiscales sur lesquelles les collectivités n'exercent aucun pouvoir de taux ou d'assiette.

Je suis parfaitement d'accord avec la nécessité de faire la vérité sur cette question alors que les réformes de la taxe professionnelle, de la taxe d'habitation et - bientôt - des impôts de production ont profondément modifié la physionomie de la fiscalité locale. Toutefois, si l'on retenait la définition proposée, les ratios d'autonomie financière se contracteraient à court terme. Mais quelle serait la dynamique de cette contraction, compte tenu des réformes de la taxe d'habitation et de celle des impôts de production, qui substituent des impôts nationaux à des impôts locaux ? Pour information, nos collègues proposent d'actualiser les planchers des ratios d'autonomie financière en référence à la situation constatée en 2020 en appliquant la définition proposée.

En tenant compte de ces paramètres, une fois la réforme de la taxe d'habitation achevée, le ratio d'autonomie financière du bloc communal s'établirait 5,4 points en dessous du plancher et celui des départements 21,4 points en dessous. Ainsi, les ressources vraiment « propres » des départements représenteraient environ 33 % de l'ensemble.

La définition proposée met à jour l'érosion du pouvoir fiscal des collectivités territoriales, mais elle nous place devant une situation difficile. Si les ratios d'autonomie financière ne sont pas conformes aux planchers de la loi organique, alors le législateur est tenu de prendre les mesures de correction qui s'imposent. En pratique, le législateur devra territorialiser des impôts nationaux ou créer de nouveaux impôts locaux pour un montant de l'ordre de 21,6 milliards d'euros après la réforme de la taxe d'habitation.

Or, nous savons combien il est difficile d'augmenter la pression fiscale, de trouver la bonne formule pour territorialiser la base d'un impôt national ou, encore, de réduire les inégalités de richesse fiscale entre les collectivités.

Dès lors, faut-il continuer de travailler avec un instrument - les ressources propres - qui ne représente plus grand-chose, ou bien accepter la nouvelle définition, mais en s'interrogeant sur ses conséquences ? Je plaide pour la seconde option.

En lien avec vos deux rapporteurs, la commission des finances a accepté la proposition tendant à exclure du champ des ressources propres les recettes fiscales sur lesquelles les collectivités n'exercent aucun pouvoir de taux ou d'assiette. Toutefois, il est souhaitable d'amender la règle selon laquelle ces ressources propres représentent une part déterminante de l'ensemble de ressources des collectivités. Nous préférons qu'à l'avenir elles représentent une part significative de l'ensemble des ressources des collectivités territoriales. Cette notion n'est pas définie par les textes en vigueur, ce qui signifie qu'il reviendra au législateur organique de consulter et de trancher pour en définir la nature et la portée. Pour mémoire, en 2003, le Sénat avait proposé un seuil minimal de 33 %. Cela ne préjuge en rien de la solution qui sera retenue, mais montre que le choix de ratios fixés en référence à une année particulière n'a rien d'évident et peut être remis en cause.

Enfin, et à titre personnel, je crois nécessaire d'accompagner cette réflexion sur le renforcement du pouvoir fiscal des collectivités d'un travail d'ampleur sur la péréquation.

La péréquation est le corolaire essentiel du pouvoir fiscal et elle ne peut pas être discutée après la réforme fiscale ou dans l'urgence. Elle doit, au contraire, être discutée de concert en tant qu'elle est la condition de succès d'une réforme du pouvoir fiscal des collectivités territoriales.

M. Marc-Philippe Daubresse. - Comme rapporteur, à l'Assemblée nationale, de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, j'avais dit que nous arrivions au terme d'un débat, qui ne faisait en fait que commencer : dix-sept ans plus tard, nous le prolongeons, en débattant encore d'expérimentation aussi bien que de ressources propres. Et le moins qu'on puisse dire c'est qu'entre temps, les transferts de compétences n'ont cessé de s'accentuer, avec de larges approximations pour les transferts de ressources. Un ajustement est nécessaire et nos rapporteurs sont parvenus à une rédaction rigoureuse, qui répond au fond de ce problème important et complexe.

Sur l'expérimentation, si nous acceptons le principe d'une différentiation, je m'étais battu - avec Pierre Méhaignerie et contre le gouvernement de l'époque, conduit par Jean-Pierre Raffarin - pour faire établir qu'une expérimentation même positive n'était pas nécessairement généralisable, car toute expérimentation se déroule toujours dans un contexte particulier, qui compte dans ses conditions de succès. Pour les politiques du logement, par exemple, telle expérimentation qui réussit dans une grande métropole peut être néfaste dans un territoire peu dense de la ruralité ou en montagne.

La question de la réglementation mérite également un débat. Qui est le mieux placé pour détenir le pouvoir réglementaire ? Nous ne sommes pas tous d'accord sur ce point. Et selon la réponse, l'agencement entre les lois ne sera pas le même : on peut imaginer des lois-cadres assez larges, qui laissent davantage de pouvoir d'adaptation au règlement ; mais à qui doit revenir ce pouvoir réglementaire d'adaptation : au préfet, ou bien à l'assemblée territoriale ?

En tout état de cause, nos rapporteurs nous proposent une belle rédaction qui tient le chemin de crête, je me réjouis du débat que nous allons avoir.

Mme Agnès Canayer. - Cet excellent rapport concrétise le travail de longue haleine réalisé sous l'égide du président Larcher et j'ai pu vérifier, pendant la campagne électorale de cet été, que bien des élus attendent un texte qui leur donne un pouvoir d'adaptation plus important - d'autant que la gestion de la crise sanitaire a encore démontré combien l'agilité était du côté des collectivités territoriales plutôt que de l'État. Ces propositions de loi fixent des principes, qui changent l'état d'esprit du cadre constitutionnel et organique actuel et correspondent aux attentes des élus locaux, en particulier sur des sujets anxiogènes comme l'autonomie financière.

Cependant, il reste un sujet difficile : la considération des politiques locales par les services de l'État. Il faut renforcer l'État déconcentré, pour qu'il ne soit pas réduit aux seules fonctions de contrôle et de sanction - il faut lui donner plus de moyens pour qu'il puisse accompagner véritablement les élus, adapter les politiques nationales aux territoires, nous devons travailler aussi sur cet axe.

M. Éric Kerrouche. - Merci à notre rapporteur pour cette présentation très claire d'un travail de grande qualité. Nous partageons une culture commune des territoires, nous nous rejoignons sur des sujets financiers, sur la nécessité d'un rééquilibrage au profit des collectivités territoriales, aussi bien que pour constitutionnaliser la clause de compétence générale des communes. Pour autant, nous avons une différence d'appréciation globale : vous vous félicitez que ce texte fasse ce que vous appelez le pari de la liberté, tandis que nous pensons que le paradigme de la liberté ne suffit pas à appréhender la décentralisation, et qu'il faut des cadres - vous le pensez aussi par moments, si j'en crois plusieurs de vos amendements. Si nous acceptons le principe de différenciation, nous ne sommes pas d'accord avec votre rédaction, qui encourage une différenciation tous azimuts, opérée en dépit de l'avis du Conseil d'État de 2017. En valorisant ainsi la liberté, vous allez vers une concurrence entre les territoires, alors que nous sommes attachés au principe de solidarité et de fraternité entre les territoires - c'est dans cet esprit que nous travaillerons sur ces textes.

Nous proposerons en particulier de supprimer la constitutionnalisation du principe d'une représentation équitable des territoires, car il ne nous semble pas nécessaire de l'inscrire dès l'article 1er de la Constitution - et parce qu'une modification de l'article 72 nous semble suffisante pour défendre cette idée. Sur le fameux « tunnel » de la représentativité, il faut encore réfléchir : si la formule suggérée par le Conseil constitutionnel parait trop restrictive et si un passage à 50 % pose des problèmes évidents pour les EPCI - l'écart de représentativité étant alors jusqu'au double -, une proposition à 33 % présente bien des avantages, il faut en débattre.

Autre sujet, la fusion des articles 73 et 74 est loin de faire l'unanimité dans l'hémicycle, il faut aller plus loin dans la réflexion avant de fusionner ces deux articles de la Constitution.

Enfin, nous sommes attachés à une loi de financement des collectivités territoriales, nous la proposerons par amendement : c'est un outil essentiel pour comprendre les flux financiers et améliorer la visibilité sur les finances locales.

M. Thani Mohamed Soilihi. - Mon groupe est très réservé sur ces deux textes, en dépit de l'excellent travail de nos deux rapporteurs. Je m'en tiendrai à la fusion des articles 73 et 74 de la Constitution. Le passage d'un régime à l'autre est déjà possible : il suffit pour cela que la population concernée donne son assentiment par référendum. Nous savons que la dichotomie entre identité et spécialité législative a perdu de son sens - voyez les collectivités de Saint-Martin et Saint-Barthélemy, qui sont régies par le principe de l'identité législative, alors qu'elles devraient relever de la spécialité législative. La fusion des deux articles ferait, par exemple, relever Wallis-et-Futuna du principe d'identité législative, au prix de bouleversements locaux. Je crois que l'idée de fusionner les deux régimes fait son chemin, mais qu'elle n'est pas mûre - et il serait plus intéressant de renvoyer à deux lois organiques pour apporter les ajustements nécessaires.

Enfin, Mayotte étant le seul territoire d'outre-mer à ne pas avoir contribué aux travaux de Michel Magras, il m'est difficile de dire quelle est la position précise de mon territoire sur cette question - le conseil départemental s'est abstenu. C'est pourquoi je ne pourrai voter ces textes.

Mme Cécile Cukierman. - Je salue le travail de nos rapporteurs. Ces deux textes font débat, y compris dans mon groupe. Pour aller à l'essentiel, si nous n'avons pas de difficulté avec l'article 4 et les suivants, nous pensons que les trois premiers articles de la proposition de loi constitutionnelle posent problème. Nous ne méconnaissons pas la diversité des territoires, le poids des facteurs géographiques, démographiques, sociaux, la diversité de notre république ; cependant, la question est celle de l'égalité ou de l'équité des territoires, de la manière dont la Constitution les prend en compte dans leur diversité. L'égalité n'est pas l'égalitarisme, mais elle consiste à prendre en compte les besoins propres de chaque territoire - et nous pensons que pour ce faire, il y a un besoin de République, qu'il faut accompagner les élus pour leur permettre d'exercer leur mandat.

Deuxième débat, celui de l'expérimentation : nous sommes prudents sur ce sujet, car nous y voyons un risque de mettre les territoires en concurrence.

Enfin, en ce qui concerne la représentation équitable des territoires, nous souhaitons débloquer les rigidités, en particulier celle qui tient à la prise en compte du seul critère démographique, dont nous avons vu les conséquences.

En tout état de cause, étant donné qu'il y a, au sein de cette commission, un gentlemen's agreement entre groupes politiques sur les propositions de loi, nous ne proposerons pas d'article de suppression.

M. Philippe Bonnecarrère. - Notre collègue Lana Tetuanui m'a chargé de vous rapporter les difficultés que pose, vu de la Polynésie française, la perspective de fusionner les articles 73 et 74 de la Constitution. Le régime de l'article 74 est fondé sur l'intérêt propre et l'organisation particulière de la collectivité d'outre-mer. La fusion fait craindre une banalisation, une dévalorisation du régime de cet article. Je vous présenterai donc trois amendements à l'article 6 de la proposition de loi constitutionnelle, pour donner aux collectivités régies par l'article 74 des moyens d'action supplémentaires et maintenir une distinction entre les deux régimes applicables aux collectivités ultramarines.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Nous partageons très largement le constat que les réformes territoriales, quoique nombreuses, ont laissé trop de sujets de côté, notamment ceux de la péréquation et du pouvoir réglementaire, évoqués par certains de mes collègues.

La déconcentration n'entre pas dans l'objet de ce texte, même si elle a partie liée avec la décentralisation. Le débat est ancien et nous l'abordons en nous prononçant pour le plein exercice des libertés locales. Je me souviens de la présidente Éliane Assassi, nous disant qu'il ne saurait y avoir de bonne décentralisation sans une bonne déconcentration, qu'il faut un État territorial vigoureux, bien doté et rapide, pour accompagner les collectivités territoriales dans l'exercice de leurs missions. Certes, mais nous sommes partis, nous, des conditions de plein exercice des libertés locales. Le point de blocage, on le connait, c'est principalement la main invisible d'un État qui entrave les libertés locales par un contrôle trop lourd, ou encore par le manque de moyens qu'il attribue à ses services déconcentrés pour exercer correctement leurs missions. Pour aller plus loin, il faut donc conforter les libertés locales et leurs conditions d'exercice.

Je partage pleinement le constat d'Agnès Canayer : ce débat est politique autant que technique et il faut plus de reconnaissance des politiques publiques locales, une plus juste reconnaissance aussi de ceux qui font vivre la démocratie. Un projet de loi dit « 3D » - décentralisation, différenciation, et déconcentration -, peut-être même 4D en y adjoignant la « décomplexification », est en préparation : nous serons attentifs à ces sujets lors de son examen.

Je me réjouis des points nombreux de convergence avec M. Kerrouche. Je précise que notre texte tient précisément compte de l'avis du Conseil d'État en ce qui concerne la différenciation. Je suis également favorable à une réforme de la péréquation, Charles Guené en a parlé, nous devons faire le bilan de la péréquation actuelle - tant elle devient incompréhensible pour les élus concernés...

Sur le « tunnel » de la représentativité, je suis d'accord avec vous, monsieur Kerrouche, nous voulons fixer une limite dans la Constitution, mais il faudra ensuite définir l'écart précis dans une loi ordinaire. Faut-il une loi de financement des collectivités territoriales ? J'y suis personnellement favorable, mais ces deux propositions de loi n'en sont pas le bon véhicule.

Quant à la fusion des articles 73 et 74 de la Constitution, notre objectif est précisément de permettre aux collectivités d'outre-mer de définir elles-mêmes la part de l'identité et de la spécificité législative.

Sur les difficultés propres à Wallis-et-Futuna, je suis à votre disposition, monsieur Mohamed Soilihi, pour les examiner. La fusion aura aussi cet avantage de répondre aux attentes des collectivités qui hésitent à passer d'un régime à l'autre. Voyez la Guyane, où nous nous sommes déplacés et où nous avons évoqué cette perspective avec tous les acteurs du territoire : faut-il une loi spécifique pour la Guyane, ou bien n'est-ce pas préférable de mieux intégrer les articles 73 et 74 de la Constitution, pour plus de souplesse dans le choix du régime juridique ? Il nous a aussi été opposé que la concertation aurait pu être plus importante. Or, le président de la Délégation sénatoriale aux outre-mer a passé un temps considérable à auditionner, à concerter, pour parvenir à un avis fondé - il a proposé trois possibilités, nous en avons retenu une, en motivant notre choix par rapport aux deux autres. J'ajoute que la procédure de révision constitutionnelle est suffisamment longue pour poursuivre et faire vivre le débat.

J'entends les préoccupations de Mme Cukierman, même si j'avoue ne pas saisir toute la subtilité du distinguo entre équité et égalité. Ce que nous voulons, c'est prendre en compte les spécificités territoriales, assurer une meilleure représentation des territoires, en particulier des territoires ruraux qui sont peu denses - c'est le fondement de la limite que nous voulons poser, dans la Constitution, au « tunnel » d'écart de représentation. Quant à l'expérimentation, nous posons un acte, mais il faudra aller plus loin, avec des traitements parfois singuliers, selon les situations et les besoins.

Enfin, nous avions bien identifié la portée politique du choix pour certains des territoires ultramarins, consistant à relever de l'article 73 ou de l'article 74 de la Constitution  - en particulier s'agissant de la Polynésie française. Nous nous emploierons à ce que la fusion des deux articles ne change pas la dimension statutaire du territoire. Cependant, les trois amendements de notre collègue Lana Tetuanui nous semblent inappropriés, dès lors que la Polynésie française dispose déjà de pouvoirs d'intervention en matière pénale et en matière internationale.

EXAMEN DES ARTICLES DE LA PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

Article 1er

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Avec l'amendement COM-5, nos collègues socialistes proposent de supprimer l'article 1er : avis défavorable.

L'amendement COM-5 n'est pas adopté.

Article 3

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Avec l'amendement COM-9, nous vous proposons de restreindre l'application du principe d'égalité devant le suffrage aux groupements de collectivités qui exercent à titre obligatoire un nombre déterminant de compétences locales.

L'amendement COM-9 est adopté ; l'amendement COM-6 devient sans objet.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Avec l'amendement COM-10, nous restreignons, en renvoyant à la loi organique, le nombre de compétences pouvant être attribuées à titre dérogatoire.

L'amendement COM-10 est adopté.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Avec l'amendement COM-11, nous supprimons l'énumération limitant les possibilités de renvoi au pouvoir réglementaire national.

L'amendement COM-11 est adopté.

Article 4

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Avec l'amendement COM-12, nous revenons à la formulation traditionnelle de la clause de compétence générale.

L'amendement COM-12 est adopté ; l'amendement COM-7 devient sans objet, de même que l'amendement COM-8.

Article 5

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Avec l'amendement COM-13, nous proposons de substituer à la notion de « part déterminante des ressources totales » celle de « part significative » des mêmes ressources.

L'amendement COM-13 est adopté.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Avec l'amendement COM-14, nous limitons la compensation financière pour les modifications de conditions d'exercice à celles résultant d'une décision de l'État.

L'amendement COM-14 est adopté.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Avec l'amendement COM-15, nous remplaçons la notion de « réévaluation régulière » des compensations, par celle de « réexamen régulier ».

L'amendement COM-15 est adopté.

Article 6

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Avec l'amendement COM-4, nos collègues socialistes proposent de supprimer cet article : avis défavorable.

L'amendement COM-4 n'est pas adopté.

L'amendement de coordination COM-16 est adopté.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Avec l'amendement COM-1 rectifié, Mme Tetuanui propose que les collectivités ultramarines puissent davantage intervenir en matière pénale et dans la conduite des relations internationales : avis défavorable.

L'amendement COM-1 rectifié n'est pas adopté.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Avec l'amendement COM-2 rectifié, Mme Tetuanui propose que les actes des collectivités ultramarines intervenant dans le domaine de la loi soient systématiquement examinés par le Conseil constitutionnel : avis défavorable.

L'amendement COM-2 rectifié n'est pas adopté.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Avec l'amendement COM-3 rectifié, Mme Tetuanui propose que les autorités de la collectivité ultramarine puissent saisir le Conseil constitutionnel par voie d'action ou par voie d'exception, afin qu'il contrôle la conformité des lois aux dispositions du statut de la collectivité : avis défavorable.

L'amendement COM-3 rectifié n'est pas adopté.

La proposition de loi constitutionnelle est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

EXAMEN DES ARTICLES DE LA PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - En application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, il nous revient d'arrêter le périmètre indicatif de la proposition de loi organique.

J'en profite pour rappeler les précisions apportées par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2020-802 DC du 30 juillet dernier. Pour un texte organique, le Conseil utilise deux critères cumulatifs : il considère comme « cavalier » toute disposition qui, d'une part, ne présente pas de lien, même indirect, avec le texte initial et qui, d'autre part, est prise sur un fondement constitutionnel différent.

En l'espèce, le périmètre du texte organique comprend toute disposition prise sur le fondement des articles 39, 72 et 72-2 de la Constitution et visant à modifier le droit applicable aux études d'impact et aux collectivités territoriales.

Article 1er

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - L'amendement COM-1 vise à effectuer une simple mesure de coordination corrigeant une erreur de référence.

L'amendement COM-1 est adopté.

Article 4

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Avec l'amendement COM-2, nous souhaitons supprimer la modification du calcul des ratios d'autonomie financière en cas de baisse des concours financiers de l'État.

L'amendement COM-2 est adopté.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - L'amendement COM-3 vise à raccourcir la procédure applicable lorsque les ratios d'autonomie financière sont inférieurs à leur plancher organique.

L'amendement COM-3 est adopté.

La proposition de loi organique est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans les tableaux suivants :

PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article 1er
Garantie d'une représentation équitable des territoires dans leur diversité

M. KERROUCHE

5

Suppression de l'article

Rejeté

Article 3
Représentation équitable des territoires -
Droit à la différenciation pour les collectivités territoriales

M. DARNAUD, rapporteur

9

Restriction de l'application du principe d'égalité devant le suffrage aux groupements de collectivités qui exercent à titre obligatoire un nombre déterminant de compétences locales

Adopté

M. KERROUCHE

6

Suppression de l'assouplissement du principe d'égalité devant le suffrage dans les groupements de collectivités territoriales

Satisfait ou sans objet

M. DARNAUD, rapporteur

10

Restriction du nombre de compétences pouvant être attribuées à titre dérogatoire ; renvoi à une loi organique

Adopté

M. DARNAUD, rapporteur

11

Suppression de l'énumération limitant les possibilités de renvoi au pouvoir réglementaire national

Adopté

Article 4
Clause de compétence générale des communes

M. DARNAUD, rapporteur

12

Retour à la formulation traditionnelle de la clause de compétence générale

Adopté

Mme CUKIERMAN

7

Clause de compétence générale des départements et des régions

Satisfait ou sans objet

Mme CUKIERMAN

8

Clause de compétence générale des départements et des régions

Satisfait ou sans objet

Article 5
Compensation financière des modifications du périmètre des compétences

M. DARNAUD, rapporteur

13

Passage à une part "significative" de ressources propres

Adopté

M. DARNAUD, rapporteur

14

Limitation de la compensation financière pour les modifications de conditions d'exercice à celles résultant d'une décision de l'Etat

Adopté

M. DARNAUD, rapporteur

15

Principe d'un "réexamen régulier" des compensations financières

Adopté

Article 6
Modification du régime constitutionnel des territoires ultramarins

M. LUREL

4

Suppression de l'article

Rejeté

M. DARNAUD, rapporteur

16

Amendement de coordination

Adopté

Mme TETUANUI

1 rect.

Possibilité pour les collectivités ultramarines d'intervenir en matière pénale et dans la conduite des relations internationales

Rejeté

Mme TETUANUI

2 rect.

Contrôle des actes des collectivités ultramarines par le Conseil constitutionnel

Rejeté

Mme TETUANUI

3 rect.

Possibilité de saisine du Conseil constitutionnel par voie d'action et par voie d'exception

Rejeté

PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article 1er
Renforcement des études d'impact

Mme GATEL, rapporteur

1

Coordination

Adopté

Article 4
Redéfinition des ressources propres

Mme GATEL, rapporteur

2

Suppression de la modification du mode de calcul des ratios d'autonomie financière en cas de baisse des concours financiers

Adopté

Mme GATEL, rapporteur

3

Raccourcissement de la procédure en cas de ratios d'autonomie financière inférieurs au plancher organique

Adopté

La réunion est close à 12 heures.