COMMISSION MIXTE PARITAIRE

Mercredi 15 mai 2019

- Présidence de Brigitte Bourguignon, députée, présidente -

La réunion est ouverte à 18 h 15.

Commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative au droit de résiliation sans frais de contrats de complémentaire santé

Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande de M. le Premier ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative au droit de résiliation sans frais de contrats de complémentaire santé, texte adopté par l'Assemblée nationale le 27 mars dernier et par le Sénat le 2 mai, s'est réunie à l'Assemblée nationale le mercredi 15 mai 2019.

La commission mixte paritaire procède à la désignation de son bureau, ainsi constitué :

- Mme Brigitte Bourguignon, députée, présidente ;

- M. Alain Milon, sénateur, vice-président ;

- M. Dominique Da Silva, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale ;

- M. Michel Amiel, sénateur, rapporteur pour le Sénat.

Mme Brigitte Bourguignon, députée, présidente. - Nous avons affaire à un texte court et qui, me semble, par son objet, pouvoir donner lieu à un accord. Nos deux rapporteurs nous confirmeront, j'espère, que tel est bien le cas.

M. Alain Milon, sénateur, vice-président. - Je vous remercie pour votre accueil, Madame la présidente. Avant d'aborder le fond du texte, je voudrais saluer le travail de nos rapporteurs qui, chacun pour leur part dans leur assemblée, ont travaillé dans un contexte politique qui n'était pas si simple que cela.

Ils ont élaboré ensemble un compromis tendant à recentrer le texte sur sa disposition initiale, la résiliation à tout moment, après un an d'adhésion, des contrats de complémentaire santé, ce qui nous permet d'envisager, chaque assemblée faisant un pas vers l'autre, que la commission mixte paritaire aboutisse.

Je m'en félicite. Sans surestimer l'impact de ce texte sur la recomposition du marché des complémentaires, que certains redoutent et que d'autres appellent de leurs voeux, j'y suis favorable car il apporte une souplesse supplémentaire pour les usagers, et devrait bénéficier tant aux retraités qu'aux petites entreprises. Les particuliers bien informés comme les entreprises dotées de directions des ressources humaines étoffées savent d'ores et déjà tirer parti de la possibilité de résiliation annuelle prévue par notre droit.

Nous avons déjà vu des secteurs entiers que la puissance publique n'avait pas su réguler connaître une transformation radicale sous l'effet d'une concurrence accrue. Cela ne sera sans doute pas le cas pour les complémentaires santé sous le seul effet de ce texte, mais donner de la souplesse, c'est à nos yeux renforcer la marge de manoeuvre des adhérents.

Même si je considère que les lois ne sont pas faites pour envoyer des signaux mais bien pour fixer des règles, la volonté d'envoyer un signal aux professionnels de santé sur le tiers-payant à l'article 3 bis A ne doit pas mettre en échec notre volonté d'aboutir.

Je m'abstiendrai donc sur la proposition tendant à rétablir cet article, dans une rédaction qui porte clairement ce signal, et ne ferai pas obstacle à son adoption.

M. Michel Amiel, sénateur, rapporteur. - La proposition de loi relative au droit de résiliation sans frais de contrats de complémentaire santé comptait initialement quatre articles. Elle a été complétée par l'Assemblée nationale de trois articles additionnels.

Au Sénat, elle a suscité un large débat sur lequel je ne reviendrai pas ici. Notre commission des affaires sociales a dans un premier temps supprimé, contre l'avis que j'avais porté en tant que rapporteur, les articles 1er, 2, 3 et 4 formant le « coeur » de ce texte.

Ces quatre articles ont ensuite été rétablis en séance publique, par l'adoption d'amendements de notre collègue Philippe Dallier pour les articles 1er à 3, et de deux amendements identiques déposés en mon nom propre et par le Gouvernement s'agissant de la date d'entrée en vigueur maintenue par le Sénat au 1er décembre 2020 au plus tard.

Le texte qui résulte des travaux du Sénat présente sur ces quatre articles une rédaction très proche de celle adoptée par l'Assemblée nationale ; cette rédaction conserve notamment les apports introduits à l'initiative de mon homologue Dominique Da Silva concernant la simplification des modalités de résiliation ou le principe selon lequel le nouvel organisme assure les formalités nécessaires à l'exercice du droit de résiliation.

Sur les autres articles, le Sénat a précisé la rédaction de l'article 3 bis introduit par l'Assemblée nationale qui complète utilement l'information des assurés sur le taux de redistribution des contrats ; la rédaction retenue s'en tient à une information plus simple et intelligible, exprimée sous forme de ratios.

Le Sénat a par ailleurs supprimé, sur ma proposition et suivant la position retenue par notre commission, deux articles introduits par l'Assemblée nationale : les articles 3 bis A et 3 ter. En effet, il ne nous a pas semblé qu'ils apportaient une solution opérante aux enjeux pourtant importants soulevés, tenant à la mise en oeuvre du tiers payant ou à la lisibilité des contrats de complémentaire santé.

Enfin, le Sénat, renouvelant une position déjà exprimée lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, a proposé d'étendre à tous les professionnels de santé l'interdiction des pratiques de remboursement différencié par les organismes complémentaires d'assurance maladie dans le cadre des réseaux de soins. C'est le sens du nouvel article 3 bis AA introduit par notre commission à l'initiative de notre collègue Daniel Chasseing et confirmé en séance publique.

Nous aboutissons donc à un texte finalement très proche quant au dispositif central, qui est celui de l'assouplissement du droit à résiliation des contrats de complémentaire santé.

Nos différences portent sur des dispositions que je qualifierais, sans jugement de valeur, de « périphériques ».

Notre commission mixte paritaire pourrait donc, je le souhaite, aboutir à un texte comportant le coeur du dispositif de la proposition de loi ; ce serait faire un pas vers une simplification des démarches pour les assurés et une concurrence accrue sur le marché de la complémentaire santé, pour viser une meilleure efficience de ses opérateurs. Sur ces dispositions, nous sommes d'accord avec mon collègue Dominique Da Silva pour apporter aux articles 1er à 3 de simples ajustements.

Concernant l'article 3 bis A, supprimé par le Sénat, je peux comprendre la volonté de nos collègues de montrer un signal pour que le processus de consultation en ligne des droits s'intensifie. C'est la direction déjà prise par les organismes complémentaires dans le cadre des travaux sur le tiers payant intégral mais des progrès sont encore nécessaires, y compris et même surtout de la part des établissements de santé encore peu outillés en logiciels adaptés. L'initiative de réintroduire cette disposition sous une nouvelle rédaction moins ambiguë ne devrait pas empêcher notre commission mixte paritaire de conclure.

Je remercie particulièrement Dominique Da Silva pour la qualité de nos échanges en amont de cette réunion.

M. Dominique Da Silva, député, rapporteur. - Je ne reviendrai pas sur le parfait exposé des travaux des deux chambres que vient de nous faire mon homologue Michel Amiel.

Comme le rapporteur pour le Sénat, je me félicite de l'accord de nos deux assemblées pour mettre en oeuvre le droit de résiliation des contrats d'assurance complémentaire santé à tout moment après la première année de souscription, avec une entrée en vigueur de cette faculté le 1er décembre 2020, comme initialement prévu à l'article 4.

Je note également que le Sénat a entériné le dispositif de simplification et de modernisation des modalités de notification d'une résiliation de contrat d'assurance par l'assuré, que nous avions adopté en première lecture aux articles 1er à 3, visant à simplifier la vie des consommateurs. De la même manière, avec une rédaction épurée, le Sénat a également voté en faveur d'une meilleure transparence des contrats proposés par les organismes d'assurance complémentaire santé avec l'obligation de communiquer le taux de redistribution, au même titre que les frais de gestion, introduite à l'article 3 bis.

Nos discussions ont donc essentiellement porté sur les dispositions additionnelles votées par les deux chambres.

Afin de rassurer les professionnels de santé, l'Assemblée nationale a souhaité qu'un dispositif de consultation des droits complémentaires soit mis à leur disposition avant l'entrée en vigueur de la proposition de loi. L'Assemblée nationale avait également souhaité qu'une autorité indépendante, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, soit chargée d'une mission de contrôle pour s'assurer que les engagements des organismes complémentaires en termes de lisibilité de leurs offres soient tenus. Le Sénat n'a pas été convaincu et a jugé ces dispositions insuffisamment normatives.

De notre côté, la disposition introduite par le Sénat, visant à interdire les remboursements différenciés opérés par les réseaux de soins, ne peut recevoir notre assentiment, car d'un point de vue formel, cette disposition n'a pas de lien avec la proposition de loi et, sur le fond, elle remettrait en cause l'intérêt des réseaux de soins, qui participent à la politique de modération des dépenses de santé et peuvent se révéler intéressants pour l'assuré, à plus d'un titre.

Avec le rapporteur du Sénat, nous sommes tombés d'accord pour vous proposer d'en rester à l'épure du texte - et à son objet premier, puisqu'il fait consensus entre nos deux assemblées. Nous vous proposerons donc de retenir des rédactions communes précisant le champ des articles 1er, 2 et 3, qui introduisent le principe de la résiliation infra-annuelle pour les trois catégories d'organismes complémentaires et d'adopter les articles 3 bis et 4, dans leur rédaction adoptée par le Sénat.

Je remercie Michel Amiel d'avoir compris que la question de la consultation des droits en ligne par les professionnels de santé, sécurisant le tiers payant en faveur des assurés, est une préoccupation majeure pour les députés. Il faut que les plateformes nécessaires soient accessibles à la même échéance que l'entrée en vigueur du présent texte. C'est pourquoi je vous présenterai une rédaction améliorée de l'article 3 bis A, prenant en compte les observations du Sénat.

En contrepartie, les autres dispositions, sur lesquelles nous ne sommes pas en mesure de trouver un accord entre les deux assemblées devront être supprimées.

Dans ce cadre, il est donc possible d'aboutir à un texte susceptible de rencontrer l'assentiment de nos deux chambres.

Mme Brigitte Bourguignon, députée, présidente. - Dès lors qu'un accord semble possible, je vous propose de passer à l'examen des dispositions restant en discussion.

La commission mixte paritaire procède ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.

Article 1er

M. Michel Amiel, sénateur, rapporteur. -Je ferai une présentation commune des rédactions proposées par les rapporteurs aux articles 1er, 2 et 3, qui portent des dispositions similaires mais concernent trois codes différents.

Cette proposition de modification n° 1 reprend l'accord des deux assemblées pour mettre en oeuvre le principe de la faculté de résiliation des contrats d'assurance complémentaire santé à tout moment après la première année de souscription.

Elle entérine également la simplification et la modernisation des modalités de notification d'une résiliation de contrat d'assurance par l'assuré votées par les deux chambres, en renvoyant expressément aux moyens de résilier le contrat par un mode de communication à distance symétrique de la modalité de souscription.

Cependant, elle rétablit l'obligation de résilier par lettre recommandée avec accusé de réception dans un certain nombre de situations exposées spécifiquement à des risques de contentieux, comme par exemple les contrats souscrits via un démarchage à domicile, les contrats d'assurance emprunteur, les contrats de groupe en coassurance et la résiliation à l'initiative de l'assureur.

La proposition de rédaction supprime également l'obligation prévue par l'Assemblée nationale de transmission de certaines informations non détaillées entre l'ancien et le nouvel organisme complémentaire.

Enfin, elle procède à diverses améliorations rédactionnelles et harmonise la terminologie avec celle résultant de l'ordonnance n° 2017-1433 relative à la dématérialisation des relations contractuelles dans le secteur financier, en prévoyant une notification « par lettre ou tout autre support durable ».

Je vous ferai donc exactement la même proposition pour les institutions de prévoyances et les mutuelles aux articles 2 et 3.

M. Yves Daudigny, sénateur. - Il s'agit ici d'une explication de vote, le groupe socialiste et républicain s'étant opposé à ce texte lors de son examen au Sénat.

Je constate que pour ce texte, tout rentre dans l'ordre entre les groupes majoritaires de l'Assemblée nationale et du Sénat !

Toutefois, au vu de notre position constante lors de l'examen de ce texte, nous voterons ma collègue du groupe socialiste et républicain et moi-même contre les amendements de rétablissement.

Nous sommes en revanche favorables à la suppression des dispositions que nous examinerons plus tard, relatives aux remboursements différenciés opérés par les réseaux de soins, dispositions introduites lors de l'examen du texte au Sénat.

La proposition de rédaction n° 1 des rapporteurs de l'Assemblée nationale et du Sénat est adoptée et, en conséquence, l'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 2

M. Michel Amiel, sénateur, rapporteur. - Je reprends donc exactement la même explication que pour la proposition de rédaction précédente, non pas pour gagner du temps, mais parce que cette proposition de rédaction n° 2 relative aux institutions de prévoyance est identique sur le fond.

La proposition de rédaction n° 2 des rapporteurs de l'Assemblée nationale et du Sénat est ensuite adoptée et, en conséquence, l'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 3

M. Michel Amiel, sénateur, rapporteur. - Je reprends de nouveau la même explication pour la proposition de rédaction n° 3 pour les mutuelles.

La proposition de rédaction n° 3 est adoptée et, en conséquence, l'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 3 bis AA

M. Dominique Da Silva, député, rapporteur. - L'Assemblée nationale souhaite, par cette proposition de rédaction n° 4, la suppression de cet article interdisant les taux de remboursement différenciés par les organismes complémentaires pour les réseaux de soins, car la fin de ce remboursement différencié nuirait à ces réseaux.

M. Alain Milon, sénateur, vice-président. - Ce principe, tel qu'il a été introduit à l'Assemblée nationale, est la conséquence de la loi « Le Roux », qui n'a pas été votée par la majorité sénatoriale. Nous restons extrêmement favorables à la fin de ces remboursements différenciés, mais cet article n'a pas de lien direct avec le texte de la proposition de loi. Je suis donc favorable à sa suppression pour ce motif.

La proposition de rédaction n° 4 du rapporteur pour l'Assemblée nationale est adoptée et l'article 3 bis AA est en conséquence supprimé.

Article 3 bis A

M. Dominique Da Silva, député, rapporteur. - Cette proposition de rédaction n° 5 est une disposition non codifiée permettant de confier à l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire (Unocam) la mission de s'assurer du déploiement des services numériques par les organismes complémentaires, avant l'entrée en vigueur du présent texte. La finalité est de sécuriser le tiers payant par les professionnels et établissements de santé.

M. Yves Daudigny, sénateur. - Nous voterons contre cet article, ne comprenant pas vraiment comment cette mission peut être confiée à l'Unocam, alors qu'un travail a déjà été entrepris par l'ensemble des organismes complémentaires pour que l'engagement des assurés auprès d'une mutuelle soit communiqué le plus rapidement possible aux professionnels de santé.

M. Michel Amiel, sénateur, rapporteur. - Ce n'est pas un casus belli : dans la mesure où l'on sécurise informatiquement le suivi de la mise en oeuvre effective par les organismes, je voterai pour.

La proposition de rédaction n° 5 du rapporteur pour l'Assemblée nationale est adoptée et, en conséquence, l'article 3 bis A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 3 bis

L'article 3 bis est adopté dans la rédaction du Sénat.

Article 3 ter

La commission mixte paritaire a maintenu la suppression de l'article 3 ter.

Article 4

L'article 4 est adopté dans la rédaction du Sénat.

La commission mixte paritaire a ensuite adopté, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative au droit de résiliation sans frais de contrats de complémentaire santé.

En conséquence, la commission mixte paritaire vous demande d'adopter la proposition de loi relative au droit de résiliation sans frais de contrats de complémentaire santé dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

La réunion est close à 18 h 40.