Mardi 23 mai 2017

- Présidence de Mme Chantal Jouanno, présidente -

Rapport « Femmes et agriculture » - Audition de Mme Christiane Lambert, présidente de la FNSEA

Mme Chantal Jouanno, présidente. - Dans le cadre de l'élaboration de notre rapport relatif aux agricultrices, nous accueillons Christiane Lambert, que je félicite pour son élection à la présidence de la FNSEA. C'est un symbole fort. Je précise que notre réunion est ouverte à nos collègues de la commission des affaires économiques - ici représentée par son président - et de la commission des affaires sociales.

Signe de notre intérêt unanime pour les questions abordées dans ce rapport, il sera élaboré par un groupe de travail composé de six membres : un par groupe.

Après le colloque du 22 février 2017, les co-rapporteurs ont poursuivi leurs travaux avec deux tables rondes, l'une sur l'enseignement agricole et la formation des agricultrices, l'autre sur les questions sociales. Des déplacements ont eu lieu dans la Drôme et en Vendée. Deux autres sont prévus à Toulouse et en Bretagne. Nous espérons présenter les conclusions de ce rapport d'ici juillet, de sorte qu'elles puissent inspirer les députés nouvellement élus, le Gouvernement, et le Sénat qui sera issu du prochain renouvellement...

Nos auditions et déplacements ont fait apparaître les obstacles rencontrés par les agricultrices, par exemple lorsqu'il s'agit de financer leur projet d'installation. En matière de protection sociale, la question des statuts et les retraites sont de vraies difficultés. Nous nous intéressons aussi à l'accès des agricultrices à la formation continue et aux leviers pour leur permettre de s'engager dans les instances agricoles, tant il est difficile, pour beaucoup d'agricultrices, de concilier temps personnel et professionnel.

Pouvez-vous nous présenter l'action menée par Xavier Beulin, votre prédécesseur, pour améliorer la situation des agricultrices et l'égalité femmes-hommes dans le secteur ? Comment comptez-vous poursuivre cette action ? Quelles seront les priorités de votre mandat dans ce domaine ? Quels moyens comptez-vous mettre en oeuvre ?

Avant tout, pourriez-vous commencer par nous présenter votre parcours hors du commun ? Je laisse la parole au président Lenoir puis nous vous écouterons avec intérêt.

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques. - Je tenais à saluer Christiane Lambert et à la féliciter pour son élection à la présidence de la FNSEA. Madame la présidente, vous succédez à Xavier Beulin, avec lequel nous avions beaucoup travaillé et dont la disparition nous a profondément touchés. C'est un réconfort de savoir que notre coopération se poursuivra avec vous.

Malheureusement, l'agenda de la commission des affaires économiques va m'obliger à vous quitter : le groupe de travail sur la PAC se réunit en effet cet après-midi, pour trois auditions. Nous aurons toutefois l'occasion de nous revoir prochainement et prendrons rapidement contact avec vous pour une audition devant notre commission.

Mme Christiane Lambert, présidente de la FNSEA. - Merci, madame la présidente, pour votre invitation. Je connais votre travail, et j'avais été impressionnée par la façon dont vous évoluiez dans un milieu d'hommes lorsque vous étiez ministre de l'écologie.

Je suis accompagnée de Jacqueline Cottier, présidente de la commission des agricultrices de la FNSEA, et de Nadine Normand, chargée à la FNSEA des relations avec les assemblées parlementaires. Nous avons aussi une directrice : la FNSEA compte beaucoup de femmes parmi ses cadres !

Je salue Corinne Bouchoux, que j'ai côtoyée dans le Maine-et-Loire : elle s'est toujours montrée curieuse des sujets agricoles et nous avons souvent eu des discussions constructives et des points d'accord - ce qui n'est pas toujours le cas avec des élus EELV !

Je trouve surprenant d'être félicitée pour mon accession à la tête de la FNSEA, car je n'ai pas le sentiment d'avoir fait des choses exceptionnelles... Mes parents étaient militants à la Jeunesse agricole chrétienne (JAC), et j'ai très tôt mis la main à la pâte. Les années 1960 ont été une période de progression sociale pour les agriculteurs, avec les lois d'orientation agricole de 1960 et 1962, qui ont permis aux petites exploitations de se moderniser. Être issue d'une famille pétrie de valeurs chrétiennes et terriennes, qui nous a appris que le travail était récompensé, est un marqueur important. J'ai décidé dès l'âge de huit ans d'être agricultrice. Baccalauréat D', BTS techniques agricoles et gestion d'entreprise : je mesure combien je dois à mes parents et à mes enseignants qui m'ont poussée à poursuivre une formation alliant technique et gestion, permettant d'appréhender les grands sujets agricoles. En effet, les agricultrices sont souvent freinées dans leur engagement par le sentiment de ne pas disposer d'un bagage agricole et technique suffisant. Il y a aussi l'impression de ne pas savoir s'exprimer en public qui freine encore beaucoup de femmes...

L'enseignement que j'ai reçu était marqué par l'ouverture d'esprit et l'esprit de synthèse, les rencontres avec des socio-professionnels : on ne transmettait pas un savoir professoral. Sur cent étudiants, huit filles ! Pour moi qui n'avais jamais quitté l'exploitation familiale - mes parents ne prenaient pas de vacances - ce fut l'occasion de rencontrer des jeunes venus d'une quarantaine de départements : une vraie ouverture !

Bac en poche à 17 ans, BTS à 19 ans et, tout de suite, installation, avec la reprise d'une exploitation voisine de celles de mes parents, dans le Cantal. Passer de la vie étudiante à la vie en exploitation, toute seule, fut difficile ; j'ai saisi l'occasion de m'engager et suis devenue très vite présidente du centre cantonal des Jeunes agriculteurs - à 19 ans et demi ! Mon premier réflexe a été de me former à l'Institut de formation des cadres paysans (Ifocap), créé par Michel Debatisse. Mon premier stage : prendre la parole en public et piloter une réunion !

Je suis devenue vice-présidente du centre départemental : la vice-présidence féminine, spécificité de nos organisations, a été un moyen pour de nombreuses femmes d'accéder à des responsabilités - même s'il a d'abord fallu les convaincre. J'y ai porté des dossiers concernant prioritairement l'installation et le financement, ainsi que certains dossiers économiques.

Aspirée très vite au niveau régional, j'ai été élue présidente du Centre régional de Jeunes agriculteurs d'Auvergne en 1986.

En 1989, j'ai quitté le Cantal pour reprendre, avec mon mari, une exploitation porcine dans le Maine-et-Loire. Notre fils aîné est né la même année, mais j'ai vite repris des responsabilités : le monde agricole est une grande famille, et j'ai été très bien accueillie par l'équipe départementale. Après la naissance de notre deuxième enfant en 1991, j'ai accepté, en 1992, un mandat national au bureau du Centre national des jeunes agriculteurs (CNJA). Un responsable d'organisation professionnelle agricole doit se rendre régulièrement à Paris - ce qui suppose d'organiser la garde des enfants. Mon mari m'a poussée à accepter et le président du CDJA, Jean-Marc Lézé, m'a proposé une solution : prendre comme agent de remplacement, non pas un garçon pour travailler dans la porcherie, mais une jeune femme pour s'occuper des enfants. C'est ainsi que notre nounou est entrée dans la famille ; marraine de notre fille, elle est encore salariée chez nous 24 ans plus tard. Cette entorse au règlement du service de remplacement m'a permis de présider le CNJA pendant quatre ans, tout en conservant une vie familiale apaisée.

Un parcours professionnel, c'est aussi la facilitation permise par les autres, car il n'est pas aisé d'être à la fois mère de famille, chef d'exploitation et responsable d'organisation professionnelle. J'ai pu m'investir dans mes responsabilités et m'y épanouir en ayant une vision positive et non sacrificielle de l'engagement. Les échanges au niveau national ont été enrichissants aussi pour la conduite de mon exploitation.

Première femme à présider le CNJA, de 1994 à 1998, j'ai pu orienter les projecteurs sur nos dossiers, en mettant l'accent sur l'installation des jeunes agriculteurs, en chute libre après la réforme de la PAC en 1992. Parmi nos slogans : « Nous avons plus besoin de voisins que d'hectares » ! Avec Philippe Vasseur, alors ministre, nous avons élaboré la Charte nationale pour l'installation des jeunes agriculteurs. Les résultats tangibles - un tassement de la baisse des installations - furent une grande satisfaction.

En 1998, à 35 ans, je suis frappée par la limite d'âge posée par Jeunes agriculteurs. Je m'étais juré de faire un vrai break, mais appelée par Luc Guyau, alors président de la FNSEA, j'ai accepté, en octobre 1999, de prendre la présidence du Forum de l'agriculture raisonnée respectueuse de l'environnement (Farre), qui porte une vision de l'agriculture performante sur le plan tant économique qu'environnemental. J'ai beaucoup aimé cette responsabilité concrète.

En 1999, le jour même de la naissance de notre benjamine, je suis élue au conseil d'administration de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles du Maine-et-Loire, au nom de la section porcine, ma production actuelle. En 2001, j'arrive au niveau national puis, en 2005, à la vice-présidence de la FNSEA, non comme responsable du dossier des agricultrices, mais comme vice-présidente en charge de dossiers. Je travaille aux côtés de Jean-Michel Lemétayer.

En 2010, je deviens première vice-présidente, chargée de suppléer le président en son absence, ce qui me vaut de côtoyer de très près Xavier Beulin. Brillant, éloquent, doté d'une grande capacité d'analyse et de conviction, il avait annoncé, le 25 janvier, sa candidature à un nouveau mandat. La vie en a décidé autrement : à son décès, le 19 février, j'ai donc assuré l'intérim. Je connaissais le rythme de travail, la pression, interne et externe, dont Xavier Beulin avait souffert, mais les 23 membres du bureau de la FNSEA m'ont encouragée à postuler à sa succession. J'ai été élue le 13 avril pour un mandat de trois ans. Cela n'a guère surpris les adhérents et les fédérations, mais les journalistes, eux, n'en reviennent toujours pas !

Grâce à Xavier Beulin, nous avons instauré il y a six ans une obligation de 30 % de femmes sur les listes syndicales pour l'élection aux chambres d'agriculture : deux hommes, une femme, et ainsi de suite. Cela nous convient ; vu la démographie, il serait difficile d'observer une parité absolue, sachant que les femmes représentent 25 % des chefs d'exploitation et 33% des actifs agricoles. Il nous faudra convaincre le ministère sur ce point...

Notre objectif est bien sûr de défendre et de promouvoir l'agriculture. Les métiers ont beaucoup évolué, et l'image nostalgique et bucolique des fermes d'antan est loin. Nous ne pourrions pas vivre et travailler comme le faisaient nos parents et nos grands-parents. La jeune génération intègre la robotisation, le travail par délégation, qui allège les contraintes et fait gagner en précision, la vente directe en ligne... L'agriculture vit avec son temps !

Les agriculteurs sont extrêmement investis, en phase avec les problématiques du vivant, à commencer par le climat. Notre entreprise n'a pas de toit, mes 106 hectares sont au grand air, s'il grêle, je n'ai plus rien, une sécheresse dévaste tout. Cette connexion au climat est cause d'une très grande vulnérabilité pour les agriculteurs, ce qui explique l'émotion...

La sécheresse est ressentie différemment selon que l'on a un jardin potager ou 106 hectares, c'est évident ! Ce métier crée aussi de vraies satisfactions et un espoir renouvelé année après année, car même après une mauvaise récolte, on sème encore l'année d'après et on espère une bonne récolte. Ainsi va la vie, quand on est agriculteur.

Ma mère est devenue agricultrice en se mariant, en 1959. C'est en 1961 - année de ma naissance - que le terme d'agricultrice est entré dans le Petit Larousse. Ce n'est qu'en 1988 qu'un statut plein et entier leur a enfin été accordé. C'est d'ailleurs grâce à cette réforme que mon mari est passé du statut de conjoint-collaborateur à celui de co-gérant ! Grâce à l'implication des agricultrices dans nos organisations, les femmes peuvent désormais constituer un Groupement agricole d'exploitation en commun (Gaec) avec leur conjoint, à égalité de responsabilités.

La FNSEA, ce sont 94 fédérations départementales, 13 fédérations régionales, 210 000 agriculteurs adhérents ; Jeunes agriculteurs, 20 000. Les élections professionnelles qui se tiennent tous les six ans sont le test de notre représentativité. Depuis leur instauration en 1981 par Édith Cresson, alors ministre de l'Agriculture, la FNSEA a toujours été majoritaire, même si le paysage syndical s'est étoffé depuis : 56 %, avec 68 % de votants, lors des dernières élections.

Le choix s'est donc porté sur un projet pour une agriculture dynamique, audacieuse, tournée vers l'avenir, sans nostalgie. Notre organisation est également caractérisée par un fort sentiment européen et un intérêt pour les politiques européennes. Nous mettons l'accent sur les préoccupations sociétales que sont le respect de l'environnement, la réponse aux attentes qualitatives des consommateurs, la traçabilité alimentaire, l'empreinte carbone de l'agriculture. Mais les consommateurs sont volatils, et pas toujours au rendez-vous... Nous traversons actuellement une crise grave : alors que 85 % des aliments sont achetés en supermarché, la distribution est très concentrée et les quatre opérateurs engagés dans une concurrence fratricide pour faire baisser les prix. Quiestlemoinscher.com est l'un des sites les plus consultés - or en matière de low cost, les produits français sont les moins bien placés. On l'a vu dans le Maine-et-Loire dans le secteur de la chaussure : 12 000 emplois il y a vingt ans, 1 200 aujourd'hui ! L'agriculture risque de connaitre la même spirale dramatique. Nous nous battons pour maintenir l'activité agricole sur l'ensemble des territoires, car l'agriculture, c'est aussi l'alimentation, le paysage, l'emploi, la gastronomie : l'agriculture est constitutive de l'identité et du rayonnement de la France.

Mme Chantal Jouanno, présidente. - Merci pour ce témoignage transparent et sincère.

Mme Jacqueline Cottier, présidente de la commission des agricultrices de la FNSEA. - L'élection de Christiane Lambert est un message fort pour les agricultrices : elle montre que l'on peut y arriver, à condition de bénéficier de leviers en matière de formation et d'accompagnement. Merci, Christiane !

Mme Corinne Bouchoux, co-rapporteure. - Les femmes contribuent financièrement à la formation mais n'en bénéficient guère. Comment développer la formation des agricultrices ?

Ne va-t-on pas voir se creuser la différence entre les agriculteurs issus d'une famille d'agriculteurs et les nouveaux venus qui, s'ils ne manquent pas d'enthousiasme et ont souvent un bon niveau d'instruction, ne sont pas imprégnés de culture agricole ? Tout ne s'apprend pas dans les livres...

Mme Annick Billon, co-rapporteure. - Notre déplacement en Vendée, où nous avons retrouvé Jacqueline Cottier, a mis en exergue la problématique du statut de conjoint-collaborateur. Nous avons été frappés par le volontarisme des agricultrices que nous avons rencontrées : elles mènent un combat permanent pour gagner leur place, faire reconnaître leurs droits. Nous en avons eu des témoignages, le système de remplacement manque de souplesse - par exemple, quand le congé maternité démarre plus tôt que prévu. Autres difficultés : la relation aux banques pour les femmes qui s'installent, la reprise d'une exploitation... Je me félicite des déplacements à venir, car les agricultrices sont sensibles à votre souhait de les écouter.

Mme Catherine Procaccia. - Merci, madame la présidente, d'avoir associé les membres de la commission des affaires sociales à cette réunion.

J'aimerais savoir si la double activité est plus répandue chez les femmes que chez les hommes.

Ma seconde question concerne les nouvelles technologies : vous l'avez évoqué, les agriculteurs ne travaillent plus depuis longtemps comme certains l'imaginent encore. Qu'en est-il des formations en matière de nouvelles technologies satellitaires pour le calcul des rendements, pour le traitement des parcelles (rendements à l'hectare, pesticides) ? Proposez-vous un certain nombre de formations ou d'informations pour permettre aux agriculteurs de suivre ces questions ?

Je suis moi-même retraitée de l'agriculture, puisque j'étais salariée de la Mutualité agricole, des Assurances mutuelles agricoles puis de Groupama. Si les femmes ont conquis une certaine place dans l'agriculture, j'ai le sentiment qu'elles ont plus de mal à « faire leur trou » dans les organisations comme les chambres d'agriculture, la Mutualité ou le Crédit agricole. Comment l'expliquez-vous ?

Mme Christiane Lambert. - Un mot d'abord sur la formation. Je préside Vivéa, le fonds pour la formation des entrepreneurs du vivant. Si 19 % des agriculteurs se forment chaque année, le taux n'est que de 15 % à 16 % pour les femmes. Cela tient d'abord à la difficulté de quitter l'exploitation, notamment quand on travaille dans l'élevage où les astreintes sont fortes. Nous incitons à recourir aux services de remplacement, avec un tarif préférentiel pour favoriser l'accès à la formation. Il faut aussi décomplexer certaines femmes qui craignent de se voir reprocher d'avoir « du temps à perdre », les mettre à l'aise en constituant des groupes d'agricultrices. Reste que l'accès à la formation est plus facile par exemple dans l'Ouest que dans les Hautes-Alpes, où le moindre déplacement prend beaucoup de temps. C'est pourquoi nous développons les Mooc, pour lever ce frein géographique. Les formations à distance sont en outre plus compatibles avec l'organisation d'une exploitation.

Le profil des agriculteurs a beaucoup changé : 35 % des jeunes agriculteurs qui s'installent le font hors succession familiale. En 1992, ce chiffre était de 30 % dans les Pays de la Loire ou en Bourgogne-Franche-Comté, mais de 7 à 8 % seulement dans certains départements. En outre, l'installation se féminise. En 2016, sur 6 800 nouveaux venus, on compte 25 % de jeunes femmes - souvent viticultrices, maraîchères, horticultrices, mais aussi dans l'élevage, notamment de lapins, d'ovins et de caprins. Elles ont souvent un niveau de formation supérieur à celui des hommes - sachant que 92 % des jeunes qui s'installent, femmes et hommes confondus, ont le niveau baccalauréat, 34 % le niveau BTS et 17 % le niveau ingénieur. Le niveau de formation augmente, car dans ce métier il faut être polyvalent !

Les nouveaux profils de retour tardif à la terre ont aussi besoin de formation technique : le soutien du fonds Vivéa à l'installation est ainsi passé de 4,5 à 9 millions d'euros en cinq ans.

Bref, le profil des jeunes qui s'installent est très varié, c'est un melting pot enrichissant. Ils ont des attentes différentes de celles de leurs aînés, sur le séquençage entre temps de travail et de loisir, sur l'articulation entre vie familiale et professionnelle, sur l'exigence de résultats aussi : ils n'accepteront pas trois années en résultat négatif. Il y aura donc des entrées, mais aussi des départs, il faut en prendre conscience.

Les progrès obtenus sur le statut de conjoint-collaborateur l'ont été grâce à la personnalité des femmes qui ont porté ce combat, et grâce aux hommes qui ont su les écouter. Marie-Thérèse Lacombe a su convaincre son mari, Raymond Lacombe, alors président de la FNSEA...

On trouve davantage de femmes prêtes à exercer des responsabilités au niveau cantonal ou départemental qu'au niveau régional ou national, car les temps de trajet et la nécessité d'organiser l'intendance sont d'incontestables obstacles. Et les responsabilités familiales reviennent davantage aux femmes... Cela dit, les choses changent. De plus en plus de conjointes d'agriculteurs travaillent en dehors de l'exploitation, comme infirmière, enseignante, etc. Dans ma commune, sur quinze exploitations, nous sommes le seul couple d'agriculteurs ! Ce sont donc les pères qui déposent les enfants à l'école et vont les chercher, car le métier agricole leur laisse une certaine souplesse d'organisation. La société évolue, donc.

Lorsque je me suis présentée devant le banquier, à 19 ans, il m'a rétorqué que je n'étais pas « un élément stable et sécurisant ». Sans la caution de mes parents, je n'aurais pas pu m'installer. Du reste, l'activité agricole étant extrêmement capitalistique, dans un contexte d'accroissement de la volatilité et du risque, il n'est pas anormal qu'un banquier demande davantage de garanties. Le statut d'exploitant agricole entraîne des droits économiques - emprunts, caution, aides, ce qui explique qu'il soit encadré pour éviter tout détournement. Toutefois, certaines jeunes femmes affirment rencontrer plus de difficultés que les hommes pour emprunter.

La double activité a longtemps concerné les femmes plus que les hommes ; je ne suis pas sûre que ce soit encore le cas aujourd'hui. Désormais, les agricultrices choisissent leur métier. Elles ont parfois un métier tout autre mais sont attirées par la qualité de travail de leur mari et trouvent plus agréable de travailler avec lui qu'à l'extérieur de l'exploitation. Elles rejoignent l'exploitation vers l'âge de trente ans après avoir suivi une formation, puisqu'on ne peut pas s'improviser éleveur, agriculteur ou maraîcher. Elles développent l'exploitation en y amenant souvent une activité qui leur est propre : vente directe ou autre atelier à leur goût tel que production de lapins, de poulets...

La double activité n'est toutefois pas la règle. Dans certains départements, il est difficile d'être pluriactif dans la mesure où il faut parfois parcourir de longues distances pour aller travailler. Selon que l'on se trouve dans un territoire dynamique ou en recul, l'approche est différente. Dans les zones en recul, cette pluriactivité aide à faire bouillir la marmite...

Mme Jacqueline Cottier. - Nous alertons les agricultrices qui, en retournant travailler à l'extérieur, quittent leur statut agricole, mais continuent en réalité à travailler dans l'exploitation. En cas d'accident par exemple, les conséquences peuvent être graves. Quant au statut de conjoint collaborateur, il ne peut pas être durable. Nous encourageons les femmes à réfléchir aux progrès de leur activité et à franchir éventuellement le pas vers le statut plein et entier d'exploitant.

Mme Christiane Lambert. - Le nombre de jeunes filles qui veulent devenir agricultrices est impressionnant. Les pères qui voient leur fille s'installer éprouvent une vraie fierté, comme vous pouvez l'imaginer. La force physique est moins déterminante qu'auparavant et les filles s'épanouissent dans des métiers supposés masculins.

On compte beaucoup de femmes à la MSA - qui a eu une présidente, un peu chez les assureurs tels que Groupama, très peu au Crédit agricole et encore moins au sein des coopératives. C'est regrettable. Le président de coopérative et sénateur Daniel Gremillet me disait qu'il avait fait entrer deux femmes au conseil d'administration de sa coopérative et que le débat s'en était trouvé enrichi.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin, co-rapporteure. - Que la FNSEA ait une femme présidente n'est pas anodin. Les femmes ont besoin de symboles auxquels s'identifier. Entrez-vous dans cette fonction avec une sensibilité féministe ? Avez-vous réfléchi à des causes particulières à promouvoir ? J'ai été frappée, au cours de nos travaux, par la grande technicité, la polyvalence du métier d'agricultrice ainsi que par la difficulté à articuler les temps de vie professionnelle et personnelle. Quelles seront vos actions en matière de santé, de lutte contre les violences, d'accès à la culture, au sport ? Vous avez dit ce que chacun pense ici : on ne veut renoncer à rien quand on est une femme.

Mme Maryvonne Blondin. - Vous avez évoqué l'importance vitale de la formation professionnelle et le profond attachement de la FNSEA à l'Europe. Quelles sont vos actions de coopération internationale, en particulier en Afrique ? Un proverbe africain dit : « Éduque un homme, tu éduques une personne ; éduque une femme, tu éduques un village. » J'ai beaucoup travaillé avec Agriculteurs français et développement international (AFDI) en Bretagne et suis par ailleurs en charge de la coopération décentralisée. J'ai mis en place des formations à Madagascar ; elles manquent dans ce pays plein de potentialités. Allez-vous soutenir ce type d'actions ?

Les groupements de valorisation des agricultrices mènent des actions concrètes. Un moyen d'attirer les femmes peut être, comme dans le Finistère, de promouvoir des vêtements conçus en fonction de leur morphologie. Un travail important a été réalisé en partenariat entre un groupement de valorisation agricole de femmes et des élèves du lycée Le Paraclet, à Quimper, puis développé par l'entreprise Armor Lux®, pour des vêtements plus pratiques, adaptés aux femmes tout en étant solides. Ce type d'initiative renforce le rôle des femmes dans l'agriculture.

M. Yannick Vaugrenard. - J'ai beaucoup apprécié la présentation de votre parcours exceptionnel. Cette réussite, c'est aussi la présence d'une famille à vos côtés. Vous avez dit qu'à huit ans, vous vouliez devenir agricultrice. C'est bien plus sain que de vouloir, au même âge, devenir Président de la République !

Dans l'une de vos premières interviews en tant que présidente de la FNSEA, vous avez insisté sur la nécessité d'une grande loi de simplification. On sait bien que l'abus de normes nuit à l'économie. Vous avez aussi souhaité un Grenelle de l'alimentation. Pouvez-vous nous en dire plus ?

La forte augmentation des votes extrêmes a été soulignée lors de l'élection présidentielle. On a coutume d'entendre que ces votes ont concerné les secteurs ruraux. Or on le constate, le Front national est plutôt bas là où les agriculteurs sont les plus présents. Très souvent, les responsables politiques mettent en avant une Europe empêcheuse de tourner en rond - c'est parfois vrai pour la PAC. Pourtant, l'Europe est une chance. Comment mettre en avant l'intérêt du monde agricole à développer l'Union européenne ?

Mme Françoise Laborde, co-rapporteure. - Vous avez effectué un très beau cursus, vous venez du terrain. Vous avez suivi une formation initiale, des formations continues, vous avez travaillé dès 19 ans, vous êtes mère de famille et vous avez exercé des mandats syndicaux, jusqu'à devenir présidente ! Vous exprimez bien votre passion en montrant que vous en tirez une satisfaction malgré les contraintes et les obligations liées à l'exercice de responsabilités.

Les agricultrices contribuent davantage au financement de la formation continue qu'elles n'en bénéficient, car elles doivent affronter des problèmes de logistique. Toutefois, s'il existe les Mooc, les formations ne sont pas remplaçables car elles donnent l'occasion de sortir et de rencontrer d'autres personnes. La FNSEA travaille-t-elle sur ce sujet ?

Même si la politique de lutte contre le chômage est remise à plat après l'élection présidentielle, comment peut-elle s'étendre aux agriculteurs ?

Mme Hermeline Malherbe. - Je préside le conseil départemental des Pyrénées-Orientales, territoire pourtant souvent considéré comme machiste.

Madame la présidente, quel sera votre travail pour faire évoluer l'image des agriculteurs et agricultrices ? Qu'on arrête avec celle de l'agriculteur pollueur ! Il est fondamental de lier agriculture et alimentation. À titre d'exemple, la cuisine centrale publique des Pyrénées-Orientales, qui fournit nombre de restaurants scolaires du département, organise des animations auprès des jeunes avec des agriculteurs ou des éleveurs. Ce type d'initiative fonctionne bien pour faire évoluer l'image du métier. Qu'allez-vous faire, à la FNSEA, pour prendre en compte cette dimension qui me semble très importante ?

Mme Christiane Lambert. - Je suis moi aussi très impressionnée par vos parcours, mesdames les sénatrices, car je mesure combien il est difficile pour une femme de gravir les échelons en politique. Cela me semble moins dur à la FNSEA.

J'ai été élue par un conseil d'administration de 69 personnes, dont 17 % de femmes. Je n'ai pas été choisie parce que j'étais une femme, mais pour mes compétences. Je porte un message d'ensemble fort sur les problématiques agricoles, sans m'excuser d'être une femme. Beaucoup d'agricultrices l'attendent de moi.

Afin d'améliorer l'image des agriculteurs, j'accueille dans notre exploitation familiale beaucoup de journalistes, très curieux de voir une agricultrice et un élevage de porcs in situ. On n'a jamais vu autant de petits cochons à la télévision : c'est important car nous souffrons beaucoup de l'agriculture bashing porté par des militants extrémistes de la cause environnementale, qui à mon avis exagèrent les problèmes. Quand j'ai décidé d'être agricultrice, à huit ans, puis quand mes parents ont construit une porcherie, deux ans plus tard, j'ai été l'objet de quolibets inimaginables et de railleries blessantes à l'école. Par la suite, des professeurs et maîtres de stage ont tenté de me dissuader de suivre un cursus agricole, au motif que j'avais de bons résultats scolaires. Or ce métier est passionnant ! J'ai envie de redorer son blason. Nombre d'agriculteurs ont des « bleus au coeur » et comptent sur moi pour porter le flambeau et travailler à améliorer l'image de notre métier. Je prône l'agriculture « décomplexée » : j'élève des porcs et je l'assume. Je fais ce métier dans le respect de l'environnement : c'est possible. Je préparais, avant de venir à cette audition, ma réunion du 2 juin dans les Ardennes : les agriculteurs veulent qu'on y parle des attaques dont ils font l'objet, notamment de la part des « anti-viandes ».

J'ai toujours cultivé la nécessité de bien communiquer, d'aller au-devant des autres avec une parole vraie, sincère et argumentée. La FNSEA a choisi une femme capable de se livrer et de montrer par la preuve ce que les agriculteurs font, concrètement. Les opposants syndicaux prétendent que le choix d'une femme relève d'un simple souci de communication. Moi, je montre l'agriculture telle qu'elle est. J'ai vu que vous aviez rencontré en Vendée Sylvie Douillard1(*) : voilà une agricultrice épanouie, impliquée. Les agricultrices ne sont pas des phénomènes !

L'un de mes collègues disait que PO, pour Pyrénées-Orientales, signifiait « pays oublié ». Nous, nous sommes la profession oubliée. Je souhaite décomplexer tout le monde en parlant de l'agriculture telle qu'elle est et non telle qu'elle est caricaturée. Combien de fois ai-je entendu mes enfants répéter tout le mal qu'en avaient dit leurs professeurs ?

Vous avez cité des actions des groupements de valorisation agricole. L'agriculture est un laboratoire social. À bien des égards, nous avons été des précurseurs : les coopératives d'utilisation du matériel en commun ne sont rien d'autre qu'un « Blablacar » physique et non numérique ; les services de remplacement ne sont rien d'autre que les services à domicile appuyés sur des plateformes numériques.

Mme Catherine Procaccia. - En effet, cela existait bien avant !

Mme Christiane Lambert. - C'est normal que le monde agricole soit un laboratoire social : quand on est loin de tout, il faut tout inventer.

Beaucoup de femmes participent à AFDI, avec lequel la Commission nationale des agricultrices travaille beaucoup. J'ai notamment accueilli une agricultrice burkinabé pendant trois semaines dans mon exploitation. Les femmes d'Afrique ont encore plus de mérite que nous.

J'en viens à l'annonce du Président de la République pour une loi de simplification et pour des « états généraux de l'alimentation ». L'empilement réglementaire, en effet, est insupportable. Les agriculteurs renoncent à des projets de méthanisation ou de réserve d'eau par crainte de lourdeurs administratives. En France, la mise en place d'un projet de méthanisation dure huit ans, contre deux ans à l'étranger. Face à ces difficultés, le nouveau ministre de l'Agriculture, Jacques Mézard, a l'air très pragmatique.

Le Président de la République a fait de la simplification une priorité. Ce serait vraiment une source d'économies pour notre pays. Et même si c'est la vingtième fois que l'on nous parle de simplification, j'y crois toujours.

M. Macron a touché du doigt un aspect majeur de la crise agricole. Les agriculteurs qui vendent en dessous des coûts de production se lèvent le matin pour perdre de l'argent. C'est insensé ! Il est anormal que le secteur de la distribution ait un tel poids et que les producteurs soient écrasés. C'est destructeur pour l'économie de nos territoires et pour l'emploi. Nous souhaitons donc une réforme de la loi de modernisation de l'économie, qui a ouvert un « boulevard » aux entreprises de distribution. Les agriculteurs ne comprennent pas qu'un groupe comme Savencia, qui affiche + 83 % de résultats nets, soit celui qui paie le lait le moins cher. Ce n'est pas tenable dans la durée.

La semaine dernière, le directeur du département opinion de l'Ifop pointait la confusion entre vote rural et vote agricole qu'évoquait M. Vaugrenard. Plus la dynamique agricole est forte dans une commune, moins elle vote FN - regardez la Bretagne et la Normandie, et à l'inverse, le Nord et le l'Est ! Nous n'avons pas du tout aimé que l'on nous colle cette étiquette « FN ». Ma commune compte 700 habitants, dont 500 votants, et quinze familles d'agriculteurs. Ces derniers représentent donc au mieux 30 bulletins. Est-ce qu'ils font le résultat du FN ? Non !

Certains syndicats cultivent le sentiment anti-européen. Pas la FNSEA. Au contraire, le sentiment pro-européen y est très développé. Nous pouvons dire que nous sommes pro-européens, que ce soit sur les questions de la monnaie, des marchés, des échanges ou de la circulation des biens et des personnes. Nos jeunes connaissent l'Europe, qu'ils sillonnent dans le cadre du programme Erasmus. Ils découvrent d'autres pratiques, puis décident de revenir s'installer en France : c'est extrêmement porteur. À la FNSEA, nous avons pris le parti d'expliquer ce qu'apporte l'Union européenne à l'agriculture, à la ruralité et à la société française. Nous nous réjouissons de l'issue du scrutin présidentiel.

Les Mooc et la formation à distance sont très importants mais, en effet, rien ne remplace le présentiel : il redonne le moral à des personnes qui captent de l'énergie dans le groupe. Il faut lever les freins à la formation en présentiel, je rejoins Mme Laborde sur ce point.

Les critères d'accès au RSA et à la prime d'activité ne sont pas adaptés au profil des agriculteurs, qui ne se versent pas de salaire mais prélèvent un revenu quand l'exploitation est rentable ou empruntent quand elle ne l'est pas.

Mme Françoise Laborde, co-rapporteure. - La FNSEA travaille-t-elle aux critères d'accès ?

Mme Christiane Lambert. - La FNSEA y travaille avec la MSA mais Bercy se montre plutôt « psychorigide » à cet égard.

Les Pyrénées-Orientales ont grandement souffert de la perte de production dans des secteurs tels que la viticulture, l'horticulture, le maraîchage et l'arboriculture. Une grande partie des surfaces consacrées à l'arboriculture et à la culture de la salade des Pyrénées-Orientales est désormais en friche. Comme le disent les producteurs, on regarde passer les camions espagnols et on accueille au salon professionnel MedFEL les producteurs de fruits de toute la planète. C'est extrêmement difficile pour les producteurs.

Mme Hermeline Malherbe. - Les producteurs locaux sont présents au MedFEL. Cela a contribué à changer l'image des productions locales.

Mme Christiane Lambert. - L'agriculture, c'est l'alimentation. Il faut le rappeler, alors que le rapport des Français à l'alimentation change. Ils sont de plus en plus attachés à l'origine des produits, à leur non-transformation, à la santé. J'entendais parler ce matin, sur BFM Business, d'une start-up, Frichti, qui cuisine des plats maison et les livre à domicile. Aux États-Unis, on construit des appartements sans cuisine car les habitants se font livrer. L'agriculture est prête à répondre à une demande de circuit court, raisonné, biologique et labellisé. Elle est prête à fournir les grands circuits commerciaux classiques comme McDonald's ou KFC. Elle est aussi prête à alimenter l'Allemagne et l'Angleterre en fruits et légumes du soleil. Elle peut également fournir la restauration à domicile. Nous soutenons tous les modèles d'agriculture car il y a de la place pour tous les modèles d'alimentation.

Mme Élisabeth Doineau. - Merci pour ce témoignage. Avez-vous donné envie à vos enfants de devenir agriculteurs ?

En Mayenne, beaucoup de retraitées de l'agriculture souffrent du niveau très faible de leurs revenus. Ce n'est plus acceptable. Mènerez-vous un combat pour elles ?

Mme Christiane Lambert. - J'ai trois enfants. L'aîné, 27 ans, travaille dans un cabinet d'avocats d'affaires à La Défense. Le deuxième a fait ses études à Sciences Po Bordeaux ; il y a découvert les grands enjeux alimentaires et a décidé de suivre un BTS agricole à Angers, en apprentissage. Il travaille actuellement en Pologne pour une entreprise française d'alimentation du bétail et est passionné par son métier. Enfin, ma benjamine, 18 ans, étudie en classe préparatoire véto-agro ; elle s'intéresse aux gros animaux. Je laisse libres mes enfants qui ont la fibre agricole. J'ai vu tant j'ai vu d'agriculteurs « exploser » à trente ans sous le poids d'un héritage qu'ils avaient embrassé sans le souhaiter ! J'ai également été une militante de l'installation hors cadre familial. Ce sont des fils ou filles spirituels que l'on accueille et c'est bien ainsi.

La retraite moyenne des agricultrices est de 500 euros mensuels. Même si celles qui partent aujourd'hui ont des niveaux de retraite plus élevés, certaines agricultrices âgées, qui ont beaucoup travaillé, qui ont une santé usée, touchent des retraites scandaleusement basses. Nous nous battons pour que le calcul de la retraite soit fondé sur les 25 meilleures années, ce qui pour l'instant n'a pas l'écho de Bercy. Le candidat Macron proposait d'augmenter les retraites de 200 euros : pour nous, ce serait un sacré progrès. En agriculture, un point de hausse équivaut à 2 milliards d'euros, or le secteur agricole compte trois fois plus de retraités que d'actifs... Pour commencer, il faudrait améliorer la fiscalité agricole afin d'encourager les agriculteurs à capitaliser pour leur retraite.

Mme Catherine Procaccia. - Le Président de la République a évoqué la convergence de tous les systèmes de retraite. Cela fait quarante ans que j'entends parler de l'intégration de la MSA dans le régime général.

Mme Christiane Lambert. - La convergence des niveaux serait bénéfique aux agriculteurs, puisque le niveau moyen général des retraites est de 1 300 euros mensuels contre 800 euros pour les agriculteurs et 500 euros pour les agricultrices.

La convergence des caisses serait un autre projet. Les frais de gestion de la MSA sont inférieurs à ceux des caisses de sécurité sociale et des autres caisses. En outre, ce serait une mauvaise réponse au sentiment de déclassement de la ruralité que de retirer les dernières antennes locales de la MSA, du Crédit agricole ou de Groupama. L'intitulé du ministère de la « cohésion des territoires » me semble être tiré des enseignements du second tour de l'élection présidentielle.

Mme Chantal Jouanno, présidente. - Voici une belle conclusion. Il nous reste à vous remercier, ainsi que Jacqueline Cottier, d'être venues témoigner devant nous.

Mme Christiane Lambert. - Je vous fais part du plaisir et de la satisfaction des agricultrices des territoires qui vous reçoivent dans le cadre de vos travaux.


* 1 Sylvie Douillard préside la commission des agricultrices de la FDSEA 85.