Mercredi 30 novembre 2016

- Présidence de M. Jean-Claude Lenoir, président -

Projet de loi de finances pour 2017 - Mission « Économie » - Examen du rapport pour avis

La réunion est ouverte à 9 h 30.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur pour avis de la mission « Économie ». -À périmètre constant et après neutralisation des mesures de transfert, les crédits de la mission pour 2017 connaissent une stagnation par rapport à l'an passé : on observe en effet une hausse de 0,5 % des crédits de la mission, mais une baisse de 0,7 % des crédits hors titre 2, c'est-à-dire hors frais de personnel. Cet état de fait tranche quelque peu avec trois années consécutives de baisse ininterrompue des crédits qui ont conduit à une diminution de 13 % par rapport à 2013.

Je regrette néanmoins que des changements de périmètres et des transferts entre missions rendent particulièrement peu aisée l'évaluation sur plusieurs années de l'évolution des crédits dévolus au soutien des entreprises. En effet, si l'on relève une hausse faciale de 10,7 % des crédits de paiement par rapport à l'année passée, cela vient pour l'essentiel du déversement des crédits de soutien aux entreprises électro-intensives, qui relevaient jusqu'alors de la mission « Écologie ». Comme pour les normes elles-mêmes, les documents budgétaires doivent s'efforcer de conserver une relative stabilité, qui est seule de nature à garantir leur pleine lisibilité.

Pour le programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme », on observe une baisse de 1 % en crédits de paiement, à 830,8 millions, et de 2,3 % en autorisations d'engagement, à 831,8 millions. Cela fait suite à une baisse de 5 % en crédits de paiement et de 1,75 % en autorisations d'engagement l'année passée. Toutefois, comme l'année précédente, l'évolution des crédits hors titre 2 est nettement plus défavorable : - 3,2 % en crédits de paiement et - 6 % en autorisations d'engagement.

D'autre part, s'agissant des crédits du programme 220 « Statistiques et études économiques », c'est-à-dire, essentiellement, les fonds alloués à l'INSEE, par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2016, on constate une hausse de 5 % en autorisations d'engagement et de 3,7 % en crédits de paiement. Cet effort ne vise cependant qu'à compenser les incidences de la mise en oeuvre du principe de gratuité des données publiques à compter du 1er janvier 2017, en application de la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique.

Enfin, je relève la stabilisation des crédits du programme 305 « Stratégie économique et fiscale », avec une faible augmentation de 0,9 %, à 429 millions en crédits de paiement.

Comme toujours, le levier essentiel de la mission reste la dépense fiscale : 23,9 milliards en 2017. Par rapport aux évaluations faites pour 2016, il y a une augmentation de 16 %.

Cette hausse s'explique par deux éléments : en premier lieu, le fonctionnement « à plein régime » du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), et l'augmentation de son taux, qui passerait de 6 % à 7 % en 2017. Le CICE concentre à lui seul les deux tiers de la dépense fiscale de la mission. Le second élément d'explication est la montée en charge et l'extension du dispositif de suramortissement en faveur des investissements industriels, qui a été reconduit pour une année supplémentaire en 2016, afin de bénéficier aux investissements intervenus jusqu'au 14 avril 2017. Cette prolongation conduit à un chiffrage de la mesure, pour 2017, à 1 milliard, contre 860 millions pour 2016.

Compte tenu de ces différents éléments, je vous proposerai d'émettre un avis de sagesse sur les crédits de la mission. Toutefois, avant de vous prononcer, je souhaite aborder deux éléments de l'accompagnement des entreprises que j'ai particulièrement étudiés cette année.

Le premier concerne le Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC). La période 2015-2016 aura été la première année de mise en oeuvre effective du FISAC dans son dispositif issu de la loi du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises. Il est donc possible, aujourd'hui, d'avoir un premier retour d'expérience.

La situation antérieure est complètement assainie. Tous les dossiers en stock avant la réforme ont désormais donné lieu à une décision positive ou négative d'attribution d'aide, les actions approuvées sont en cours de réalisation et les paiements sont effectués au fur et à mesure de leur avancement. Cela vaut également pour les actions de financement qui, jusqu'en 2014, dépendaient du Comité professionnel de la distribution des carburants (CPDC), et qui relèvent désormais directement du FISAC.

D'autre part, le FISAC repose aujourd'hui sur des appels à projets structurés autour d'axes prioritaires ; des priorités thématiques et des zones géographiques privilégiées sont définies chaque année dans l'appel d'offres. C'est une bonne chose, car cela permet de mieux cibler les aides.

En 2015, les actions devaient cibler les derniers commerces et les commerces multiservices en zones rurales, les stations-services qui assurent le maillage du territoire, ou encore l'accessibilité des commerces. Les zones géographiques privilégiées étaient les communes classées en zone de revitalisation rurale et les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Au total, l'administration a été saisie de 324 demandes de soutien au titre du FISAC, représentant une demande d'aide globale de 36 millions. Sur ce total, 105 opérations individuelles en milieu rural ont reçu des subventions, à hauteur de 2,9 millions. Il restera donc 12 millions pour financer au titre de 2016 une partie des 219 dossiers d'opérations collectives résultant de l'appel à projets de 2015. C'est dire le décalage entre l'attente du terrain et les possibilités financières du FISAC : la sélection sera drastique.

Pour les appels à projets de 2016, les priorités de 2015 ont été maintenues et complétées, s'agissant des opérations collectives, par des priorités thématiques telles que la modernisation, la diversification, l'accessibilité et la sécurisation des entreprises de proximité existantes, ainsi que la création et la modernisation des halles, marchés couverts et marchés de plein air. En outre, aux deux zones géographiques déjà ciblées ont été ajoutées les centralités commerciales dégradées connaissant un fort taux de vacance. Cette nouvelle priorité est selon moi très pertinente, car je suis convaincue que le FISAC peut être une arme très efficace pour la revitalisation des centres-villes, qui n'ont cessé de perdre leur attractivité commerciale. La situation de vacance commerciale dans nombre de villes moyennes est préoccupante : à Béziers, Châtellerault, Forbach ou Annonay, la vacance dépasse les 20 %.

Il n'en reste pas moins que, avec une dotation en crédits de paiement de 10 millions pour 2017, ce qui représente une diminution de 87,7 % en dix ans et de 23,6 % en un an, la dimension structurante du FISAC reste extrêmement faible. Il serait donc important de renforcer sa dotation, a fortiori si les premières appréciations favorables venaient à se confirmer.

J'en viens à la coordination des actions d'accompagnement des entreprises et, dans cette perspective, à la nouvelle Agence France entrepreneur (AFE). Les réseaux d'accompagnement des entreprises sont particulièrement nombreux. Il s'agit, d'abord, des réseaux consulaires, les chambres de commerce et d'industrie (CCI) et les chambres de métiers et de l'artisanat (CMA), qui offrent une large palette d'actions à leurs membres. L'offre d'accompagnement peut néanmoins s'avérer redondante, notamment en cas de double affiliation, ce qui est le cas pour près de 70 % des artisans. Par ailleurs, les ressources budgétaires disponibles diminuent ; ainsi, le montant de la taxe pour frais de chambre des CCI est réduit, à nouveau, de 60 millions par le présent projet de loi de finances.

Il y a, ensuite, les réseaux associatifs soutenus par l'État ou les collectivités territoriales. On compte ainsi cinq grands réseaux nationaux avec implantations régionales : Initiative France, France active, Réseau entreprendre, le réseau BGE, ainsi que l'association pour le droit à l'initiative économique (ADIE).

De nouveaux acteurs développent également un accompagnement. Ainsi, Bpifrance propose depuis deux ans une offre d'accompagnement aux entreprises qu'elle finance en fonds propres ou qu'elle garantit, offre qui porte notamment sur les start-ups ou sur la croissance des TPE et des ETI.

Il faut mentionner, enfin, le réseau d'accompagnement à l'international, qui fait intervenir notamment Business France, les chambres de commerce françaises à l'étranger ainsi que d'autres acteurs.

Le paysage de l'accompagnement des entreprises s'avère donc particulièrement riche ; les entreprises peuvent en principe y trouver un appui dans leurs démarches quotidiennes et dans leurs stratégies de croissance.

Nous devons néanmoins être vigilants sur deux points. D'une part, les entreprises doivent être pleinement conscientes des services qu'elles peuvent trouver dans les différents réseaux d'accompagnement. Or elles n'en sont pas toujours suffisamment informées. D'autre part, cette abondance d'actions ne doit pas conduire à des stratégies concurrentes entre les acteurs. Elle doit au contraire assurer des complémentarités. Sur ce point, la convention de partenariat conclue entre Business France et CCI France a valeur d'exemple. Cette démarche reste pourtant insuffisamment développée sur le territoire national.

À cet égard, les missions de coordination des acteurs de l'accompagnement d'entreprise qui viennent d'être confiées à l'AFE revêtent un grand intérêt. Cependant, la question est de savoir si cette nouvelle structure sera bien à la hauteur de ses nouvelles missions. Elle doit, d'abord, animer et incarner la stratégie nationale de soutien à l'entreprenariat. Il s'agit, pour l'AFE, de renforcer la visibilité et de consolider le pilotage des financements vers les grands réseaux d'appui aux entreprises, en animant par ailleurs l'écosystème public et privé de l'entreprenariat. Il lui faut, ensuite, devenir la référence nationale en matière d'information et d'orientation numériques des entrepreneurs. À cette fin, l'AFE devra moderniser le site internet développé par l'Agence pour la création d'entreprises, l'APCE, et s'efforcer de faire connaître les plateformes de formation à l'entreprenariat. Enfin, l'AFE devra nouer des partenariats stratégiques avec les grands acteurs territoriaux et impulser des actions innovantes sur les territoires.

La création de cette agence a été annoncée en octobre 2015. Or il a fallu attendre avril 2016 pour que le Gouvernement lui donne sa feuille de route et elle vient seulement d'approuver ses statuts. Tout reste donc à faire pour cette agence. Il faudra être vigilant sur son action, afin qu'elle ne soit pas une coquille vide ou une APCE simplement rebaptisée. Cette création n'aura sinon été qu'un effet d'annonce, alors qu'une réelle instance de concertation, de dialogue et de coordination est absolument nécessaire pour clarifier et rendre encore plus efficace l'offre d'appui aux entreprises actuellement disponible.

M. Jean-Claude Lenoir, président. - Merci pour cet excellent travail.

Mme Sophie Primas. - Je veux attirer l'attention de la commission sur la situation assez inquiétante des CCI. Après avoir fait beaucoup d'efforts dans les deux dernières années, elles n'ont plus de fonds propres ni de trésorerie suffisamment importante pour assurer leur rôle. Je me préoccupe en particulier de l'action remarquable menée dans leurs écoles. La CCI Paris Île-de-France doit aujourd'hui vendre une école et elle a arrêté l'ensemble de ses investissements. Chacun connaît pourtant l'excellence des résultats de cette école. De plus, les ressources des CCI proviennent non pas du budget de l'État mais des cotisations des entreprises. Dans ma commune, une très bonne école de la CCI n'est pas en mesure d'accomplir les investissements nécessaires pour former ses élèves à la robotique.

M. Martial Bourquin. - Vous nous avez imposé une drôle de situation, mes chers collègues de la majorité sénatoriale : nous sommes dans l'incapacité de discuter et d'amender le budget. Cette situation inédite est loin d'être confortable pour nous, mais certainement pour vous aussi. Nous en sommes d'autant plus désolés que des rapports de qualité ont été produits, qui auraient pu aboutir au dépôt d'amendements eux aussi de qualité. Le Sénat aurait pu laisser sa marque sur certains points, comme le FISAC.

J'en viens au rapport : le FISAC a-t-il une dimension structurelle ou corrective ? En tant que maire d'Audincourt, j'ai fait appel plusieurs fois au FISAC. Les grandes surfaces continuent de se multiplier à la périphérie des villes ; elles prennent aujourd'hui de nouvelles formes ; toujours plus grandes, comme les atolls. Elles ont pour but de drainer une clientèle maximale dans un rayon de plusieurs dizaines de kilomètres. Face à de telles machines, même avec l'aide du FISAC, il est impossible de garder les commerces de centre-ville. Ces équipements commerciaux, qui incorporent des indépendants, déplacent considérablement les zones de chalandise.

Le e-commerce change lui aussi beaucoup de choses. Il est temps, selon moi, d'avoir une politique équilibrée d'urbanisme commercial. Aujourd'hui, tel n'est pas le cas. Structurellement, le FISAC ne pourra rien faire contre les tendances à l'oeuvre aujourd'hui.

Enfin, lors des demandes d'autorisations d'agrandissement, il faut obliger les grandes surfaces à revenir dans les centres villes, sous une forme ou sous une autre. Certaines tentatives en ce sens ont eu du succès. Néanmoins, si l'on ne rééquilibre pas la politique d'urbanisme commercial, tout cela sera voué à l'échec, car le FISAC ne peut intervenir qu'à la marge.

M. Michel Le Scouarnec. - Je pense pour ma part aux petites communes les plus éloignées des villes. J'ai ainsi aidé une commune de 700 habitants à réinstaller un petit commerce d'alimentation. Je suis d'accord quant au rôle joué par le FISAC pour aider les commerces en difficulté des centres-villes et centres-bourgs, mais ne faudrait-il pas une ligne budgétaire spécifique pour les territoires hyper-ruraux ? Leur population, qui vieillit et peine à se déplacer du fait du manque de transports en commun, souffre du manque de commerces. Le FISAC devrait intervenir en leur faveur.

M. Jean-Claude Lenoir, président. - Pour répondre à M. Bourquin, nous examinons depuis plusieurs semaines des rapports extrêmement intéressants et qui ont fait l'objet d'un long travail. Il serait dommage d'être privé de leur lecture. Il est faux d'affirmer que le Sénat n'aura pas examiné le projet de loi de finances pour 2017 : il a fait l'objet d'un examen approfondi, en commission des finances pour la première partie, dans les commissions saisies pour avis pour la seconde partie. Il importait donc d'examiner les derniers rapports avant l'adoption, éventuelle, de la question préalable cet après-midi.

M. Martial Bourquin. - Cesserons-nous de nous réunir après ce vote ?

M. Jean-Claude Lenoir, président. - Il faut attendre de connaître le vote du Sénat.

Je partage les observations de notre rapporteur sur les crédits de la mission, ainsi que l'analyse de M. Bourquin sur l'urbanisme commercial. Nous observons tous l'évolution très inquiétante des formes du commerce, ainsi que son externalisation par rapport aux centres-villes, qui se dégradent en conséquence : le taux de vacance est proprement ahurissant.

Il me faut souligner la lourde responsabilité portée par les élus locaux sur ce point. J'ai toujours été favorable à des documents d'urbanisme intercommunaux, sans lesquels il sera difficile de traiter ces sujets : les communes, à elles seules, ne peuvent évidemment pas apporter les bonnes réponses.

On s'interroge souvent sur l'efficacité des interventions publiques. Or l'effet levier du FISAC est considérable. Il permet la rénovation d'un centre-bourg avec celle d'une boutique, ou encore la reprise par la collectivité de la distribution de carburants. Je regrette donc la modestie des sommes engagées au regard des besoins exprimés en 2015 qu'a rappelé notre rapporteur : 2,9 millions pour les équipements en milieu rural, 15 millions au total.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteure pour avis. - Nous discutons chaque année du FISAC, et vous savez à quel point les crédits de ce fonds ont diminué depuis dix ans : en 2007, ils s'élevaient à 81,5 millions ; en 2017, les crédits de paiement ne seront plus que de 10 millions. Ils ont baissé de 23 % en un an. J'avais déjà proposé, l'an dernier, d'augmenter ces crédits en puisant sur la dotation de l'INSEE, ce qui n'avait pas fait l'unanimité. On ne peut que regretter que ces crédits baissent encore, et ce d'autant plus que l'effet de levier du FISAC est considérable. Ces crédits sont aujourd'hui davantage ciblés, sur les zones de réhabilitation rurale par exemple : monsieur Le Scouarnec, les petits centres-bourgs peuvent profiter du FISAC.

Je partage l'analyse et l'inquiétude de Mme Primas concernant les CCI. On leur a, en quelque sorte, coupé les vivres. Il n'en reste pas moins qu'un nombre important d'acteurs accompagnent les entreprises dans les territoires. Ils auraient tout intérêt à s'entendre pour éviter d'être redondants. Par exemple, Bpifrance pratique depuis 2 ans l'accompagnement d'entreprises : c'est une forme de concurrence. Il faudrait plus de complémentarité entre les acteurs, à l'image des mutualisations effectuées par les collectivités locales. Cela dit, on sait bien que les crédits manquent et que les chambres de commerce doivent s'adapter à cette situation. Il est néanmoins extrêmement regrettable que ce soit la formation qui en pâtisse.

M. Martial Bourquin. - Quant au FISAC, si l'on avait débattu du budget, on aurait pu examiner un amendement visant à augmenter ses crédits. Il est dommage de laisser la seule Assemblée nationale aborder ces questions.

Le FISAC est désormais essentiellement consacré au commerce ; d'autres crédits, qui ne sont malheureusement pas tous consommés, sont disponibles pour les centres-bourgs. On pouvait auparavant faire financer par le FISAC des restructurations globales, dont le commerce n'était qu'un élément : il faut à présent, pour de tels projets, utiliser des crédits différents.

M. Franck Montaugé. - Je ne veux pas minimiser l'importance du FISAC, mais il serait intéressant d'en connaître l'efficacité. C'est un fonds d'appoint : il ne peut, à lui seul, déterminer les prises de décisions des commerçants. Cette question est liée à celle de la reconquête des centres-villes anciens, enjeu national qui concerne énormément de villes de notre pays. On n'arrivera pas à traiter la question de l'urbanisme commercial de nos territoires indépendamment de la reconquête de l'habitat des centres anciens, qui offre des disponibilités considérables, mais dans des logements qui nécessitent des réhabilitations inabordables pour les propriétaires. Il faut élaborer un véritable plan national à ce sujet. Il faut par ailleurs associer la réhabilitation des quartiers relevant de la politique de la ville à celle des centres-villes anciennes, dans une perspective de mixité sociale et fonctionnelle, pour aboutir à une ville partagée.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur pour avis de la mission « Économie ». - En conclusion, je suggère à la commission d'adopter un avis de sagesse.

M. Jean-Claude Lenoir, président. - Mme Élisabeth Lamure va désormais nous présenter le rapport de M. Philippe Leroy, qui ne pouvait être présent aujourd'hui, sur le volet « Communications électroniques et poste » de cette mission.

Mme Élisabeth Lamure, en remplacement de M. Philippe Leroy, rapporteur pour avis. - Comme porte-parole de Philippe Leroy, je présenterai ces crédits en trois temps. Je ferai d'abord une analyse des évolutions budgétaires pour 2016. Je dirai ensuite quelques mots de la gestion par l'Agence nationale des fréquences (ANFR) et du déploiement de la 4G sur les bandes 700 et 800 MHz. Enfin, je ferai quelques remarques sur le déploiement de la fibre à travers le plan « France très haut débit ».

L'analyse budgétaire porte tout d'abord sur les actions nos 4 et 13 du programme 134. Elles correspondent à des sommes relativement faibles : respectivement 162 et 23 millions. Avec 162 millions de dotations, l'action n° 4 voit ses crédits légèrement augmenter, de 0,46 %, après une baisse de 6 % l'an passé. La dotation de l'ANFR est stable. Cela lui permettra d'exercer ses missions dans des conditions satisfaisantes tout en poursuivant ses efforts de gestion : de 2010 à 2015, l'agence a réduit ses effectifs, de 330 à 309 agents, stabilisé ses dépenses de personnel, mais aussi diminué ses dépenses d'investissement.

Votre rapporteur Philippe Leroy a souhaité souligner la grande diversité des missions et le grand professionnalisme avec lequel l'agence s'en acquitte. Il y voit la preuve que l'État peut rester compétent dans les domaines à forte intensité technologique sans avoir besoin d'externaliser ses interventions au moyen d'une autorité administrative indépendante. Il a notamment donné un exemple qui touche très probablement la grande majorité de la population : celui de la planification du contrôle de l'utilisation des fréquences et la garantie de leur disponibilité effective lors des grands évènements publics, notamment sportifs. Elle s'illustre ainsi chaque année lors du Tour de France, du tournoi de tennis de Roland-Garros, des 24 heures du Mans et du défilé du 14 juillet. Elle est également intervenue cette année pour l'Euro 2016.

Cette action n° 4 mobilise par ailleurs 119 millions pour la compensation par l'État des surcoûts de la mission de service public de transport postal. Il s'agit du premier exercice connaissant une compensation stabilisée en montant par rapport à l'exercice précédent depuis 2011 : son montant s'élevait alors à 242 millions.

L'accord entre l'État, la presse et la Poste de 2008, dit « accord Schwartz », portant sur la compensation accordée par l'État à la Poste et les tarifs postaux de la presse, est arrivé à échéance le 31 décembre 2015. Le conseil des ministres du 2 décembre 2015 a annoncé le niveau des augmentations tarifaires, ainsi que le montant de la compensation accordée par l'État à la Poste pour les années 2016 à 2022, en distinguant quatre catégories de presse : les titres à faibles ressources publicitaires, la presse d'information politique et générale, la presse de la connaissance et du savoir et, enfin, la presse de loisirs et de divertissements. Le Gouvernement a choisi d'agir unilatéralement, sur la base d'un rapport toujours non publié à ce jour, là où la période précédente avait fait l'objet d'un accord tripartite. Pis, alors que les accords Schwartz n'ont pas été respectés par l'État, son engagement unilatéral de décembre dernier semble également être remis en cause. Lors de son discours prononcé à la conférence des éditeurs, le 3 octobre 2016, la ministre de la culture et de la communication a reconnu, « par souci de clarté et de cohérence de l'action publique », avoir « renoncé à la création de nouvelles catégories de presse, autres que la presse d'information politique et générale ». Votre rapporteur s'étonne des manières peu orthodoxes utilisées en l'espèce par l'État, qui risquent de mettre en danger la presse professionnelle, dont la diffusion repose essentiellement sur le routage par la Poste.

L'action n° 13, quant à elle, est consacrée au financement de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP). Après une baisse de 45 % des crédits de fonctionnement de l'autorité pendant cinq ans, ce qui se traduit encore cette année par le besoin de crédits supplémentaires en fin de gestion, la dotation de l'ARCEP est en hausse de 9,52 % pour 2017.

La loi de finances pour 2016 a permis de rétablir les emplois de l'ARCEP à un niveau de 171 équivalents temps plein. Celle pour 2017 devrait permettre à l'ARCEP d'exercer ses nouvelles missions sans tensions financières, tout en poursuivant sa démarche de réaffectation de ses emplois vers ses missions « coeur de métier ». En effet, après la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques et l'ordonnance du 28 avril 2016, la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique confie de nouvelles missions à l'ARCEP, parmi lesquelles une mission de grande importance : celle de protéger la neutralité du net. L'augmentation du budget permettra également à l'ARCEP de financer en 2017 les coûts induits par l'élection de son président à la présidence de l'organe des régulateurs européens des communications électroniques pour cette année.

Si ces moyens supplémentaires permettent donc une mise en cohérence avec l'importance des missions qui lui sont confiées, votre rapporteur se demande néanmoins toujours s'il y a lieu de déléguer à une autorité administrative indépendante un nombre croissant de missions dont l'État devrait demeurer seul garant.

J'en viens au second point du rapport : la gestion par l'ANFR du déploiement de la 4G dans les bandes 700 et 800 MHz. La bande 800 a été attribuée aux télécommunications en 2011. L'ANFR a dû être mobilisée dans ce cadre au titre de sa mission de protection de la réception de la télévision, afin d'éviter les brouillages. Le centre d'appel de l'agence a reçu, depuis mars 2013, près de 148 000 plaintes. Elle a constaté près de 75 000 brouillages, qui ont été résolus par l'intervention d'un antenniste à la charge de l'opérateur chez le téléspectateur. À partir d'octobre 2017 et jusqu'en juin 2019, à l'occasion du déploiement de la 4G dans la bande 700 MHz, elle aura à effectuer une mission similaire. Il apparaît donc que ce sujet est sous contrôle.

L'agence a également été mobilisée, s'agissant de la bande 700, pour accompagner les téléspectateurs dans le cadre du passage, dans la nuit du 5 avril 2016, à la TNT haute définition, qui constituait la première étape de la réaffectation de cette bande. Elle a d'abord conduit une très large campagne de communication, entre novembre 2015 et avril 2016, afin d'inciter les ménages à réaliser un diagnostic et à s'équiper en conséquence. Selon l'agence, son centre d'appel aurait reçu 570 000 appels entre janvier et mai 2016. En avril dernier, 97 % des foyers avaient connaissance de cette campagne d'information, et plus de 80 % des Français considéraient ce passage à la TNT en haute définition comme un progrès. L'agence a ensuite géré la distribution de trois principaux types d'aides : une aide à l'équipement, une aide à la réception et une aide d'accompagnement à domicile pour les personnes handicapées ou âgées. Le montant distribué de ces aides au début du mois de novembre s'élevait à près de 4 millions.

En bref, selon l'ANFR, qui en a dressé un bilan en juillet dernier, ces opérations se sont traduites, en 2016, par un succès qu'il conviendra de confirmer jusqu'à l'affectation totale de la bande 700 à la 4G.

Enfin, Philippe Leroy a également souhaité dresser un bilan de la mise en oeuvre du plan « France très haut débit », dont les crédits destinés à accompagner les collectivités locales dans le financement des réseaux d'initiative publique figurent dans le programme 343. Les autorisations d'engagement de ce programme sont en augmentation par rapport à la prévision initiale : 409,5 millions contre 150 millions initialement prévus. Le Gouvernement souhaite accélérer la mise en oeuvre du plan. Votre rapporteur considère qu'une telle accélération est évidemment indispensable. Toutefois, il relève que les crédits de paiement ne seront ouverts sur ce programme qu'en 2018 ou 2019 et que, selon l'administration, d'ici à la fin de 2016, le total des décaissements devrait atteindre 158 millions, sur un total attendu de 3,3 milliards d'ici à 2022. Cela est de nature, selon lui, à nuancer le concert de louanges qui semble actuellement se faire entendre à ce sujet.

En outre, si l'objectif intermédiaire de couverture de 50 % des locaux du territoire en très haut débit en 2017 devrait être atteint dès la fin de l'année 2016, il souligne que, à la fin du premier trimestre 2016, la fibre optique jusqu'à l'abonné ne concernait que 14,6 % des foyers. Il reste donc du chemin à parcourir avant d'arriver aux 80 % de couverture en fibre optique jusqu'à l'abonné prévus en 2022.

Aussi la mise en oeuvre du plan fait-elle face à de nombreux défis. À court terme, la procédure d'instruction des dossiers de financement par l'État des réseaux d'initiative publique reste complexe : sauf à être particulièrement malin, elle relève du parcours du combattant. La commercialisation de ces réseaux, et notamment leur tarification, reste à éclaircir. L'ARCEP, qui a publié des lignes directrices à ce sujet, s'est dotée d'une approche pragmatique, au cas par cas, qui est de nature à favoriser la réussite des projets. À plus long terme, et pour les zones les plus reculées de notre territoire, se pose une question cruciale qui ne semble pas encore avoir été résolue : il s'agit de savoir quel sera le degré de mobilisation de chacune des technologies disponibles, ainsi que leur assiette géographique. Alors que la fibre reste l'objet de toutes les attentions, il conviendra de s'assurer d'une qualité de service proche, si ce n'est similaire, sans quoi l'acceptabilité de la technologie mise en place risque d'être limitée.

En définitive, force est de constater que, si le plan accélère, ses réalisations concrètes se font attendre. D'importants choix stratégiques devront être opérés à l'avenir. Il importera donc de ne pas conduire cette politique au fil de l'eau et au gré des évènements, mais de garder pour seule boussole la nécessité de répondre aux attentes légitimes de nos concitoyens sur tout le territoire.

Afin d'encourager la tendance que reflète ce projet de budget, notre collègue Philippe Leroy a souhaité proposer à la commission un avis de sagesse.

M. Daniel Dubois. - En ce qui concerne le plan très haut débit, les promesses présidentielles ne seront pas tenues. En outre, ce sera aux futurs Gouvernements de trouver les crédits de paiements promis. N'oublions pas que les opérateurs se montrent parfois réticents à louer la fibre.

Le département de la Somme est très avancé pour le déploiement de la fibre mais les opérateurs ne se bousculent pas pour la commercialiser.

La 4G devait compenser en milieu rural l'absence du très haut débit. Mais tel n'est pas le cas. De plus, le 4G urbain désorganise souvent les zones péri-urbaines et rurales.

En dépit des observations de l'ARCEP à Orange, les réseaux cuivre ne sont plus entretenus. Malgré le plan Macron qui prévoyait 200 pylônes supplémentaires, les débits annoncés ne correspondent absolument pas à la réalité constatée sur le terrain. Les territoires ruraux se sentent ainsi abandonnés.

M. Gérard César. - Je rejoins mon collègue sur ce sentiment d'abandon. Grâce au ciel, les intercommunalités ont pris le relais du plan très haut débit.

Ma communauté de communes comprend 20 000 habitants et 31 communes. Elle a conclu un partenariat avec le département dénommé « Gironde numérique ». La facture nette pour cette communauté s'élève à 2,9 millions : c'est bien trop cher !

Les fabricants de fibre optique sont-ils prêts à répondre aux appels d'offre ? Les entreprises sont-elles à même d'installer la fibre optique ?

M. Alain Bertrand. - Je partage ce qui vient d'être dit : les ruraux voient bien ce qui se passe. Dans certaines zones, il est toujours impossible de téléphoner avec son portable. Même quand la fibre sera déployée, les hameaux ne seront pas reliés. En Lozère, nous en comptons 2 200 !

Nous devons commencer par modifier la définition des zones grises : plutôt que de se contenter d'une barre sur un point de la commune, il faudrait décider qu'une zone grise implique que 95 % de la commune est couvert. Que l'État arrête de nous raconter des histoires : il n'est pas acceptable que les infirmières ou les artisans ne puissent appeler à l'aide.

Le Sénat serait bien inspiré de proposer un grand texte sur l'avenir des ruralités. Le sentiment d'abandon favorise l'émergence des extrémismes de droite comme de gauche.

M. Yannick Vaugrenard. - Je partage ces inquiétudes. Comme il y a quelques dizaines d'années avec l'eau et l'électricité, le haut débit et la 4G sont fondamentales pour le devenir des zones rurales.

L'audition d'Axelle Lemaire a démontré que des engagements avaient été pris, tant d'un point de vue financier que de celui du soutien de la puissance publique en faveur du monde rural avec le plan France très haut débit. Il s'agit d'un important dossier d'aménagement du territoire, essentiel pour la cohésion de notre pays.

Mme Sophie Primas. - Le déploiement du numérique doit se faire sur tout le territoire. Évitons néanmoins d'opposer mondes ruraux et urbains. Certaines zones très urbaines ne sont pas couvertes par la 4G et ne bénéficient pas de la fibre. La fracture numérique est complexe et ne se résume pas à l'opposition entre campagnes et villes.

M. Gérard Bailly. - Cela fait quinze ans que nous avons ce débat. Pour la fibre, nous aurions dû faire comme pour l'électrification de notre pays. Dans mon département, le vice-président chargé de ce dossier annonce qu'il sera couvert à 80 % en... 2030 ! Nous avons donc encore le temps d'évoquer ce sujet.

Quelle que soit notre couleur politique, nous sommes d'accord pour dire que la couverture numérique de notre territoire est indispensable. Comme l'État ne pourra augmenter son financement, une péréquation à l'échelon national sera nécessaire. Et puis, ne faudrait-il pas augmenter les tarifs de la téléphonie ? Cela permettrait de dégager des marges d'investissement. Après les élections de 2017, nous devrons instaurer une grande péréquation afin que les coûts soient identiques, que l'on soit en montagne, en zone très rurale ou en ville.

M. Henri Tandonnet. - Il faut changer de modèle : celui qui consiste à donner les zones les plus rentables aux opérateurs et le reste du territoire aux collectivités territoriales n'est pas tenable. Comment voulez-vous qu'un département puisse couvrir des zones reculées par des satellites ? Sans péréquation, nous parlerons toujours de ce sujet dans quinze ans.

M. Bruno Sido. - Pourquoi les choses se passent-elles bien dans certains départements et pas dans d'autres ? On pourrait s'inspirer des bons élèves.

M. Joël Labbé. - Notre commission ne devrait-elle pas rédiger un rapport transpartisan sur cette question ? Certes, certains quartiers sont mal desservis, mais le problème des zones hyper-rurales est capital. La France a été électrifiée grâce au service public, tout comme pour l'eau, d'ailleurs. Pour la fibre, nous avons affaire à de grandes entreprises libérales. Augmenter le coût des abonnements ? Mais pensez aux ménages en difficulté, aux précaires ! Internet est devenu indispensable pour tous. Veut-on, oui ou non, avancer ?

M. Jean-Jacques Lasserre. - Dans mon département, l'État a procédé à des découpages : dans les zones à manifestation d'intérêt, la rentabilité est immédiate et les opérateurs en font leur affaire. Pour tout le reste du territoire, il faut s'en remettre aux réseaux d'initiative publique. Comment faire alors pour convaincre les collectivités de s'engager ? L'étude que notre département a menée révèle des éléments intéressants : les différences de coûts sont inimaginables ; cela va de 300 à 6 000 euros en fonctions des zones à desservir.

M. Alain Bertrand. - En Lozère, c'est 14 000 euros !

M. Jean-Jacques Lasserre. - Nous devons nous mettre d'accord sur l'utilisation du mix technologique, d'autant que les évolutions en hertzien sont considérables. Les spécialistes sont beaucoup plus réservés sur le tout satellitaire. Certaines zones rurales devront aussi accepter de ne pas avoir la fibre.

Les départements ne peuvent pratiquer la péréquation. Le fonds national de péréquation devrait mettre l'accent sur les zones très rurales et les zones de montagne afin que les responsables des réseaux d'initiative publique puissent avoir les moyens financiers de réaliser ces réseaux.

M. Franck Montaugé. - Nous portons collectivement une lourde responsabilité du fait de l'ouverture des marchés voulue par l'Europe. La remise en cause de la tarification au coût marginal a détruit les dispositifs de solidarité territoriale et de péréquation. Je crains d'ailleurs que la péréquation en matière d'électrification ne disparaisse à terme.

Pour le très haut débit, serait-il possible de mettre en place un équivalent du Fonds d'amortissement des charges d'électrification (Facé) ? Ce serait absolument indispensable.

Compte tenu du marasme des économies occidentales, l'OCDE en appelle à des plans de relance et la France serait bien inspirée de mettre en place un fonds de péréquation pour permettre un accès pour tous au numérique.

M. Martial Bourquin. - Pourrions-nous auditionner rapidement Orange, SFR et Free ? Ils se sont lancés dans une guerre des prix qui se fait au détriment de l'investissement. Conclusion, ce qui devait être fait en deux ans dans ma ville le sera en six. Le Sénat devrait présenter des propositions pour une meilleure couverture dans les villes et dans les campagnes.

L'ARCEP avait estimé le coût de la couverture du territoire à 21 milliards, la bande 700 MHz permettant d'apporter partout le haut débit, y compris dans les zones les plus rurales. Où en est-on ?

En outre, face aux zones blanches, les opérateurs traitent en priorité les villes alors que trois ou quatre pylônes en campagne améliorent considérablement la réception 4G et l'accès Internet. Évitons la rupture entre la ville et la campagne.

M. Jean-Claude Lenoir, président. - Je retiens votre proposition d'une audition des principaux opérateurs.

Mme Anne-Catherine Loisier. - Notre débat démontre que le suivi des politiques publiques est indispensable.

Depuis 2014, la couverture audiovisuelle s'est dégradée : c'est un vrai problème.

M. Daniel Gremillet. - Ce fut une erreur d'accepter le financement par les collectivités, car cela a mis un coup d'arrêt à la péréquation. C'est d'ailleurs ce qui se passe aussi avec les TER : les collectivités ont beaucoup investi dans les rames, et maintenant on leur demande de rénover les voies ! C'est impossible.

Arrêtons d'opposer les ruraux aux urbains : concentrons-nous sur la mutualisation et la péréquation.

Enfin, nos concitoyens n'acceptent pas qu'on leur dise d'attendre cinq ans pour avoir la fibre.

Mme Élisabeth Lamure, en remplacement de M. Philippe Leroy, rapporteur pour avis. - Les inquiétudes et les constats sont partagés : nous voulons aller plus vite et partout. Les délais annoncés créent des inquiétudes.

Nous devons couvrir tout le territoire avec la fibre, contrairement à ce qu'a dit M. Bertrand. Il y a un siècle, on n'imaginait pas que l'eau et l'électricité arriveraient dans les fermes les plus reculées. Et pourtant, ce fut fait.

Pour répondre à M. César, les fabricants de fibres et les installateurs sont prêts et peuvent répondre à la demande. Reste à financer les installations.

M. Jean-Claude Lenoir, président. - M. Bourquin va maintenant nous présenter son rapport sur les crédits d'accompagnement des entreprises à l'export.

M. Martial Bourquin, rapporteur pour avis. - Je souhaite cette année faire un point sur les crédits consacrés au financement des actions d'accompagnement des entreprises à l'export que met en oeuvre Business France. Il aurait été bon que ces questions soient abordées dans l'hémicycle.

Comme vous le savez, Business France résulte de la fusion, décidée en février 2014, entre Ubifrance, l'opérateur de l'État jusqu'alors en charge de l'accompagnement des entreprises à l'export, et l'Agence française pour les investissements internationaux (l'AFII), dont la fonction était d'attirer les investisseurs sur le sol national.

La fusion juridique et financière entre les deux entités a eu lieu le 1er janvier 2015. L'intégration informatique est en cours et devrait être achevée à la fin de cette année. Onze accords collectifs ont par ailleurs été signés à l'unanimité pour rendre possibles les évolutions statutaires nécessaires. Aujourd'hui le nouvel ensemble compte plus de 1 500 collaborateurs, dont les deux tiers sont en poste à l'étranger.

Le coût prévisionnel de la fusion entre 2014 et 2016 était estimé à 12,2 millions. Finalement, ce coût s'établit à 8,6 millions, dont près de la moitié sont liés aux investissements informatiques et 1,7 million à l'adaptation des statuts des personnels. Business France a reçu en 2015 une dotation exceptionnelle de 5 millions pour couvrir les frais de fusion, ce qui ne représente qu'une couverture partielle des frais réels.

L'objectif de la fusion était évidemment de mutualiser les fonctions « support », mais les économies d'échelle ne sont pas encore apparentes. On commence en fait à peine à sortir de la phase initiale propre à toute fusion, dans laquelle le rapprochement occasionne surtout des coûts supplémentaires. Il faudra vérifier dans les années qui viennent si les gains de productivité administratifs attendus sont effectivement au rendez-vous.

Néanmoins, des synergies très intéressantes sont d'ores-et-déjà apparues entre les métiers export et investissement de Business France, là où on ne les attendait pas forcément. La cohérence du rapprochement entre deux entités exerçant des métiers à première vue aussi différents n'allait pas de soi. Et pourtant une vraie cohérence économique se fait jour. On ne le sait pas assez, mais une part importante des exportations françaises, supérieure à 30%, est réalisée par des entreprises étrangères installées en France. Donc attirer un investisseur qui produira en France, ce qui était le métier de l'AFII, c'est aussi renforcer le potentiel exportateur de notre pays. Business France, en fusionnant les activités export et investissement, permet d'optimiser ce lien et de promouvoir la France comme une plateforme pour l'exportation.

Ainsi, les entreprises étrangères accompagnées pour s'installer et produire en France se voient désormais présenter d'emblée un plan d'accompagnement pour se projeter dans le monde, et en Europe en particulier, à partir de leur implantation française. Inversement, les clients étrangers des exportateurs français sont systématiquement démarchés en vue d'encourager les projets d'installation en France. C'est le rapprochement des personnels d'Ubifrance et de l'AFII -et l'intégration de leurs fichiers clients- qui rend possible ces synergies dans lesquelles les investissements étrangers nourrissent les exportations françaises et les exportations renforcent l'attractivité du territoire.

La création de Business France n'est qu'un aspect, même s'il est le plus visible, d'une politique plus générale de mise en ordre de bataille de notre système d'appui à l'export menée par le Gouvernement depuis plusieurs années. Notre politique d'appui à l'export reste plurielle. Elle s'appuie désormais sur plusieurs acteurs principaux : Business France, BPI France, les chambres de commerce et d'industrie (CCI), les régions et le réseau des CCI à l'international. Une meilleure coordination de ces acteurs est donc nécessaire pour renforcer l'efficience de ce dispositif et offrir un service plus performant à moindre coût dans un contexte budgétaire tendu.

Les ressources de Business France provenant des dotations publiques sont en effet en recul sensible. Les crédits ouverts en loi de finances initiale sont passés de 127 millions en 2012 à 110 millions prévus pour l'année prochaine, soit un recul de 13 %. La dotation effectivement reçue, c'est-à-dire la dotation déduction faite des réserves obligatoires et des diverses mesures de régulation budgétaire, est pour sa part passée de 121 à 100 millions. Si l'on se concentre sur le volet appui à l'export proprement dit, en excluant les crédits correspondant au champ d'action de l'ancienne AFII, la dotation passe de 100 millions en 2012 à près de 85 millions aujourd'hui, soit un recul de 15 %.

Malgré cette baisse des dotations, l'activité de Business France est cependant restée dynamique. On a dénombré, en 2015, plus de 10 000 entreprises accompagnées. À la fin octobre 2016, ce chiffre dépassait déjà les 8 000, ce qui fait que l'objectif de 9 400 entreprises accompagnées fixé pour cette année devrait être atteint. C'est un peu moins qu'en 2015, mais cette baisse correspond moins au rationnement de l'offre de Business France qu'à une inflexion stratégique, avec une volonté de privilégier les prestations d'accompagnement personnalisées au détriment des actions collectives, qui permettent certes de toucher plus d'entreprises mais génèrent en définitive moins de courant d'affaires.

Comment Business France a-t-elle pu maintenir son niveau d'activité malgré la baisse des dotations ? Il y a deux éléments de réponse. La première explication tient à des gains d'efficacité liés à la réorganisation d'ensemble du système. Beaucoup de temps, d'énergie et d'argent, et donc d'opportunités pour nos entreprises, étaient en effet perdus du fait d'un partage des rôles confus, des redondances et du manque de lisibilité du dispositif. La fusion d'Ubifrance et de l'AFII est un élément de clarification du paysage, mais d'autres mesures très importantes sont allées dans le même sens. J'en citerai trois.

La première est l'optimisation de la coopération entre Bpifrance et Business France. Des chargés d'affaires d'Ubifrance, puis de Business France, ont commencé à être déployés dans les délégations régionales de Bpifrance à partir de 2013. Ils sont désormais 46 à être physiquement présents dans les bureaux de la Bpi en région. Ils sont employés par Business France, mais travaillent dans les locaux de la Bpi. Au départ, l'idée était de faciliter l'accès aux produits financiers offerts par la Bpi dans le domaine de l'export. En réalité, le rapprochement des personnels a démultiplié l'efficacité des services offerts par les deux parties. La Bpifrance dont on pouvait penser à l'origine qu'elle devait agir plutôt en deuxième rideau en offrant ses services financiers aux entreprises sélectionnées et présentées par Business France, joue désormais un rôle majeur en premier rang, dans la détection des entreprises potentiellement exportatrices. Elle est devenue le principal fournisseur d'affaires de Business France.

Le succès de cette coopération s'explique très simplement : Bpifrance, qui intervient de façon générale dans le financement des PME et des ETI, notamment des entreprises innovantes, est en mesure de détecter avec une grande efficacité les entreprises qui ont un potentiel d'exportation encore inexploité ou insuffisamment exploité. Je rappelle qu'elle est partie prenante dans tous les programmes d'excellence : accélérateur PME et ETI, Pass French Tech, BPI excellence... La communication directe entre chargés d'affaires de la Bpifrace et de Business France, rassemblés dans un même lieu, sur le terrain, permet donc d'offrir à ces entreprises à fort potentiel, dans un même package et à un même guichet, l'ensemble des services de prospection et d'accompagnement à l'international et des services financiers très spécialisés du financement à l'international.

Ainsi, pour un investissement relativement minime - 46 salariés de Business France dans les bureaux de la Bpifrance en région pour un coût annuel total de 4,5 millions -, on obtient un gain collectif énorme, gain qu'on est en mesure de chiffrer très précisément. En 2013, 91 entreprises ont démarré un plan d'action international avec un chargé de Business France intégré dans un bureau régional de la Bpifrance. En 2014, ce chiffre est passé à 391 et à 730 en 2015. Au 1er octobre 2016, on en est déjà à 1 034. C'est une multiplication par onze en trois ans. On a déjà dépassé en octobre 2016, avec plus d'un an d'avance, l'objectif qui devait être atteint fin 2017. Quant au taux de transformation de ces accompagnements à l'export en courants d'affaires effectifs, il est excellent : 55 %, c'est-à-dire que plus d'une action de suivi sur deux, dans le cadre de la relation entre Bpifrance et Business France, permet de gagner des marchés nouveaux.

Une deuxième étape dans la mise en ordre du dispositif public français d'appui à l'export est la signature d'un partenariat stratégique entre Business France, le réseau des CCI en France et les associations du réseau des CCI à l'International. Cette décision est intervenue à l'occasion du Forum des PME à l'international organisé par le Secrétaire d'État au Commerce extérieur le 11 mars 2015. Cette convention permet de clarifier le rôle de chacun des acteurs dans le parcours à l'export. Dans un paysage institutionnel jusqu'à alors très confus, où les acteurs étaient souvent en concurrence les uns avec les autres dans une atmosphère de méfiance réciproque, cela a permis d'apaiser les tensions et d'amorcer un travail coopératif, sans doute très perfectible, mais qui a au moins le mérite d'exister.

Dans ce schéma, les CCI sont désormais en principe recentrées sur le travail de détection des entreprises potentiellement exportatrices. L'idée est d'exploiter leur connaissance du tissu économique local en s'appuyant sur le travail des 400 conseillers en développement international employés par les chambres sur l'ensemble du territoire. Les CCI font un diagnostic du potentiel exportateur des entreprises locales, informent ces dernières de l'offre d'accompagnement offert par Business France et définissent avec elles un plan d'action dans un cadre individuel ou collectif. Les signataires de la convention de partenariat stratégique se sont engagées à accompagner 3 000 entreprises d'ici 2017 avec un objectif de développement de courants d'affaires pour un tiers d'entre elles.

Du parcours de l'export, Business France définit et met en oeuvre une offre de services d'accompagnement des entreprises qui comprend trois types de produits issus du Programme France Export : des actions d'accompagnement collectives sous forme de salon, des actions d'accompagnement personnalisé correspondant sur mesure aux besoins des entreprises clientes et la gestion du dispositif des Volontaires internationaux en entreprise (VIE). Business France intervient donc dans les premières étapes du déploiement international des entreprises qu'elle accompagne.

Les CCI à l'international sont quant à elles principalement chargées de la mise en oeuvre de prestations d'implantation, de structuration et de pérennisation sur le marché étranger visé. Autrement dit, il s'agit plutôt pour elles de faire fructifier dans la durée le travail d'implantation initial.

La rationalisation du dispositif d'appui à l'export s'est également poursuivie plus récemment avec deux décisions qui étaient attendues depuis longtemps : d'abord, l'intégration au département agroalimentaire de Business France de la mission de relation d'affaires international remplie jusqu'ici par Sopexa. Les transferts de personnel ont commencé en juillet dernier et, au premier janvier prochain, Business France devient ainsi l'opérateur unique de l'État pour accompagner près de 4 000 entreprises du secteur agroalimentaire sur les marchés internationaux. Ensuite, le transfert à Bpifrance de la gestion des garanties publiques à l'exportation, jusqu'à présent assurée par Coface pour le compte de l'État. Le principe de ce transfert a été officialisé le 29 juillet 2015 pour une réalisation à la fin de l'année 2016. L'intégration des garanties publiques à l'exportation au sein du catalogue de procédures de Bpifrance permettra de simplifier la relation des entreprises avec l'écosystème du développement économique, puisqu'il s'agit d'un pas important vers la mise en place d'un guichet unique du financement des activités exports offrant une palette d'interventions qui couvre tous les stades du développement des entreprises. Le maillage territorial de Bpifrance contribuera en outre à une meilleure diffusion des garanties publiques à l'exportation auprès de nouveaux exportateurs et à la promotion de ces outils. Enfin, l'État espère une diminution du coût de la gestion des garanties publiques à l'exportation de l'ordre de 20 % à la faveur de ce transfert.

Sans ce travail de réorganisation globale du dispositif, on ne comprendrait pas que le volume et la qualité de l'accompagnement des entreprises à l'international réalisé par Business France aient pu être maintenus malgré le contexte de tensions budgétaires.

L'autre élément qui explique la capacité de Business France à poursuivre ses missions malgré la baisse des dotations budgétaire, c'est le développement des ressources propres de l'agence. Il y a en effet deux composantes dans les ressources financières de Business France : une composante « ressources propres », tirées de la facturation de certaines prestations fournies aux entreprises, et une composante « dotations publiques ». Business France obéit à un modèle de financement mixte, différent du modèle assis quasi exclusivement sur un financement public, tel qu'on retrouve au Royaume-Uni ou en Italie. On peut certes discuter de la pertinence de ce modèle. Toutefois, dans le contexte financier actuel, il me paraît le seul praticable pour notre pays. Par ailleurs, sur le fond, l'idée d'une participation partielle des entreprises au coût complet du service qu'elles reçoivent ne me paraît pas aberrante, dès lors que le taux et les modalités de cette participation ne constituent pas un facteur de blocage financier et psychologique.

Aujourd'hui, si l'on se concentre sur le volet export de Business France, c'est-à-dire sur le périmètre de l'ancienne Ubifrance, on voit que les subventions reçues de l'État représentent 84,7 millions et les ressources propres, 83,3 millions. En gros donc, il y a aujourd'hui un euro de dotation pour un euro de chiffre d'affaires. En 2012, les subventions représentaient 100 millions par an et les ressources propres 64 millions. On voit donc bien qu'il y a une évolution du modèle du financement. Mise sous tension du fait d'une réduction des dotations publiques de 15% sur cinq ans, Business France a compensé en augmentation la part de ses ressources propres.

Ce mouvement peut-il se poursuivre ? Je n'en suis pas sûr. Si on continue à développer ainsi les ressources tirées de la facturation aux entreprises des prestations fournies, il y a en effet un risque qu'on en vienne à sacrifier le service gratuit ou quasi-gratuit aux entreprises les plus petites et les plus fragiles en se concentrant uniquement sur les « bons clients ». Nous n'en sommes pas là. Aujourd'hui Business France est encore clairement un opérateur qui remplit une mission de service public économique. Il s'appuie certes sur le développement de ses activités commerciales mais seulement pour mieux remplir sa mission de service public. Vous trouverez sur ce point des indications dans le rapport écrit sur la politique de facturation des services de Business France. Toutefois il faut être vigilant : une baisse brutale des dépenses publiques pourrait nous conduire à un basculement du modèle économique, qui doit rester un grand service public.

Pour terminer ce rapport, je voudrais avancer quelques propositions ou recommandations au Gouvernement, qui malheureusement ne seront pas examinées en séance publique.

Premièrement, il faut améliorer la lisibilité budgétaire de la politique d'appui à l'export. Cette politique et les crédits qui vont avec sont dispersés entre de nombreux acteurs et lignes budgétaires. Il faudrait intégrer tout cela pour savoir combien la France investit dans la politique d'appui à l'export. Les 120 millions de dotation à Business France ne sont qu'une partie du total. Il y a aussi les 67 millions du budget des CCI consacré à l'international, les 70 millions de dotations publiques qui alimentent les produits export de BPI, les 600 agents de la direction générale du Trésor dans les services économiques. Au total, on est sans doute autour d'un demi-milliard d'euros, soit autant que nos principaux concurrents que sont le Royaume-Uni, l'Italie et surtout l'Allemagne.

Deuxième recommandation. Sans forcément se placer dans une optique de fusion, qui serait contre-productive actuellement, il faut réfléchir aux moyens d'améliorer les synergies entre la branche export des CCI et les autres acteurs du dispositif. Le travail de détection menée par Bpifrance semble plus performant que celui des CCI pour un coût moindre.

Troisième idée : pour soutenir l'effort d'internalisation des PME, on pourrait réfléchir aux moyens de faire baisser le coût des personnels commerciaux à l'export pour ce type d'entreprises. Assurer une présence et une prospection commerciale à l'international, cela demande en effet un personnel spécialisé et cela coûte cher. Un crédit d'impôt sur les salaires de ce type de personnel s'inspirant du modèle italien pourrait être envisagé.

M. Jean-Claude Lenoir, président. - Merci pour cet excellent rapport qui, comme tous les autres, sera imprimé, diffusé et, bien sûr, porté à la connaissance du Gouvernement.

M. Martial Bourquin, rapporteur pour avis. - Il aurait été préférable d'examiner ces rapports en séance.

- Présidence de Mme Élisabeth Lamure, vice-présidente -

M. Marc Daunis. - Je partage l'analyse sur cette nécessaire fusion. Dans une économie mondialisée, on ne pouvait se contenter du dispositif en place. Je salue l'action du secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger, Matthias Fekl.

Si nous aidons bien nos entreprises à exporter, nous ne faisons pas assez d'efforts pour les entreprises étrangères qui souhaitent s'implanter en France. Dans les Alpes-Maritimes, Texas instrument a fermé. Nous avons travaillé avec l'Afii qui, visiblement, n'a pas suffisamment pris en compte la demande étrangère. Si nous présentons nos atouts et détectons les opportunités, nous ne savons pas reformuler notre offre par rapport à des demandes d'implantations d'entreprises étrangères. Cette fusion est intéressante, car elle permettra de prendre en considération cette dimension essentielle : ainsi, nous pourrons présenter aux investisseurs étrangers nos extraordinaires capacités en matière grise, en infrastructures et en dispositifs d'accompagnement, comme le crédit impôt-recherche. Ne laissons pas d'autres pays européens capter ces investisseurs en raison d'aides fiscales d'ailleurs déloyales.

M. Gérard César. - Je fais miennes les recommandations de notre rapporteur.

J'ai eu l'honneur de représenter le Sénat au conseil d'administration de Business France. Jusqu'à présent, les régions, les départements, les chambres d'agriculture et les chambres de commerce promouvaient l'exportation, mais en ordre dispersé. Les actions devraient être mutualisées, sous le patronage de Business France.

Si les grandes entreprises n'ont pas besoin de Business France pour exporter, ce n'est pas le cas pour nos PME : les VIE pourraient grandement les y aider. Encore faut-il qu'ils parlent l'anglais commercial, ce qui n'est pas toujours le cas.

M. Joël Labbé. - Nous exportons des poulets, produits à faible valeur ajoutée, d'autant que la compétitivité mondiale tire les prix vers le bas, ce qui pénalise nos producteurs qui doivent toujours plus s'endetter pour investir.

Or 40 % de la viande de volaille consommée en France est d'origine étrangère. Pourquoi aider les exportations alors que la demande sociale porte sur la proximité et la qualité ? Alors, soutenons sans réserve les filières de proximité.

M. Ladislas Poniatowski. - La création de Business France répond à un besoin de mutualisation et de meilleure détection des entreprises potentiellement exportatrices.

N'oublions cependant pas que la loi NOTRe a donné la compétence économique aux régions. Leurs présidents s'en sont pleinement saisis et ils se sont transformés en ambassadeurs. Ainsi, le président de la région Normandie s'est rendu en Iran et en Israël, à la demande des entreprises, et Bpifrance ne faisait pas partie des voyages. Il est revenu avec des contrats industriels et agricoles. Gardons en mémoire ces nouveaux acteurs qui viennent d'apparaître et qui n'ont pas l'intention de s'effacer.

M. Daniel Gremillet. - Certes, il y a les présidents de région, mais aussi les métropoles et certaines communautés d'agglomération. Attention à la dispersion des moyens !

Autant la mutualisation est une bonne chose, autant la facturation des services, même légère pour les petites entreprises, est indispensable. Je suis vraiment défavorable à la gratuité.

Enfin, n'oublions pas l'échec de Bpifrance concernant le plan d'urgence lancé par le ministre de l'agriculture lors de la crise agricole.

Mme Élisabeth Lamure, présidente. - Effectivement, les acteurs à l'international sont multiples. Une clarification est nécessaire afin de mutualiser les services offerts. Combien d'entreprises sont-elles accompagnées par les régions et par les CCI ?

M. Martial Bourquin, rapporteur pour avis. - L'attractivité de notre pays tient à plusieurs facteurs structurels : une main d'oeuvre de grande qualité, le crédit impôt-recherche, des infrastructures publiques développées, une fiscalité avantageuse. Mais il faut accompagner aussi ces atouts par un travail sur mesure afin de coller au plus près des projets d'implantation des entreprises étrangères. C'est le rôle de Business France.

Nous devons promouvoir les atouts de notre pays. La question de l'attractivité est essentielle.

M. Marc Daunis. - Ne nous contentons pas de présenter l'offre française. Mettons l'offre et la demande en adéquation.

M. Martial Bourquin, rapporteur pour avis. - Exactement ! À chaque investisseur doit correspondre une campagne de promotion sur mesure.

La coordination entre les acteurs s'est grandement améliorée, monsieur César, et la création de Business France a renforcé les dispositifs puisque des stratégies d'exportation, mais aussi de financement et de garantie sont proposées aux entreprises. Je veux aussi rendre hommage à la qualité du personnel de BPI France, recruté parmi les meilleurs, et qui propose un accompagnement personnalisé : cela fait toute la différence. Désormais, il faut intégrer davantage les CCI et les régions.

Aujourd'hui, nous comptons 9 000 VIE, dont 4 000 dans les PME. Bpifrance souhaite renforcer la part des PME car elles ont des capacités d'exportation très importantes. .

Les salariés de Business France sont sous statut privé et la moitié de ses ressources ne provient pas de l'impôt mais de la facturation des prestations.

Le conseil stratégique de l'export, mis en place par Matthias Fekl, se réunit tous les mois : le ministre gère au plus près toutes ces structures et je veux rendre hommage à son engagement.

Mme Élisabeth Lamure, présidente. - Je mets donc désormais aux voix les crédits de la mission « Économie ».

La commission décide de s'en remettre à la sagesse du Sénat sur le vote des crédits de la mission « Économie ».

Mme Élisabeth Lamure, présidente. - Je vous propose également de voter sur les crédits de la mission « Écologie », dont le vote avait été réservé jusqu'à l'audition de Mme Ségolène Royal. M. Sido nous avait proposé un avis défavorable sur ces crédits.

Il nous faut aussi voter sur la mission « Pêche et aquaculture » sur lequel M. Le Scouarnec avait proposé de donner un avis de sagesse.

La commission émet un avis défavorable aux crédits de la mission « Écologie ».

La commission décide de s'en remettre à la sagesse du Sénat sur le vote des crédits de la mission « Pêche et agriculture ».

La réunion est close à 11h30.