Jeudi 1er octobre 2015

- Présidence de M. Michel Magras, président -

Désignation d'un nouveau rapporteur sur les questions foncières

M. Michel Magras, président. - Mes chers collègues, l'objet de notre réunion de ce jour est tout à fait ponctuel, mais non moins important : en vue de la poursuite de nos travaux sur le foncier dans les outre-mer, il nous faut désigner un nouveau rapporteur pour succéder à Jean-Jacques Hyest appelé à siéger au Conseil constitutionnel.

Les rapporteurs et moi-même effectuant un déplacement à Mayotte la semaine prochaine pour instruire le deuxième volet de l'étude concernant le titre de propriété, la régularisation et la combinaison des régimes coutumiers avec les règles du droit civil, nous n'avions d'autre choix que de vous convier aujourd'hui, dans des délais un peu précipités par dérogation à l'antériorité que nous pratiquons habituellement.

Nous avons le plaisir d'accueillir Mathieu Darnaud, notre jeune collègue de l'Ardèche qui succède à Jean-Jacques Hyest dans notre délégation. Il est membre de la même commission permanente, la commission des lois, a déjà été rapporteur pour cette commission d'un texte relatif à l'outre-mer et est, par surcroît, urbaniste, toutes caractéristiques qui font de lui un rapporteur bien profilé pour travailler sur la question épineuse du foncier dans les outre-mer. Je vous propose donc de le nommer en remplacement de Jean-Jacques Hyest... bien que Jean-Jacques Hyest ne soit pas remplaçable ! Et je profite de cet instant pour exprimer les chaleureuses félicitations de notre délégation au président Hyest dont l'expertise juridique et la constante et bienveillante attention portée à nos outre-mer vont cruellement nous manquer.

Puis-je considérer que vous approuvez la nomination de Mathieu Darnaud comme rapporteur ?

Personne ne demandant la parole, je félicite donc Mathieu Darnaud qui rejoint comme rapporteur, sur le deuxième volet de l'étude sur le foncier, Thani Mohamed Soilihi, rapporteur coordonnateur, et Robert Laufoaulu, rapporteur.

Je profite de notre réunion pour vous signaler que notre prochain rendez-vous devrait se tenir le 15 octobre afin d'examiner un projet de résolution en vue de la Conférence de Paris sur le climat.

M. Jérôme Bignon, qui pilote ce projet au sein de la Commission du développement durable, souhaite recueillir les observations des membres de notre délégation sur les développements du texte faisant référence aux outre-mer confrontés au dérèglement climatique. Notons que nous ne nous situons pas dans un processus législatif et qu'il ne s'agira pas de rédiger, et encore moins d'adopter, des amendements, mais simplement de formuler des observations destinées à enrichir la réflexion du groupe de travail.

Y a-t-il des demandes de parole sur ce point ?

Mme Lana Tetuanui. - Je voudrais revenir sur le document traitant de la biodiversité des outre-mer face au changement climatique, qui a été récemment publié par le groupe de travail dont Jérôme Bignon et Jacques Cornano sont les rapporteurs. Certaines phrases ont un peu fait l'effet d'une bombe nucléaire en Polynésie française ! Je vise les propos tenus sur le projet aquacole de Hao, qui est porté par des investisseurs chinois. Le texte publié sous le sceau du Sénat émet des réserves sur les pollutions futures qu'entraînerait ce projet. Pour bien comprendre le problème, j'aimerais vous rappeler que l'atoll de Hao était la base arrière de Mururoa... Faire de la polémique sur un projet utile au redressement de l'économie de la Polynésie alors que l'État n'a pas encore achevé la dépollution du site me paraît particulièrement malvenu. J'attendrai notre réunion du 15 octobre pour revenir avec les rapporteurs sur ces sujets.

Par ailleurs, je souhaite la bienvenue à notre nouveau rapporteur sur le foncier tout en appelant la délégation à se rendre en Polynésie pour y étudier la question foncière qui constitue un frein à tous nos projets. Cela reste un grand problème sur notre territoire, malgré l'avancée récente que constitue l'institution d'un tribunal foncier.

M. Joël Guerriau. - Je souhaite appuyer l'intervention de ma collègue. À la page 28 du rapport consignant les actes des tables rondes sur la biodiversité outre-mer, il est souligné que l'installation du projet de production de 50 000 tonnes de poisson aura des conséquences environnementales. Quelle peut être la portée de cette critique alors que nous parlons d'un ancien site d'essais nucléaires ? C'est assez paradoxal d'oublier les vertus d'un projet qui se substitue à une activité autrement plus nocive pour l'environnement et permettra de nourrir la population.

M. Thani Mohamed Soilihi. - Pour ma part, je souhaite adresser mes félicitations à Mathieu Darnaud, mais aussi à Jean-Jacques Hyest dont la candidature proposée par le Président du Sénat a été validée à l'unanimité - dont seulement deux abstentions - par la Commission des lois. C'est sans précédent. Non que je veuille intimider notre nouveau collègue qui le remplace ! Je souhaite d'ailleurs à mes collègues Darnaud et Laufoaulu ainsi qu'à notre président « Caribou ! », c'est-à-dire « bienvenue » en mahorais, alors que nous plancherons sur le terrain à Mayotte dès la semaine prochaine sur les questions foncières.

M. Michel Magras, président. - Nous ne méconnaissons pas les problèmes spécifiques de dépollution qui concernent la Polynésie française, dont notre ancien collègue Richard Tuheiava s'était fait l'écho. Toutefois, le texte mis en distribution dont il est question n'est pas un rapport, mais le recueil des actes de notre colloque du 11 juin 2015. Il ne s'agit donc pas d'une position des rapporteurs mais de propos tenus par un intervenant, que nous nous devons de reproduire fidèlement tels qu'ils ont été prononcés. Ce sera encore le cas pour les actes de notre conférence économique du bassin Pacifique que nous avons tenue le 25 juin et pour ceux de notre colloque sur le tourisme durable en outre-mer qui a remporté hier un vif succès. Les parlementaires ne sont pas engagés par les propos tenus et sont libres, comme vous le faites, de les contester ou d'adopter une position inverse dans leurs rapports proprement dits. Nous nous retrouverons très probablement la première semaine de novembre pour valider le rapport global de Jérôme Bignon et Jacques Cornano sur l'adaptation des outre-mer au changement climatique.

Sur la problématique foncière, nous sommes convenus ensemble de décliner notre étude sur trois ans en nommant Thani Mohamed Soilihi comme rapporteur coordonnateur. En 2015, pour le premier volet sur la gestion du domaine de l'État, nous nous sommes concentrés plutôt sur le bassin Atlantique pour traiter plus spécifiquement la zone des pas géométriques et le cas des forêts d'État. Certaines de nos recommandations présentées en juin ont déjà été reprises et nous pouvons nous en féliciter. Le deuxième volet sur le titrement et les maux de la propriété foncière privée s'ouvre maintenant. Nous nous rendons à Mayotte dès la semaine prochaine mais je peux tout-à-fait vous rassurer : le Pacifique ne sera pas oublié ! L'objectif au bout des trois ans de l'étude est bien de parvenir à un panorama global des questions foncières dans tous les outre-mer. Je ne peux toutefois pas encore vous dire si, quand et comment nous irons en Polynésie, puisque cela relève de la compétence des Questeurs qui devront valider notre demande et dont je ne veux pas présumer de la décision.

Cela m'amène à vous informer que j'ai rencontré, en ma qualité de président de la délégation, le directeur de cabinet du Président du Sénat, ainsi que le secrétaire général de la présidence qui est chargé des questions relatives aux absences pour l'application du nouveau règlement. Les réponses ne sont pour le moment pas satisfaisantes parce que l'interprétation du texte qui est faite laisse penser que lorsque nous sommes en déplacement en outre-mer, nous sommes considérés comme absents. On nous dit que nous aurons un trimestre pour nous rattraper. J'ai fait valoir tous les arguments : que l'outre-mer, c'est la France, que ces déplacements sont validés par le Sénat et par la Questure, pour travailler sur des missions définies par les instances permanentes. Je crains que nous n'ayons pas beaucoup de pouvoir pour modifier cette nouvelle approche du règlement et qu'il nous faille équilibrer sur un trimestre. Ce point n'était pas à l'ordre du jour et je me suis permis néanmoins de vous en parler puisque c'est d'actualité et que certains d'entre vous m'avaient fait part de leur inquiétude.

M. Gilbert Roger. - Je reviens sur le nouveau règlement qui entre en application ce matin. Je suis venu à la réunion d'aujourd'hui malgré des rendez-vous pris de longue date. Le groupe auquel j'ai l'honneur d'appartenir m'a indiqué que si je ne venais pas à la réunion de la délégation, je serais considéré comme absent. Je ne sais pas si c'est bien le cas, mais en tout état de cause, je fais tout mon possible pour être présent. Je formulerai une demande : pourrions-nous disposer d'un calendrier prévisionnel sur le trimestre qui indiquerait les dates auxquelles la délégation serait susceptible de se réunir pour nous permettre d'organiser nos agendas ? Nous ne devons pas seulement assister à des réunions, il y a des personnes extérieures que nous devons aussi rencontrer.

M. Michel Magras, président. - Nous essayons d'ores-et-déjà de planifier. Pour les réunions suivantes dont je vous parlais en introduction, j'attends encore confirmation de la disponibilité des rapporteurs. Pour retracer nos prochains travaux, je peux vous dire que, début novembre, notre groupe de travail devra adopter son rapport et faire autoriser sa publication en réunion plénière conjointe de la Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable et de notre délégation. Nous devrons aussi arrêter notre programme de travail pour l'année qui vient.

Pour revenir à la question de la comptabilité des absences dans le cadre de la nouvelle réglementation, seules sont prises en compte les réunions des commissions permanentes du mercredi. Les délégations ne sont pas considérées comme des commissions, ce qui veut dire qu'une absence à la délégation n'est pas pointée et comptabilisée dans le total des absences. Cette distinction pourrait paraître surprenante, mais elle me semble légalement justifiée. Ce point est certain, les délégations ne sont pas assimilables à des commissions en la matière.

M. Serge Larcher. - Je ne veux pas m'étendre sur le sujet de l'application du nouveau règlement dont nous aurons à débattre dans nos groupes politiques, mais ce qui vous a été répondu, Monsieur le président, concernant la non-prise en compte des sénateurs en mission outre-mer dans le cadre de la délégation, est inacceptable. En tant que secrétaire du Bureau du Sénat, je demanderai des précisions. On ne peut pas faire n'importe quoi ici. Nous sommes en République. Cela voudrait dire que des sénateurs en mission outre-mer seraient partis faire du tourisme ? C'est inacceptable. Nous nous déplaçons pour travailler et, par conséquent, nos missions doivent être prises en compte comme telles. Le 20 octobre se déroulera une réunion de Bureau, je l'interpellerai sur cette question.

M. Joël Guerriau. - Cela dépasse le sujet de l'outre-mer. Aucune mission de représentation du Sénat à l'extérieur, par exemple à l'ONU ou à l'OTAN, ne peut être considérée comme une absence. C'est ahurissant.

M. Pierre Frogier. - Je vais essayer de ne pas appréhender les choses d'un point de vue financier. Ce que je constate, c'est que la réflexion engagée par le cabinet du Président ne prend, me semble-t-il, absolument pas en compte les spécificités de l'outre-mer. C'est bien de cela dont il s'agit. Robert Laufoaulu et moi-même ne sommes pas à huit heures de notre circonscription.

Mme Lana Tetuanui. - Moi non plus, je suis à 20 heures d'avion...

M. Pierre Frogier. - Pour venir, j'ai fait 32 heures d'avion en passant par Melbourne et Singapour pour respecter mes engagements à Paris. À quel moment allons-nous pouvoir parler du fond des choses ? ou alors est-ce que cette délégation ne sert à rien ? Sommes-nous capables de créer un groupe d'influence pour avoir un échange avec soit le Président, soit la Questure ? Lorsque nous sommes élus, avons-nous le droit de garder notre domicile en circonscription ou bien faut-il élire domicile à Paris ? C'est cela le problème. Notre indemnité est la même que celle de nos collègues métropolitains mais nous devons à la fois faire vivre notre famille chez nous et nous loger à Paris. Sans moyens personnels suffisants, comment être élu à l'Assemblée Nationale ou au Sénat dans ces conditions ? Sinon, que l'on modifie l'enveloppe de nos déplacements couverts entre notre circonscription et Paris pour nous permettre d'être ici tous les quinze jours. La délégation à l'outre-mer sert aussi à poser toutes ces questions.

M. Michel Magras, président. - Je veux bien que nous réfléchissions au niveau de la délégation aux moyens d'intervenir sur ce sujet. J'ai rencontré le directeur de cabinet du Président et le secrétaire général de la présidence. Nous avons longuement discuté. Je suis parti d'une interprétation du texte du paragraphe 9 de l'article 23 bis du Règlement. Tout le monde ne l'interprète pas de la même façon. Pour certains, comme moi, les missions outre-mer étaient considérées comme des présences... J'entends la plaidoirie de Pierre Frogier. J'étais initialement intervenu pour indiquer qu'imposer un seuil de 50 % aux ultramarins était inenvisageable. J'ai sur ce point collaboré en parfaite entente avec Jean-Jacques Hyest qui était le rapporteur. Nous avons élevé aux deux tiers le seuil pour les sénateurs ultramarins.

M. Antoine Karam. - Je suis élu comme Georges Patient dans une circonscription vaste comme le Portugal. Il faut parfois des jours de pirogue ou des heures d'avion et de piste pour atteindre certains points de la Guyane. Or, nous avons également des obligations de présence sur notre territoire. Je prends un exemple : nous sommes invités comme sénateurs à un sommet de coopération transfrontalière avec le Brésil pour régler la question du pont sur l'Oyapock. Il s'agit bien là de représenter la France en tant que parlementaire face aux autorités brésiliennes. Cela n'est nullement pris en compte. Un traitement différencié pour les outre-mer est nécessaire. Je vous propose de constituer une délégation de notre délégation pour rencontrer le Président et les Questeurs à ce sujet.

M. Michel Magras, président. - La proposition est enregistrée. Je propose de procéder par étapes. Serge Larcher est membre du Bureau et aura l'occasion de soulever le problème le 20 octobre. Par ailleurs, je souligne que les sénateurs hexagonaux seront davantage pénalisés lorsqu'ils se rendront en mission outre-mer puisqu'ils sont soumis au seuil de 50 %. Plus généralement, il faut convenir que le fond de l'affaire pose une question de principe car nous sommes des élus de la République et l'outre-mer, c'est la France ! Nous sommes légitimement frustrés, notamment de ne pas pouvoir assumer comme nous le souhaiterions nos obligations de représentation locales.

M. Mathieu Darnaud. - En tant que membre le plus pénalisé de la mission à Mayotte, si j'ai bien compris, et en tant que métropolitain...

M. Serge Larcher. - Ce n'est pas un handicap !

M. Mathieu Darnaud. - Je voulais simplement vous remercier de la confiance que vous me faites en me nommant rapporteur. Je mesure mes responsabilités à l'heure de succéder à l'éminent président Hyest. J'ai la volonté d'apporter une contribution active aux futurs travaux sur la question foncière, centrale pour les outre-mer. Par ailleurs, je souscris à ce qui a été dit par mes collègues : il suffit de lire les programmes des missions outre-mer pour savoir qu'elles ne ressemblent pas à des voyages d'agrément mais tout au contraire un travail de fond alimenté par des auditions de terrain.

M. Thani Mohamed Soilihi. - La question des absences a été, en réalité, bâclée par tous nos groupes respectifs. Je me permets de parler de mon expérience. Au sein de mon groupe, on nous disait : « ne t'inquiète pas, nous allons nous préoccuper des outre-mer. » Au final, la proposition de résolution est arrivée devant la Commission des lois sans que nous ayons eu de concertation, ni défini de stratégie. Notre collègue Félix Desplan a porté un amendement d'exonération de la règle au bénéfice des sénateurs ultramarins. Personnellement, je me suis senti agressé lors du débat par certains collègues hexagonaux de mon groupe. Je n'étais pas favorable à une exonération totale mais à une règle différenciée comme celle des deux tiers qui a été finalement adoptée en séance. Il faut nous ressaisir. Nous ne nous sommes pas préparés à cette discussion alors que chacun d'entre nous est concerné. Depuis mon domicile, il me faut 24 heures pour arriver jusqu'au Sénat. Quel collègue hexagonal subit la même contrainte ? Il est temps de prendre en compte nos spécificités.

M. Maurice Antiste. - Juste un mot : l'égalité n'est pas l'équité.

M. Georges Patient. - En ma qualité de président de l'intergroupe parlementaire, je reviens sur des points qui nous pénalisent par rapport à nos collègues hexagonaux. Sur la question des absences, j'étais intervenu par courrier. Il me semblait que satisfaction partielle nous était donnée, mais l'interprétation du règlement retenue est maintenant à revoir. Autre pénalité, celle qui découle de notre double résidence. Nous ne sommes en fait pris en charge que huit mois dans l'année, alors même que les sessions extraordinaires s'étendent sur juillet et septembre.

Il me semble qu'il faut profiter du caractère institutionnel de la délégation pour élaborer une stratégie et aller, en force, voir le Président et nos groupes respectifs.

M. Daniel Gremillet. - Je comprends que ces points soient soulevés. Il me semble qu'il serait bon de parvenir à une position unanime de la délégation. Je suis un sénateur de l'Hexagone, à quatre heures de route du Sénat, mais je ne peux pas rester insensible à vos contraintes. Je souhaite donc être associé à votre démarche car ce n'est pas uniquement un problème de sénateurs ultramarins. C'est notre problème à tous. Plus largement, j'y vois un enjeu stratégique : comment assurer notre capacité à représenter ensemble les territoires, ici au Sénat ? Le problème qui est soulevé transcende les clivages politiques. Il nous concerne tous, quelle que soit notre appartenance politique, ce qui doit nous permettre de nous rassembler. Il y a à la fois le problème des rapporteurs en mission et celui, encore plus massif, de l'exercice au quotidien du mandat de sénateur pour nos collègues ultramarins. Il me semble, si notre président en était d'accord, qu'il serait judicieux qu'une position claire des sénateurs ultramarins émerge dans un premier temps, avant que nous puissions ensuite collectivement la porter.

M. Michel Magras, président. - Je retiens cette volonté d'associer les sénateurs hexagonaux de la délégation à une démarche définie au préalable avec précision par les sénateurs ultramarins.

Mme Gisèle Jourda. - Notre collègue Gremillet a parfaitement exprimé mon opinion. L'originalité de la délégation est d'associer les hexagonaux et les ultramarins. Ce serait un contresens sur l'esprit même de la délégation de restreindre la démarche auprès du Bureau aux seuls ultramarins. C'est une revendication collective que nous devons aussi chacun relayer dans nos groupes politiques. Ce n'est pas toujours facile car nous sommes toujours accusés de défendre des passe-droits, alors qu'il s'agit de prendre en compte des revendications cohérentes, justifiées et naturelles ! C'est le bon sens même. Une charte commune pourrait nous rassembler par-delà les options politiques. Pour être forte et crédible, notre délégation se doit d'être unie.

M. Joël Guerriau. - Le mot d' « absentéisme » s'est imposé par incompréhension de la fonction sénatoriale en général. Nous nourrissons dans les milieux populaires l'idée que nous sommes absents là où nous devrions censément être présents et l'on veut nous imposer d'être présents là où ce n'est pas nécessairement indispensable. Est-ce qu'un vote solennel est si important qu'il nous impose d'être présents ? Le lieu où nous devons être, n'est-ce pas le lieu où nous pouvons être le plus utile, alors que nos agendas sont déjà surchargés et qu'on veut nous imposer une priorisation contestable ? Je suis complètement solidaire de nos collègues d'outre-mer et je pense qu'une action doit être menée.

M. Robert Laufoaulu. - J'ai bien réfléchi en me demandant même, à un moment donné, si j'allais continuer dans mes fonctions. Quoi que l'on fasse, si l'on ne change pas la nouvelle réglementation, je serai sanctionné tous les trimestres. Je préfère encore démissionner plutôt que d'être sanctionné.

M. Michel Magras, président. - J'ai intentionnellement employé le terme de sanction dans mes deux rendez-vous. On m'a repris pour me signifier qu'il ne s'agissait pas de sanction. Mais ce ne sont pas des subtilités de vocabulaire qui sont en cause. J'entends vos messages unanimes. Il faut agir et nous devons en définir les modalités. Je remarque que la délégation n'a pas été, en tant qu'organe institutionnel, associée à la réflexion sur le nouveau règlement. Le retour de notre collègue Serge Larcher sur la réunion du Bureau du 20 octobre sera très intéressant.

M. Pierre Frogier. - Je voudrais qu'on pose le vrai problème. J'aurai la réponse à cette question : Comment le Parlement nous considère-t-il ? Quel est le statut des parlementaires ultramarins ? Doit-on abandonner notre circonscription et notre domicile pour résider à Paris ? Quand les collègues métropolitains disent que nous bénéficions des mêmes avantages, ils omettent de dire que nous avons tout de même des contraintes différentes ! Jusqu'à présent, personne n'en a parlé. Mais désormais, puisque l'on veut nous sanctionner, et Robert Laufoaulu a raison d'employer le terme, posons les vrais problèmes.

M. Robert Laufoaulu. - Les rapports sur nos absences sont repris sans nuance et sans explication par les réseaux sociaux. Nous sommes de plus en plus malmenés, surtout dans nos territoires. C'est une double sanction !

M. Georges Patient. - Pour être efficaces, ne devrions-nous pas remettre à Serge Larcher une liste de nos revendications en prévision de la prochaine réunion du Bureau ?

M. Michel Magras, président. - Dans ce cas, si vous en étiez d'accord, je pourrais recueillir vos revendications et en faire la synthèse dans un courrier que nous remettrions à Serge Larcher.

M. Michel Fontaine. - J'arrive ce matin de La Réunion pour repartir dans deux jours. N'oublions pas un autre type de sanction : la sanction physique, médicale. Il n'est pas anodin d'enchaîner ainsi des vols de dix heures sur toute l'année.

M. Gilbert Roger. - Je suis élu de Seine-Saint-Denis qui rassemble peut-être la plus forte communauté d'ultramarins de France. Lorsque je participe à vos travaux, ils comprennent qu'une part d'eux-mêmes est prise en compte. Comment réagiront-ils lorsque l'on voudra sanctionner des sénateurs hexagonaux qui n'ont à se reprocher que de vouloir s'intéresser à eux ? C'est une folie.

M. Michel Magras, président. - Je rassemblerai donc nos doléances avant de les transmettre à Serge Larcher qui les présentera au Bureau. Ensuite, nous verrons par quel autre moyen d'action nous pourrons agir. J'aimerais toutefois dire que ce type de démarche ne fait pas partie des missions de la délégation et ne doit pas nous faire méconnaître la qualité des travaux de fond que nous menons, au bénéfice des populations ultramarines mais aussi de l'institution sénatoriale. Nos rapports sont connus par leur qualité et repris. Cela suffit à justifier notre travail mais sans doute mériterions-nous plus de considération.