Mercredi 15 juillet 2009

- Présidence de M. Jean Arthuis, président -

Bilan de la péréquation régionale - Communication

Au cours d'une première séance tenue le matin, la commission a entendu une communication de M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial, sur le bilan de la péréquation régionale.

M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial, a présenté les principales conclusions de sa mission de contrôle sur le bilan de la péréquation régionale. Il a précisé que ce contrôle s'inscrit dans la continuité du cycle de réflexion de la commission sur les finances locales et la taxe professionnelle (TP).

Il a expliqué que le choix de ce sujet résulte du constat de l'instabilité du dispositif. Il a rappelé qu'il avait ainsi, le 5 décembre 2008, à l'occasion du débat sur la loi de finances pour 2009, fait valoir à Mme Michèle Alliot-Marie, alors ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, que les critères d'éligibilité de la dotation de péréquation régionale méritaient d'être révisés. En réponse, celle-ci avait indiqué regretter que les régions n'aient pas été en mesure d'aboutir à un consensus en la matière, tout en ajoutant que le Gouvernement continuerait à travailler sur ce sujet.

M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial, a tout d'abord relevé le caractère relativement récent de la péréquation régionale puis exposé les deux étapes de sa mise en oeuvre.

La première phase correspond au fonds de correction des déséquilibres régionaux (FCDR), créé par la loi du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République. Cette péréquation relevait d'une logique horizontale, c'est-à-dire s'effectuant entre les collectivités territoriales elles-mêmes.

La seconde étape de la péréquation régionale, à partir de la loi de finances pour 2004, est marquée par la suppression du FCDR et le passage à une logique verticale avec la création de la dotation de péréquation au sein de la dotation globale de fonctionnement (DGF) régionale.

M. Pierre Jarlier a souligné que le système en vigueur reste proche du FCDR, au niveau des critères d'éligibilité et de ceux relatifs à la répartition. Celle-ci continue ainsi de reposer sur le calcul de deux parts égales : l'une évaluée selon le potentiel fiscal par habitant, l'autre en fonction du potentiel fiscal superficiaire.

Il a ensuite fait observer que le rythme d'évolution de la dotation de péréquation des régions est étroitement lié à celui de la DGF ainsi qu'à celui de la dotation forfaitaire, dans la mesure où son montant est égal à la différence entre le montant de la DGF régionale et celui de la dotation forfaitaire. Il a précisé que l'enveloppe de la DGF est fixée par la loi de finances et que le comité des finances locales (CFL) détermine le taux de progression de la dotation forfaitaire, au sein d'une fourchette comprise entre 60 % et 90 % du taux de progression de la DGF. La croissance de la dotation de péréquation repose donc avant tout sur une limitation de la hausse de la dotation forfaitaire.

Dressant ensuite le bilan de la politique de péréquation régionale, M. Pierre Jarlier a tout d'abord relevé son caractère performant, dans la mesure où les écarts de « pouvoir d'achat » des collectivités régionales sont réduits grâce aux dotations de l'Etat.

Puis il a indiqué que l'inconvénient majeur du dispositif réside dans l'absence de cohérence entre ses critères d'éligibilité d'un côté et de répartition de l'autre.

Le deuxième inconvénient du dispositif actuel réside dans le fait qu'il induit des effets de seuil brutaux, dépendants des variations de l'indicateur de ressources, mais aussi des variations relatives dans les évolutions démographiques des régions. En effet, le potentiel fiscal par habitant, utilisé en tant que critère d'éligibilité au dispositif, pénalise les régions dont le dynamisme démographique est faible.

Le troisième défaut a trait au calcul du potentiel fiscal. Cet indicateur est partiellement évalué selon des bases qui ne donnent lieu à aucune recette pour la collectivité. En effet, la réforme de la taxe professionnelle (TP) mise en oeuvre par l'article 85 de la loi de finances pour 2006 a conduit à plafonner, à compter de 2007, la TP supportée par les entreprises à 3,5 % de leur valeur ajoutée. Ce plafonnement n'étant pas intégralement compensé aux collectivités locales, son coût reste donc partiellement à la charge des collectivités. En raison de la mise en place de ce « ticket modérateur » de compensation de la TP, le potentiel fiscal se fonde sur une richesse en partie virtuelle.

Enfin, M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial, a abordé les perspectives de réforme de la péréquation régionale.

Il a précisé tout d'abord qu'un groupe de travail a été mis en place en octobre 2008 par le CFL, en vue de réfléchir à la réforme de la péréquation régionale. Ses réflexions portent notamment sur l'introduction de critères de charges dans la détermination des régions éligibles à la péréquation, sur l'élaboration d'indices synthétiques ainsi que sur la mise en oeuvre de nouveaux indicateurs de richesse fiscale.

S'agissant du passage éventuel à la notion de potentiel financier, qui permet de prendre en compte l'ensemble des ressources dont bénéficie une collectivité territoriale, y compris les dotations et compensations qu'elle perçoit en provenance de l'Etat ou d'autres collectivités, M. Pierre Jarlier a invité à la plus grande prudence en raison des bouleversements auxquels une telle réforme pourrait conduire. Sur l'intégration de critères de charges, la difficulté réside dans la définition même des charges prises en compte, pour laquelle il n'existe pas de consensus, et dans leurs poids relatifs pour chacune des régions.

M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial, a ensuite formulé plusieurs observations sur les pistes d'évolution envisageables.

En premier lieu, il a indiqué que la politique de péréquation régionale pourrait être plus ambitieuse. A cette fin, il conviendrait d'inciter le CFL à accélérer le rythme d'évolution de la part péréquation au sein de la DGF.

En second lieu, il a estimé que les effets de seuil pourraient être atténués par un lissage des entrées et des sorties du dispositif de péréquation sur plusieurs années.

Il a ensuite jugé nécessaire de rapprocher les critères concernant l'éligibilité de ceux permettant de calculer la répartition. Il a estimé, en particulier, que les règles relatives à l'éligibilité devraient mieux prendre en compte la réalité des territoires, soit par l'introduction de la notion de potentiel fiscal superficiaire, soit par une pondération en fonction des charges liées à la densité.

En dernier lieu, il a déclaré que les imperfections de l'indicateur de ressources doivent faire l'objet d'une réflexion spécifique. Le potentiel fiscal doit ainsi être aménagé de manière à mieux refléter les ressources mobilisables par les régions. Cependant, il ne lui a pas semblé opportun de prendre en compte les compensations telles qu'elles figurent dans la dotation forfaitaire et de mettre en oeuvre la notion de potentiel financier.

M. Pierre Jarlier a estimé que la réforme de la taxe professionnelle offre un contexte favorable pour donner une nouvelle impulsion à la réforme de la péréquation. Il a jugé utile de créer à cette occasion un fonds national de péréquation, en faveur duquel la mission temporaire sur l'organisation et l'évolution des collectivités territoriale, présidée par M. Claude Belot, s'est également prononcée.

Pour conclure, il a proposé de prolonger ces réflexions de manière à ce qu'elles puissent trouver une traduction dans les futures lois de finances. Dans cette perspective, il a souligné l'intérêt de la poursuite de l'activité du groupe de travail sur la péréquation régionale mis en place par le CFL.

M. Jean Arthuis, président, a relevé les difficultés inhérentes aux politiques de péréquation, qu'il s'agisse du choix de l'indicateur de ressources des collectivités territoriales ou de la dualité entre critères d'éligibilité et critères de répartition. Il s'est également interrogé sur l'opportunité de fusionner certaines régions en vue de résoudre le problème posé par leurs écarts de richesses.

Après avoir souligné la distinction à opérer entre les deux formes d'indicateurs de ressources que sont le potentiel fiscal en valeur absolue et le potentiel fiscal par habitant, M. Jean-Claude Frécon a souligné le fait que rapporter le potentiel fiscal au nombre d'habitants pénalise les régions à faible population ou à faible dynamisme démographique.

A ce sujet, M. Jean Arthuis, président, a indiqué que ce raisonnement encourage les collectivités dont la population baisse à vouloir conserver le même niveau de dotations. Toutefois, celles dont la population augmente réclament, de leur côté, un accroissement de l'effort financier de l'Etat. Ces deux exigences, qui ne peuvent être satisfaites qu'en augmentant les charges publiques, apparaissent difficiles à concilier concomitamment.

Mme Michèle André a envisagé la création d'un fonds national de péréquation, tout en attirant l'attention sur les difficultés à définir des critères satisfaisants, tant en ce qui concerne ses modalités de financement que les règles de répartition de ses ressources.

En réponse, M. Pierre Jarlier a plaidé pour une limitation de l'accroissement de la dotation forfaitaire de la DGF des régions au profit de la dotation de péréquation, ainsi que pour l'utilisation au profit de la péréquation d'une fraction de la future cotisation sur la valeur ajoutée, dont le taux serait fixé au niveau national.

M. Jean Arthuis, président, a rappelé qu'il est délicat de concilier l'autonomie financière des collectivités territoriales et la péréquation verticale, dans la mesure où ces principes sont, en pratique, contradictoires.

M. Yves Krattinger a fait valoir que les contraintes budgétaires conduisent aujourd'hui à limiter les ambitions de l'Etat en matière de péréquation. C'est pourquoi il s'est prononcé en faveur de l'adoption de mécanismes horizontaux de péréquation qui viendraient s'articuler avec des dispositifs verticaux. En outre, de manière à réduire le coût global induit par ces politiques, il a préconisé un ciblage relativement fin des dotations.

Après avoir approuvé le principe d'une contribution des collectivités territoriales les plus riches, M. Jean Arthuis, président, a déploré l'extrême complexité des critères utilisés dans le cadre des politiques de péréquation. Il a ensuite fait valoir que toutes les collectivités territoriales ne peuvent pas toujours sortir gagnantes des réformes des finances locales.

M. Jean-Claude Frécon a observé que l'autonomie financière et la péréquation sont des objectifs complémentaires qui, par conséquent, ne doivent pas être conçus comme étant en opposition l'un par rapport à l'autre. Il a illustré sa remarque avec le cas des Länder allemands. Les deux principes ont, en effet, dû être conjugués de manière à responsabiliser les entités fédérées, ce qui était particulièrement nécessaire après la réunification des deux parties de l'Allemagne.

S'agissant de l'indicateur de ressources retenu pour les collectivités territoriales, M. Jean Arthuis, président, a souligné la difficulté de parvenir à un équilibre adéquat dans la prise en compte des compensations versées par l'Etat. Il a ensuite conclu en insistant sur l'impossibilité de faire croître indéfiniment les dotations de l'Etat aux collectivités territoriales, notamment dans un contexte économique difficile.

A l'issue de ce débat, la commission a donné acte, à l'unanimité à M. Pierre Jarlier de sa communication, et en a autorisé la publication sous la forme d'un rapport d'information.

Règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2008 - Examen de l'amendement

Au cours d'une seconde séance tenue l'après-midi, la commission a procédé à l'examen de l'amendement sur le projet de loi n° 502 (2008-2009), adopté par l'Assemblée nationale, de règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2008.

Au terme d'un débat auquel ont participé MM. Jean-Pierre Fourcade, Christian Gaudin, François Trucy et Mme Nicole Bricq, la commission a décidé de solliciter l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 2 de M. Jean Arthuis, président, prévoyant l'amortissement, chaque année, de 2 % du montant de la dette financière de l'Etat en vue de sa résorption sur une période de cinquante ans. Son auteur a précisé que cet amendement, qu'il a déposé à titre personnel, présente un caractère pédagogique et doit permettre au Gouvernement de s'exprimer sur le sujet.