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commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

Projet de loi

Orientations des mobilités

(Nouvelle lecture)

(n° 730 (2018-2019) )

N° COM-9

18 octobre 2019


 

Question préalable

Motion présentée par

Adopté

M. MANDELLI, rapporteur


TENDANT À OPPOSER LA QUESTION PRÉALABLE


En application de l’article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, d’orientation des mobilités (n° 730).

Objet

Accroître l’offre de mobilités durables sur l’ensemble du territoire est un enjeu majeur des années à venir pour lutter contre les fractures sociales et territoriales et pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de la France.

Le projet de loi d’orientation des mobilités était très attendu sur cette question, tant par les acteurs du secteur que par les citoyens.

Abordant ce texte dans un état d’esprit constructif, en partageant son objectif de mettre fin aux « zones blanches de la mobilité » et de développer les mobilités propres et partagées, le Sénat a, en première lecture, amélioré ce texte sur de nombreux volets.

La plupart de ces apports ont été maintenus dans le texte adopté par l’Assemblée nationale, qu’il s’agisse de la sanctuarisation des ressources de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf), de la pérennisation du Conseil d’orientation des infrastructures et des contrats opérationnels de mobilité, ou encore des dispositions visant à favoriser le développement des véhicules à faibles émissions (objectifs de verdissement des flottes de véhicules des entreprises), des mobilités partagées (ouverture du forfait mobilités durables aux conducteurs en covoiturage) et actives (obligation d’emport de vélos non démontés dans les trains et les bus), ou à renforcer la sécurité dans les transports.

Surtout, le Sénat a comblé une lacune majeure du texte : l’absence de financement dédié aux intercommunalités qui se saisiront de la compétence d’organisation des mobilités, et qui, en l’absence de services réguliers de transport, ne bénéficieront pas des recettes du versement mobilité. Il est indispensable que ces intercommunalités aient les moyens de développer une offre de mobilité sur leurs territoires, qui en sont aujourd’hui dépourvus.

Le Sénat avait à cette fin adopté un dispositif de financement permettant à ces intercommunalités d’instaurer un versement mobilité à taux minoré même en l’absence de services réguliers de transports, et de bénéficier d’une part du produit de la taxe carbone en complément lorsque les ressources perçues sont insuffisantes pour développer une offre de mobilité satisfaisante.

Ce dispositif a été supprimé par les députés, sans que rien ne le remplace, ce qui a conduit à l’échec de la commission mixte paritaire (CMP) chargée d’élaborer un texte de compromis.

Lors des débats à l’Assemblée nationale, la ministre chargée des transports Élisabeth Borne, avait renvoyé le règlement de cette question au projet de loi de finances pour 2020 : « la question se pose néanmoins de la ressource dont peuvent bénéficier les autorités organisatrices qui n’organisent pas de transports réguliers […]. Je veux vous assurer l’engagement du Gouvernement pour qu’une ressource soit apportée pour cette situation : nous sommes en train d’examiner les différentes options possibles, mais tout cela est lié aux réflexions en cours sur la réforme de la fiscalité locale à la suite de la suppression de la taxe d’habitation. […] L’objectif du Gouvernement est d’intégrer les dispositions qui seront retenues après concertation dans le prochain projet de loi de finances »[1].

Or, force est malheureusement de constater que le projet de loi de finances pour 2020 ne comporte aucune mesure permettant d’assurer un financement dédié et pérenne de la compétence « mobilité » des intercommunalités.

L’octroi aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre d’une fraction de TVA à compter de 2021 pour compenser la suppression de la taxe d’habitation ne constitue en effet pas une nouvelle ressource dédiée aux services de mobilité.

Pire, loin d’attribuer aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM) des moyens supplémentaires, le projet de projet de loi de finances les prive en réalité d’une partie de leurs ressources, puisqu’il prévoit d’amputer de 45 millions d’euros la compensation que l’État leur verse à la suite du relèvement du seuil de salariés à partir duquel les employeurs sont assujettis au versement mobilité opéré en 2016.

Cette baisse s’ajouterait par ailleurs à la perte de recettes - non compensée - de 45 millions d’euros en 2023, puis de 30 millions d’euros par an à partir de 2024, que subiront les AOM du fait de la réforme des modalités de franchissement des seuils sociaux prévue par la loi « PACTE » du 22 mai 2019[2].

Dans ces conditions, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable considère que les intercommunalités ne seront pas incitées à se saisir de la compétence « mobilité », car elles n’auront pas les moyens de développer des alternatives à la voiture individuelle, et que, par conséquent, la promesse du Gouvernement de mettre fin aux « zones blanches de la mobilité » risque fort de rester lettre morte, au détriment des habitants de ces territoires.

La commission regrette que le problème du financement de la compétence d’organisation des mobilités, qui est identifié depuis le début de l’examen de ce projet de loi comme indispensable pour lutter contre les inégalités d’accès à la mobilité, n’ait pas trouvé de réponse.


[1] Assemblée nationale, Rapport fait de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sur le projet de loi d’orientation des mobilités, Tome III « Comptes rendus ».

[2] Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.



NB :En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, cette motion est soumise au Sénat avant la discussion des articles.